Joachim Wtewael, Persée secourant Andromède, 1611.
Huile sur toile, 180 x 150 cm. Musée du Louvre, Paris.
Ainsi que nous l’avons vu, la première éclosion de la peinture à l’huile dans les pays du Nord avait brillé d’un incomparable éclat avec le génie des Van Eyck ; mais pas plus avant eux que chez leurs successeurs immédiats, on ne saurait véritablement parler d’une École hollandaise distincte de l’École flamande primitive. Avec les premières années du XVIIe siècle, des différences profondes allaient s’accuser entre les visées artistiques des Flandres et celles des Pays-Bas. Le pays tout entier, il est vrai, s’était soulevé contre la tyrannie étrangère pour secouer le joug de l’Espagnol. Cependant, la lutte dans les provinces du Midi n’avait été ni si vive, ni si opiniâtre que dans celles du Nord et tandis que les premières acceptaient, avec la paix, le régime de transaction auquel pendant longtemps elles devaient rester soumises, les autres, au contraire, ne se prêtaient à aucun accommodement et ne déposaient les armes qu’après avoir conquis leur entière indépendance.
En même temps que cette scission politique, s’opérait aussi le partage entre les deux Écoles jusque-là réunies. Alors que, fidèle à ses anciennes traditions, l’École flamande trouvait à Anvers son principal centre d’activité, l’École hollandaise, de son côté, dans les conditions très particulières qui lui étaient faites, inaugurait un art nouveau et tout à fait original.
En dépit des différences assez tranchées qui caractérisent l’une et l’autre de ces écoles voisines, il existe entre elles – est-il besoin de le dire ? – bien des liens et des affinités. Ni dans l’espace, ni dans le temps, les lignes de démarcation, par lesquelles la critique essaie d’établir ces sortes de délimitations, ne se présentent jamais avec une rigueur absolue. C’est ainsi qu’entre la Flandre catholique et la Hollande protestante, la ville d’Utrecht a tenu, dans l’histoire du paysage, une place intermédiaire qu’expliquent à la fois sa situation géographique et les croyances religieuses auxquelles elle était restée attachée.
Utrecht, on le voit, était dès lors un centre artistique très important et, les premiers, les artistes qui y étaient nés ou qui s’y étaient fixés, cédaient au courant qui entraînait peu à peu vers l’Italie leurs confrères de tous les pays. C’est chez ces étrangers, qui affluaient à ce moment à Rome, que l’art italien allait, après les Carrache et Caravage, trouver des continuateurs et devenir un art cosmopolite dont l’Allemand Elsheimer, les frères Bril venus des Flandres, et après eux deux Français établis dans la Ville éternelle, Poussin et le Lorrain furent les représentants les plus en vue. À Utrecht même, Abraham Bloemaert (1564-1651) – bien qu’il n’y fût pas né et qu’il n’ait jamais vu l’Italie – peut être considéré comme le chef de cette école des Hollandais « italianisants ».