De par sa composition, le tableau évoque les portraits d’apparat du XVIe siècle : le personnage est représenté en pied dans un intérieur d’où par la fenêtre s’ouvre un magnifique paysage. Cependant, la pose du bouffon, son costume, les objets jetés négligemment sur le sol, témoignent de l’ironie du peintre vis à vis de cet être disgracié.

Velázquez fut le premier parmi les peintres à s’adresser au thème des bouffons. Jusqu’alors, ces « personnages chargés de divertir les grands avec leurs plaisanteries », comme on disait à la cour, n’avaient pas daigné attirer l’attention. Impressionné par leur forte personnalité, leur indépendance et leur conduite courageuse, Velázquez trouva en ces personnes beaucoup plus qu’un simple objet de divertissement.

Le portrait du grand veneur Juan Mateos, se rapporte au genre de portrait non officiel. Le grand veneur fut de tout temps un personnage important de la maison royale, puisque la chasse était l’un des passe-temps favoris des rois d’Espagne. Juan Mateos avait même écrit un traité sur la chasse, qui parut à Madrid en 1634. Juan Mateos, d’une main s’appuie sur le pommeau d’une épée, dans l’autre, il tient un pistolet. Cependant, le personnage n’a rien d’héroïque, au contraire, il a l’air timide et réservé. Le grand veneur, qui porte un costume classique noir, est représenté sur un fond sombre sans aucun accessoire, de sorte que l’attention du spectateur se concentre uniquement sur le visage. Ce genre de portrait fut introduit en Espagne par Le Greco, pour qui les valeurs spirituelles du personnage étaient beaucoup plus importantes que tout autre aspect physique de sa personnalité. Ainsi, Velázquez se montrait fidèle aux traditions de son célèbre prédécesseur.

 

La Torre de la Parada. 1635-1640

 

Les travaux de construction du pavillon de chasse de la Torre de la Parada furent commencés en 1635, alors que le palais du Buen Retiro n’était pas encore achevé. Les origines de cette construction remontent au XVIe siècle, c’est-à-dire à l’époque du règne de Philippe II, quand une tour fut construite près du Palais du Pardo, non loin de Madrid. Philippe IV décida de l’agrandir tout en l’enfermant dans un édifice. C’est principalement l’atelier de Rubens qui reçut la commande de décorer le pavillon de chasse. Velázquez prit aussi part à l’aménagement de la Torre de la Parada, comme l’atteste un document datant du mois de décembre 1636, dans lequel le peintre réclame son salaire. Le tableau La Chasse au sanglier ou La Tela Real fut créé pour décorer la pièce principale de la Torre de la Parada, la Galerie Royale, au même titre que les portraits de la famille royale en costumes de chasse. La Torre de la Parada renfermait des tableaux flamands pour la plupart, qui traitaient surtout des sujets mythologiques. Trois d’entre ces tableaux appartiennent à Velázquez : Mars, Esope et Ménippe. Identiques de dimensions, ils figurent tous les trois dans l’inventaire de la Torre de la Parada de 1701.