Le Château D'Eppstein

Dans les années 1830, le comte Elim se perd au cours d’une chasse dans les bois. Il doit passer la nuit dans une forteresse à moitié abandonnée, le Château d’Eppstein , où il reçoit la visite d’un fantôme de femme à robe blanche. Il apprend, au matin, la légende qui veut que Merlin ait prédit que les comtesses d’Eppstein décédées la nuit de Noël ne meurent qu’à moitié…

Trop souvent cantonnée sur l’étagère de la littérature jeunesse avec ses Trois Mousquetaires , le Comte de Monte-Cristo , et la cohorte de souvenirs d’enfance qui l’accompagne, l’œuvre d’ Alexandre Dumas ne se limite pas au roman de Cape et d’Épée, même s’il en fut l’un des maîtres incontesté…

Elle recèle bien d’autres pépites à découvrir. Le Château d’Eppstein en fait tout justement partie, tout comme Pauline , deux romans qui ont en commun l’ atmosphère gothique très réussie qu’ils dégagent et la mise en abyme de leur récit.

Avec Le Château d’Eppstein , dans un premier récit introductif, Alexandre Dumas met en scène la société de la princesse Galitzine à Florence, procédé narratif que l’on retrouve dans Pauline.

En plus de chercher à donner au récit de la véracité, il sert de caution au surnaturel. Racontant l’expérience d’une nuit passée au château d’Eppstein , le comte Élim narre les étranges évènements qui s’y déroulent. L’auditoire est intrigué jusqu’au moment où le comte, terminant son récit, déclare : « [Cette histoire de la chambre rouge], j’en ai fait une espèce de livre fort gros et fort ennuyeux, que je vous apporterai demain ».

Le lecteur devient alors l’un des participants de cette veillée d’antan et se laisse prendre par l’inquiétante et romantique beauté du château et des paysages allemands, tandis que la Révolution française s’approche à grands pas…

Pour Le Château d’Eppstein , Dumas , qui vécut quelque temps près de Francfort, s’inspira de la nature grandiose des forêts du Taunus, pour nous livrer, une fresque gothique où le fantastique le dispute à un romantisme sombre : un château perdu en pleine forêt, un orphelin abandonné dont la mère malheureuse semble l’aider au-delà de la mort, un comte ambitieux et jaloux, un squelette qui tue depuis son tombeau…

Reflet du style gothique qui connait alors ses derniers grands succès, avant d’être éclipsé par le romantisme – et auquel Dumas, décidément touche-à-tout, ne nous avait pas habitués – le récit est brillant, les personnages ciselés par leurs dialogues, la langue magnifique et émouvante de sincérité, le surnaturel y est vengeur, terrible mais juste à la fois et le suspense est garanti jusqu’à la dernière page.