Trop-plein

Aucun journaliste, comme c'est curieux, n'a jugé bon d'interroger le citoyen que le Président, agressé verbalement par lui, a traité de « pauvre con » au Salon de l'agriculture. Il aurait pourtant été intéressant de connaître ses raisons. De qui s'agit-il ? D'un travailleur ? D'un chômeur ? D'un marin-pêcheur ? D'un intellectuel ? D'un militant fanatique ? D'un candidat à la Villa Médicis ? Ne me dites pas que cet inconnu, désormais célèbre, est un ancien soixante-huitard, ce serait trop beau. Tout de même, on aimerait connaître son profil, son caractère, ses opinions, voir son visage dans les magazines. Être le « pauvre con » du Président pourrait même devenir une carrière. « Casse-toi, pauvre con ! » est une phrase mémorable. Quoi, pas la moindre interview, pas la moindre photo dans Match, pas le plus petit contrat d'édition ? Un petit livre, Le Con du Président, aurait du succès, j'en suis sûr, et, pour une fois, je ferais même nègre.

Le trop-plein ressemble au vide comme deux gouttes d'eau, et c'est là que surgit l'ennui qui nous guette. La France, après la tornade bling-bling, doit maintenant s'habituer à vivre en routine. Le Président s'habille en président, son épouse en épouse, la reine d'Angleterre bénit nos amoureux nationaux ; tous ces mariages et ces remariages indiquent la fin de partie. Non, non, je refuse de croire que Nicolas, Carla, Cécilia, Richard ne sont pas mariés pour la vie. Qu'il faille maintenant marier, chacun de leur côté, Ségolène Royal, Fabius et Hollande est un impératif raisonnable et festif. Et surtout plus d'infidélités, de divorces, de scènes de ménage. L'ennui, donc, avec pouvoir d'achat garanti.

Vais-je maintenant m'appesantir sur les turbulences du Medef, appelé à « fluidifier les relations sociales » (admirable expression) ? Sur la question des sectes et de l'église de scientologie ? Sur les sondages ? Sur le serpent de mer du troublant SMS ? Sur la vague rose municipale ? Sur la baisse du dollar et l'envol de l'euro ? Sur l'explosion du baril de pétrole et la ruée vers l'or ? Sur les menaces de Ben Laden contre le pape ? Sur la poudrière infernale du Proche-Orient ? Sur le duel fratricide Hillary-Obama ? Sur les quatre mille morts américains en Irak, sous l'œil satisfait de Bush ? Sur la nouvelle star de la nage, Alain Bernard ? Ah, laissez-moi respirer et préparer tranquillement mes Jeux olympiques.

30/03/2008