Le Démon dans l'Âme
- Authors
- Varlet, Théo
- Publisher
- Bibliothèque numérique romande
- Tags
- romans , pacifisme
- Date
- 2017-10-17T00:00:00+00:00
- Size
- 0.43 MB
- Lang
- fr
Ce livre contient une table des matières dynamique. Le Démon dans l’Ame, c’est l’histoire d’une crise normale et intellectuelle dont sont parallèlement victimes, en sens contraires, deux époux qui s’aiment. La guerre, réduite à son aspect civil, c’est-à-dire avilissant et déchaînant tous les sales instincts, est le « deus ex machina » de la crise. La femme, haute de coeur et d’esprit choit lourdement dans une sorte de folie, l’homme, lui, tend alors vers un égoïsme qu’il s’ignorait. Tous deux ont « le démon dans l’Ame » et ce démon n’est d’ailleurs qu’un masque de I’éternel devenir qui ne veut rien immobile et qui change en même temps le ciel, les continents, les sociétés el les individus.
Biographie de l'auteur
Théo Varlet, alias Déodat Serval, né le 12 mars 1878 à Lille et mort le 6 octobre 1938 à Cassis, est un poète, écrivain de fantastique et de science-fiction et traducteur français du XXe siècle.
Extrait : PREMIÈRE PARTIE
AU SOLEIL DE L’AMOUR
CHAPITRE PREMIER
Un paradis terrestre
Les cigales se taisaient. Le soleil, affleurant le lointain horizon des montagnes bleutées, ruisselait en feu sur la mer, pareille à un lac, dans le cadre des deux promontoires. Sous les pins-parasols, au haut de la pente qui dévale avec ses verdures de cistes, de bruyères et de myrtes jusqu’aux rochers littoraux, les deux amants (époux, d’ailleurs, pour les commodités administratives ; mais ils ignoraient ce détail, ici) allongés sur la toison rousse et feutrée des aiguilles de pin encore chaudes, contemplaient la féerie du couchant.
C’était le dernier soir de leurs vacances merveilleuses.
Depuis six ans, Étienne Serval et sa femme venaient chaque été sur cette île déserte, incroyablement située à trois lieues au large des côtes provençales, retremper leur idylle aux jouvences de la vie primitive ; et le souvenir de ces quinze jours passés dans la lumière de l’Éden irradiait sur eux comme un sacre.
Évasion des tyrannies civilisées ! Loin des toits étouffants, loin des haleines envieuses et mesquines, la vie en liberté, la vie sauvage, allègre d’ignorer les frères-humains et les besoins artificiels… Des hamacs, suspendus aux troncs des pins bercés dans la tiède brise des nuits méditerranéennes ; un feu de « pignes » où faire cuire les produits de la pêche ; au besoin quelques vivres entreposés dans un vieux cabanon sans porte : – et les journées, toutes les journées immenses, depuis l’aube jusqu’à la brune, à vivre en Adam et Ève de ce royaume solitaire, à jouir de toutes les sensations, avec l’ingénuité des sauvages et des enfants, et avec une conscience aiguë de cerveaux civilisés.
Aux yeux de l’amoureux poète, le centre et l’âme du paysage étaient son Ida. Chaque calanque, chaque plage, chaque rocher de l’île les avaient vus tour à tour se livrer aux baisers du soleil et à la fluide caresse de la mer. Debout dans la lumière, la nudité de la jeune femme glorifiait l’outremer du ciel et l’indigo des flots, telle une Anadyomène vivante et amoureuse.