39.

Bloqué dans la circulation à cause d'un chantier près de Fort Lauderdale, je tape les chiffres du numéro de téléphone portable de M. Rashford Watley, à Montego Bay. Il me répond avec un rire chaleureux, comme si nous étions amis depuis des décennies. J'explique que je suis bien rentré aux États-Unis et que la vie est belle. Il y a quarante-huit heures, après avoir dit au revoir à Nathan et à Rashford, je sortais en douce de Jamaïque, terrifié à l'idée de me faire arrêter par des policiers avant d'embarquer à bord de l'avion pour Porto Rico. Je suis stupéfié de la vitesse à laquelle les événements se déroulent. Je me répète à plusieurs reprises de rester concentré et de ne penser qu'à l'étape suivante.

Rashford ne s'est pas rendu à la prison depuis dimanche. Je lui explique que Nathaniel a échafaudé un plan pour soudoyer du monde là-bas et qu'il se figure que je vais revenir avec une valise de billets. J'ai passé quelques coups de fil : il semble que ce garçon ait de longs antécédents avec la cocaïne ; je n'arrive toujours pas à croire que cet idiot ait voulu en introduire clandestinement quatre kilos ; et je ne m'explique pas le coup du pistolet. Un crétin.

Rashford acquiesce et me dit qu'il a discuté avec le procureur hier, lundi. S'il réussit à user de ses pouvoirs magiques, son client peut s'attendre à passer « autour de » vingt ans dans le système carcéral jamaïcain. Vu les raclées que Nathan a reçues ses deux premières nuits en prison, Rashford pense qu'il a peu de chances de survivre encore longtemps.

Nous nous accordons pour que Rashford se rende à la prison cette après-midi, histoire de voir où en est Nathaniel. Je lui demande de lui transmettre le message : je m'active pour obtenir sa libération, la visite à son domicile s'est déroulée comme prévu, et tout avance comme convenu.

— Comme vous voudrez, me fait Rashford.

Je lui paie ses honoraires, donc il travaille toujours pour moi, en théorie.

J'espère que ce sera notre dernière conversation.

 

Vanessa effectue une fois encore le trajet de trois heures et demie entre Richmond et Roanoke. Elle arrive à 14 heures pile pour son rendez-vous avec Dusty Shiver, l'avocat de Quinn Rucker. Quand elle lui a téléphoné pour programmer ce rendez-vous, elle lui a promis qu'elle avait en sa possession des éléments de preuves essentiels sur l'affaire Rucker. Intrigué, Dusty a bien tenté de la sonder un peu, mais elle a insisté pour le rencontrer dès que possible.

Elle a revêtu une jupe assez courte pour attirer l'attention, et elle tient à la main une élégante mallette en cuir. Dès qu'elle entre dans son bureau, Dusty se lève d'un bond et lui propose un siège. Une secrétaire apporte un café et ils réussissent à échanger quelques propos, une petite conversation bien rôdée, avant que la porte ne soit refermée pour de bon.

— J'irai droit au but, monsieur Shiver, commence Vanessa. Quinn Rucker est mon frère, et je peux prouver qu'il est innocent.

Dusty digère la nouvelle ; l'écho de cette révélation secoue la pièce. Il sait que Quinn a deux frères – Dee Ray et Tall Man – et une sœur, Lucinda. Tous ont pris une part active dans le commerce familial. Maintenant il se rappelle l'existence d'une seconde sœur qui n'a jamais été impliquée dans les trafics familiaux et n'a jamais été mentionnée.

— Quinn est votre frère, répète-t-il.

— Oui. J'ai quitté Washington il y a des années, et j'ai gardé mes distances.

— D'accord. Je vous écoute. Je suis tout oreilles.

Vanessa recroise les jambes. Dusty ne la quitte pas des yeux. Elle commence :

— Une semaine après l'évasion de Quinn du camp de Frostburg, il a failli faire une overdose de cocaïne, à Washington. Nous, la famille, on a compris qu'il allait se tuer, avec cette saleté – Quinn avait toujours été le plus gros consommateur de tous –, alors nous sommes intervenus. Mon frère Dee Ray et moi-même l'avons conduit à un centre de désintoxication, près d'Akron, dans l'Ohio, un endroit sérieux pour les toxicos sérieux. En l'absence d'une ordonnance de la cour ils ne pouvaient pas l'enfermer mais, dans ce centre, ils ont l'habitude. Quinn était là-bas depuis vingt et un jours quand les corps du juge Fawcett et de sa secrétaire ont été découverts, le 7 février.

Vanessa sort une chemise de son attaché-case et la dépose sur le bureau de Dusty.

— Tous les documents sont là. Comme il venait de s'échapper de son centre de détention, il avait été admis sous un faux nom, James Williams. Nous avons versé un dépôt de vingt mille dollars en espèces, et le centre de désintoxication ne nous a pas cherché d'histoires. On ne nous a pas posé beaucoup de questions. Quinn a subi un examen physique complet avec tests sanguins, donc nous avons les preuves ADN qu'il était là-bas au moment des meurtres.

— Depuis combien de temps le savez-vous ?

— Je ne peux pas répondre à toutes vos questions, monsieur Shiver. Il y a beaucoup de secrets, dans notre famille, et pas beaucoup de réponses.

Dusty la dévisage ; elle soutient froidement son regard. Il sait qu'il n'apprendra pas tout et, pour le moment, ce n'est pas si important. Il vient juste de remporter une victoire majeure sur le gouvernement des États-Unis, et il en rit déjà.

— Pourquoi a-t-il avoué ?

— Pourquoi avoue-t-on un crime que l'on n'a pas commis ? Je l'ignore. Quinn est atteint d'un grave syndrome bipolaire, entre autres. Le FBI lui a bourré le crâne pendant dix heures, en puisant dans tous les sales tours à sa disposition. Connaissant Quinn, il a dû jouer avec eux. Il leur a sans doute donné ce qu'ils voulaient dans le seul but qu'ils le laissent tranquille. Il a pu inventer une histoire pour qu'ils tournent en rond le temps de la vérifier. Je n'en sais rien. Souvenez-vous du kidnapping du bébé des Lindbergh, le kidnapping le plus célèbre de l'histoire.

— J'ai dû lire quelque chose à ce sujet, en effet.

— Eh bien, au moins cent cinquante personnes ont avoué ce crime. Cela n'a aucun sens, mais que voulez-vous, Quinn peut devenir dingue, parfois.

Dusty ouvre le dossier. Il contient un rapport pour chaque journée où Quinn était en désintoxication, du 17 janvier au 7 février, quand ont été découvert les corps du juge Fawcett et de Naomi Clary.

— Il est indiqué ici qu'il a quitté le centre dans l'après-midi du 7 février, remarque Dusty tout en lisant.

— C'est exact. Il est parti, ou il s'est enfui, et il s'est rendu à Roanoke.

— Et pourquoi, oserais-je vous demander, est-il allé à Roanoke ?

— Là encore, monsieur Shiver, il y a beaucoup de questions auxquelles je ne peux pas répondre.

— Donc il se pointe à Roanoke le lendemain du jour où les corps ont été retrouvés, il va dans un bar, se saoule, se bagarre et se fait arrêter, les poches pleines de billets. Beaucoup de blancs restent à combler, ici, madame...

— Oui, en effet, et avec le temps ils seront comblés. Pour le moment, ce n'est pas cela l'important, n'est-ce pas ? L'important, c'est que vous ayez une preuve évidente de l'innocence de mon frère. À part cette confession, le gouvernement ne peut retenir aucune preuve contre mon frère, exact ?

— C'est exact. Il n'existe aucune preuve matérielle, juste un comportement suspect. Comme le motif qui l'a poussé à se rendre à Roanoke. Comment est-il arrivé là-bas ? Où a-t-il trouvé tout cet argent ? Où a-t-il acheté les pistolets volés ? Beaucoup de questions, madame, mais je suppose que vous n'avez pas de réponses, n'est-ce pas ?

— En effet.

Dusty croise les mains derrière la nuque et fixe le plafond du regard. Après un long temps de silence, il reprend :

— Je vais devoir enquêter là-dessus, vous savez. Je vais devoir aller dans ce centre de désintoxication, y interroger les uns et les autres, recueillir des dépositions, etc. Les fédéraux ne feront pas marche arrière tant qu'on n'aura pas un dossier épais comme ça avec lequel leur cogner dessus. Il va me falloir vingt-cinq mille dollars de plus.

Sans hésitation, Vanessa lui répond :

— Je vais discuter de ça avec Dee Ray.

— L'audience se tient dans deux semaines, il nous faut donc agir vite. J'aimerais déposer une requête en annulation des charges avant cette audience.

— C'est vous l'avocat.

De nouveau, un silence. Dusty se penche en avant, les deux coudes plantés sur sa table, et observe Vanessa.

— Je connaissais bien le juge Fawcett. Nous n'étions pas amis, non, simplement deux connaissances. Si Quinn ne l'a pas tué, avez-vous une idée de qui l'a fait ?

Elle est déjà en train de secouer la tête. Non.

 

La police a trouvé le pick-up de Nathan sur la zone de l'aviation générale de l'aéroport régional de Roanoke, mardi en fin de matinée. Comme il fallait s'y attendre ses employés, lundi, au bar, se sont inquiétés de ne pas le voir et, en fin d'après-midi, ils ont passé des appels. Ils ont fini par contacter la police, qui a passé l'aéroport au crible. Nathan s'étant vanté de s'être envolé pour Miami à bord d'un jet privé, les recherches n'ont pas été compliquées – du moins pour ce qui concerne son pick-up. Le fait de le retrouver là-bas n'était pas forcément l'indication d'un acte criminel, et la police ne s'est pas pressée de lancer une chasse à l'homme. Un rapide contrôle du nom de son propriétaire a révélé un casier judiciaire, ce qui n'a pas suscité la sympathie. Et il n'y a pas eu non plus de protestations familiales pour les inciter à retrouver le cher disparu.

Une recherche informatique et quelques appels téléphoniques ont révélé que Nathan avait acheté ce pick-up neuf deux mois plus tôt, chez un concessionnaire de Lexington, en Virginie, à une heure au nord de Roanoke, sur l'Interstate 81. Son prix de vente était de quarante et un mille dollars, payés en espèces par Nathan. Une pile impressionnante de billets de cent dollars – généralement, on règle ce genre de somme par chèque.

À l'insu du concessionnaire, de la police, ou de qui que ce soit d'autre, Nathan s'était trouvé un courtier en or.

 

Et j'en avais finalement trouvé un moi aussi.

Après deux allers-retours à la salle des coffres de l'agence de la Palmetto Trust, à Miami, j'ai encore en ma possession, dans le coffre de mon Impala de location, exactement quarante et un de ces précieux lingots, pour une valeur de près de sept cent mille dollars. Il faut que j'en convertisse une partie en argent liquide et, pour ce faire, je suis forcé d'entrer dans le monde louche du courtage de l'or. Un monde où les règles sont flexibles, où tous les personnages ont le regard fuyant et parlent un double langage.

Les deux premiers marchands, pêchés dans l'annuaire, me suspectent d'être je ne sais quel agent et me raccrochent au nez. Le troisième, un gentleman avec un accent, ce qui, je l'ai vite compris, n'a rien d'inhabituel dans ce métier, veut savoir comment je suis entré en possession d'un lingot de dix onces d'or pur.

— C'est une longue histoire, dis-je avant de raccrocher.

Le numéro quatre est un petit poisson qui, officiellement, vend des appareils de seconde main et qui, dans l'arrière-boutique, rachète des bijoux. Le numéro cinq laisse percer un certain intérêt mais, naturellement, il aura besoin de voir ce que je détiens. Je lui explique que je n'ai aucune envie d'entrer dans son magasin, parce que je n'ai pas envie d'être pris en vidéo. Il se tait un instant et je le soupçonne de s'imaginer que je veux lui voler son argent liquide sous la menace d'une arme. Nous décidons finalement de nous retrouver chez un marchand de glaces, dans un bon quartier de la ville. Il portera une casquette de l'équipe des Marlins.

Une demi-heure plus tard, je suis installé devant une coupe de glace à la pistache (deux boules). En face de moi Hassan, un grand Syrien à la barbe grise, savoure à une coupe triple (chocolat, caramel). À moins de dix mètres de là, un autre gentleman au teint mat lit un journal en dégustant un yaourt glacé, sans doute prêt à m'abattre s'il sent de ma part la moindre velléité de leur créer des ennuis.

Hassan et moi essayons d'échanger quelques propos badins, puis je lui glisse une enveloppe toute fripée. À l'intérieur, il y a un lingot. Hassan jette un coup d'œil autour de lui – les seuls clients sont de jeunes mamans, leurs gamins de cinq ans et l'autre Syrien. Il prend le lingot dans sa grosse patte, referme les doigts dessus, le tapote légèrement contre le coin de la table, et marmonne : « Ouah ! » Une exclamation qu'il réussit à prononcer sans une once d'accent.

Je suis sidéré de ce que cette simple interjection peut avoir de réconfortant. Je n'ai jamais pensé que cet or puisse être faux, mais de le voir examiné par un pro, subitement, voilà qui est rassérénant.

— Ça vous plaît, hein ? dis-je stupidement.

— Très joli, répond-il en glissant le lingot dans l'enveloppe.

Je tends la main et la lui reprends.

— Combien en avez-vous ? me demande-t-il.

— Disons cinq lingots, cinquante onces. Hier, l'or a clôturé à mille sept cent trente dollars l'once, donc...

— Je connais le cours de l'or, m'interrompt-il.

— Bien sûr. Vous voulez en acheter cinq lingots ?

Un type comme lui ne répond jamais par oui ou par non. Il multiplie les détours, se couvre et bluffe.

— C'est possible, réplique-t-il, et cela dépend certainement du prix.

— Que pouvez-vous m'en offrir ?

Il y a d'autres acheteurs d'or solvables dans l'annuaire, mais je manque de temps et je suis las de tous ces démarchages.

— Eh bien, cela dépend de plusieurs choses, monsieur Baldwin. Dans une situation comme celle-ci, on doit partir du principe que l'or provient du marché noir. Je ne sais pas où vous vous l'êtes procuré, et je ne veux pas le savoir, mais il y a de fortes chances pour qu'il ait été « soustrait » à son précédent propriétaire.

— Est-ce que ça compte vraiment de savoir où...

— Êtes-vous le propriétaire déclaré de cet or, monsieur Baldwin ? m'interrompt-il sèchement.

— Non.

— Évidemment. C'est pourquoi la décote qui s'applique au marché noir est de vingt pour cent.

Hassan n'a pas besoin de calculateur.

— Je vous en offre mille quatre cents dollars l'once, m'annonce-t-il d'une voix feutrée, mais ferme, en se penchant vers moi.

Sa barbe lui masque partiellement les lèvres, pourtant ces mots-là, prononcés avec cet accent, sont on ne peut plus clairs.

— Pour les cinq lingots ? Pour les cinquante onces ?

— À supposer que les quatre autres soient de la même qualité.

— Ils sont identiques.

— Et vous n'avez aucun certificat, ni justificatif ? Aucun papier, rien, exact, monsieur Baldwin ?

— C'est exact, et je ne veux pas de traces non plus. Une vente simple, de l'or contre des billets, pas de reçu, pas de paperasse, pas de vidéo, rien. Je viens, je repars et je disparais dans la nuit.

Hassan sourit et me tend la main droite. Je la serre : l'affaire est conclue. Nous convenons de nous retrouver à 9 heures le lendemain matin dans un bistro de l'autre côté de la rue, dans un box où nous pourrons faire nos comptes en toute discrétion.

Je quitte le glacier comme si j'avais commis un crime et je me répète ce qui devrait relever de l'évidence : il n'est pas contraire à la loi d'acheter et de vendre de l'or, que ce soit à un cours bradé ou à prix gonflé. Ce n'est tout de même pas du crack, et pas non plus une information d'initié émanant d'un conseil d'administration. Il s'agit d'une transaction parfaitement légitime, si je ne m'abuse ?

À nous observer, Hassan et moi, on aurait juré deux escrocs négociant un marché tordu. Et alors ? À ce stade, cela m'est totalement égal.

 

Je prends des risques, cependant je n'ai pas le choix. Hassan constitue un risque, mais j'ai besoin de cet argent. Sortir cet or du pays imposera aussi de prendre certains risques, toutefois, si je le laissais ici, je pourrais le perdre.

Je consacre les heures suivantes à quelques achats dans des boutiques à prix cassé. J'achète des articles choisis un peu au hasard, comme des coffrets de backgammon, des petites boîtes à outils, des livres et trois ordinateurs portables bas de gamme. J'entrepose mes achats dans une chambre de motel située de plain-pied, au sud de Coral Gables, et je passe le reste de la nuit à bricoler ces accessoires, à emballer le tout, et à boire de la bière fraîche.

Je retire les disques durs et les batteries des ordinateurs portables, et je les remplace par trois de mes briquettes. À l'intérieur de chaque livre je fourre un lingot enveloppé dans du papier journal et une feuille d'aluminium, puis je ligature le tout dans de l'adhésif. Dans les boîtes à outils, je laisse le marteau et les tournevis, mais je retire tout le reste. Quatre lingots entrent gentiment dans chacune d'elles. Les coffrets de backgammon contiennent deux lingots chacun sans du tout paraître suspectes. En me servant d'emballages fournis par FedEx, UPS et DHL, j'emballe soigneusement la marchandise. Les heures passent, et je suis comme perdu dans un autre monde.

J'appelle deux fois Vanessa, et nous résumons le déroulement de nos journées respectives. Elle est de retour à Richmond, où elle fait exactement ce que je fais. Nous sommes tous les deux épuisés, physiquement et mentalement, et nous nous encourageons mutuellement à aller de l'avant. Ce n'est pas le moment de ralentir ou de commettre une négligence.

À minuit, je termine et j'admire mon travail : une dizaine de paquets posés sur la console, prêts à être expédiés avec livraison sous vingt-quatre heures, tous hermétiquement fermés et correctement affranchis. Ils n'ont nullement l'air suspect et contiennent en tout trente-deux lingots d'une valeur totale d'environ cinq cent cinquante mille dollars. Pour les envois internationaux, les formalités sont interminables, et je suis forcé de les remplir en inventant toutes sortes de sornettes. L'expéditeur est M. Reed Baldwin, de Skelter Films, à Miami, et le destinataire est le même personnage, à Sugar Cove Villas, numéro 26, Willoughby Bay, Antigua. Mon plan, c'est d'être là-bas pour les réceptionner. S'ils arrivent à destination sans incident, Vanessa et moi tenterons des envois similaires dans un proche avenir. Si quelque chose tourne mal, nous aurons recours à d'autres méthodes. Un tel moyen d'expédition représente un risque réel : les paquets pourraient être fouillés et confisqués ; l'or pourrait être volé quelque part sur le trajet. Toutefois, je suis convaincu qu'il atteindront leur nouvelle destination. Et je fais l'effort de me rappeler que nous n'expédions pas de substances interdites.

Je suis trop sur les nerfs pour dormir ; à 2 heures du matin, j'allume la lumière, mon ordinateur portable, et j'ouvre ma boîte mail. J'en rédige un à M. Stanley Mumphrey, procureur fédéral, district sud de Virginie, et à M. Victor Westlake, FBI, Washington. C'est un brouillon, ainsi libellé :

 

Chers MM. Mumphrey et Westlake,

 

Je crains d'avoir commis une grave erreur. Quinn Rucker n'a pas tué le juge Raymond Fawcett et Mme Naomi Clary. Après ma sortie de prison, il m'a fallu plusieurs mois avant de le comprendre et d'identifier le vrai tueur. Les aveux de Quinn sont faux, comme le savez sans doute désormais, et vous ne détenez aucune preuve matérielle contre lui. Son avocat, Dusty Shiver, a désormais en sa possession la preuve évidente d'un alibi inattaquable qui disculpera Quinn, alors préparez-vous à devoir abandonner toutes les charges qui pèsent contre lui. Désolé des éventuels désagréments.

Il est impératif que nous nous parlions le plus vite possible. J'ai un plan détaillé sur la manière de procéder, et seule votre totale coopération pourra conduire à l'arrestation et à la condamnation du tueur. Mon plan commence par votre promesse d'une complète immunité pour moi et d'autres personnes, et il s'achève avec le résultat précis que vous désirez. En travaillant ensemble, nous pourrons enfin résoudre cette affaire et rendre justice.

Je suis hors des États-Unis et je n'ai aucun projet d'y retourner, jamais.

Sincèrement,

Malcolm Bannister