Une Bonne Affaire
- Authors
- Malot, Hector
- Date
- 1870-01-01T00:00:00+00:00
- Size
- 0.28 MB
- Lang
- fr
Extrait:
I
L'hôtel du Bœuf couronne était en révolution; le 17, ou plutôt, pour parler
une langue moins abrégée, le voyageur qui occupait la chambre n 17 venait
d'être rapporte dans un état désespéré. Sorti le matin, gai et dispos en
apparence, on l'avait vu revenir deux heures après, étendu sans connaissance
sur un brancard, et il avait fallu le porter jusqu'à sa chambre: dans
l'escalier, sa tête ballante avait deux fois heurte les marches de pierre sans
qu'il poussât un cri ou fit un mouvement. Comme le brancard s'était arrêté
devant la porte précisément à l'heure du déjeuner de la table d'hôte, cela
avait produit une certaine émotion parmi les convives. On avait quitté la
table pêle-mêle, et pendant que, la serviette a la main, la bouche pleine, on
se pressait aux fenêtres, un voyageur de commerce s'était détaché du groupe
pour aller examiner les mains du moribond, parce que, si les pouces étaient
tournes en dehors, c'était la comédie d'un pauvre diable, tandis que, s'ils
étaient tournes en dedans, c'était l'attaque d'épilepsie d'un honnête homme.
Les pouces n'étant tournes ni en dehors ni en dedans, par cette raison que les
mains n'étaient point fermées, on avait abandonné l'hypothèse de l'épilepsie
pour celle de l'apoplexie, et, discutant confusément, on était revenu à la
table, ou deux Anglaises, après avoir profité du brouhaha pour faire main-
basse sur tous les œufs à la coque, s'occupaient tranquillement a les casser
et a les brouiller dans leurs verres…