TOTEM n. m. est emprunté (1833), d'abord sous la forme totam (1794) à l'anglais totem (1776) ou totam (1791, Long), lui-même emprunté à une langue indienne d'Amérique du Nord de la famille Algonquin, l'ojibwa ototeman, dans lequel otem, possessif, vient du morphème grammatical ote. Le mot, pour les Ojibwas, précise à la fois une relation collective (parenté entre germains, plus généralement clan ou groupe exogame) et individuelle. La forme aoutem relevée en Acadie en 1609 ne s'est pas répandue en France.
❏  Le mot désigne l'animal pris comme l'ancêtre et le protecteur d'un clan, lui donnant son nom, instituant la parenté et faisant l'objet de tabous. Par métonymie, il désigne la représentation de l'animal choisi pour totem (1833). Le mot, analysé chez les sociologues depuis Durkheim (1896-1897) et les psychanalystes (le fameux Totem et Tabou de Freud), est passé (1917) dans l'usage familier avec le sens de « porte-bonheur, fétiche ». ◆  Totem, mot didactique d'anthropologie en français d'Europe et d'Amérique, est plus familier en Afrique, où il s'applique à l'animal protecteur d'un groupe ethnique ou d'un ensemble de personnes portant le même nom, l'animal faisant l'objet d'un interdit alimentaire. Par extension, totem peut se dire d'une nourriture, d'une boisson repoussante.
❏  TOTÉMISME n. m. est l'adaptation (1833) de l'anglais totemism (1870) ou totamism (1791, Long). ◆  Il a produit les dérivés TOTÉMISTE adj. et n. (1907, Larousse) et TOTÉMISTIQUE adj. (l'anglais a de même totemist et totemistic, 1881).
■  TOTÉMIQUE adj. est emprunté (1896), pour servir d'adjectif à totem, à l'anglais totemic, terme créé aux États-Unis par Schoolcraft en 1846, attesté chez Lubbock en 1865. ◆  Emprunté au sens de « propre au totem », totémique qualifie ce qui a les caractères du totem (1904) et, en particulier, le mât portant les emblèmes du totem (1939).
TOTIPOTENT, ENTE adj. est un composé didactique du latin totus « tout entier » (→ tout), d'après omnipotent, et s'emploie en biologie (1899) à propos des cellules embryonnaires non encore différenciées (Cf. cellule souche*).
❏  TOTIPOTENCE n. f. s'applique à la capacité de ces cellules.
1 TOTO, appellatif et prénom a symbolisé (1837) le jeune homme, puis (1875) l'enfant, le jeune élève. ◆  Le mot vient sans doute de Totor, de Victor, plutôt que d'une onomatopée dialectale signifiant « lourdaud, nigaud ».
❏  Cet appellatif entre dans de nombreuses « histoires drôles » (remis à la mode v. 1990) et dans l'exclamation familière vas-y Toto !
2 TOTO n. m. est la modification (p.-ê. d'après 1 toto), de toutou (écrit tous-tous, 1655), mot champenois (Dauzat) répandu par l'argot des soldats de 1914-1918 et attesté oralement à la fin du XIXe s. (en 1889).
❏  Synonyme familier de pou, parfois étendu à d'autres parasites de l'homme. Il a vieilli.
3 TOTO ou SUISSE-TOTO n. (écrit aussi tôtô) se dit en français de Suisse de manière plaisante, moqueuse, pour « Suisse alémanique ». Le sobriquet pourrait venir de l'allemand du « toi, tu » répété dans la conversation. Le suisse-toto désigne aussi le dialecte alémanique de Suisse.
TOTON n. m. est la francisation (1653) d'après la prononciation nasalisée de la dernière syllabe (→ dicton) de totum (1606). Celui-ci est emprunté au latin totum, neutre substantivé de l'adjectif totus « tout entier » (→ tout).
❏  L'emploi du mot pour désigner une espèce de dé traversé par une cheville vient de ce que sur les quatre faces de cet objet étaient inscrites les lettres A, D, R, T, initiales des mots latins ou français : A pour accipe « reçois (un jeton) », D pour da « donne (un jeton) », R pour rien (rien à donner ni à recevoir) et T pour totum « tout », soit tout l'enjeu à prendre. ◆  Par extension (1904), toton désigne une petite toupie que l'on fait tourner en prenant sa tige supérieure entre le pouce et l'index. On relève (1835) la graphie tonton par assimilation.
TOUAREG → TARGUI
TOUBAB, TOUBABESSE n. est la transcription d'un mot arabe du Sahel, répandu en français d'Afrique subsaharienne pour désigner un Européen, un Blanc ; et par extension un Africain, une Africaine ayant adopté un mode de vie européen.
TOUBIB n. m., écrit tabibe dans une relation de voyage, en 1617, réapparaît au XIXe siècle sous diverses graphies : tébib (1849), tbeb (1858), tebeb (1860), tobib (1863), puis toubib (1870) ; c'est un emprunt de l'arabe maghrébin ṭbīb, en arabe classique ṭabīb « médecin, savant habile, versé dans la connaissance d'une chose ».
❏  Le mot est passé en français au milieu du XIXe s. dans le contexte de l'armée coloniale d'Algérie, à propos d'un médecin militaire. Il s'est répandu dans l'usage familier avec le sens de « médecin » (apr. 1914).
TOUCAN n. m. est emprunté (1557) au tupi (langue du Brésil) tucana (guarani tuca) qui signifie peut-être littéralement « bec osseux ». Le mot est passé en portugais sous la forme tucano (1587), en italien, en anglais, en allemand et en espagnol. Ce dernier, tulcan (1740) puis tucan (1884), est trop récent pour avoir pu servir d'intermédiaire entre le tupi et le français ; toucan est probablement un cas d'emprunt direct d'une langue indienne.
❏  Toucan désigne un oiseau grimpeur à très gros bec, vivant en Amérique du Sud. ◆  Le mot s'emploie en français d'Afrique à propos d'un autre oiseau à gros bec, le calao.
L TOUCHER v. tr. dir. et indir. (XIIe s.), d'abord tuchier (1080), également tochier (v. 1155) et touchier en ancien français, est probablement issu d'un latin populaire °toccare, formation onomatopéique (→ toc) conservée dans toutes les langues romanes au détriment du mot latin classique tangere (→ noli me tangere). Un sens très proche de la valeur étymologique correspond au roumain toca « annoncer l'angélus avec une claquette », à l'espagnol tocar « sonner les cloches » (→ tocsin). P. Guiraud propose plutôt de voir dans toucher le dérivé d'un verbe roman °tudicare, doublet de tuditare, de tundere « frapper, battre à coups redoublés » (→ contusion).
❏  Les valeurs principales de toucher sont acquises dès les premiers emplois ; dans La Chanson de Roland (1080), le verbe transitif signifie « entrer en contact avec (une personne ou qqch.) », par l'intermédiaire d'un objet ou avec la main, plus tard avec une autre partie du corps (v. 1121) ; le contact peut impliquer l'agressivité : toucher (qqn, qqch.) signifie (v. 1125) encore à l'époque classique « s'attaquer à ». ◆  Le verbe s'emploie également au sens de « porter la main sur qqch. » (v. 1155), pour prendre, palper, etc., sans que le contact soit violent ; d'où autrefois toucher la main à qqn, en signe d'amitié (1456) ou d'accord (v. 1530). Le contact a un rôle particulier dans la conception traditionnelle du roi thaumaturge : toucher signifie « guérir (en posant la main sur le corps) » (1560). ◆  La relation à l'objet touché peut viser à une intervention (1636, toucher à qqch.), spécialement dans ne pas toucher à la nourriture « ne pas manger » (1564). ◆  Toucher connaît, toujours avec l'idée de mouvement, plusieurs extensions. Il s'emploie à propos d'un instrument de musique (v. 1200, toucher d'un instrument), transitivement et dans la locution figurée toucher la corde sensible (1774 ; au XVIe s., toucher une mauvaise corde, [1579]). ◆  Il prend très tôt une valeur érotique, « caresser » (1280) et « avoir des rapports sexuels » (v. 1145), mais le pronominal se toucher « se masturber » est plus récent (1655). ◆  Le sens de « frapper (qqn) », relevé isolément à la fin du XVe s., réapparaît au XVIIe s. (1611, toucher sur qqn) mais n'est bien établi qu'au XIXe s. ; le verbe s'emploie à partir du XVIe s. avec un sujet de chose pour « entrer en contact avec (qqch.) » (1529, en parlant d'un navire), puis « heurter violemment » (v. 1698) et pour « atteindre avec un projectile » (1547), d'où l'exclamation touché ! (opposé à raté !). ◆  D'autres emplois concrets sont plus récents, au billard (1740, toucher la bille), d'où au figuré toucher sa bille (v. 1970) « bien connaître un domaine, réussir », en escrime (XIXe s.). ◆  Le contact peut aussi être opéré par l'intermédiaire de la parole ; toucher a signifié « mentionner brièvement » (v. 1138) et « dire » (v. 1290), puis « effleurer un sujet » (fin XVe s.), emploi vieilli sauf dans la locution toucher un (deux...) mot(s) de qqch. (à qqn) (fin XIIIe s.) ; il a pris une valeur plus générale, « s'occuper, se mêler de (qqch.) » (1283), et s'emploie couramment depuis le XIXe s. pour « joindre (qqn) », par une lettre ou un coup de téléphone. À l'époque classique il se disait pour « exprimer par l'écriture ou la peinture » (1608). ◆  Par ailleurs le contact s'opère avec l'argent, toucher signifiant « recevoir, percevoir (une somme d'argent, qqch.) » (1311, puis 1573 toucher argent). Le verbe suggère souvent que ce gain est excessif ou illicite. En français d'Afrique, toucher a pris, sans connotation négative, le sens de « gagner de l'argent » (il touche beaucoup, bien) et de « percevoir son salaire » (on a touché avec un mois de retard).
■  Un autre emploi est connu depuis le XIIe siècle, « parvenir jusqu'à (un point) » (v. 1176), aujourd'hui littéraire au propre, par exemple dans toucher au port (v. 1150, d'un bateau), toucher au but (1530), et au figuré (1547) ; il est aussi littéraire à propos d'un point situé dans le temps, au propre (1635) et au figuré dans toucher à sa fin (1673).
Enfin le verbe signifie aussi dans les premiers textes « être contigu à » (v. 1150), comme transitif, toucher qqch., aussi comme transitif indirect dans toucher à qqch. (v. 1175), enfin au pronominal se toucher (1690). Par extension, toucher à équivaut à partir du XVIIe s. à « être très proche de » (1668). Mais dès l'ancien français toucher à s'emploie avec une valeur abstraite, « avoir un rapport avec (qqch.) » (1267), d'où ensuite les sens « avoir pour objet » (1538) et « être très voisin de » (1739 ; cela touche au délire). ◆  Parallèlement, la contiguïté concerne une personne (fin XIIIe s.) ; toucher signifie en particulier « avoir un lien de parenté avec (qqn) » (1567), aujourd'hui dans toucher de près (de loin) (1751), d'abord au pronominal se toucher (1640). ◆  Au sens concret, se toucher s'est spécialisé, d'abord en argot, pour « se masturber » ; au figuré, (il) se touche la nuit (1903, argot de Saint-Cyr) « se faire des illusions ».
❏  Le déverbal TOUCHE n. f., dès l'ancien français (v. 1160), désigne un objet servant à toucher, d'abord un bâtonnet crochu pour lever les jonchets (toche) puis, sorti d'usage, une gaule pour faire avancer les animaux (1380). ◆  De nos jours, le mot sert essentiellement à désigner les leviers d'un clavier (1636, d'un clavecin) et, dans les instruments à cordes, la pièce collée sur le manche et où s'appuient les doigts (1640 ; fin XVe s., touce) ; au XIXe s., il s'est étendu aux éléments d'un clavier de machine (1858). ◆  Avec ce même sémantisme, touche s'emploie en français d'Afrique centrale pour le crayon d'ardoise.
■  Le nom s'est dit du résultat de l'action, signifiant « fait d'être atteint par une maladie » (v. 1250). Il désigne l'essai de l'or et de l'argent (1260), par figure ce qui sert à faire apprécier la qualité de qqch. (1285), essai pratiqué avec la touche (v. 1313), emploi métonymique, puis la pierre de touche (1562), expression aussi prise au figuré (1549). Voir ci-dessous le dérivé touchau. ◆  Touche a désigné l'action de frapper (1280), d'où le sens de « coup (de poing, de couteau) » (v. 1310), sorti d'usage. ◆  Le mot s'emploie dans divers domaines avec la valeur d'« action de toucher » et concrètement de « résultat de l'action » : en musique « note d'un clavier » (v. 1310) ; en escrime (1555) ; plus tard au billard (1845) et à la pêche (déb. XXe s.) pour « action de toucher », « coup par lequel on touche ». En peinture (1622), c'est l'élément coloré posé par la brosse, le pinceau, sens repris au figuré en littérature (av. 1690), comparable à couleur locale. ◆  Il désigne en particulier la manière de toucher pour améliorer qqch. (1690).
■  Sans doute par le biais des ateliers de peintres, le mot se dit familièrement (1872) de l'aspect d'ensemble que présente une personne ou une chose (avoir une drôle de touche). ◆  Faire une touche « rencontrer une personne qui répond à une invite galante » (1925) est peut-être lié à une valeur ancienne de touche, « émotion » (fin XVIIe s.) et, en tout cas, à des emplois vivants de toucher (ci-dessus).
Depuis la fin du XIXe s. (1889), le mot est employé dans les jeux de ballon pour désigner la partie du terrain à l'extérieur des limites latérales du champ de jeu : ce sens est un emprunt à l'anglais touch, d'abord employé à propos du joueur qui fait toucher le sol au ballon au-delà des lignes (d'où mettre en touche). Une locution au départ technique, dégager, botter en touche, a été reprise au figuré pour « se dégager habilement en déplaçant l'objet du débat ».
Le diminutif TOUCHETTE n. f., autrefois « pierre de touche » (v. 1504), désigne (1844) chaque petite pièce incrustée dans le manche d'un instrument à cordes et, familièrement, un choc sans gravité entre deux automobiles (v. 1970).
■  TOUCHER n. m., emploi substantivé du verbe (1226, toukier), désigne le sens du tact puis l'action (v. 1150) et la manière (1636) de toucher, enfin la qualité d'un corps au toucher (1762). Le mot s'est spécialisé en musique (1690) et en médecine (1872, toucher vaginal).
■  TOUCHAU n. m. (1721 ; 1399, toucheau « or essayé avec la touche ») est un terme technique au sens de « pierre de touche », restreint dans le travail du métal en bijouterie. ◆  Le nom d'agent TOUCHEUR, EUSE n. (1611) a désigné une personne conduisant les bestiaux en les aiguillonnant. Le mot a un sens technique en imprimerie (1836).
Toucher a aussi donné des adjectifs avec TOUCHABLE adj. (déb. XIVe s.) et son antonyme INTOUCHABLE adj. (1569), qui s'emploie spécialement comme nom pour désigner une personne qu'on ne peut toucher sans se souiller, notamment des hors-castes ou parias des Indes (1923).
■  Le participe présent adjectivé TOUCHANT, ANTE, d'abord appliqué à des choses contiguës (1611), qualifie ce qui fait une forte impression (1639), puis ce qui séduit avant de se restreindre à « attendrissant » (1660 ; 1679, le touchant). ◆  Touchant prép., au sens de « au sujet de » (v. 1250), a vieilli.
Quelques composés ont été formés entre le XIXe et le XXe s. avec l'élément verbal touche comme premier élément : TOUCHE-À-TOUT n. m. (1836) « personne, notamment enfant qui touche à tout », TOUCHE-PIPI n. m. (1935) d'usage très familier pour « attouchements sexuels » et à touche-touche loc. adv. (1920) « en se touchant, en se suivant de très près », familier.
Le préfixé ATTOUCHER v. tr. s'est employé du XIIe jusqu'au XIXe s. au sens d'« être près de (qqch.) » (1121, atuchier a). ◆  Il a aussi signifié (1536) « être uni à (qqn) par la parenté », acception sortie d'usage dès la fin du XVIIe siècle. ◆  Rare au sens général de « toucher (qqn) légèrement » (1121), il s'emploie encore avec une valeur érotique (v. 1170).
■  Son dérivé ATTOUCHEMENT n. m. est vieilli pour « action de toucher » (apr. 1170) dans l'emploi général, spécialisé pour parler d'une caresse, notamment sexuelle (XIIIe s.), d'où par euphémisme le sens de « masturbation » (1845), en médecine, etc.
■  ATTOUCHEUR, EUSE adj., attesté chez les Goncourt (1869), est rare, appliqué à ce qui effleure. ◆  ATTOUCHEUSE n. f. s'est employé (apr. 1850) pour « prostituée ».
❏ voir RETOUCHER, SAINTE-NITOUCHE, TOCCATA, TOCSIN, TOUQUER.
G TOUER v. tr. est issu (XIIIe s.) du francique °togôn « tirer », reconstitué d'après l'ancien norrois toga, l'ancien haut allemand zogôn, le moyen haut allemand zogen et représenté par l'anglais to tow, l'allemand tauen.
❏  Dès ses premières attestations (à Oléron), le verbe est spécialisé comme terme de marine au sens de « remorquer (un navire) », d'abord au moyen d'un bateau à rames, aujourd'hui à l'aide d'une chaîne mouillée au fond de l'eau (1872). ◆  Touer signifie aussi « faire avancer (un navire) » en tirant, au moyen du cabestan, un câble amarré à un point fixe (fin XVIe s.), aussi au pronominal se touer (1680).
❏  Le mot a donné plusieurs dérivés techniques ayant trait à cette opération. TOUAGE n. m. est d'abord relevé sous la forme thouage (XIIIe s. à Oléron) ; en tant que nom d'action, il a suivi l'évolution du verbe et eu le sens de « prix payé par un bateau toué » (XVIe s.). ◆  Ce mot a été repris au Canada (zone de touage) comme équivalent de l'anglais tow away zone, pour « zone où les voitures stationnées illégalement sont remorquées à la fourrière ». On recommande dans ce sens zone de remorquage.
■  Le déverbal TOUE n. f. (fin XIVe s.) a désigné un bateau plat à une voile servant de bac, le câble servant à touer (1465) et aussi l'action de touer (1680) ; il s'est dit également d'une barque à fond plat faisant la navette entre la terre et un navire au mouillage (1845).
■  TOUÉE n. f. désigne (1415) le câble servant à touer, la longueur de chaîne filée en mouillant (1798) et la longueur de remorque servant au halage (1876).
■  TOUEUR, EUSE n. et adj. (1639) a d'abord signifié « ancre de touée », et a cessé de s'employer adjectivement (1771). Le mot sert aujourd'hui à désigner le remorqueur qui avance par touage (1855).
G TOUFFE n. f. (XIII e s.), d'abord tofe (v. 1180) d'origine germanique, est pris à un mot de même famille que l'allemand Zopf, le francique °top (→ toupet). Il a probablement été emprunté à un dialecte allemand où la transformation de p en pf a fait des progrès plus sensibles et plus rapides que celle de t en z. C'est le cas pour l'ancien alémanique °topf qui a pu fournir le mot au français par l'intermédiaire des parlers de l'Est. À titre hypothétique, on a évoqué un croisement avec une variante du bas latin tufa « huppe ».
❏  Le mot a d'abord été employé avec le sens de « gros flocon de neige », sorti d'usage. ◆  Isolément au XIIIe s. et repris au XVIe s. (1564), il désigne un petit bosquet d'arbres serrés, emploi aujourd'hui senti comme métaphore littéraire (touffe d'arbres). ◆  De nos jours, il s'applique surtout à un assemblage naturel de plantes (herbes, fleurs) rapprochées par la base (1393). Par analogie, il se dit d'un ensemble de poils, de brins rassemblés à la base (1539). Spécialement, d'abord en argot, « toison pubienne » (mil. XXe s.), d'où ras la touffe, qui se dit d'un vêtement féminin très court.
❏  En a été dérivé l'adjectif TOUFFU, UE (1549), précédé par tuffu (1438, sens obscur), qualifiant ce qui est en touffe épaisse, ce qui est formé d'éléments rapprochés (1560, cheveux touffus) et, par extension, un endroit garni de touffes d'arbres (1678). ◆  Il a développé au XIXe s. la valeur figurée d'« encombré, chargé à l'excès » (1843).
■  L'autre dérivé de touffe, TOUFFER v. intr. « se mettre en touffe » (1823), est à peu près inusité.
TOUFFEUR → ÉTOUFFER
L TOUILLER v. tr., dont la forme actuelle (1421) a été précédée par tooillier (v. 1175), est issu du latin tudiculare « piler, broyer, triturer ». Celui-ci est dérivé de tudicula, « machine pour broyer les olives » et « écumoire, cuillère à pot », lequel est dérivé par suffixation diminutive de tudes « marteau », lui-même de tundere (→ contusion).
❏  Ce mot usité dans les parlers septentrionaux a été usuel en français jusqu'au XVIIe s. aux sens de « traîner (qqn) dans la boue » (v. 1180), « salir » (v. 1390, toillier). ◆  Il s'emploie toujours familièrement pour « mélanger » (1335), spécialement « remuer » (une pâte, etc.), et en termes de jeu (1599, touiller les cartes). ◆  Il s'est spécialisé dans le vocabulaire technique au sens de « brasser (pour épurer) » (1842).
❏  Les nombreux dérivés, liés à l'idée de « mêler » ou de « salir », ont presque tous disparu, comme le déverbal TOUILLE n. f., d'abord « action de jeter dans la boue » (v. 1200, touelle), qui a désigné (1877) un instrument pour touiller.
■  Le nom d'action TOUILLAGE n. m., familier, est attesté fin XVIIIe s. (1793).
■  TOUILLETTE n. f. désigne (années 1990) la petite spatule servant à remuer les boissons chaudes d'un distributeur automatique. On dit aussi TOUILLEUSE n. f.
■  Touiller a aussi servi à former des composés comme tartouiller (→ tarte) et ratatouille*.
TOUJOURS → JOUR
TOULADI n. m. semble être un emprunt à une langue amérindienne. C'est le nom d'un poisson salmonidé des lacs profonds d'Amérique du Nord, à nageoire caudale fourchue, au corps marqué de taches pâles, appelé couramment truite grise.
TOULOUCOUNA n. m., emprunt à une langue africaine, est en français d'Afrique le nom d'un arbre (Méliacées), aussi appelé carapa, dont les graines oléagineuses fournissent une huile médicinale, et aussi celui de cette huile.
TOULOUPE n. f., sous la forme touloppe en 1768, est emprunté au russe, où le mot désigne une peau de mouton et la veste de cette matière, portée par les paysans russes, la laine en dedans. Le mot fait surtout allusion à la Russie du XIXe siècle.
TOUNDRA n. f. est emprunté (1830) au russe túndra ou toundra « partie sud de l'Arctique », « étendue sans arbres au climat rude, à la surface gelée en permanence et avec peu de végétation », attesté pour la première fois en 1631. Le mot russe est lui-même emprunté, comme nom de lieu, au finnois tunturi « exhaussement, crête », d'où « montagne nue » puis « étendue sans végétation ». Il s'agit donc d'une racine finno-ougrienne.
❏  Toundra est passé en français avec la valeur du mot russe.
⇒ encadré : Le tzigane ou tsigane