Toujours plus fort

Il y a eu le voyage en Chine, et Sarko, très à l'aise au milieu de l'armée en terre cuite rassemblée pour lui ; sa mère, surtout, à qui le président chinois, ému, a offert un châle. Cette présence maternelle n'a pas été assez commentée, d'autant plus qu'une autre mère, celle de Carla Bruni, est arrivée par la suite. Les mères, les enfants, voilà qui est admirablement joué. La Chine ? Bientôt les Jeux olympiques, et n'oublions pas que l'Opéra de Pékin est de construction française. Il y a eu ensuite Sarko en Algérie, les ruines de Tipasa, et le surgissement d'Albert Camus dans le discours présidentiel. Camus, c'est du solide, suivez mon regard, vers une union méditerranéenne et humaniste future. Il y a eu l'ébouriffante mise en scène de la visite de Kadhafi à Paris, sa tente, ses amazones, sa virée au Louvre et à Versailles, sa chasse à Rambouillet, son allure de seigneur hirsute et abrupt, ses déclarations de roi du désert, les indignations programmées qu'il fallait, les affaires. Quel film ! Il y a eu, il y a toujours, l'attente fiévreuse d'Ingrid Betancourt et la sollicitude permanente du président sauveur d'otages. Il y a eu le rapt de Carla à Disneyland, nouvelle percée à gauche, sabre dans le caviar, la mode, la chanson, les réseaux d'amants, la branchitude, Libération, Les Inrockuptibles, les fantasmes poussés à bout, la fuite en Égypte, les mystères de Louxor, l'annonce d'un mariage inouï et, pourquoi pas, d'un heureux événement (les mères sont là), bref, un modèle de campagne à l'intérieur des lignes ennemies, avec, en plus, promotion sociale du côté d'une très bonne famille italienne (aucune Française n'aurait fait le poids). Franchement, avez-vous vu mieux depuis Bonaparte ? Du haut des pyramides, quarante siècles contemplent cet exploit. Le Président est là, il jouit, il médite. Carla, le soir, lui chante doucement une berceuse, et Hollywood se convulse d'envie. Vous persistez à me parler du pouvoir d'achat, de l'augmentation des salaires et des sans-domicile dans la rue ? Quelle mesquinerie ! Et le penseur mondial de la gauche radicale, Badiou, qui compare Sarko à Pétain ! Quelle ringardise ! Vous ne voyez donc pas ce soleil nouveau de la République se lever sur le Nil ?

30/12/2007