Chapitre 4

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redéfinir la santé

De l’immense majorité d’entre nous, on exige une duplicité constante, érigée en système. On ne peut pas, sans nuire à sa santé, exprimer jour après jour le contraire de ce qu’on ressent réellement, ramper face à ce qu’on n’aime pas, se réjouir de ce qui cause notre infortune. Notre système nerveux n’est pas une fiction. C’est un corps physique composé de fibres. Notre âme est située dans l’espace et se place en nous comme les dents dans la bouche. On ne peut sans cesse la violenter impunément.

boris pasternak, docteur jivago

Après toutes les recherches que j’avais effectuées sur les effets placebo et nocebo, je pouvais affirmer sans l’ombre d’un doute que le corps était destiné à s’autoréparer et que les croyances positives, les soins attentifs et les réactions de détente conséquentes représentaient de bonnes bases pour qu’il puisse procéder à sa guérison. Mais les croyances positives et les soins attentifs sont-ils suffisants pour que le corps guérisse de façon substantielle ? J’avais l’intuition que ce n’était pas si simple.

Que se passe-t-il pour la femme qui croit qu’elle ira mieux et trouve un médecin formidable, mais vit avec un homme qui la trompe et la maltraite ? Et pour cet homme malade qui occupe 12 heures par jour un poste dévalorisant pour lequel il doit compromettre son intégrité s’il veut ramener un salaire à la maison ? Pour la personne qui fume, consomme de l’alcool, mange des pâtes et des pizzas au pepperoni, mais qui souhaite vivre jusqu’à 100 ans parce que son existence est tellement remplie d’amour et de sens qu’elle voudrait ne jamais la quitter ? Toutes ces questions m’ont incitée à penser qu’être en bonne santé est bien plus complexe qu’on ne le croit.

Prenons l’exemple des adeptes des comportements sains. Si des gens font tout pour adopter des comportements sains — manger des fruits et des légumes, éviter la viande, le gluten et les produits transformés, faire du sport tous les jours, bien dormir, éviter les comportements de dépendance et consulter des praticiens de médecine fonctionnelle — dans le but d’optimiser la biochimie de leur corps, ils devraient mener des existences longues et prospères et mourir dans leur sommeil à un âge avancé, n’est-ce pas ? Alors comment se fait-il qu’un si grand nombre de ces adeptes de la vie saine soient plus malades que d’autres qui engouffrent de la viande cuite au barbecue, avalent des bières, dorment cinq heures par nuit et passent leur temps avachis sur le divan à regarder la télé ?

Si des personnes saines ont autant de risques que les autres de tomber malades, je devais en conclure qu’il y avait une défaillance dans notre définition de ce qui constitue un mode de vie sain. De toute évidence, les comportements sains contribuent largement à notre santé. Je me considère comme une de ces adeptes de la vie saine. Je bois mon jus de verdure, je prends mes vitamines, je marche et fais du yoga tous les jours, je dors bien, je vois un praticien de médecine fonctionnelle, et je prends des mesures pour éviter que des toxines puissent me nuire.

Pourtant, j’en suis venue à croire que le royaume purement physique et biochimique de la maladie — que l’on peut diagnostiquer par des tests en laboratoire, voir sur des études radiologiques et expliquer dans des boîtes de Pétri sous microscope — et qui bénéficie d’une bonne alimentation, d’un exercice physique régulier, de l’absence de toxines et des effets positifs sur le corps de la médecine fonctionnelle, n’est en fait qu’une partie de l’équation. C’est certes une grande partie, mais pas la totalité. Ma propre expérience auprès de mes patients (ainsi que mon expérience personnelle, sur laquelle je reviendrai au chapitre 9) m’a amenée à croire que la probabilité qu’une personne tombe malade ou soit en bonne santé, qu’elle parvienne à se guérir ou reste malade, a davantage à voir avec les événements de sa vie qu’avec n’importe quel comportement « sain » qu’elle pourrait adopter.

Formation sur le tas

Les soupçons que j’avais à propos de ce qui prédispose le corps à être en bonne santé et de ce qui nous rend réellement malades s’est confirmé alors que je travaillais dans une clinique de médecine intégrative dans le comté de Marin. Après avoir quitté la médecine conventionnelle, je me suis jointe à un groupe formidable de médecins et d’autres professionnels de la santé ayant à cœur d’aider les patients à être en meilleure santé possible. J’étais profondément reconnaissante de pouvoir passer une heure entière avec mes nouveaux patients et d’avoir enfin l’occasion d’explorer plus en profondeur ce qui les prédisposait à la maladie et ce qui favorisait véritablement leur santé.

Lorsque j’ai commencé ce nouveau travail, j’étais en admiration devant mes patients. C’étaient les personnes les plus impliquées dans leur santé que j’avais eu l’occasion de rece-voir. Nombre d’entre elles buvaient quotidiennement leur jus de verdure, avaient une alimentation végétalienne, faisaient de l’exercice physique avec un entraîneur personnel, dormaient huit heures par nuit, prenaient leur poignée de vitamines et autres suppléments tous les matins, dépensaient une fortune dans les médecines alternatives et complémentaires, et suivaient reli­gieusement les ordres de leur médecin. Pour certaines personnes, ce rythme de vie fonctionnait à merveille. Elles étaient l’incarnation de la santé, avec leur peau éclatante, leur corps magnifique et une force vitale qui transpirait de tous leurs pores.

D’autres, en revanche, n’avaient jamais été aussi malades. Je n’en revenais pas. Si on considère tout ce que j’avais appris à l’école de médecine, ces personnes auraient dû être en parfaite santé. Alors pourquoi tant de patients « sains » étaient-ils en souffrance ?

Pour aider ces patients, je demandais toute une batterie de tests, notamment des tests spécialisés que les médecins traditionnels n’ont pas l’habitude de réclamer, et il m’arrivait parfois de déceler quelque chose de surprenant qui, une fois traité, permettait une disparition complète des symptômes. Ces patients me considéraient comme une héroïne. Un simple remplacement d’hormone par exemple pouvait transformer leur vie.

Mais avec les autres patients, ceux qui, tout en menant des vies saines, souffraient d’une multitude de symptômes, la plupart du temps je ne trouvais rien, ce qui me laissait perplexe. Je ne trouvais pas d’explication biochimique à leur mal-être, et j’avais un sentiment d’échec, mais je savais au fond de moi que je n’étais pas responsable de leur état. Je n’avais pas oublié de leur faire passer un test important, ni de les envoyer vers le bon spécialiste. La réponse était ailleurs. Il manquait une pièce importante du puzzle, et je ne savais pas laquelle.

Parvenue à cette étape, j’étais très intriguée et avide de comprendre pourquoi ces patients « sains » étaient si malades. Au lieu de me concentrer uniquement sur les comportements relatifs à la santé, sur leurs antécédents médicaux et sur les autres questions habituelles, j’ai commencé à interroger les patients sur leur vie. Parce que nous avions le luxe de passer une heure ensemble, j’avais le temps de les écouter. Et ce que j’ai entendu a transformé entièrement l’opinion que je me faisais de la santé.

J’ai alors décidé de modifier le formulaire d’accueil que je faisais remplir à mes patients. Au lieu de limiter mes questions à leurs antécédents médicaux, chirurgicaux et familiaux, aux médicaments qu’ils prenaient et à une éventuelle consommation de drogues, comme me l’avait enseigné l’école de médecine, j’ai ajouté au formulaire toute une liste de questions sur le reste de leur vie. Ce que leurs réponses m’ont appris m’a véritablement étonnée.

Une méthode radicalement nouvelle pour accueillir les patients

J’ai commencé à explorer plus en profondeur les vies personnelles de mes patients et à leur poser des questions auxquelles la plupart des médecins n’auraient pas pensé. Est-ce que quelque chose vous empêche d’être entièrement vous-même ? Le cas échéant, qu’est-ce qui vous freine ? Qu’aimez-vous en vous ? Qu’est-ce qui manque à votre vie ? Qu’est-ce que vous appréciez dans votre vie ? Vivez-vous une relation amoureuse ? Le cas échéant, êtes-vous heureux ? Si vous répondez non, souhaiteriez-vous l’être ?

Êtes-vous comblé par votre travail ? Vous sentez-vous en harmonie avec votre mission de vie ? Êtes-vous satisfait sur le plan sexuel, que ce soit avec votre partenaire ou vous-même ? Vous exprimez-vous avec créativité ? Si oui, de quelle façon ? Si vous répondez non, vous sentez-vous frustré sur le plan créatif, comme si quelque chose en vous mourait d’envie de s’exprimer ? Sentez-vous que votre situation financière est saine, ou considérez-vous l’argent comme un facteur de stress ?

Si votre marraine la fée pouvait changer une seule chose dans votre vie, que souhaiteriez-vous ? Quelles règles suivez-vous tout en souhaitant pouvoir les enfreindre ?

J’ai découvert que les réponses de mes patients m’en apprenaient souvent plus sur leur maladie que n’importe quel test de laboratoire, n’importe quel dossier médical ou n’importe quelle radio. Souvent, le diagnostic était évident et ne m’était pas apparu aussi clairement avant parce que je n’avais pas posé les bonnes questions.

J’en suis venue à comprendre que ces patients étaient en mauvaise santé non pas à cause de leurs gènes, de leurs mauvaises habitudes de vie ou de leur malchance, mais parce qu’ils se sentaient terriblement seuls ou tristes dans leurs relations, qu’ils étaient stressés par leur travail, angoissés par l’état de leurs finances ou profondément déprimés. La plupart d’entre eux me donnaient une longue liste en réponse à la question de mon formulaire « Qu’est-ce qui manque à votre vie ? » Lorsque je leur posais la question face à face, la majorité se mettait à pleurer. Il se passait quelque chose qui n’avait rien à voir avec les légumes, le sport ou les vitamines.

À l’inverse, j’avais des patients qui s’alimentaient mal, faisaient rarement du sport, oubliaient leurs suppléments et semblaient bénéficier d’une parfaite santé. En lisant leurs réponses à mon questionnaire, j’apprenais qu’ils menaient des existences emplies d’amour, de joie, de sens, d’abondance financière, d’expression créative, de plaisir sexuel, de connexion spirituelle et d’autres éléments qui les différenciaient de mes adeptes de la vie saine qui étaient en mauvaise santé. Dans le fond, ils étaient heureux. Et même s’ils ne prenaient pas le meilleur soin de leur corps, celui-ci réagissait en étant en bonne santé.

C’est alors que j’ai commencé à poser à mes patients deux questions essentielles : « Selon vous, qu’est-ce qui est à la source de votre maladie ? » et, surtout : « De quoi votre corps a-t-il besoin pour guérir ? »

Au début, je m’attendais à ce que mes patients me répondent qu’un déséquilibre hormonal ou qu’une mauvaise alimentation était à l’origine de leur maladie. Je pensais qu’ils partageraient leurs intuitions avec moi concernant leurs traitements : « Je crois que je vais choisir la thérapie craniosacrale au lieu de la physiothérapie » ou « Je vais attendre pour prendre ce médicament anti-cholestérol et essayer plutôt de modifier mon alimentation. »

Parfois, les patients me faisaient part de leur besoin d’effectuer des changements relativement conventionnels tels que « J’ai vraiment besoin d’un antidépresseur », « Des antibiotiques devraient faire l’affaire », « J’ai besoin de perdre 10 kilos » ou « J’ai vraiment besoin d’équilibrer mes hormones. »

Mais, la plupart du temps, lorsque je leur demandais : « Selon vous, qu’est-ce qui est à la source de votre maladie ? », mes patients me répondaient : « Je donne aux autres jusqu’à l’épuisement », « Je suis malheureux en couple », « Je déteste mon travail », « J’ai besoin de plus de temps pour moi », « Je me sens tellement seul que je pleure tous les soirs en m’endormant », « Je ne sais plus quel est le sens de ma vie », « Je ne ressens plus la présence de Dieu », « Je me déteste tellement que je suis incapable de me regarder dans un miroir », « J’évite d’affronter la réalité », « Je n’arrive pas à me pardonner pour ce que j’ai fait », « Je vis dans le mensonge et je ne suis qu’un imposteur. »

Et lorsque je leur demandais : « De quoi votre corps a-t-il besoin pour guérir ? », leurs réponses me surprenaient. « Je dois démissionner », « Il faut que je révèle mon homosexualité à mes parents », « Je dois divorcer », « Je dois finir l’écriture de mon roman », « Je dois embaucher une gardienne pour mes enfants », « Je me sens seul ; j’ai besoin de me faire des amis », « J’ai besoin de méditer tous les jours », « Je dois dire à mon mari que j’ai une liaison », « Je dois me pardonner », « Je dois arrêter d’être aussi pessimiste. »

Eh bien !

Même si nombre de mes patients n’étaient pas prêts à faire ce que leur intuition leur dictait relativement aux besoins de leur corps, les plus courageux écoutaient leur voix intérieure et faisaient dans leur vie les transformations radicales dont elle avait besoin. Certains ont démissionné. D’autres ont quitté leur conjoint(e). D’autres ont déménagé dans une autre ville. Et d’autres encore sont partis à la poursuite de rêves qu’ils avaient depuis longtemps mis de côté.

Les résultats furent surprenants. Parfois, une longue liste de maladies disparaissait, la plupart du temps avec une grande rapidité. Mes patients se guérissaient eux-mêmes alors que des années de thérapie médicale s’étaient avérées inefficaces. J’étais sous le choc.

Une histoire d’autoguérison

Marla était la résidente type du comté de Marin. Elle était végétarienne, marchait beaucoup, pratiquait le yoga, participait à des triathlons, avalait les dizaines de suppléments que son naturopathe lui prescrivait et ne consommait pas d’alcool, de cigarettes ou de drogues.

Pourtant, son dossier médical était particulièrement impressionnant et elle souffrait de quatre problèmes de santé chroniques.

Ayant entendu par des amis que je pratiquais une médecine différente, elle avait pris rendez-vous avec moi en espérant que je puisse déterminer ce qui la rendait si malade, en dépit de tous ses efforts pour être en bonne santé. En lisant ses réponses à mon questionnaire d’accueil, j’ai découvert que Marla était malheureuse. Elle était mariée à un homme qui la maltraitait physiquement et psychologiquement, et ils n’avaient plus de relations sexuelles depuis deux ans. Elle se sentait frustrée sur le plan créatif parce que son mari n’encourageait pas sa passion pour l’art, et elle était tellement occupée par son travail et par ses entraînements de triathlon qu’elle n’avait plus le temps de peindre. En outre, prendre soin de sa mère âgée et malade qui vivait chez elle était une source d’épuisement.

En terminant la lecture de son formulaire, je savais que le corps de Marla ne pourrait pas guérir tant qu’elle n’aurait pas réglé les problèmes qui minaient son existence. Avec toutes les émotions négatives qui habitaient son esprit et toutes les hormones de stress qui envahissaient son corps, aucun légume, supplément, programme d’exercice physique ou médicament ne pouvait être suffisamment efficace pour contrecarrer les effets néfastes des réactions de stress chronique sur son corps.

Après avoir confié à Marla ce que je pensais être l’origine réelle de son mal-être physique, je lui ai posé la question : « De quoi votre corps a-t-il besoin pour guérir ? »

Marla m’a répondu :

— J’ai besoin de déménager à Santa Fe.

— Pourquoi Sante Fe ? l’ai-je interrogée.

Marla m’a expliqué :

— Parce que j’y ai une maison de vacances, et que, chaque fois que j’y suis, tous mes symptômes disparaissent.

Peut-être existait-il une explication biochimique à cela. Peut-être avait-elle en elle une sensibilité chimique à un élément de sa maison de Mill Valley. À moins qu’elle soit allergique à une culture que l’on trouvait dans la région de la baie de San Francisco, mais pas à Santa Fe. À moins encore que le climat, l’alimentation ou un autre facteur environnemental puisse expliquer une telle différence.

Me doutant qu’aucune de ces hypothèses n’était valable, j’ai encouragé Marla à écouter ce que lui disaient son corps et son intuition.

Un an plus tard, j’ai reçu un appel de Marla m’informant qu’elle avait déménagé à Santa Fe. Pour qu’un tel changement de vie soit possible, elle avait vendu son entreprise et installé sa mère dans une merveilleuse résidence pour personnes âgées près de Sante Fe, où elle pouvait lui rendre visite le week-end. Elle avait également demandé le divorce. Et une fois installée à Santa Fe, elle s’était inscrite à l’école des beaux arts. Depuis, elle avait rencontré un autre homme et s’était fait de nouveaux amis artistes, et elle se plaisait à marcher, à skier et à faire du vélo dans les montagnes voisines.

Surtout, m’a-t-elle raconté, tous ses symptômes ont disparu comme par magie trois mois après son déménagement.

Comment votre style de vie influence-t-il votre corps ?

Ce n’est pas un médicament, un supplément ou une opération chirurgicale qui a amélioré la santé de Marla. Elle a réussi à améliorer son état en réduisant son stress, en relaxant son esprit et son corps, en réalisant son rêve, en trouvant l’amour et en nourrissant son corps d’hormones propices à la santé, tout en le libérant de ses hormones de stress. Ces changements ont provoqué des transformations physiologiques mesurables.

Marla n’est pas la seule dans ce cas. J’ai assisté à des dizaines de transformations similaires, et j’en suis venue à saisir que le système médical se concentrait presque uniquement sur la biochimie des patients, au détriment bien souvent de la santé de leur esprit, ce qui leur était particulièrement dommageable.

Mon expérience auprès de mes patients du comté de Marin m’a permis d’entamer l’étape suivante de mes recherches sur les facteurs de santé optimale et de longévité. Animée par la même passion que celle qui m’avait amenée à chercher dans des ouvrages de la bibliothèque la preuve que l’esprit pouvait guérir le corps, je me suis replongée dans la littérature médicale pour y trouver ce qui, au-delà des comportements traditionnellement propices à une bonne santé, influençait la santé du corps en passant par celle de l’esprit.

Ma théorie — selon laquelle les choix de vie que vous faites peuvent provoquer des transformations physiques dans votre corps — s’est étendue aux personnes avec lesquelles les gens interagissent sur les plans professionnel et personnel, à leur liberté créative, à leur vie spirituelle, à leur relation à l’argent et à leur degré de bonheur. Les personnes qui font des choix de vie heureux et sains, comme celui de trouver un partenaire de vie aimant et présent, d’entretenir des relations étroites avec des amis et de la famille, et d’exercer un métier qu’elles aiment, mènent des existences positives qui facilitent la réaction de détente, contrecarrent la réaction de stress et aboutissent à une meilleure santé.

Nous avons tous conscience que le stress est mauvais pour nous, mais nous ne savons trop que faire pour y remédier. Or, après avoir effectué mes premières recherches, je saisissais le lien évident entre le stress que ressentait l’esprit et la façon dont l’état du corps se dégradait. Je pouvais voir le lien qui se créait entre les facteurs de stress émotionnel comme la solitude, la frustration au travail, la colère liée à un traumatisme passé, les soucis financiers ou la peur, et la maladie.

D’autres scientifiques avaient-ils étudié ce lien ? Existait-il une preuve permettant d’appuyer l’idée que de bonnes relations humaines favorisaient une bonne santé et que le stress au travail provoquait des maladies ? Il était temps de me replonger dans les journaux scientifiques.

C’est ainsi que je me suis donné pour mission de prouver que tous les aspects de notre mode de vie influencent la santé de notre esprit et, avec elle, la santé de notre corps. Selon moi, pour mener une vie pleine de vitalité, éviter les maladies ou optimiser ses chances de rémission, les éléments suivants sont essentiels :

Des relations saines, notamment un réseau familial solide, des amis, des proches et des collègues.

Une façon saine et constructive de passer vos journées, que vous exerciez votre métier à l’extérieur ou chez vous.

Une vie créative saine et totalement libérée qui permet à votre âme de s’exprimer pleinement.

Une vie spirituelle saine, libérée de tout stress finan-cier inutile, qui répond aux besoins essentiels de votre corps.

Une vie sexuelle saine, qui vous permet d’exprimer votre côté érotique et d’explorer vos fantasmes.

Une vie financière saine, exempte de stress inutile et qui vous assure de combler les besoins essentiels de votre corps.

Un environnement sain, exempt de toxines, de risques de catastrophe naturelle, de radiation et d’autres facteurs néfastes qui menacent la santé du corps.

Une vie intellectuelle et émotionnelle saine, caractérisée par l’optimisme et le bonheur, et exempte de peur, d’angoisse, de déprime et autres troubles de la santé mentale.

Un style de vie sain propice à la bonne santé du corps, notamment une bonne alimentation, de l’exercice physique régulier, un sommeil adéquat et l’absence de dépendances malsaines.

Les preuves scientifiques que j’ai découvertes appuient mon point de vue. Chacun des aspects de votre vie — vos relations, votre travail, votre créativité, votre spiritualité, votre sexualité, etc. — a le pouvoir de vous stresser ou de vous détendre. Une relation saine favorise les réactions de détente dans votre corps. Une relation malsaine, à l’inverse, déclenche des réactions de stress. Une vie spirituelle saine provoque des émotions positives telles que la joie, l’espoir et un sens d’unité, ce qui favorise également les réactions de détente. À l’opposé, une vie spirituelle malsaine, dans laquelle vous vous sentez jugé par les autres, redoutez d’être puni par une divinité vindicative ou où vous vous sentez menacé par des perspectives effrayantes telles qu’aller en enfer, ne pourra que déclencher des réactions de stress.

Il ne suffit pas de se concentrer sur la santé du corps, il faut prendre en considération celle de l’esprit. Promouvoir la santé du corps sans encourager celle de l’esprit est un exercice futile. Nous ne guérirons véritablement que lorsque nous prendrons conscience que notre corps est le miroir de notre santé interpersonnelle, spirituelle, professionnelle, sexuelle, créative, financière, environnementale, mentale et émotionnelle. En fait, les données scientifiques suggèrent que, dans certains cas, la santé de l’esprit est aussi, si ce n’est plus, importante que celle du corps. Notre corps ne nous dicte pas la façon de mener notre vie, alors qu’il en est plutôt un miroir. Il est le reflet de l’ensemble de nos expériences de vie.

Prenons l’exemple d’une patiente qui ne souffre de douleur pelvienne qu’en présence de son patron autoritaire et abusif. Elle va voir le gynécologue qui lui diagnostique une endométriose et lui suggère une chirurgie ainsi qu’un rendez-vous chez l’urologue. Alors elle va voir l’urologue qui place une caméra dans sa vessie et diagnostique une cystite interstitielle, mais lui suggère d’aller voir un gastro-entérologue afin d’être certain. Elle va visiter ce troisième médecin qui lui insère une sonde anale et lui donne l’étiquette du syndrome du côlon irritable.

Pourtant, personne n’a soulevé le fait que sa douleur survient quand son patron entre dans la pièce. Personne ne pense à suggérer que le stress de son travail et sa relation dysfonctionnelle avec son patron pourraient être à l’origine de symptômes physiques découlant eux-mêmes de réactions de stress répétitives. Peut-être qu’à la place de médicaments ou d’une opération chirurgicale, ce dont cette femme a véritablement besoin est d’un nouveau travail lui permettant de guérir ses pensées négatives et de laisser son corps s’autoréparer.

Être malade ou être en bonne santé

Si la santé du corps passe par la santé de l’esprit, comment devrions-nous nommer ce type de santé ? Notre système de santé n’a pas de mot qui permette de décrire ce type de santé élargi. La définition courante de « santé » ne prend pas en considération votre niveau de satisfaction au travail, en amour, ou dans vos relations interpersonnelles.

À l’école de médecine, on m’a enseigné qu’il existait deux types de personnes : celles qui étaient malades et celles qui étaient en bonne santé. Nous savons tous qui sont les personnes malades. Leur examen physique révèle un problème. Leurs tests en laboratoire et leurs examens sont anormaux, et elles sont donc considérées comme malades. Des médicaments leur sont alors prescrits, et si les médecins parviennent à leur éviter l’hôpital — ou, pire, la mort —, ils poussent un soupir de soulagement.

Si nous allons un peu plus loin en les aidant à adopter un mode de vie bénéfique pour leur corps, comme une alimentation plus saine ou l’arrêt de la cigarette, et que ces changements leur permettent de se sentir mieux, nous nous autocongratulons pour notre bon travail.

Les gens en bonne santé subissent aussi des examens physiques, des tests en laboratoire et des radios, et leurs résultats sont toujours bons. S’il a pu leur arriver de tomber malades, nous avons réglé le problème avec des médicaments, des modifications de leur alimentation, de l’exercice physique, la perte de poids, ou tout autre facteur leur permettant d’être bien.

À titre de professionnels de la santé, nous voulons éviter que les personnes en bonne santé deviennent malades, et la médecine préventive nous aide à transformer notre objectif en réalité. En outre, les données publiques sur les comportements sains, notamment une bonne alimentation, de l’exercice physique régulier, l’arrêt de la cigarette, la gestion du poids, la vaccination et le dépistage du cancer, ont contribué au bien-être de la population toute entière.

Pourtant, alors que la technologie médicale connaît une progression rapide et que nous comprenons mieux comment éviter les maladies, notre société est de plus en plus obèse, hypersensible, ou accro aux médicaments qui calment notre anxiété, notre dépression et nos troubles bipolaires.

Il existe une autre catégorie de patients qui se situe quelque part entre les gens malades et ceux en bonne santé. Techniquement, ils ne sont pas malades, mais ils ne sont pas non plus en bonne santé. Leurs examens sanguins sont normaux, leurs signes vitaux sont stables, leurs bulletins de santé sont excellents. Pourtant, ils ne se sentent pas aussi bien que l’on pourrait le croire. Or, il semble y avoir une épidémie de cette nouvelle forme de patients.

Les personnes atteintes de cette « épidémie » se disent fatiguées, déprimées et anxieuses. Elles dorment mal, ont moins de libido, prennent du poids, et acquièrent toutes sortes de dépendances malsaines à force de vouloir ne plus rien ressentir. Et elles se plaignent de vagues symptômes physiques tels que des douleurs au niveau du dos, de la nuque ou des muscles, de troubles gastro-intestinaux, de maux de tête, de gêne respiratoire et de vertiges.

Ces personnes se rendent donc chez le médecin avec la conviction que quelque chose ne va pas. Après avoir effectué une série d’examens et de tests, le médecin déclare que tout va bien. Or, ces personnes ne se sentent pas bien.

Parce que les médecins ne parviennent pas à trouver d’explication biochimique aux symptômes de ces patients, ils ont tendance à les traiter à l’aide d’antidépresseurs et autres médicaments passe-partout qui ne s’attaquent pas à la source du problème, et qui ne sont donc pas efficaces. Les patients décident alors de consulter un autre médecin et recommencent tout à zéro parce que, de toute évidence, quelque chose ne va pas. Et ils ont raison. Quelque chose ne va pas. Mais ce n’est pas ce qu’ils pensent.

Nombre de ces patients qui sont techniquement en bonne santé, mais qui se sentent mal, souffrent des conséquences physiologiques de réactions de stress répétitives qui finissent par abîmer leur corps. À moins d’être soulagés de leur stress, ces patients tombent habituellement malades. Cependant, le système médical ne semble pas être de cet avis et suggère plutôt que vos symptômes sont « dans votre tête ». Il n’a pas tout à fait tort. Tout prend naissance dans votre tête et se transmet ensuite à votre corps.

La physiologie de l’émotion

Quel est le processus exact par lequel une pensée ou un sentiment a des répercussions sur le corps ?

Au début, il y a une pensée ou un sentiment — prenons l’exemple de la peur. Un médecin vous dit que vous n’avez plus que trois mois à vivre ; ou il vous injecte un produit en vous prévenant qu’il a des effets secondaires désagréables. À moins que la situation soit moins grave. Peut-être avez-vous peur d’être abandonné par votre femme, d’être licencié par votre patron, de ne pas pouvoir payer vos factures, de ne pas réaliser votre rêve ou d’être rejeté par tout le monde parce que nous n’êtes pas une personne digne d’être aimée.

Vos pensées sont puissantes. Votre conscience — qui réside dans votre cerveau antérieur — sait que vous avez peur. Mais votre cerveau reptilien — la zone attenante à votre cerveau antérieur qui abrite l’hypothalamus — ne peut pas faire la différence entre une pensée de peur abstraite et une véritable menace imminente. Votre cerveau reptilien croit que vous allez mourir, ce qui déclenche la réaction de stress et les mécanismes de lutte ou de fuite, lesquels activent à leur tour l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien, ce qui met en branle votre système nerveux sympathique, bloque votre système immunitaire et vous prépare à fuir le danger.

Au beau milieu d’une réaction de stress, les fonctions d’autoentretien et d’autoréparation de votre corps tombent sou­dainement en panne. Les réactions de stress sont censées n’être déclenchées que très rarement. Un corps sain devrait être dans un état de repos physiologique la plupart du temps. Si vous êtes un homme des cavernes vivant au sein d’une tribu dont les membres sont heureux, vous ne devriez presque jamais avoir à fuir d’ours des cavernes. Et le reste du temps, vous devriez ramasser des baies, vous reposer près du feu et faire de petits bébés des cavernes.

Bien sûr, les hommes des cavernes que sont nos ancêtres n’ont pas vécu très longtemps en raison des dangers réels qu’ils devaient affronter au quotidien, dangers contre lesquels nous sommes en grande partie protégés parce que nous avons le luxe de pouvoir nous loger et nous nourrir. Ceci étant dit, la vie moderne présente ses propres dangers. Les facteurs de stress auxquels nous sommes confrontés au quotidien — la solitude, les relations difficiles, le stress au travail, les problèmes financiers, l’anxiété, la dépression, etc. — déclenchent des pensées et des sentiments dans le cerveau antérieur qui vont à leur tour stimuler l’hypothalamus de façon répétitive pour produire des réactions de stress. L’esprit sait qu’il ne s’agit que d’un sentiment, mais le cerveau reptilien pense que vous êtes la cible d’une attaque.

Des sentiments négatifs tels que la peur, l’anxiété, la colère, la frustration ou le ressentiment stimulent l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien1. Que votre corps soit ou non en danger, votre esprit croit que vous l’êtes, ce qui active votre hypothalamus, lequel libère de la corticolibérine dans le système nerveux. La corticolibérine stimule l’hypophyse, qui va à son tour sécréter de la prolactine, une hormone de croissance, et de la corticotrophine, lesquelles incitent la glande surrénale à libérer du cortisol, qui a la responsabilité d’aider le corps à maintenir un état d’homéostasie lorsque le cerveau l’avertit de la présence d’une menace.

Lorsque l’hypothalamus est activé, il active également le système nerveux sympathique (la réaction de lutte ou de fuite), incitant les glandes surrénales à libérer de l’adrénaline et de la noradrénaline, ce qui accroît la tension différentielle et la tension artérielle, entre autres réactions physiologiques. La sécrétion de ces hormones déclenche diverses modifications métaboliques dans l’ensemble du corps.

Les vaisseaux sanguins qui irriguent le tube digestif, les mains et les pieds se resserrent, et ceux qui irriguent le cœur, les grands muscles et le cerveau se dilatent, envoyant plutôt le sang vers des organes qui vous permettront de fuir en cas d’urgence. Vos pupilles se dilatent elles aussi pour laisser entrer davantage de lumière. Votre métabolisme s’accélère pour vous donner de l’énergie en dissolvant les graisses stockées et en libérant du glucose dans le sang. Votre fréquence respiratoire s’accélère et vos bronches se dilatent, laissant pénétrer plus d’oxygène, et vos muscles se tendent, prêts à fuir la soi-disant menace.

Le niveau d’acide gastrique augmente et celui d’enzymes digestifs diminue, ce qui provoque des contractions de l’œsophage, de la diarrhée ou de la constipation. Le cortisol neutralise votre système immunitaire afin de réduire l’inflammation liée aux potentielles blessures physiques reçues lors de l’attaque. La procréation devient impossible — le sexe est un luxe pour une personne en danger !

Votre corps ignore fondamentalement le sommeil, la digestion et la reproduction, pour se concentrer sur la course, la respiration, la réflexion, et la production d’un niveau d’oxygène et d’énergie suffisants pour assurer votre sécurité. Lorsque votre corps est exposé à une menace physique, ces changements vous aident à lutter contre celle-ci ou à la fuir. Mais lorsque la menace n’existe que dans votre tête, votre corps ne le sait pas, et si, avec le temps, la réaction de stress est déclenchée de façon répétitive, la réaction biologique de la nature finit par faire plus de mal que de bien.

Ainsi, le corps n’est pas en mesure de se détendre pour réparer les régions qui tomberont inévitablement malades si elles ne sont pas entretenues par des mécanismes d’autoréparation. Les organes peuvent se détériorer. Les cellules cancéreuses que nous fabriquons tous les jours naturellement, mais qui sont normalement détruites par notre système immunitaire, peuvent proliférer. L’usure chronique du corps humain finit par avoir des conséquences et par nous rendre malades.

Mais ce n’est pas une fatalité. Le corps sait comment se détendre grâce à la réaction de détente compensatoire décrite par Herbert Benson (voir le chapitre 8). Lorsque le cerveau antérieur abrite des pensées positives et des sensations telles que l’amour, la connexion, l’intimité, le plaisir et l’espoir, l’hypothalamus arrête de provoquer des réactions de stress. Lorsque vous êtes optimiste et plein d’espoir, aimé et soutenu, en harmonie avec votre vie professionnelle ou créative, nourri sur le plan spirituel, ou proche d’une autre personne sur le plan sexuel, la réaction de détente supplante la réaction de stress.

Le système nerveux sympathique se bloque. Les niveaux de cortisol et d’adrénaline chutent. Le système nerveux parasympathique prend le relais. Le système immunitaire se remet en branle. Et le corps peut procéder à son autoréparation, éviter les maladies éventuelles, et tenter de guérir celles qui existent. Par conséquent, les chances sont plus grandes d’éviter que les personnes en bonne santé tombent malades, et même de traiter celles qui souffrent déjà d’une maladie.

Et voilà ! Vos pensées permettent l’autoguérison. Votre esprit a guéri votre corps, et cela n’a rien d’un processus métaphysique Nouvel Âge. C’est une simple question de physiologie.

Aujourd’hui, je suis fermement convaincue que les croyances positives et les soins attentifs bloquent les réactions de stress, déclenchent les réactions de détente, et ramènent le corps à son état naturel de repos physiologique pour qu’il puisse faire ce qu’il fait le mieux : se guérir. Un des moyens les plus profonds par lesquels votre esprit peut guérir votre corps concerne les relations que vous entretenez avec votre entourage. Nous savons tous que l’amour guérit. Cependant, saviez-vous qu’il ne guérit pas seulement l’âme, mais aussi le corps ? Tandis que la solitude, la colère et le ressentiment empoisonnent le corps, le désir de connexion, l’intimité et le sentiment d’appartenance familiale, amicale et amoureuse sont ancrés dans votre adn, et lorsque ces désirs sont comblés, notre corps réagit par une meilleure santé. Lorsque vous trouvez votre « tribu », que vous vous sentez aimé et que vous vous entourez des personnes qui vous connaissent profondément et vous acceptent tel que vous êtes, vous optimisez les probabilités pour que votre corps puisse se réparer, et vous le préparez à vivre des miracles.