TOME n. m. est emprunté (v. 1540, Marot) au latin tomus, lui-même emprunté au grec tomos, proprement « morceau, partie coupée, portion » (→ -tomie), employé particulièrement à propos d'un morceau de papyrus ou de parchemin, d'où le sens de « volume, fascicule », appliqué spécialement à un fascicule fait de feuillets, par opposition au volumen roulé (→ volume). Le sens primitif subsiste en espagnol et en italien.
❏  Le mot a été emprunté comme terme d'imprimerie au sens de « volume, livre relié ». Ce sens général avait vieilli au XVIIIe s. (il est qualifié de « rare » par l'Académie en 1740). ◆  Tome désigne surtout l'un des volumes d'un ouvrage qui en comporte plusieurs (1549). ◆  Son emploi métaphorique au sens général de « partie » (1675) est sorti d'usage, de même que la locution figurée être le second tome de qqn (1788) « lui ressembler comme un double ».
❏  Le dérivé TOMER v. tr., d'abord attesté au sens de « multiplier les tomes de » (1801), sens disparu, signifie « diviser un ouvrage par tomes » (1829), « marquer du chiffre qui indique le tome » (1836) et reste d'emploi technique.
■  En revanche, son dérivé TOMAISON n. f. (1829), employé en imprimerie pour « division (d'un ouvrage) par tomes » et « indication du tome auquel appartient chaque feuille » (1835), est plus usuel.
❏ voir ANATOMIE, ATOME, DICHOTOMIE, LATOMIE.
TOMENTEUX, EUSE adj. est un dérivé didactique, en botanique (1801) du latin tomentum « bourre », d'origine inconnue. L'adjectif qualifie un organe de plante (feuille, tige) couvert de poils ou de duvet.
TOMETTE n. f. est un mot d'origine régionale (1821), issu du savoyard tometa « petit fromage mou » (Cf. le dauphinois tumeto), également employé par analogie de forme pour désigner une brique servant au carrelage. Tometa (et tumeto) dérivent de toma, forme régionale de tomme*.
❏  Le mot désigne une brique de carrelage dans les maisons du Dauphiné et de Provence. Son usage s'est répandu au XXe siècle avec la vogue d'un style provençal, et le mot est aujourd'hui connu dans toute la France. On trouve plus rarement la graphie tommette.
❏  De tomette est dérivé TOMETTIER n. m. [plus courant que tommettier] (XXe s.), « fabricant de tomettes ».
? TOMME n. f. est la forme francisée (1581, d'après Bloch et Wartburg) de toma, mot dialectal attesté en ancien provençal (v. 1200) au sens de « fromage frais » et en ancien dauphinois pour désigner un petit fromage. L'origine de ce mot est obscure ; on peut supposer une forme °tōma (Cf. les correspondants calabrais et sicilien tuma) d'origine prélatine, ou °tuma, laquelle se rattacherait au latin tumere « gonfler » (→ tumeur). ◆  On trouve aussi la graphie tome.
❏  Tomme s'emploie pour désigner le caillé fermenté servant, par exemple, à préparer le cantal (1823). C'est le nom courant depuis le XVIIIe s. (1784) de divers fromages fabriqués en Savoie, dans le Dauphiné et en Provence. ◆  Le mot s'emploie régionalement, dans le sud de la France, pour un fromage frais fait à partir de lait caillé. Cet emploi était général (attesté en 1671) et l'usage technique signalé plus haut en est la survivance (Auvergne, Aubrac).
❏ voir TOMETTE.
TOMMY n. m., mot attesté en français dès 1901, qui s'est répandu en 1914, est un emprunt à l'anglais, un prénom familier dérivé de Tom, pour Thomas, le simple soldat des règlements militaires britanniques étant appelé depuis 1815 Thomas Atkins. Ce fut, notamment en 1914-1918, le surnom du soldat britannique, parfois repris ensuite.
TOMO-, -TOME, -TOMIE sont les éléments formants savants tirés du grec -tomos « coupé » et « qui coupe » et de -tomia « ablation, section, incision ». Ceux-ci sont issus du radical de temnein « couper, fendre, trancher », employé pour exprimer l'idée d'abattre des arbres (d'où « ravager un territoire »), dans le vocabulaire du sacrifice, et dans celui de la médecine, à propos d'une incision, etc. Temnein appartient à une racine indoeuropéenne °tem- « couper » qui a des représentants en irlandais dans le présent athématique tamnaid « il coupe », en baltique et en slave, ainsi que dans le latin templum (→ temple).
❏  Tomo-, -tome et -tomie, auxquels s'ajoute -ectomie du grec ektemnein « retrancher en coupant », entrent dans la construction de termes de chirurgie (→ anatomie) et surtout de composés où l'idée de « section » est prise au figuré.
■  TOMOGRAPHIE n. f., technique radiologique produisant une image correspondant à un plan, à l'intérieur d'un organe ; cette image (une tomographie du poumon). Abrév. courante TOMO n. f. La scanographie est une tomographie produite au scanner. Le dérivé TOMOGRAPHIQUE adj. a dû être formé peu après le nom, vers 1930.
■  TOMODENSITOMÈTRE n. m. et TOMODENSITOMÉTRIE n. f. (1976) désignent le scanner et la scanographie.
❏ voir ANATOMIE, ATOME, DICHOTOMIE, LATOMIE, et TOME.
TOM-POUCE n. m. est la traduction (1845) de l'anglais Tom Thumb, de Tom, forme abrégée de Thomas, et de thumb « pouce ». Ce dernier est issu d'un germanique occidental °þmon qui se rattache à la racine indoeuropéenne °tu-bh- « gonfler » (→ tombe, tumeur, tumulus). Tom Thumb, proprement « Thomas le Poucet », est le nom de personnages nains de contes anglais. Au XIXe s., Barnum choisit ce pseudonyme pour Charles Stratton, nain célèbre qu'il exhiba dans le monde entier dans les années 1845-1850.
❏  Le mot a été emprunté avec le sens familier de « nain ». ◆  Par analogie, il se dit d'un petit parapluie à manche court (1924), d'une variété de dahlia nain et d'un très petit dictionnaire.
+ 1 TON n. m. est emprunté (fin XIe s. ; v. 1180 selon T. L. F.) au latin tonus pris dans quelques acceptions spécialisées : « son d'un instrument » en musique et « accent syllabique » en métrique ; un autre sens, « tension », donnant par un emprunt postérieur (à l'anglais) le français tonus (ci-dessous). Le latin tonus est emprunté au grec tonos, mot du groupe de teinein « tendre » qui appartient à une racine indoeuropéenne de même sens °ten-, laquelle a de nombreux représentants en latin (→ tenir). Tonos en grec est à la fois employé concrètement pour désigner des ligaments tendus ou pouvant se tendre, une corde, et abstraitement l'action de tendre et la tension ; de là, diverses acceptions spécialisées en physiologie, musique et métrique. Ces dernières, reprises par le latin, sont passées en français.
❏  Le mot apparaît comme terme de musique, désignant la hauteur du son d'un instrument ; quelques sens étendus ne se sont pas maintenus : « air d'une chanson » (fin XIIe s.), « bruit (de voix) » (XIIe s.) et en général « son » (v. 1380).
■  Parallèlement, dès le XIIe s., le mot désigne dans l'usage courant la hauteur de la voix et, par extension, sa qualité sonore (timbre) ou son intensité, d'où la locution a [à] haut ton « à haute voix » (déb. XIIIe s.) et le sens de « manière de parler » (v. 1200), en tant qu'expression d'un état psychologique.
■  À la Renaissance, alors que la musique se dégage du système du plain-chant médiéval fondé sur les modes*, le mot ton se spécialise ; il désigne (1549) une échelle de sons d'une hauteur déterminée, signalée par le nom de sa tonique (ci-dessous) : par exemple le ton de la majeur, de la mineur (Cf. tonalité, ci-dessous). D'autre part, il se dit (1578) de l'intervalle fondamental qui constitue un degré dans cette échelle de sons. ◆  De la première valeur vient la locution donner le ton « faire entendre la note qui indique la tonalité d'un morceau » (1608), qui succède à bailler le ton (1549), employée ensuite au figuré (1718) d'après une valeur extensive de ton « manière de se comporter dans un groupe social » (1678). ◆  De là viennent l'expression figurée le bon ton « les manières convenues (dans un milieu donné) » (1751), aujourd'hui archaïque ou stylistique, et la locution restée courante de bon ton (1823). ◆  Au XVIIe s., ton a pris aussi le sens étendu de « manière de s'exprimer par écrit » (1688), spécialement à propos du style qui caractérise une œuvre littéraire (1658, Pascal). L'acception générale de « manière de parler » a engendré quelques locutions, comme le prendre sur tel ou tel ton (1667, Molière), d'abord le prendre d'un ton trop haut (1651, Scarron) ou encore changer de ton (1668). Prendre le haut ton « parler avec fierté » (1798) est sorti d'usage.
■  Parallèlement au développement des acceptions musicales, le mot se spécialise aussi en phonétique (1550), désignant l'accent de hauteur placé sur la syllabe d'un mot (dit accent tonique). On appelle aujourd'hui en linguistique langues à ton celles où la hauteur d'une syllabe constitue un trait pertinent (le chinois, de nombreuses langues africaines, mais aussi le suédois).
■  L'emploi de ton dans le domaine visuel apparaît au XVIIe s. ; c'est d'abord un terme de peinture signifiant « degré de force et d'éclat des teintes » (1669 ; 1680, ton de couleur), emploi attesté en latin pour tonus chez Pline, mais provenant en français plutôt de l'influence des acceptions en musique que d'un latinisme ; il est passé dans l'usage courant au milieu du XVIIIe s., notamment avec le sens de « teinte, nuance » et celui d'« effet dominant des couleurs » (1762).
Au XVIIIe s., un nouvel emprunt au grec tonos a donné à ton des sens physiologiques : « élasticité des tissus organiques » (1771), d'où au figuré « énergie », mais ceux-ci sont sortis d'usage sous la concurrence des mots spécifiques tonus, tonicité (ci-dessous) et tension, qui appartiennent à la même famille étymologique.
❏  Ton a fourni un dérivé tardif TONAL, ALE, ALS adj., attesté en 1828 en musique ; il qualifie spécialement le système selon lequel l'harmonie et la mélodie se sont réglées par l'obligation de respecter un ton principal.
■  Cet adjectif a produit TONALEMENT adv. (1872), sorti d'usage.
TONALITÉ n. f. (1821), qui a développé ses divers sens dès le milieu du XIXe s., précisant notamment les valeurs du mot ton en musique (tonalité de sol majeur, etc.).
■  En dérivent aussi par préfixation les termes de musique ATONAL, ALE, ALS adj. (1914) et POLYTONAL, ALE, ALS adj. (1924), d'où ATONALITÉ n. f. et POLYTONALITÉ n. f., pour des concepts rendus nécessaires par le développement des systèmes musicaux renonçant aux échelles tonales traditionnelles. Celles-ci, fixées de manière précise par l'œuvre de J. S. Bach, ont été progressivement mises en question à l'époque postromantique, dès avant la construction du système atonal et sériel des douze sons (dodécaphonisme) au début du XXe s. (Schœnberg, puis Webern).
Ton a aussi produit deux dérivés en phonétique, TONÉTIQUE n. f. (v. 1950) et TONÈME n. m. (1972), peu usités ainsi qu'un terme de physiologie définissant le caractère d'une sensation auditive, TONIE n. f. (v. 1950).
Les composés verbaux de ton sont bien antérieurs.
■  Dès la fin du XIIe s., 1 ENTONNER v. tr. est d'abord employé en musique pour « commencer à chanter (un air) » (v. 1190), puis couramment (XVIe s.), et par figure dans l'expression littéraire, entonner la louange de qqn (1657), déjà au XVIe s. chez Baïf sous la forme entonner l'honneur de qqn « le célébrer ».
■  DÉTONNER v. intr., en musique « sortir du ton » (1611), est passé dans l'usage courant au sens figuré de « ne pas être en harmonie avec (un ensemble) » (1740).
TONIQUE adj. et n., d'abord écrit tonicque (1538), est emprunté au grec tonikos « qui concerne la tension », « qui tend ou peut tendre », adjectif spécialisé en musique et en métrique au sens de « qui concerne le ton, l'intonation » et substantivé dans ces domaines (to tonikon) pour désigner le ton entier, l'intonation. Tonikos est dérivé de tonos.
■  Le mot, avec son orthographe actuelle (1618), a été introduit par les médecins pour qualifier ce qui présente une tension élastique, à propos des muscles. La médecine moderne lui donne le sens de « relatif au tonus des muscles » (Cf. tonus ci-dessous) et l'emploie pour qualifier une contraction musculaire anormale qui raidit les muscles (1694). ◆  Depuis le XVIIIe s. (1762) le mot qualifie ce qui excite, fortifie les forces de l'organisme, au propre et (1832) au figuré. ◆  Cependant, eau tonique (v. 1965) est un calque de l'anglais tonic water « boisson tonique au quinquina », souvent employé par emprunt en français (voir ci-dessous tonic).
■  L'emploi spécialisé de l'adjectif en musique, dans le syntagme note tonique (1722) a vieilli, mais non la substantivation la tonique n. f. (1762) pour désigner la note fondamentale dont la hauteur caractérise la tonalité d'un morceau ; le mot est alors senti comme dérivé de ton (en musique). ◆  La linguistique a repris l'adjectif pour qualifier la voyelle ou la syllabe qui porte le ton (1842, accent tonique), la voyelle ou syllabe précédente étant nommée PROTONIQUE adj. et n. f., formé avec pro- (1876).
■  Tonique a produit TONICITÉ n. f. (1803), employé en physiologie pour désigner la manifestation de l'élasticité des tissus vivants et au sens étendu de « caractère stimulant » (1861).
■  Son radical a servi à former le terme de médecine TONISME n. f. (1836), qui semble archaïque, à la différence du verbe TONIFIER v. tr. (1837) « rendre plus élastique » et « avoir un effet tonique », d'où viennent TONIFIANT, ANTE adj. et n. m. (v. 1860) et TONIFICATION n. f. (v. 1870). Tonifier et tonifiant sont assez usuels.
Tonique entre dans des composés appartenant au domaine de la médecine, comme CARDIOTONIQUE adj. (v. 1920), qui concerne la tonicité musculaire du cœur, CONTRE-TONIQUE adj. (XXe s.), ÉLECTROTONIQUE adj. (av. 1890), ainsi que dans TONICARDIAQUE adj. et n. m. (1905, toni-cardiaque) dont il fournit le premier élément.
HYPERTONIE n. f. (1803) et HYPERTONIQUE adj. sont tirés du composé grec hupertonos, de huper (→ hyper-) et tonos, à la fois à propos d'une tension musculaire supérieure à la normale et d'une pression osmotique supérieure à l'ISOTONIE n. f. (v. 1900 ; grec isotonos, → iso-), c'est-à-dire à la tension osmotique du sérum sanguin, un sérum artificiel de même pression osmotique étant dit ISOTONIQUE adj. (1897). ◆  HYPOTONIE n. f. (1899 ; de hypo-) et HYPOTONIQUE adj. (1904) s'appliquent aux tensions osmotiques inférieures à l'isotomie.
VEINOTONIQUE adj. (attesté 1985 ; de veine) se dit en médecine pour « qui augmente la tonicité des parois veineuses ».
TONIE n. f. vient du sens acoustique de ton, pour désigner le caractère de la sensation auditive qui dépend de la fréquence et de la vibration des sons perçus.
TONUS n. m. est emprunté (1865) par l'intermédiaire de l'anglais au latin tonus. ◆  Le mot a été introduit en français comme terme de physiologie (en rapport avec tonique et tonicité) pour désigner un état de légère tension des muscles au repos. ◆  Il s'est répandu dans l'usage courant (1916) avec le sens de « dynamisme », prenant parallèlement dans l'argot des étudiants le sens spécialisé de « réunion bruyante des internes des hôpitaux » (1935).
■  Il entre dans le terme de physiologie ÉLECTROTONUS n. m. (1890).
TONIC n. m. est emprunté à l'anglais dans tonic water, pour la boisson gazeuse peu sucrée, aromatisée au quinquina, appelée aussi eau tonique (ci-dessus). Ces usages sont le plus souvent remplacés par un nom de marque (notamment Schweppes).
❏ voir ATONE, BARYTON, HYPOTHÉNUSE, INTONATION, MONOTONE, TÉTANOS, TUNER.
L 2 TON, TA, TES adj. poss. sont issus respectivement : pour ton (fin Xe s.) du latin °tum, pour ta (fin Xe s.) du latin °tam, et pour tes (1080 ; fin Xe s., tas et tos) du latin °tos, trois formes populaires. °Tum, °tam et °tos sont les formes atones et contractées du latin classique tuum, tuam, tuos, accusatifs masculin, féminin singulier et pluriel de tuus.
En ancien français, le féminin ta s'élidait en t' (comme ma en m') (→ mamie) avant d'être remplacé par l'emploi du masculin ton dès la fin du XIIe s. (ton amie). Le mot tante* témoigne de cette élision (t'ante, pour ta ante).
❏ voir TIEN.
L TONDRE v. tr. est issu (v. 1130) du bas latin tondĕre (ĕ bref), altération du latin classique tondēre (ē long) aux sens de « couper à ras (la laine, le poil) », « tailler, émonder (l'herbe, les branches) » et, familièrement, « dépouiller ». Tondere pourrait avoir été fait sur une forme en °-de / o- d'une racine indoeuropéenne signifiant « couper » (grec tendein « ronger », moyen irlandais ro-s-teind « il découpe »).
❏  Le verbe est passé en français avec le sens de « raser », le complément désignant soit les cheveux, soit la personne. Il signifiait spécialement « faire (qqn) moine » (v. 1165), sens disparu mais dont la valeur est présente dans tonsure*. ◆  Depuis le XIIe s., tondre signifie « couper le poil ou la laine (d'un animal) » (v. 1170) et, dès cette époque, il a le sens figuré de « dépouiller » (v. 1160 ; v. 1450, « piller »), présent dans la locution métaphorique plus récente (attesté 1611) se laisser tondre la laine sur le dos « supporter avec patience les exactions ». Par extension, avec l'idée d'égaliser, il signifie dès le XIIe s. « couper à ras » (v. 1175, tondre le drap), « faucher de près (le gazon) » (v. 1180). Ultérieurement, il a pris ceux de « brouter » (v. 1600), le sujet désignant un animal, et « élaguer » (1636). ◆  Une valeur technique, « enlever une faible épaisseur au parement de la pierre » (1842), est métaphorique quant au complément.
❏  Les dérivés du verbe se répartissent en deux groupes morphologiques. D'un côté, à la suite de l'ancien participe passé, plusieurs mots ont été formés sur le radical tont- ; de l'autre, des formes en tond- apparaissent dès le XIIIe siècle.
■  TONTURE n. f. (XIIIe s.), archaïque ou très technique, a probablement été gêné par tonsure*.
■  TONTE n. f. (1387) « action de tondre » est toujours usuel.
■  TONTISSE adj. (1690) et n. f. (1759) a remplacé l'ancienne forme tondiche (1290) ou tondice (déb. XVe s.) pour qualifier ce qui provient de la tonture du drap.
■  Les mots formés sur le radical tond- présentent plusieurs cas de chevauchement avec les précédents : c'est le cas pour tondure n. f. (1380), synonyme ancien de tonture. ◆  TONDAISON n. f. (déb. XIVe s. ; v. 1160, tondison) et TONDAILLE n. f. (1500) ont été à peu près éliminés par tonte.
■  TONDEUR, EUSE n. « personne qui tond les animaux » (1380 ; le sens est antérieur sous la forme tuntetier, v. 1170), tondeur s'applique également à l'« ouvrier qui tond le drap » (1229). Il s'est dit aussi d'un barbier (1549). ◆  De là vient le premier emploi de TONDEUSE n. f. (1611) « épouse du barbier », reformé au XIXe s. pour désigner une machine à tondre les draps (1832) puis, couramment, pour tondre l'herbe (1876, tondeuse à gazon).
■  TONDAGE n. m. (1303 ; 1368, tontage), mot technique, se dit à propos des draps et de certains animaux, notamment des chevaux (1845).
❏ voir TOISON, TONSURE.
TONER n. m. est un emprunt (dans les années 1970) à l'anglais toner, dérivé de tone « nuance d'une couleur ».
Le mot anglais existe depuis 1920 en photographie, en 1954 en xérographie. Il désigne, sens emprunté par le français, une poudre faite de résine thermosensible, qui peut se déposer comme une encre sur le papier des imprimantes, photocopieuses, ainsi que la cartouche contenant ce produit. En français spontané, le mot est homonyme de tonnerre.
❏ voir aussi TUNER.
TONG n. f. est un emprunt (v. 1965) à l'anglais thong, mot germanique très ancien (ancien anglais thwong, v. 950), dont le sens est « lanière de cuir », le sens d'emprunt semblant récent, pour une sandale légère formée d'une semelle et d'une bride en V, insérée entre le pouce du pied et les autres doigts.
L'objet porte d'autres noms en divers lieux francophones : claquette en Nouvelle-Calédonie, savate en Polynésie, dans l'océan Indien, slache en Belgique.
TONIQUE → 1 TON
TONITRUANT, ANTE adj. est un emprunt tardif (1866) au latin tonitruans, participe présent de tonitruare « tonner », lequel est le dérivé rare et tardif de tonitrus (→ tonnerre).
❏  Le mot signifie « qui fait un bruit de tonnerre », en parlant d'une voix ou d'une personne.
❏  TONITRUER v. intr. (1869), emprunté au verbe latin ou dérivé de l'adjectif, et son dérivé TONITRUEMENT n. m. (1888), sont plutôt littéraires, ainsi que TONITRUANCE n. f. (1906), rare.
TONKA ou TONCA n. m. (1872, tonca), emprunt à une langue amérindienne de Guyane, désigne le fruit d'un arbre d'Amérique tropicale dont on extrait la coumarine. En apposition, fève tonka.
L TONLIEU n. m., écrit tonliu en 1159, altération de tolneu (1150) « bureau de douane », est issu du bas latin teloneum, emprunt au grec telônion « perception ». Les formes tonleu, tonlieu témoignent de l'influence de lieu, lieue. Employé en ancien et moyen français, le mot est devenu un terme d'histoire féodale pour l'impôt perçu sur les marchandises transportées, puis la taxe payée par les marchands pour vendre dans les foires et sur les marchés.
L + 1 TONNE n. f. est issu (v. 1283) du latin médiéval tunna (VIIIe s., chez Alcuin) « grand tonneau », aussi attesté sous la forme tonna. Tunna a été emprunté à un mot gaulois dont on voit généralement un représentant dans l'ancien irlandais tonn « peau » ; ce sens initial aurait fourni les valeurs hypothétiques de « vase, outre » (pour contenir le vin), d'où « tonneau ». Le français tonne et le catalan tona (XIIe s.) ont seuls hérités du latin tunna. Les autres langues, romanes et germaniques, représentent des emprunts, soit directs (ancien haut allemand tunna ; allemand Tonne), soit obtenus par l'intermédiaire du français (italien tonna ; espagnol tonel).
❏  Le mot est introduit en français pour désigner un gros récipient fait de douves assemblées par des cerceaux, d'où par métonymie le contenu de ce récipient (1690). Ce sens, concurrencé par le dérivé tonneau (ci-dessous), a vieilli. ◆  Par analogie de forme, tonne a développé divers sens techniques, « coquille arrondie » (1676), « bouée en bois ou en fer » (1690), et est passé dans le vocabulaire de l'histoire de l'armure où il est attesté tardivement (1904).
Par l'idée de « grande contenance », il a pris dans le système métrique la valeur usuelle d'« unité de masse valant mille kilogrammes » (1842), développant un emploi spécial en marine (1846), domaine où tonne désignait depuis longtemps une unité de capacité (1681). ◆  Par calque de l'anglais ton, la tonne est, en Grande-Bretagne, l'unité de masse valant 2 240 livres (1 014 kg), et, en Amérique du Nord, l'unité valant 2 000 livres (907 kg). À partir du XIXe s., tonne est employé par exagération à propos d'une énorme quantité de choses (1812). Il désigne aussi diverses unités : celle de calcul du prix dans le transport des marchandises (1833, tonne kilométrique), et plus tard (XXe s.) du poids des véhicules (aussi substantivement : un 7 tonnes pour « camion de 7 tonnes »). ◆  C'est aussi, en parlant de fusées, une unité de poussée égale à 1 000 kg.
■  Dans ce dernier domaine, on emploie surtout le composé KILOTONNE n. f. (1957).
2 TONNE n. f., de même origine, par la même évolution de sens que tonnelle, prend dans plusieurs régions le sens de « tonnelle » (1553 dans le Lyonnais), puis de « cabane (en principe, de forme arrondie) », notamment construite dans les vignes, dans un jardin, comme abri et cabane à outils (surtout dans le Puy-de-Dôme). ◆  Dans le sud-ouest de la France, le même mot sert à désigner une cabane, un abri pour l'affût, dans la chasse au gibier d'eau (chasse à la tonne).
❏  Le mot a produit deux noms courants formés par suffixation diminutive.
■  TONNEAU n. m. (1380), antérieurement tonel (v. 1138) et tonnel (v. 1190), désigne du XIIe s. à nos jours un grand récipient cylindrique en bois destiné aux liquides et en particulier au vin, d'où les connotations de certains emplois figurés. Les synonymes partiels tonne, fût, foudre sont plus techniques. ◆  Il entre dans la locution figurée du même tonneau (1552, d'un autre tonneau) qui signifie péjorativement « du même genre » et dans le tonneau des Danaïdes (1765), allusion à la mythologie où les Danaïdes sont condamnées à tenter d'emplir un récipient sans fond. ◆  Le mot a désigné (déb. XVIIIe s.) le demi-tonneau formant abri dans lequel se tenait un marchand en plein air ou un écrivain public. D'autres emplois, tels ceux de « coffre percé de trous servant à un jeu » (1835) et de « voiture à cheval découverte » (1888), s'expliquent par analogie de forme. ◆  En référence au mouvement du tonneau qui roule, le mot désigne aussi un mouvement d'acrobatie aérienne (1917). Par extension, il en est venu à désigner le même type de mouvement pour un véhicule qui roule latéralement sur lui-même après s'être renversé (1932) et, en natation, un type de virage (1961).
■  Après avoir partagé avec tonne le sens de « mesure de mille kilogrammes » (XVIe s.), il s'en est différencié, se spécialisant pour désigner en marine une unité internationale de volume (XIXe s.).
■  Tonneau a produit son propre diminutif TONNELET n. m. (v. 1250), emprunté par analogie dans le vocabulaire du costume (1388), et par ailleurs TONNELIER n. m. (1255) d'où TONNELLERIE n. f. (1295), nom de l'artisan et du métier concernant non seulement les tonneaux, mais tous les récipients en bois (baquets, etc.).
■  TONNELAGE n. m., autrefois « droit payé au seigneur pour la mise en tonneaux du vin » (1334), se dit depuis le XVIIIe s. de la fabrication des tonneaux (1730) et s'emploie comme terme de commerce.
TONNELLE n. f., diminutif de genre féminin dérivé de tonne, a perdu son sens ancien de « tonneau » (2e moitié du XIVe s.) pour désigner, par analogie de forme (Cf. berceau) et dès le moyen français (1339), une construction légère à sommet arrondi sur laquelle on fait pousser des plantes, puis cet ensemble garni de plantes et les plantes elles-mêmes. Il avait pour synonyme 2 tonne. ◆  Il a pris d'autres sens spécialisés en chasse où il désigne une sorte de filet (v. 1387) et en archéologie pour la partie de l'armure du cheval qui recouvrait la croupe (1899). ◆  Le dérivé TONNELER v. tr. (1564), autrefois « chasser à la tonnelle » (1564), est archaïque et régional au sens figuré de « prendre (qqn) au piège » (fin XVIe s., Brantôme). ◆  Tonnelle, emprunté par l'anglais, a été réemprunté par le français sous la forme tunnel*.
De même, le dérivé direct de tonne désignant un droit sur les fûts (tonnes) de vin, 1 TONNAGE n. m. (1300) est passé en anglais et a fourni au français par emprunt le terme de marine 2 TONNAGE n. m. (1477) qui désigne un droit payé par un navire d'après sa capacité. Comme cette capacité est évaluée en tonnes ou en tonneaux, tonnage, perçu comme un dérivé de tonne, désigne (1755) la capacité de transport d'un navire évaluée par son volume intérieur mesuré en tonneaux. ◆  Depuis le XIXe s. (1872), le mot est employé en termes de statistiques ; il est alors dérivé de tonne.
Tonne a aussi produit le composé préfixé 2 ENTONNER v. tr., d'abord attesté au sens de « verser (un liquide) dans un tonneau » (v. 1215), d'emploi technique aujourd'hui. Le verbe a par ailleurs développé des sens figurés devenus archaïques : s'entonner pour « s'engouffrer », en parlant du vent (fin XIIIe s.) et, avec un complément désignant de la nourriture ou une boisson, « ingurgiter » (XIXe s.) ; il reste en usage au sens de « boire (du vin) ».
■  Le verbe a lui-même produit un dérivé très courant, ENTONNOIR n. m. (XIIIe s.), auparavant entonedoir (fin XIe s.), désignant l'instrument qui sert à verser un liquide dans un récipient de petite ouverture. ◆  Par analogie, le mot désigne divers objets, instruments et choses naturelles en forme de cône renversé : par exemple, familièrement, le gosier (1552, Rabelais), alors avec influence directe du verbe entonner, puis une excavation provoquée par l'explosion d'un obus (1752), une sorte de champignon (1835), une partie d'un four à chaux (1842), etc.
■  Entonner a fourni par ailleurs les termes techniques ENTONNAGE n. m. « action de mettre en tonneau » (1606) et ses équivalents ENTONNEMENT n. m. (1540) et ENTONNAISON n. f. (1864) rares.
❏ voir TUNNEL.
L TONNER v. intr. est issu (v. 1120) du latin tonare « faire éclater le tonnerre », le sujet étant d'abord Jupiter, puis impersonnellement « éclater », le sujet désignant le tonnerre. Tonare se construit aussi avec un nom de personne pour sujet, au sens d'« exprimer violemment sa colère ». Le groupe de ce mot, bien que l'expression de cette notion varie d'une langue à l'autre, a des correspondants dans le védique tányati « il tonne », le persan tundar « tonnerre », le vieil anglais thunor « tonnerre » (anglais thunder). Des formes relevées en védique (stanihi « résonne »), en grec (stenein « gémir »), en lituanien (stenù, stenéti « gémir ») ainsi qu'en russe (stonú, stonát') font penser qu'il y a eu contact (ou identité initiale) des racines indoeuropéennes °stenə- et °tenə-. On ne peut que signaler cette coïncidence, sans en déterminer la nature.
❏  Le mot est d'abord employé au sens initial du latin, à la forme impersonnelle et en construction absolue avec Dieu ou le ciel pour sujet. Par analogie, il signifie « faire éclater un bruit semblable à celui du tonnerre » (v. 1150). ◆  Son emploi avec un nom de personne pour sujet, pour « crier ou parler très fort, avec colère » est plus tardif, d'abord dans une construction transitive rare (v. 1550) et, couramment, en construction intransitive (1622).
❏  Son participe présent TONNANT, ANTE est adjectivé (v. 1155, tonant) avec les mêmes valeurs. Il a qualifié en chimie (1903) un mélange d'hydrogène et d'oxygène, mais a vieilli dans cet emploi.
TONNERRE n. m. (1553), d'abord sous les formes tuneire (1080), toneire (v. 1150) et tonoire (XIIIe s. jusqu'au début du XVIIe s.), est issu du latin tonitrus de même sens (→ tonitruant). Celui-ci est dérivé de tonare mais, comme il n'y a pas de suffixe -tru en latin, ne peut s'expliquer que par la contamination d'une forme °tonitu- (masculin) et d'un °tonə-tro- (neutre). Dans les langues romanes, le nom s'est moins bien répandu que le verbe et l'on a généralement tiré un substantivé du verbe : italien tuono, espagnol trueno, ancien provençal tron, trou (Cf. l'expression troun de l'aïre, encore en concurrence avec toneire).
■  Tonnerre désigne le bruit de la foudre et quelquefois, par métonymie, la foudre elle-même (1440-1475). Il est passé dans le vocabulaire du théâtre pour désigner le dispositif chargé d'imiter le bruit du tonnerre (1743). Par analogie, il se dit depuis le XIIe s. d'un bruit assourdissant (v. 1160). Il a produit la locution figurée coup de tonnerre (1623), à propos d'un événement imprévu, et de tonnerre (1873), d'abord au pluriel (de tous les tonnerres de Dieu, 1790) dont la variante du tonnerre (1877) appartient à l'usage familier, avec la valeur d'un superlatif exprimant l'admiration. Le langage des sports emploie le tonnerre avec une valeur voisine (1927). ◆  L'emploi du mot en interjection (1790) exprime la violence et la menace, notamment en juron (tonnerre de Dieu !, mille tonnerres !, qui semblent venir de l'usage des marins). ◆  Une métonymie technique a donné au mot (1752) le sens de « partie du canon (d'une arme à feu) où se place la charge ».
■  Les dérivés du mot créés en moyen français ne s'étant pas maintenus, le mot n'a qu'un préfixé, PARATONNERRE n. m., attesté pour la première fois en 1773 dans une lettre adressée à B. Franklin par son traducteur, et qui est formé de para-* « contre » et de tonnerre, sur le modèle de parasol, paravent. ◆  Le mot a été créé par B. Franklin, inventeur de ce dispositif de protection contre la foudre. Il s'est employé au figuré dès 1798 (servir de para-tonnerre).
❏ voir DÉTONER, ÉTONNER, TONITRUANT.
TONSURE n. f. est emprunté (1246) au latin tonsura, de tondere (→ tondre), qui signifie proprement « action de tondre », « action de couper les cheveux », et qui a eu en outre le sens de « taille des arbres », « branches coupées ».
❏  Ces derniers sens de tonsura correspondent à des emplois attestés de tonsure en moyen français et aux acceptions employées régionalement (Centre, Poitou) : « branches provenant d'un arbre étêté », « fauchaison » (1468). ◆  En ancien français, la tonsure est un signe de cléricature (1246) et, plus largement le mot s'applique à l'action de raser la tête (1380), valeur sortie d'usage à l'époque classique ; il s'est spécialisé dans le contexte religieux où il désigne (1541) la cérémonie par laquelle l'évêque confère le premier degré de la cléricature à un homme en lui coupant une mèche de cheveux au sommet de la tête. Cette acception est certainement antérieure, comme l'indiquent l'expression (v. 1456) bénéfice à simple tonsure (→ simple) et l'emploi métonymique pour « petit cercle rasé au sommet de la tête des ecclésiastiques » (1398). Par allusion à cette marque, tonsure se dit familièrement (1877, Goncourt) d'une calvitie au sommet du crâne.
❏  Le dérivé TONSURER v. tr. (fin XIVe s.), « donner la tonsure à (un ecclésiastique) », s'est employé au sens général de « raser la barbe, les cheveux » (1611).
■  Le participe passé TONSURÉ, ÉE est adjectivé (v. 1450) et substantivé (1680) à propos d'un ecclésiastique portant la tonsure.
TONTE → TONDRE
⇒ encadré : Le tzigane ou tsigane