Singapour

Vous ne m'avez pas aperçu, mais j'étais bien entendu à Singapour, et dans les coulisses de l'attribution des Jeux olympiques de 2012. La délégation française, très décalée, faisait un peu penser à un film de Louis de Funès, Les Gendarmes de Saint-Tropez à New York, ou quelque chose de ce genre. L'Asie garde ses mystères. Mais j'ai vu comme je vous vois les Anglais dépasser la ligne jaune, et les membres du CIO descendre de la chambre de Tony Blair, ce qui est pourtant formellement interdit par le règlement. Et puis, catastrophe, Paris recalé, Paris écrasé, Paris humilié, Paris martyrisé.

Et Tony, encore lui, qui, comme l'a dit Bertrand Delanoë avec son franc-parler, « la ramène ». Sacré Tony ! Hyper-Tony ! Il ne va pas danser longtemps, celui-là. Al-Qaida veille. Nous sommes naturellement horrifiés, nous, Français, par ces attentats meurtriers, et j'interdis à quiconque de penser que je ne sais pas quel esprit de revanche a pu apparaître à cette occasion. Nous sommes humains avant tout. Cela n'a pas empêché Chirac de plaisanter avec ses virils amis, Schröder et Poutine, sur la mauvaise qualité de la cuisine anglaise. La tête de veau échappe aux Anglais, la reine elle-même en mange rarement, c'est tout dire.

Résumons : les Anglais sont mal nourris, ils vivent pour cette raison moins vieux que nous, ils sont hypocrites, perfides, corrupteurs, raides, empotés, pas du tout fair-play. Le projet parisien pour 2012 était en béton, d'où l'injustice. Que de travaux envolés ! Et comment ne pas avoir été ému par l'éloquence romantique de Delanoë vantant à un jury insensible le crépuscule de Paris : le soir tombe, a-t-il dit, les amoureux s'enlacent sur les quais comme les anneaux olympiques. Et comment ce jury frigide a-t-il pu résister à la voix enjôleuse de Catherine Deneuve lançant : « Welcome to Paris » ?

31/07/2005