BHL
Qui parle ainsi du Dieu protestant américain : « Un Dieu idole : un Dieu quasi païen ; un Dieu qui se montre tout le temps ; un Dieu qui ne s'arrête jamais de parler ; un Dieu qui est là, derrière la porte ou le rideau, et ne demande qu'à se manifester ; un Dieu sans mystère, un Dieu good guy ; un presque-humain, un bon Américain, un qui vous aime un à un, vous entend si vous lui parlez, vous répond si vous le lui demandez, Dieu, l'ami qui vous veut du bien. » Eh bien Bernard-Henri Lévy, dans son dernier livre American Vertigo, reportage analytique très réussi sur les États-Unis d'Amérique169. Ce qui est drôle, avec Lévy, c'est qu'il se force à être proaméricain alors que la plupart de ses descriptions constatent la folie du lieu, son puritanisme accablant, sa lourdeur, ses mensonges, sa mémoire trafiquée, sa saturation automatique.
Là encore, tout le monde se trompe sur Lévy. On n'arrête pas de l'attaquer, de le traiter d'imposteur, et personne ne semble se douter que c'est lui qui mène la danse, suscite six biographies de lui, manipule Libération, Les Inrockuptibles, Le Canard enchaîné, et jusqu'à une feuille de chou comme Royaliste. Les insultes pleuvent ? Très bien. Encore. Quel talent ! Il a ses possédés et ses possédées qui en rajoutent dans la bassesse et la bave, c'est intéressant à voir (pas longtemps) comme des présentations de malades à Saint-Anne. Lévy, grand déclencheur d'hystérie. Lévy, jalousé à mort. Lévy diabolisé par la France profonde. Il arrive, publie un livre, fait quelques apparitions à la télévision, s'agite comme un chiffon blanc, et ça marche. Il a compris cette grande loi fondamentale : faire travailler, sans relâche, l'adversaire pour soi. Après quoi, il reprend l'avion et poursuit sa vie luxueuse, augmentant ainsi la rage infantile de ses admirateurs haineux. Tout un art.
26/03/2006