Il a été conçu comme un libre commentaire de textes, choisis, dans la philosophie dialectique et hors d’elle, en raison des lumières qu’ils jettent sur la pensée dialectique.
Les arguments de Zénon ont été étudiés comme une sorte de test de la pensée dialectique à travers les générations de philosophes qui les ont discutés. Considérés d’abord (et par Bergson encore) comme des sophismes dont une intuition directe devait faire justice, ils sont finalement reconnus comme des paradoxes caractéristiques des rapports du fini et de l’infini en mathématiques (A. Koyré). La légende de Zénon nous montre le passage d’une pensée qui dénonce des scandales logiques au nom d’un idéal d’identité, à une pensée qui au contraire accueille la contradiction comme mouvement de l’être, d’une dialectique bavarde et « ventriloque » à la vraie dialectique.
Le Parménide de Platon, et aussi le Théétète et le Sophiste ont été étudiés comme exemples d’une dialectique qui n’est ni ascendante, ni descendante, et qui se maintient, pour ainsi dire, sur place. Ceci a été l’occasion de discuter les interprétations récentes du platonisme comme dualisme et décadence.
On s’est ensuite attaché à noter le passage de la dialectique chez des auteurs qui n’en font pas profession et qui l’accueillent à leur insu ou même contre leur gré. Ainsi de Montaigne, chez qui elle est surtout la description des paradoxes du soi, et des rares occasions, qui fondent sa sagesse, où nous réussissons à faire « marcher d’une seule pièce » tout notre être. Ainsi de Descartes, qui a donné, avec le principe de l’« ordre des raisons », celui de la philosophie la moins dialectique qui soit, mais qui se trouve amené à envisager un ordre qui ne serait pas nécessairement linéaire, et à suggérer un nexus rationum. Ainsi enfin de Pascal, quand il esquisse une méthode de convergence et une conception de l’« ordre » quasi perceptif, avec digression et retour au centre, c’est-à-dire une théorie dialectique de la vérité.
Le passage de l’antithétique de la Raison Pure de Kant à la dialectique de Hegel, — décrit par M. Gueroult dans son article de 1931, — a enfin donné l’occasion de réexaminer le rapport de la philosophie avec son histoire et avec l’histoire en régime de pensée dialectique.