Rembrandt (Rembrandt Harmenszoon van Rijn),
Paysage dorage, vers 1640. Huile sur bois, 51,3 x 71,5 cm.

Herzog Anton Ulrich-Museum, Brunswick.

 

 

Rembrandt paysagiste

 

Quel que soit le talent des paysagistes dont nous venons de parler, il faut reconnaître que les genres spéciaux où ils se sont renfermés étaient assez restreints. Les aspects de la mer et ceux des villes hollandaises qu’ils ont représentés offrent certainement bien des ressources pittoresques, mais à s’y cantonner, un artiste risque fort, à la longue, de ne plus y trouver un intérêt suffisant et de se fatiguer lui-même des redites inévitables auxquelles il est condamné. Avec des visées plus hautes, les maîtres qui embrassent la totalité de leur art ont aussi plus de facilités pour se communiquer à nous et nous toucher davantage.

Comme la plupart des grands artistes, Rembrandt (1606-1669) devait, en abordant le paysage, y mettre la marque de son originalité et de son génie. Sa vie est suffisamment connue pour que nous n’ayons pas besoin de la rappeler. Dans les tableaux de ses débuts la nature est absente. Absorbé par l’étude de la figure, il s’y consacre tout entier. Le plus souvent les personnages de ses compositions sont placés dans des intérieurs clos. Quand de hasard la campagne sert de cadre à ces épisodes, l’artiste ne se met pas en frais d’étude pour la représenter. Dans Le Baptême de leunuque, il se contente d’un buisson, d’un morceau de terrain sur lequel des courges, étudiées pour la circonstance, étalent complaisamment leur large feuillage.

Lorsque, vers le milieu de 1631, Rembrandt quitte Leyde pour se fixer à Amsterdam, le paysage continue à n’avoir qu’une importance très secondaire dans ses tableaux et ses eaux-fortes. S’il a besoin de quelques détails pittoresques qu’il juge nécessaire d’y introduire, il va, pour la circonstance, les copier à la campagne. Le jeune maître est toujours plus à l’aise avec les sujets qui le ramènent à ses observations favorites du clair-obscur, pour lesquelles il trouve facilement à sa portée des éléments d’étude. Citons cependant comme une exception cette représentation si vraie et si pathétique de la tempête et des flots en courroux qui donne déjà à son interprétation de La Barque de Pierre une grandiose éloquence.