Hubert Robert, Vue imaginaire de la Grande Galerie
du Louvre en ruines, 1796. Huile sur toile,
115 x 145 cm. Musée du Louvre, Paris.
Dans son excursion dans le midi de l’Italie, Robert avait eu pour compagnon un jeune peintre, Jean-Honoré Fragonard (1732-1806), doué d’une prodigieuse virtuosité, qui devait aborder tous les genres. Nous n’avons pas à nous inquiéter ici de l’auteur de ces scènes galantes, et nous ne parlerons pas davantage des nombreux paysages où il pastiche les Hollandais. Cependant, quand il est en face de la nature, en Provence ou en Italie, Fragonard la copie avec sincérité. Dans quelques-uns de ses tableaux – comme dans le Pâtre jouant de la flûte, avec une paysanne ou La Balançoire – où le décor pittoresque joue un rôle important, il arrive presque à égaler Watteau.
Pierre Henri de Valenciennes (1750-1819) se montrait le défenseur obstiné du paysage académique, non seulement dans ses peintures aussi dépourvues de vérité que de style, mais dans son livre sur les Éléments de perspective pratique, suivis de réflexions et conseils sur le genre du Paysage, publié en l’an VIII de la République.
Vers la fin du XVIIe siècle, en même temps que les essais d’une étude plus sincère de la nature, une réaction s’était produite contre les excès de la virtuosité, et c’était le peintre Jacques Louis David (1748-1825), qui se faisait le promoteur de ce retour aux doctrines de l’art classique. Mais la nature pittoresque est complètement absente de son œuvre. Elle reparaît avec Antoine Gros (1771-1835) dans la peinture d’histoire, et ajoute un poignant intérêt à ce Napoléon sur le champ de bataille d’Eylau, le 9 février 1807, dans lequel, sous le ciel morne et assombri d’un jour d’hiver, la neige recouvre de son linceul les cadavres amoncelés à perte de vue dans la plaine immense. Après Gros, l’intervention du paysage n’est pas moins éloquente chez Théodore Géricault, son élève (1791-1824), et l’on sait quel effet pathétique il a su tirer, dans Le Radeau de la Méduse, de cette mer menaçante et de ce pauvre radeau désemparé où sont entassés pêle-mêle, réunis dans leur commune misère, les malheureux échappés au désastre.
Les doctrines encore indécises, entre lesquelles flottait l’art moderne, s’accusaient plus nettement dans les deux chefs qui devaient bientôt dominer l’École française. C’est bien au-delà de David que Jean Auguste Dominique Ingres (1780-1867) remonte dans le passé pour trouver chez Raphaël et chez les Grecs les modèles de beauté et de style. D’ordinaire, la nature ne joue aucun rôle dans son œuvre et les sujets qu’il traite sont disposés dans des intérieurs. Nous ne croyons pas qu’il ait jamais peint un seul arbre. L’influence très légitime du maître et l’action qu’il a même exercées sur certains paysagistes, s’est pourtant fait sentir dans tous les arts qui relèvent du dessin, en imposant à tous une pareille recherche de la forme et du style.