Naguère les carnets que j’ai toujours en poche accueillaient les plaisirs furtifs de mes voyages : des notes vite griffonnées où consigner mes découvertes. J’y poursuis à présent un tout autre entretien. Avec le soir qui tombe, la nuit qui coule sur nos épaules, les ombres perdues, les horloges arrêtées et le souffle de ceux dont ne bat plus le cœur. Ce sont des carnets de deuil, comme il en existe de route ou de bal… J’y viens griffer le papier comme un chien gratte la terre pour y retrouver de vieux os. Je sors de leur boîte de pauvres images où repose en paix la vie d’autrefois…
Combien de temps ce travail au noir durera-t-il ? Peut-être jusqu’à ce que le geste d’écrire me devienne détestable. Ayant usé en moi l’amour jusqu’à la corde. À moins qu’il ne coïncide très exactement avec le temps de ma propre existence.