Otages

Des barbares, dites-vous, en pensant aux ravisseurs des otages en Irak. Mais ce qui devrait attirer de plus en plus l'attention, c'est l'extrême maîtrise de la communication dont font preuve ces cagoulés de l'ombre. Tous les spécialistes sont d'accord : la foire aux otages, à Bagdad et ailleurs, est devenue une vaste opération mafieuse, une industrie florissante, doublée d'un art consommé de la terrorisation de masse, par images de crimes rituels en direct.

Cet Italien, ces Américains et d'autres sont égorgés et décapités, là, devant vous, et vous savez que certains plans ont été censurés, ce qui vous oblige à les imaginer dans une convulsion rapide de dégoût et d'horreur. Jamais le Spectacle, dans son essence de mort, n'a montré à ce point son vrai visage. Que « Dieu » soit convoqué dans cette répugnante mise en scène montre à quel point, loin d'être mort, son spectre se déchaîne en folie organisée et froide. Bien entendu, pour sauver les journalistes français, il fallait tout tenter, et tout tenter encore, mais vous ne savez rien des coulisses, et des coulisses des coulisses, sans parler des coulisses au-dessus ou au-dessous des coulisses.

Est-ce qu'on vous dit la vérité ? Ou est-ce que tout le monde ment ? Comment s'étonner que nous soyons entrés désormais dans une « société de défiance » ? Je suis porté à croire fermement à la raison et à l'avenir de la démocratie, mais je tombe là sur un mur, car la folie est un mur. La mobilisation des « musulmans de France » est un événement national important, mais je reste rêveur quand je vois et j'entends une jeune fille voilée dire : « Je ne veux pas que mon voile soit taché de sang. » Je me sens, malgré moi, appeler Voltaire et Freud au secours. Hélas, ils sont injoignables, et le cirque abject continue, un vrai décapité ici, un déluge de faux cinéma là.

26/09/2004