Identité nationale

Aimez-vous le mot « nation » et l'adjectif « national » ? Ça dépend des moments. Le mot « front » vous laisse froid, sans parler de « front national ». Quant à l'identité, j'espère pour vous qu'elle ne se réduit pas aux papiers du même nom, et que vous avez une vie privée et intérieure pleine de complexité, de soucis, mais aussi de charmes. Vous aimez la France, c'est entendu, même celle qui s'est appelée « royaume », puisque vous êtes, à juste titre, fier de Versailles, de Descartes, de Molière, de Voltaire et même de Mme de Pompadour. Vous trouvez parfois que la République exagère en faisant commencer l'Histoire avec elle, car vous ne crachez pas sur Montaigne, Pascal, Bossuet, Mme de Sévigné, Saint-Simon, Laclos ou Chateaubriand. La France, ne cherchez pas une meilleure définition, c'est d'abord sa littérature, la plus riche et la plus variée du monde. Qu'importe si votre pays s'impose au football en trichant un peu ! Vous fermez les yeux, en bon patriote, sur cet incident mineur, vous n'êtes quand même pas quelqu'un pour qui le sport et la télévision occupent l'essentiel des rêves. Vous êtes indulgent pour les jeunes gens qui pensent que la guerre de 1914-1918 est aussi vieille que la guerre de Cent Ans, et qui assistent aux commémorations de la chute du mur de Berlin comme à une cérémonie du Moyen Âge. Si vous êtes progressiste, vous êtes pour les droits de l'homme, la fonction sacrée de l'école, la laïcité stricte, la régularisation des sans-papiers, le mariage homosexuel et les adoptions qui s'ensuivent. Tout en trouvant que l'adjectif « monstrueux » est exagéré pour parler du président actuel, vous pensez qu'un écrivain, surtout s'il a obtenu ce grand prix national qu'est le Goncourt, a le droit de s'exprimer librement sans devoir de réserve (lequel doit s'appliquer aux fonctionnaires d'État).

Obtenez-vous ainsi une bonne note à votre examen d'identité obligatoire ? J'espère.

29/11/2009