from THE SUN IS DYING

The sun is dying

with human murmurs on its lips

A strange thirst comes

when ideas go gray

and love is only just

beginning

* * *

Here they are, unburdened of the dream

men and narrow-hipped women

Phew! they can breathe at last

as they turn to their calculators

open the floodgates of noise

and fill their plates

before getting into

their separate beds

* * *

Who’s talking

about remaking the world?

We merely wish

to support it

avec une brindille

de dignité

au coin des lèvres

* * *

O dieu

si tu es homme

frère de l’homme

renonce à tes mystères

sors de ta grotte

Dis à tes partisans

la vanité de leurs temples

Plonge-les dans la cécité

Lève l’étendard de la révolte

Joins-toi à ceux

qui n’ont que leurs chaînes

pour labourer le malheur

Viens donc

leur embrasser les pieds

* * *

Demain l’incertain

encore plus incertain que l’hier

Il faudra pour se rendre

by putting a sprig

of dignity

in the corner of its mouth

* * *

O god

if you are a man

brother of man

give up your mysteries

come out of your cave

Tell your supporters

how pointless their temples are

Strike them blind

Raise the banner of revolt

Join with those

who have only their chains

to tackle their misery

And come on down

and kiss their feet

* * *

Tomorrow is the uncertain

even more so than yesterday

To visit the sun’s bedside

au chevet du soleil

trouver les fleurs vivantes

les oranges non traitées

le sourire à peu près sincère

se présenter et dire

dans le charabia qui reste :

De quel mal souffres-tu ?

Est-il humain

rien qu’humain ?

* * *

Il ne sait plus dire

je t’aime

avec les vieux mots de l’amour

Se dévêtir comme le tonnerre

en jetant ses habits aux nuées

Caresser

avec les mains imaginatives du laboureur

Prier devant l’autel de l’anarchie

Regarder ce qu’il boit et mange

comme une collision mortelle

Embrasser sa proie

le long de ses blessures

Se coucher aux pieds de sa souveraine

we’ll need to find fresh flowers

unsprayed oranges

a more or less genuine smile

introduce ourselves and say

in the patter that remains:

What seems to be the trouble?

Is it human

strictly human?

* * *

He can no longer say

I love you

with the old words of love

No longer undress like a thunderclap

hurling his clothes into the clouds

Or caress

with a laborer’s knowing hands

Pray at the altar of anarchy

Treat everything he drinks and eats

like a fatal collision

Kiss his prey

the length of its wounds

Or lie down at the feet of his sovereign

comme une panthère apprivoisée

Il ne voit plus que son fantôme

dans les prunelles absentes

de l’ogresse repentie

* * *

Les barbares

nos semblables

Ils ont toujours craché sur les merveilles

pissé sur les livres

coupé les têtes savantes

répandu du sel

sur les ruines de Sodome

pour finir dans une alcôve

au milieu d’almées au pubis rasé

de devineresses naines

et d’eunuques hilares

* * *

L’époque est banale

moins étonnante que le tarif d’une prostituée

Les satrapes s’amusent beaucoup

au jeu de la vérité

like a tame panther

All he can see is his ghost

in the distracted gaze

of the reformed ogress

* * *

Barbarians

our like

always spat on the marvelous

pissed on books

beheaded the wise

sprinkled salt

on the ruins of Sodom

and ended up in fleshpots

amid dancing-girls with shaven vulvas

midget fortune-tellers

and laughing eunuchs

* * *

The times are pedestrian

less surprising than the price of a whore

The satraps have great fun

playing the game of truth

Les déshérités se convertissent en masse

à la religion du Loto

Les amants se séparent

pour un kilo de bananes

Le café n’est ni plus ni moins amer

L’eau reste sur l’estomac

La sécheresse frappe les plus affamés

Les séismes se plaisent à compliquer

la tâche des sauveteurs

La musique se refroidit

Le sexe guide le monde

Seuls les chiens continuent à rêver

tout au long des après-midi et des nuits

* * *

Il y aura une grande attente

avant la dite résurrection

Et le fils de l’homme

rendu à l’illusion

s’écriera : Qu’ai-je ?

Et les anges

peseurs du bien et du mal

s’écrieront : Qu’a-t-il ?

Et le ciel restera muet

comme au temps de la grande attente

The disinherited are converting en masse

to the religion of Lotto

Lovers break up

over a kilo of bananas

The coffee is neither more nor less bitter

Water sticks in the craw

Drought strikes the starving first

Earthquakes love complicating

the work of the rescuers

Music grows cold

Sex rules the world

Only dogs still dream

all afternoon and all night long

* * *

There will be a long wait

before the so-called resurrection

And the son of man

an illusion once more

will cry: What’s the matter with me?

And the angels

who weigh good and evil

will cry: What’s the matter with him?

And heaven will remain silent

as it has done throughout the long wait

* * *

Il y aura ce grand feu de veille

qui éloigne les fauves

et rassemble ceux

qui vont découvrir l’outil

Et le griot aux paroles qui blessent

se lèvera et frappera sept coups

au gong en bois de la mémoire

Et l’homme qui va faire fondre le métal

bondira et crachera au visage du griot

Et la femme aux sept maris reconnus

jettera au feu l’enfant disputé

* * *

Il y aura

au fond d’une grotte ou d’un désert

le survivant attitré des holocaustes

catastrophes nucléaires

épidémies informatiques

D’aucuns imaginent déjà son bonheur

l’affublent de l’ingéniosité de Crusoé

l’incitent à quitter son trou

pour rééditer la genèse

faire sortir de sa cuisse la femelle

* * *

There will be a great watch fire

to keep wild animals away

and muster those

who are to discover the tool

And the griot with the words that wound

will rise and strike

the wooden gong of memory

seven times

And the man who is going to melt the metal

will spring up and spit in the griot’s face

And the woman with seven official husbands

will cast into the fire the contested child

* * *

Deep in a cavern or a desert

there will be

the certified survivor of holocausts

nuclear catastrophes

network viruses

Some already picture his satisfaction

credit him with a Crusoe-like ingenuity

urge him to come out of his den

and repeat Genesis

et concevoir

Mais lui finit par se coucher

se recouvrir de sable

Il décide d’entamer

la grève de la vie

* * *

Personne ne parlera

dans la langue archaïque de l’âme

avec cette musique de cœur qu’on écorche

et ce murmure de larmes fendant la pierre

Avec ces mots taillés dans les racines

et le bec recourbé de l’aigle

Avec le tonnerre qui ricane

le feu qu’on avale et recrache

Avec la panique

et la promesse des sept fléaux

Avec l’étoile qui apparaît

et le délire qui fait sens

Avec la horde en prière

et les tyrans qui meurent

d’un étrange mal de tête

Mais où sont les prophètes d’antan ?

producing a female from his thigh

and multiplying

But he eventually goes to bed

covers himself with sand

and decides to call

a strike on life

* * *

No one will speak

in the ancient language of the soul

with the music of the ravaged heart

and the murmur of tears splitting stone

With words hewn from the roots

and the curved beak of the eagle

With mocking thunder

and fire swallowed and spat out

With the panic

and the promise of the seven plagues

With the star that appears

and madness that makes sense

With praying crowds

and tyrants dying

from a strange headache

Oh where are the prophets of yesteryear?

* * *

Ce siècle qui n’en finit pas

et le suivant qui devra compter

cent unités

pas une de moins

sans que l’on sache

s’il y a vraie vie

paradis quelque part

sans qu’un signe indique

s’il y a commencement ou fin

Mais où sont les apocalypses d’antan ?

* * *

Mais il faudra

une immense écoute

des yeux, de la langue

de la matrice

des sexes incandescents

Que les enfants se réveillent

de leur naïve hibernation

Que les femmes reviennent

de leur double exil

Que les mâles se mettent enfin

en quête de leur identité

* * *

This interminable century

and the next which is bound

to reach a hundred

not a single year less

without our ever learning

if real life exists

a paradise somewhere

without a sign to indicate

if there is a beginning or an end

Oh where are the apocalypses of yesteryear?

* * *

But an immense attentiveness

will be required

from eyes, tongue

womb

and incandescent genitals

Let children awake

from their naïve hibernation

Let women return

from their double exile

Let men begin at last

to seek their identity

Il faudra qu’une soif inconnue

nous tenaille

Il nous faudra une nudité

que même la peau ne pourrait travestir

* * *

Il était une fois

le lys et le basilic

les bons et les méchants

la cité

ses portails et murailles

ses chats aux sept âmes

ses saints déguisés en mendiants

ses rois d’un jour

ses vierges brûlant sur un chandelier

sa boue montant jusqu’aux genoux

ses fêtes où le pardon frappe aux portes

en babouches et djellaba blanche

Il était une fois

une fois seulement

la quiétude

* * *

An unprecedented thirst

must tear at us

We need a nudity

that even skin cannot disguise

* * *

Once there were

lilies and basil

good people and bad people

the city

its gates and walls

its cats with nine lives

its saints disguised as beggars

its kings for a day

its virgins lighting candles

its mud knee-deep

its feast days with clemency knocking at doors

in babouches and a white djellaba

Once

but only once

there was quiet

* * *

L’enfant s’éloigne

tirant avec une ficelle

son petit coffre en bois

Cercueil ou berceau ?

Il ne sait

Il marche

parce qu’on lui a parlé de la mer

comme d’un âge adulte de l’eau

et des îles

comme de villes de cristal

érigées dans un jardin

L’enfant s’éloigne

et sa tête blanchit

à la vitesse de la rumeur

* * *

Maître de la lumière

voici le désert

sa page impitoyable

et loyale

Etends tes doigts sur la flamme

et supporte

Puis écris la vague qui te tourmente

vocalise-la

The child goes off

pulling his little wooden box

on a string

Coffin or cradle?

He doesn’t know

He is walking

because he has been told that the sea

is a kind of grown-up water

and islands are

like crystal cities

built in a garden

The child goes off

and his hair turns white

at the speed of rumor

* * *

Master of light

look at the desert

light’s merciless

and faithful page

Hold you fingers over the flame

and bear the pain

Then write of the force that torments you

voice it

Fais que ta main soit l’artisane

de cette migration amoureuse

dans le silence des braves

Ne te retourne pas

pour contempler ton œuvre

Déjà le vent apocryphe

s’acharne sur la trace

et le désert lave sa planche

l’enduit de glaise

pour l’égaré

ton imprudent sosie

qu’une autre vague tourmente

* * *

La fenêtre est là

A quoi sert de l’ouvrir

tant qu’elle donnera sur une porte close

avec cet incroyable numéro

18611 ?

Il faut apprendre à vivre en enfer

avec les hétaïres sacrées

les imprécateurs bègues

les saints affectés de coïtus interruptus

les fourmis carnivores

Make your hand the artisan

of this amorous migration

in the silence of the brave

Do not look back

to behold your work

Already the apocryphal wind

is hot on the trail

the desert is clearing its slate

and covering it with loam

for the one who is lost

your reckless double

whom another force torments

* * *

The window is there

Why bother opening it

so long as it gives onto a closed door

bearing the incredible number

18611?

You must learn to live in hell

with sacred hetairai

stammering blasphemers

saints afflicted by coitus interruptus

flesh-eating ants

que même Satan n’a pu suborner

Apprendre à jouer des coudes

pour étaler son tapis de prière

là où il y a urgence

de compassion

* * *

La fenêtre cédera un jour

lorsque les hommes n’y pourront rien

et qu’ils n’auront en guise de mains

que des moignons pourris

peu habiles à compter l’argent

Lorsqu’ils perdront la vue

à force d’éviter le regard de leurs semblables

Lorsque la bête les aura rongés

jusqu’à la corde de leur graisse d’orgueil

Lorsque la puanteur de leurs idées

fera fuir même les dieux

qu’ils ont calomniés d’existence

* * *

that even Satan could not corrupt

And learn to jostle your way through

to lay your prayer carpet

where there is an urgent call

for compassion

* * *

The window will yield one day

when men can do nothing to help it

when for hands all they have is

rotten stumps

hardly useful for counting money

When they lose their sight

from avoiding the gaze of their peers

When the beast has chewed

the flab of their pride

down to the bone

When the stench of their ideas

repels even the gods

that they falsely accuse of existing

* * *

Sûr

que cette planète a la nausée

Elle n’en peut plus

de devoir dispenser

le message de rosée

les éblouissements

la rage des beautés

qu’on ne peut enfermer dans un nom

le bruissement de tout fragile

les fragrances d’oasis boréales

Mille riens invisibles

qui font lianes

autour du sexe écartelé

où éclot le nouveau-né

Sûr qu’elle n’a plus envie

d’être lyrique

* * *

Paix

ne serait-ce qu’une minute

pour rendre au matin

ce qui appartient au matin

l’offrande et l’allégeance

le sein dardant ses rayons

Be sure

that this planet is nauseated

It can no longer stomach

having to spread

messages about the dew

dazzling wonders

the cult of beauty

beyond naming

the frail rustle of everything

the scents of boreal oases

The horde of invisible trivialities

encircling like lianas

the outspread sex

whence the newborn springs

Be sure the earth no longer wishes

to wax lyrical

* * *

Peace

if only for a moment

to render unto the morning

those things that are the morning’s

offerings and allegiance

the breast shooting forth its rays

la salive attendrissant la chair

sous la dent

le fabuleux sourire des amants

délicieusement inconscients

Et bénie soit la tourmente !

* * *

Ah il ne s’agit pas d’oublier

Quoi qu’en pensent les poètes

nous avons été heureux quelques fois

Le simple mot de liberté

nous a fait pleurer comme des Madeleines

Des hommes comme nous

nous ont semblé être

des dieux de bonté et de miséricorde

Nous avons baptisé places et rues

en autant de soleils fraternels

Nous avons laissé pousser barbe et cheveux

pour que la douceur soit autant virile

que féminine

Nous avons dansé, chanté, bu

et fait l’amour toute la nuit

sur la paillasse crasseuse

du vieux monde

saliva softening flesh

under the tooth

the marvelous smile of lovers

so delightfully unconscious

And blessed be the tempest!

* * *

Oh it’s not about forgetting

Whatever the poets may think

we were happy now and again

The simple word freedom

made us weep rivers

Men just like us

we took for

gods of goodness and mercy

We named squares and streets

after such fraternal suns

We let our beards and hair grow long

to make gentleness as manly

as feminine

We danced, sang, drank

and made love all night

on the filthy mattress

of the old world

* * *

Nous en avons aboli des murailles

des prisons

autour de nous

en nous

Nous en avons investi des citadelles

déplacé des montagnes

Et nous n’avons pas hésité

à balayer devant notre porte

au point d’être impitoyables

envers nous-mêmes

Nous avons refermé les livres

petits et grands

pour n’apprendre que de l’intuition

de nos blessures

Nous avons ouvert les yeux

sur notre planète si fragile

monté la garde autour de ses poumons

Ah nous en avons appris des choses

de nos défaites

* * *

We have torn down walls

of prisons

around us

and within us

We have occupied citadels

moved mountains

And not shrunk

from sweeping up in front of our doors

to the point of being unforgiving

toward ourselves

We have closed books

short and long

so as to learn solely by intuition

from our injuries

We have opened our eyes

to our so fragile planet

and stood guard over its lungs

Oh yes, we have learnt much

from our defeats

* * *

Avec cependant ce doute

qui donne à l’espoir

l’amertume tonique de son ivresse

Avec cependant cet espoir

qui donne au doute

le lyrisme de sa méthode

Avec des hauts et des bas

des couples qui foutaient le camp

des enfants qui crachaient dans la soupe

Avec des amis qui disparaissaient

et reparaissaient en nœud papillon

Avec des exclusions et contre-exclusions

Avec la bouillie des dogmes

dont il restait toujours quelque chose

Avec la fureur rentrée réveillant les ulcères

Nous avons tenu autant que possible

dans ce radeau de fortune

* * *

Le soleil se meurt

une rumeur d’homme à la bouche

Le chaos viendra balayer la scène

de cette vieille tragédie

racontée mille et une fois

Even with the doubt

that lends hope

the tonic bitterness of its excess

Even with the hope

that lends doubt

the lyricism of its constancy

Even with the ups and downs

the couples who packed it in

the kids who spat in the soup

The friends who disappeared

only to pop up again in bow-ties

The expulsions and counter-expulsions

The hodgepodge of dogmas

that always left something behind

Even with the bottled-up ulcer-arousing anger

We held on as best we could

to our makeshift raft

* * *

The sun is dying

with human murmurs on its lips

Chaos will come and clear the stage

of this old tragedy

told a thousand times

par un idiot

devant une salle vide

Ce sera une autre éternité

d’absence trouble

de duel entre masques

et de manque à écrire

Créteil, 1990

 

by an idiot

in an empty theater

There will be another eternity

of roiled absence

dueling masks

and the failure to write

Créteil, 1990