Une journée d'Ivan Denissovitch

Une journée d'Ivan Denissovitch
Authors
Soljénitsyne, Alexandre
Publisher
Bibliothèque de NicoCergy alias Poponne
Tags
littérature russe
Date
0101-01-01T00:00:00+00:00
Size
0.43 MB
Lang
fr
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Choukhov, matricule CH-854, a été condamné à la déportation en camp de travail dans le Nord-Kazakhstan pour « trahison de la patrie » (accusation d'espionnage car il a été fait prisonnier au cours de la Seconde Guerre mondiale par les Allemands. Bien qu'il ait été condamné à dix ans, dont il a déjà purgé huit ans2, Choukhov sait qu'à l'instar des autres zeks, il ne quittera vraisemblablement pas le camp vivant.

Le livre s'ouvre à cinq heures du matin, en plein hiver, sur le

réveil de Choukhov, malade. D'habitude, Choukhov est l'un des premiers

levés, mais ce jour-là, fiévreux, alors qu'il lambine sur son châlit et a

décidé de tenter de se faire porter pâle, il est surpris par un

surveillant et se fait sanctionner par trois jours de cellule sans

interruption de travail : « Trois jours de mitard

en allant au boulot ce n'est que demi-cachot, vous mangez chaud et vous

n'avez pas le temps de penser. Le vrai cachot, c'est avec dispense de

travail3 ».

Il doit commencer par nettoyer le sol du corps de garde, ce qui est

plutôt une planque malgré les insultes des gardes : le local est chauffé

alors qu'à l'extérieur, le thermomètre marque -27,5°. Sa punition

effectuée, il se rend au dispensaire pour y chercher des soins. Le médecin ne peut pas l'exempter car il a déjà dépassé son quota quotidien d'arrêts de travail, et renvoie Choukhov au labeur. Ce dernier appartient au 104e

peloton de travailleurs, composé de 23 hommes et d'un chef à qui les

prisonniers doivent une totale obéissance. Les hommes du camp partagent

leur temps entre travaux forcés et méthodes de survie, subissant une loi

brutale et primaire ne permettant qu'aux plus résistants de s'en

sortir. Choukhov est un dur et un travailleur, ce qui lui a valu le

respect de ses pairs. Les rations de nourriture (kacha)

sont très limitées, et représentent pour les prisonniers leur seule

richesse que certains capitalisent, comme le fait Choukhov. À la fin de

la journée, il arrive à rendre de petits services à César, un

intellectuel capable d'échapper aux travaux manuels en s'étant rendu

utile aux services administratifs. César est aussi privilégié, car il

reçoit des paquets de nourriture de ses proches, qu'il partage avec

Choukhov en remerciement de ses services.

Finalement, la journée de Choukhov a été productive, « presque une

bonne journée », car il a pu survivre. Ce point de vue restrictif

proposé par Soljenitsyne sur la vie au Goulag

arrive à faire évoquer l'horreur banalisée que subissent les

prisonniers, écrasés par des conditions de vie intolérables et pourtant

supportées sans cri, les tortures

que l'on devine sans y être confrontées, les petites rapines qui

permettent à certains, comme Choukhov, de vivoter, entouré de ceux qui

s'écroulent en silence, vaincus par une violence sourde. Soljenitsyne

offre à ses lecteurs, dans un livre court et très accessible, une

peinture de la cruauté du système concentrationnaire du Goulag encore

renforcée par le point de vue subjectif de son héros, bagnard banal,

résolu à accepter la violence du système en ayant restreint son humanité

aux besoins élémentaires de subsistance et ses espoirs à survivre

jusqu'au lendemain.