VINCENT VAN GOGH (1853-1890)

 

 

En 1885, Vincent van Gogh écrivit à son frère Théodore (dit Théo) à Paris depuis le village hollandais de Nuenen : « Il existe, je crois, une école impressionniste, mais j’en sais très peu à son sujet ».[19] Sa conception de l’impressionnisme était très approximative. Il pensait qu’une nouvelle école s’était formée autour de Delacroix, Millet et Corot. Mais, au moment où les impressionnistes arrivaient effectivement au terme de leur cheminement artistique, Van Gogh avait déjà son idée sur la voie qu’il voulait suivre. Sa vie fut difficile. S’élever d’un village hollandais jusqu’au grand art n’était pas à la portée de tout le monde. Mais Vincent van Gogh était extrêmement obstiné. « Je suis très content que tu ne t’opposes pas à mon intention de venir à Paris, écrivit-il à Théo, je pense que cela m’aidera à progresser ; j’ai peur de me retrouver dans une impasse en restant ici, de tourner en rond en refaisant les mêmes erreurs ».[20] Vincent se rendit donc à Paris. Fin février 1886, il retrouva son frère Théo au Salon carré du Louvre, parmi les toiles de grands maîtres italiens.

Né le 30 mars 1853 dans le village de Groot Zundert, en Hollande, Vincent était le fils d’un pasteur calviniste, Théodore van Gogh. À seize ans, avant d’avoir terminé ses études, il commença à travailler comme vendeur de tableaux à La Haye, selon la tradition familiale. Il fit donc assez rapidement connaissance avec la peinture. Vincent travaillait dans une succursale de la Galerie d’art Goupil et Cie de Paris, ce qui lui donna l’occasion de visiter Paris et de travailler pendant près de deux ans à Londres puis, jusqu’à la fin avril 1876, dans la même entreprise, à Paris. À vingt-trois ans, Vincent connaissait bien les musées de La Haye, de Paris et de Londres, et était exceptionnellement instruit. Comme il n’y avait pas de travail qui lui convenait à Etten, le village où vivaient désormais ses parents, il changea de métier et de ville. Vincent travailla dans les quartiers modestes de Londres comme instituteur adjoint, et il y prononça ses premiers sermons. Les Van Gogh étant une lignée de pasteurs, la vocation de Vincent pour ce métier était naturelle. Sur l’insistance de ses parents, il se prépara à intégrer la faculté de théologie de l’Université d’Amsterdam, puis l’École flamande d’évangélisation à Bruxelles. Ayant échoué à l’École d’évangélisation, Vincent partit travailler comme prédicateur dans la région la plus pauvre de Belgique, le Borinage, où il aida les pauvres avec abnégation, et descendit lui-même à la mine. Vivre dans le dénuement au milieu des indigents fut pour Vincent une sorte de test de ses capacités, comme s’il avait conscience que la vie ne serait pas facile pour lui. Leur dur labeur privait les mineurs de la beauté, de la joie, et de la dignité humaine. Ces gens furent les premiers modèles de ses dessins. Lorsque Vincent écrivit à son frère du Borinage en juin 1879, ses mots annonçaient déjà une future composition : « Tout près d’ici, il y a une hauteur, d’où l’on aperçoit dans le lointain, au fond de la vallée, une partie du Borinage avec ses cheminées, ses monticules de houille, ses maisons ouvrières, et pendant la journée toute une agitation de silhouettes noires qu’on prendrait pour des fourmis. Au bord de l’horizon, on distingue quelques bois de sapins sur lesquels se détachent des maisonnettes blanches, des clochetons, un vieux moulin, etc. La plupart du temps, il flotte là-dessus une sorte de brume, ou bien c’est un effet capricieux de lumière et d’ombre amené par les nuages ; cela fait penser aux tableaux de Rembrandt (…) ou de Ruysdaël ».[21] Dans le Borinage, il surmonta ces épreuves, aussi décida-t-il de devenir peintre.

Vincent commença à étudier où il pouvait. Malgré le grave conflit qui l’opposait à son père au sujet de son avenir, il cherchait instamment une école et un professeur.