Novembre 2002
PARIS, C’EST UNE BLONDE… QUI PLAÎT À TOUT LE MONDE… mais non tu ne me plais pas… tais-toi donc… t’es pas un peu folle… LE NEZ RETROUSSÉ, L’AIR MOQUEUR… Tu nous saoules avec ton nez et tes cheveux…
LES YEUX TOU-JOURS RI-EURS !
Jean-Luc se donna quelques secondes pour reprendre ses esprits éparpillés sur le couvre-lit. La voix de la chanteuse sort de mon radio-réveil, pensa-t-il. Il est quatre heures du matin.
Et Jean-Luc se souvint qu’on était dimanche, celui où il fallait y aller, dents serrées, fesses itou, droit dans le mur. Il éteignit le radio-réveil. Sûr que Noah et Farid étaient venus le piéger. Ils avaient choisi une station abonnée à la nostalgie, réglé le volume à fond. S’ils voulaient lui faire oublier sa peur, c’était raté. Jean-Luc avait mal au ventre.
Il se leva, alla à la salle de bains, s’aspergea le visage d’eau froide et fixa dans la glace un gars au crâne rasé et au bouc brun qui avait l’air décalqué par rapport à celui de la veille. Il avala un antispasmodique, s’habilla et descendit à la cuisine.
Noah et Farid étaient là. Devant un café. Avec la tête de circonstance. Ils riaient intérieurement, ça se voyait. Noah et Farid, habillés en noir, leurs cheveux noirs, les yeux noirs de Farid, les yeux bleus de Noah, mais à part ça des siamois, des siamois de Méditerranée. Ils grignotaient des biscottes.
— ÇA, C’EST PARIS ! chanta Farid.
— Cha chai Paris, dit Noah la bouche pleine. T’as bien dormi, mon Jean-Luc ?
Farid avait choisi la confiture de myrtilles, sa préférée. Un en-cas avant de se mettre la ceinture toute la journée pour cause de ramadan.
— Tu prétends toujours que Noah et moi, on n’écoute que du rap américain, alors on a voulu te faire plaisir, dit-il en faisant danser ses mains où brillaient trois bagues d’argent.
Farid ne les enlevait jamais. Pendant les braquages, elles étaient planquées sous ses gants. Elles représentaient beaucoup pour lui. Mais quoi ?
— Yo, man ! Nous ce qu’on aime, c’est faire plaisir, dit Noah.
— Remarque, Mistinguett remixée, c’est l’idée à garder au chaud, ajouta Farid avec un nouveau geste gracieux qui montrait comme il était relax.
Farid était content de ses mains mais il pouvait aussi être content de sa gueule. La belle gueule d’un type de vingt ans qui n’a pas de souci parce que demain n’existe pas. À côté de ces deux-là, Jean-Luc se sentait vieux. Vieux, à vingt-six ans. Il se força à sourire.
Les siamois finirent de manger, Jean-Luc ne put avaler qu’un café et leur trio descendit au garage récupérer les kalachnikovs, les masses et les sacs. Ils montèrent dans le 4 X 4 Mercedes. La porte automatique s’ouvrit sur la BMW garée en retrait de la grille, à son volant Menahem mit le contact immédiatement. Un excellent, le jeune Menahem, il délivrait toujours en temps et en heure. C’est lui qui avait fauché le 4 X 4 et la BM à Asnières. Noah protégeait son frangin. Pas question de le laisser mettre un pied dans le pavillon : il était entendu qu’il ne s’occuperait jamais que de fournir les bagnoles et de faire le chauffeur.
Pendant la traversée de Saint-Denis, Noah alluma la radio. On arriva vite à la situation en Palestine. Des morts dans un attentat suicide. Et Sharon par-ci et Arafat par-là et Ramallah en ruine. Farid changea de station. Farid changeait toujours de station de radio, de chaîne de télé, de sujet de conversation ou d’espace vital quand ça causait sérieux, et Farid n’ouvrait jamais un journal. Même chose pour le rap américain. Farid n’aimait pas le rap français parce que ça obligeait à écouter les paroles, ça obligeait à ouvrir sa tête aux autres. Quant à Noah, tout ce qu’il avait appris en écoutant les rappeurs yankees, c’était ses Yo, man ! qu’il balançait à tout va.
Jean-Luc prit un deuxième antispasmodique ; il fallait qu’il parle pour oublier que ses intestins dansaient la java ; et puis tout ce qui se passait entre les deux oreilles de Farid Younis l’intéressait. Il ne pouvait pas être que ce type qui claquait son fric en sapes et en CD. Farid était fermé comme une huître. Mais une huître à perle. Jean-Luc réfléchit et demanda :
— T’as un problème avec la réalité, Farid ?
— Aucun. Ma réalité c’est la thune.
— Yo ! Moi aussi, dit Noah.
— Tu vois, Jean-Luc, mon meilleur pote est un sale Juif et sa réalité aussi c’est la thune.
— T’es le bougnoule de ma vie, dit Noah en chiffonnant les cheveux de Farid.
— Je comprends pas. Vous discutez jamais de ça.
— Y a déjà assez de gens pour en causer, dit Farid.
— Oh ça oui, dit Noah.
— Si j’étais à votre place, ça me ferait mal au bide. Des frères qui s’entretuent. Ça pourrait être vous deux. Chacun dans un camp. Vous y avez pensé ?
Gros silence des siamois. Un silence tranquille de brave-la-peur que rien ne remue. Le 4 X 4 entrait dans Paris et Noah prenait la direction du boulevard Ney, la BM et Menahem toujours dans son sillage.
— C’est un cauchemar en spirale, continua Jean-Luc. Ces gens décidés à s’étriper jusqu’au dernier sur un bout de terre promise depuis si longtemps qu’on ne sait même plus à qui. On ne voit pas comment ça peut s’arrêter.
— Yo, man ! dit Noah. Cauchemar en spirale. De quoi tu parles ?
— Des morts qui s’empilent. De la tension qui monte. C’est ça dont je parle, Noah.
— C’est vrai que ça nous concerne, dit Farid. Et je vais te dire pourquoi, Jean-Luc.
— Vas-y, je t’écoute.
— Je pense que c’est mauvais pour nos affaires. Ils foutent le boxon sur toute la planète. Parce qu’à cause de ça des terroristes terrorisent et les gens, partout, ont peur. Alors, que ce soit ici ou ailleurs, les gens votent à droite. Et du coup, il y a plus de flics partout, surtout à Paris, et ça devient plus dur pour nous de bosser. Tu vois qu’on pense à ça, mon pote le sale Juif et moi. On a bien compris que tout était lié. Hein, Noah ?
— Bien sûr, man, répondit Noah en mangeant son envie de rigoler.
— Respect, Farid. Le rapport entre des terroristes qui terrorisent et nous qui braquons, c’est intéressant comme résumé.
— Tu voulais savoir si j’avais un problème avec la réalité, tu sais maintenant. La réalité, je la regarde en face.
Jean-Luc jeta une éponge imaginaire sur l’inconscience des siamois. Une inconscience qu’il leur enviait, maintenant il s’en rendait compte. Peut-être que s’il avait été ou juif ou arabe ou les deux, les siamois auraient été vraiment ses potes ; pareille connivence devait aider à avoir moins peur au moment de foncer dans le mur. Mais la seule chose qu’il savait c’est qu’il était circoncis. Avant de l’abandonner, sa mère avait pris soin de lui faire taillader le prépuce. Allez savoir pourquoi.
Adopté par une famille de Normands, il avait grandi dans une petite ville où les mômes allaient au catéchisme sans moufter. Un jour, il avait expliqué aux siamois de Méditerranée qu’il était un peu comme eux mais en moins précis. Le prépuce envolé ne les avait pas plus intéressés que Ramallah effondrée.
Il avait toujours aussi mal au ventre.
Un Paris désert défilait par la vitre. Même les putes d’Europe de l’Est étaient parties se coucher. L’automne ressemblait de plus en plus à l’hiver. L’envie de sillonner la Méditerranée le travaillait chaque jour davantage. Encore quelques coups et il pourrait acheter le vingt-cinq mètres de ses rêves. Une occasion. Une affaire à un million deux cent mille euros. Le deal se ferait via un broker de Palma de Majorque. On affirme qu’on préfère payer cash et le fric file sur un compte en banque des îles Vierges, un paradis fiscal où les bateaux changent d’immatriculation comme les vents de direction.
Il écouterait de temps en temps de la chanson française pour se souvenir de Paris et peut-être un peu de la Normandie. Après tout, c’était grâce à son enfance normande qu’il était devenu navigateur. Jean-Luc se demanda pourquoi Farid ne parlait jamais de l’Algérie, le pays de ses parents. Les Younis habitaient le quartier Stalingrad et Farid n’y allait jamais parce qu’il était fâché avec son vieux. La sœur aussi était fâchée avec le paternel et le frère avec la sœur. Une sacrée salade au fiel.
On approchait du but. Noah dépassait Saint-Philippe-du-Roule. Jean-Luc lut la banderole fixée au fronton. Viens à lui, Jésus est là pour t’écouter. Il aurait mieux valu un truc sexy genre : Jésus se donne à toi. Les gens avaient besoin de ça en ce moment, leur trouillomètre était à zéro. Jean-Luc avait entendu parler d’une étude à la radio. Les Français n’étaient pas les derniers à avoir les jetons. Terrorisme, chômage, menace de guerre, marée noire, virus apocalyptiques, vache folle, maïs mutant, sectes cloneuses. Tout leur foutait les foies. Décidément, il n’y avait qu’en mer qu’on était bien. À condition d’éviter les zones à pirates. Tant que je me parle, j’ai moins les pétoches, se disait Jean-Luc. On arrivait, l’affaire de quelques secondes…
Les Champs-Élysées étaient un poil plus habités que les boulevards des maréchaux. Ici une poignée de fêtards sortait de boîte. Par-ci, par-là, quelques anormaux à qui personne ne demandait jamais pourquoi ils avalaient du trottoir au kilomètre par une aube froide avalaient du trottoir au kilomètre. Il y avait des voitures, peu, elles filaient si vite dans l’avenue offerte jusqu’à la place de la Concorde et au-delà. Un Paris fluide…
On était arrivés.
Farid ajusta ses gants. Ses mains ne tremblaient pas. Aux pieds d’un building moderne, une vitrine bien éclairée avec portail électronique, deux employés derrière les guichets. Et, manque de bol, deux clients. Un gars et une fille avec des sacs à dos.
— Qu’est-ce que ces touristes à la con viennent foutre dans un bureau de change à cinq heures du mat ? articula Jean-Luc en enfilant sa cagoule.
— Chercher un peu de cash, comme nous, dit Farid.
Noah ralentit, tout le monde attacha sa ceinture. Farid passa sa cagoule à Noah avant d’enfiler la sienne. Noah fit monter le 4 X 4 sur le trottoir, accéléra.
— PARIS C’EST UNE BLONDE ! brailla-t-il.
— QUI PLAÎT À TOUT LE MONDE ! reprit Farid en rigolant.
Ils s’amusent comme des petits fous, c’est pas croyable, pensa Jean-Luc. Le 4 X 4 percuta la vitrine. Craquement de banquise. Grosses fissures. Soulagé, Jean-Luc se dit : ça vient, on va l’avoir. Noah fit marche arrière. Accélération. Un trou dans la vitrine, ça venait, ça dégringolait. Et pas de sirène, pas de flic. Rien. Un miracle qui recommençait et recommençait.
Le trio quitta la voiture. Kalachnikovs en bandoulière, Farid et Jean-Luc élargirent le trou à la masse pendant que Noah, grimpé sur le toit du 4 X 4, les couvrait. On entendait la fille crier.
Jean-Luc mit les guichetiers en joue, Farid les clients. La fille geignait, elle avait une dégaine de routarde propre. Farid la frappa au visage. Elle tomba à genoux, le nez en sang. Farid colla le canon contre sa tempe. Tétanisé, son mec semblait prêt à partir dans les vapes, pendant ce temps les guichetiers se tenaient immobiles, les mains en l’air. La force de l’habitude. Jean-Luc sortit les sacs de son blouson, les jeta par-dessus le guichet. Farid dit au plus jeune :
— Tu transfères tout ce que ton coffre a dans la panse. Vite.
Le guichetier fit ce que Farid demandait. Jean-Luc pointait le kalach tantôt vers les touristes, tantôt vers l’autre employé toujours immobile. L’argent coulait, coulait. C’est le coup de ma vie, se dit Jean-Luc. La femme se mit à gémir :
— Please, don’t shoot, please…
— Shut up ! gueula Farid.
Jean-Luc ne se doutait pas que Farid parlait l’anglais. À force d’écouter tout ce rap, finalement, ça venait.
Quand ils déboulèrent du bureau de change, Menahem arrivait avec la BM, portières entrouvertes. Jean-Luc sauta à l’avant, Farid se coula à l’arrière aux côtés de Noah. Menahem accéléra jusqu’au rond-point des Champs-Élysées et tourna dans l’avenue Matignon.
Un nouveau miracle bien propre, se dit Jean-Luc. À vue de nez, il y en avait pour un bon million d’euros. Au minimum. Noah avait commencé à compter les liasses. Farid souriait dans le vide.
Ça valait le coup de se foutre la trouille. Jean-Luc avait toujours senti qu’avec Farid ce serait la baraka. En prison, il avait mis au point une technique pour découvrir l’intérieur des gens. On pensait très fort à la personne qu’on voulait percer à jour. Tellement qu’on finissait en transe. On voyait comme un voyant. Peu de temps après sa sortie de Fleury, Jean-Luc s’était concentré sur Farid. Sur un fond de ciel fissuré orange, un ciel prêt à crever de colère, il avait vu un ange noir. Des ailes immenses qui flottaient en voiles, ça faisait un bruit doux et inquiétant.
Tant que cette puissance resterait concentrée sur le fric, ça irait. Mais gare si elle se retournait contre quelqu’un. Farid avait les tripes pour tuer.
La routarde américaine n’avait pas compris à qui elle avait affaire. Peut-être parce qu’elle était une femme. Tous les hommes savaient d’instinct qu’il fallait respecter Farid pour que le ciel gonflé de colère ne se fende pas en deux et ne coule pas sur le monde.
— Les mecs, grosso modo, on a raflé un million cinq cent mille euros, dit Noah d’une voix blanche. Et même un petit paquet de dollars. Et des yens.
Menahem osa un petit sifflement. Farid remettait les billets dans les sacs sans se presser. Mais pour Jean-Luc, il avait l’air de faire des calculs.
— Tu me déposes passage du Désir, dit Farid à Menahem en fermant un sac. Je rentrerai à Saint-Denis en métro.
— Qu’est-ce que tu fais, Farid ? demanda Jean-Luc.
— Je prends ma part.
— Man, c’est louf de se balader avec toute cette thune ! dit Noah.
Jean-Luc essayait de lire Farid mais celui-ci évitait son regard.
— Pour ta frangine ?
— Non, c’est pas pour Khadidja. C’est pour Vanessa.
— La copine de ta sœur ?
— Exact. Je vais lui donner ma part.
— Pardon ?
— Tu m’as bien entendu.
— Pourquoi donner tout ce fric à cette fille ? Elle est même pas de ta famille.
— Jean-Luc, qui te dit que Vanessa est pas de ma famille ?
La voix n’avait rien de sévère mais les yeux de Farid étaient maintenant plantés dans les siens. Les ailes de l’ange froufroutent, se dit Jean-Luc. Il pesa ses mots :
— C’était juste par curiosité. Et puis, il faut peut-être penser à l’avenir maintenant qu’on a réussi ce coup magnifique…
— Avec mon fric, je fais ce que je veux.
— J’ai jamais dit le contraire. On fait tous ce qu’on veut. Encore heureux avec le mal qu’on se donne. Mais prends quand même le temps de réfléchir.
Menahem arrêta la BM rue du Faubourg-Saint-Denis. Farid sortit sans un mot, s’éloigna sous la pluie en direction du passage du Désir. Jean-Luc laissa Menahem rouler un peu avant de reprendre la conversation, quelques phrases innocentes en amuse-gueule. Il connaissait Noah, savait qu’il finissait toujours par parler, surtout avec Farid hors champ. Pour Noah, Jean-Luc ne s’était pas fatigué à entrer en transe. Ça ne valait pas le coup. Qu’est-ce qu’il aurait pu voir ? L’aide de camp d’un ange, le poisson pilote d’un requin, ou tiens ! une belette copine avec un chacal. Noah avait un côté attachant et on se demandait bien pourquoi.
Jean-Luc et lui s’étaient rencontrés en tôle et Noah avait été content de trouver un gros gabarit qui le protège des cinglés et des pèdes. À la sortie, Noah avait retrouvé Farid, et son amitié pour Jean-Luc s’était rétrécie. Mais Jean-Luc n’en avait pas fait une maladie. Farid et Noah faisaient équipe avec lui pour son pavillon, une bonne planque à ne pas laisser passer. Les siamois habitaient dans une cité où tournaient trop de profiteurs et trop de flics. Pour autant, Jean-Luc se disait que Farid était apprivoisable. À condition de bien le saisir. En relief et en détail.
— Tu comprends, toi, qu’un mec file du fric à une fille qui veut plus de lui ?
— Il prouve qu’il la respecte, répondit Noah.
— Ça fait cher le kilo de respect, je trouve.
Menahem eut un gloussement.
— Yo ! T’es là pour conduire, Menahem. Tu te mêles pas du reste ! dit Noah. (Et, s’adressant à Jean-Luc : ) Farid donne tout. Il montre qu’il est pas un petit comptable de mes deux. Qu’il est classe. C’est ça, cherche pas, man. Et si y veut que Vanessa revienne, c’est pas un plan trop zarbi.
— Pourquoi il a besoin d’amadouer cette fille ? Avec la gueule qu’il a. Toi ou moi je comprendrais, mais Farid ?
— Farid se contente pas de peu.
— Elle est si belle que ça ?
— Je sais pas, man.
— Toi, son meilleur pote, tu sais pas ?
— Non.
— Noah, allez !
— Sur ma vie, sa meuf, je l’ai jamais vue !
— Il a quand même pas peur que tu lui piques !
— Farid, c’est comme Menahem, c’est mon frère, je lui dis tout, il me dit tout mais Vanessa il m’en parle pas. Et j’ai le respect. J’admets. Le jour où Farid parlera de Vanessa, j’écouterai. Mais pour le moment, je contrôle ma gueule.
C’est mon frère. Il y avait des nuages violacés droit devant eux sur un fond plus gris plombé que noir de nuit. Paris se réveillait lentement et on avait l’impression que ça lui faisait mal. La pluie avait déjà cessé mais la trêve n’allait pas durer, ça menaçait. Il faisait froid, les ultimes traces de l’été indien se barraient en couilles. Menahem conduisait coulant, les trottoirs étaient luisants de flotte, les rues vides de gens, vides de flics, ils seraient à Saint-Denis en un rien de temps.
Mon frère.
Jean-Luc admit que mieux comprendre Farid ne lui suffisait pas. En fait, il avait toujours voulu que Farid s’intéresse à lui. Que Farid l’appelle mon frère avec cet accent qui lui venait quelquefois. Cet accent qui était tout ce qui lui restait d’un pays dont il n’avait visiblement rien à foutre. Mon frère. Mon circoncis de Normandie. Yo ! Man !