Espérance

Qu'est-il permis d'espérer en ces temps de crise mondiale ? Plusieurs symptômes ouvrent la voie : les sept cent cinquante mille visiteurs de l'exposition Picasso, files de deux ou trois heures d'attente, la nuit, par un froid sibérien jusqu'à quatre heures du matin (souffrir pour voir Picasso, expiation nécessaire) ; l'incroyable passion pour Bach manifestée à Nantes ; l'entrée triomphale des manuscrits de Guy Debord à la Bibliothèque nationale (avec ce commentaire cocasse : « L'État reçoit son enfant terrible »). Mais si vous voulez savoir ce qui se trame en profondeur aujourd'hui, c'est-à-dire demain et après-demain, prenez dès maintenant une option sur deux nouveaux « enfants terribles » : Yannick Haenel et François Meyronnis. Leur livre commun, Prélude à la délivrance204, vous frappera par son intensité et sa radicale beauté. Jamais on n'a lu Moby Dick, de Melville, avec une telle passion précise. Et puis cent autres choses qui surgissent, toutes neuves, au cœur de la catastrophe actuelle. Mais j'ai déjà peur que ce volume soit taxé, par les obscurantistes et les petits-bourgeois locaux, de fanfaronnade et de rodomontade, voire de délire mystico-religieux. Rien de plus faux : c'est simple, évident, prodigieusement cultivé, lumière sûre dans les ténèbres. Allez-y voir vous-même, si vous ne voulez pas me croire.

22/02/2009