Nietzsche
Nietzsche, on le sait, aimait beaucoup Montaigne (et Voltaire, et Stendhal). C'est le même esprit qui lui fait décrire « l'éternel soucieux qui soupire toujours, qui se plaint toujours, et qui ramasse aussi les moindres profits ». Ou encore : « Partout, je sens l'odeur de petites communautés qui se terrent ; et là où il y a de petites chambres, on y trouve de nouvelles confréries bigotes et leur relent de confréries bigotes. » Il s'est lui-même défini comme « ennemi de l'esprit de lourdeur, ennemi mortel, ennemi juré, ennemi originel ». Voilà ce qui lui fait détester les « petites âmes grises » et traiter ceux qui voient tout en noir de « purulents ».
C'est exagéré ? Mais non, et ce qu'on appelle « le retour du religieux » devrait nous convaincre, tant qu'il en est temps, que la vieille maladie de tristesse revient en ce monde. Il y a des raisons pour cela ? Injustices, oppressions, massacres ? Sans doute, mais il y a aussi ceux qui sont bien décidés à exploiter ces malheurs, les fanatiques de la passion triste. On les voit, on les entend, ils sont ostensibles et ostentatoires, très ignorants, surtout, d'où l'obscurantisme ambiant dont ne nous sortiront pas par la publicité généralisée, la téléréalité et autres divertissements débiles. D'un côté, décervelage ; de l'autre, opium.
28/12/2003