TOUTOU n. m. apparaît au XVIIe s. (1640), présent chez Cyrano de Bergerac et Scarron ; c'est un mot de formation enfantine dont la nature n'est pas expliquée (le qualifier d'onomatopée n'apporte guère d'information).
❏  Le mot désigne un chien (spécialement un bon chien), dans l'usage enfantin ou le langage affectif. ◆  Il a été employé (1776) pour désigner le favori de qqn, avec un complément introduit par de. Le mot s'emploie aussi pour parler d'une personne trop docile (av. 1778), en particulier dans des locutions comparatives du type obéir, filer comme un toutou. Il a donné lieu à la locution peau de toutou, qui correspond sur le mode ironique à peau de vache, avec un sémantisme péjoratif de « peu de valeur ».
TOUT-VENANT → VENIR
L TOUX n. f., variante graphique (1414) de tous (1258), auparavant tos (fin XIe s.), est issu du latin tussis, mot sans correspondant dans le domaine indoeuropéen. On peut néanmoins le rapprocher, avec une géminée expressive -ss-, des mots baltes (letton) tust et tusnat « respirer bruyamment ».
❏  Le mot désigne une expiration forcée, due par exemple à une irritation des muqueuses.
❏  TOUSSER v. intr. (fin XIIe s.) a remplacé, par changement de conjugaison, toussir (fin XIIe s. ; v. 1175, tossir), issu du dérivé latin tussire qui a donné l'italien tossire. Toussir s'emploie encore à l'époque classique. ◆  Le verbe signifie « avoir un accès de toux » et (1669) « simuler la toux pour avertir qqn ». Par analogie, il s'emploie (1934) en parlant d'un moteur qui a des ratés.
■  Il a produit plusieurs dérivés : TOUSSERIE n. f. (1404), vieux mot désignant une toux fatigante, TOUSSEUR, EUSE n. et adj. (1427), TOUSSANT, ANTE adj. (1660, comme nom masculin), encore en usage, mais rares.
■  TOUSSAILLER v. intr. (1821) « tousser faiblement et souvent » est moins courant que TOUSSOTER v. intr. (1606, rare av. le XIXe s.). ◆  Ce dernier a donné TOUSSOTEMENT n. m. (1845).
❏ voir TUSSILAGE.
TOWNSHIP n. m. est un emprunt (diffusé par les médias, v. 1980) à l'anglais township, dans le sens qu'il avait pris en Afrique du Sud (1934). Le mot était attesté en Europe depuis l'ancien anglais (IXe-XIIe s.), désignant une communauté, paroisse, château, puis un district, une division administrative et, hors d'Europe, un village de pionniers (en Australie, 1802). Le composé est formé de town « ville » et de l'élément final -ship.
❏  Le mot, en français, ne s'emploie que dans le sens qu'il a pris en Afrique du Sud, désignant un district, une agglomération assignée à la population noire au temps de l'apartheid.
TOXIQUE n. m. et adj., réfection savante (1213) de formes altérées toxiche (v. 1155) et toscique (v. 1165), est emprunté au latin toxicum « poison à l'usage des flèches », dit de tout poison en général et en particulier du laudanum. Le mot latin est emprunté au grec toxikon (sous-entendu pharmakon) « (poison) dont on imprègne une flèche », substantivation au neutre de l'adjectif toxikos qualifiant les flèches, dérivé de toxon « arc ». Il est vraisemblable que toxon (qui, dès Homère, concurrence bios, le vieux nom indoeuropéen) soit un emprunt à l'iranien, peut-être aux Scythes, les Iraniens et les Scythes étant réputés pour leur pratique de l'arc. On peut évoquer les anthroponymes scythes Toxaris, Taxakis et le persan littéraire takhš « arc ».
❏  Le mot, emprunté au sens général de « poison », est rare avant le XVIe siècle. Quant à son emploi adjectivé au sens de « vénéneux » (1584), il est peu attesté avant 1845, puis devient usuel.
❏  Les dérivés et composés du mot sont postérieurs à 1800.
■  TOXICOLOGIE n. f. (1803) « étude des substances toxiques », nom d'une branche importante de la pharmacologie, a pour dérivés TOXICOLOGIQUE adj. (1832) et TOXICOLOGUE n. (1842). TOXICOMANE adj. et n. (1913) désigne toute personne qui use régulièrement de stupéfiants, de drogues (abrév. fam. TOXICO n., att. 1936) ; TOXICOMANIE n. f. (fin XIXe s.) semble un peu antérieur à toxicomane. ◆  Cette série est formée avec l'élément TOXICO- pris au latin toxicum. Cet élément est très productif dans la seconde moitié du XIXe et au XXe siècle. TOXICODERMIE n. f. a succédé à TOXIDERMIE n. f. (1907) pour désigner une affection cutanée, une dermatose provoquée par des médicaments. ◆  TOXICODÉPENDANCE n. f. (attesté 1970) se dit de l'état d'une personne qui ne peut plus s'abstenir d'une drogue ; on emploie aussi TOXICODÉPENDANT, ANTE adj. et n. (Cf. addict, addiction).
■  TOXICITÉ n. f., nom didactique exprimant le caractère toxique d'une substance, est attesté depuis 1865 ; il a servi à produire l'antonyme ATOXICITÉ n. f. (XXe s.) qui répond à l'adjectif ATOXIQUE (1838).
■  Par le même procédé de préfixation, toxique a produit ANATOXIQUE adj. (av. 1923) « qui a cessé d'être toxique », ANTITOXIQUE (1853) et SYNTOXIQUE (1973) « qui permet à l'organisme de s'accommoder à un toxique ». ÉCOTOXIQUE adj. et ÉCOTOXICITÉ n. f. (1989) concernent ce qui est toxique pour l'environnement.
L'idée de réduire ou supprimer les effets toxiques a suscité des préfixés en dé-. DÉTOXIQUER v. tr. (1907) est formé à partir de intoxiquer, pour « supprimer les effets toxiques de (une substance) » (détoxiquer un venin). De là DÉTOXICATION n. f. (1945) qui a aussi le sens de « élimination des toxines par un organisme ». ◆  DÉTOXIFIER v. tr. (1976) correspond sémantiquement à détoxication.
Par substitution de suffixe, toxique a servi à faire TOXINE n. f. (1894), nom qui fut d'abord donné par Brieger en 1887 à des ptomaïnes toxiques, la TÉTANOTOXINE et la THYPHOTOXINE, et à la suite duquel on a créé de très nombreux mots composés d'usage didactique. Le sens s'est étendu à toute substance toxique élaborée par un organisme vivant, notamment par un micro-organisme pathogène, pouvant agir comme antigène.
■  Sur toxine est formé ANTITOXINE n. f. (1892) « substance qui neutralise l'effet d'une toxine », ANATOXINE n. f. (1923) « vaccin antitoxique, fait de toxines bactériennes rendues inoffensives ».
L'élément final -toxine a servi à former plusieurs autres composés, comme AUTOTOXINE n. f., EXOTOXINE et ENDOTOXINE n. f. (1906) selon que les toxines d'une bactérie ne sont pas ou sont excrétées ; PHYTOTOXINE et ZOOTOXINE n. f., toxine d'origine végétale ou animale ; NEUROTOXINE n. f. (1907) « toxine qui agit sur les tissus nerveux » ; ENTÉROTOXINE n. f. (mil. XXe s.), qui affecte l'intestin.
Soit par utilisation de l'initiale de toxique, soit, pour l'élément toxo-, par emprunt à l'anglais, un certain nombre de composés sont formés sur tox-, toxi- et toxo-. ◆  TOXÉMIE n. f. (1835 ; de -émie) s'applique à l'accumulation dans le sang de substances toxiques, endogènes ou exogènes. Variante graphique toxhémie (1903).
■  On parle de TOXICOSE n. f. (1903) en cas d'intoxication endogène, par exemple lorsque les processus de défense font défaut, comme dans la toxicose des nourrissons. ◆  TOXI-INFECTION n. f. (1903) désigne l'infection compliquée d'intoxication produite par les toxines.
■  TOXOCAROSE n. f. est une adaptation de l'anglais toxocariosis (1930), dérivé du latin moderne toxecara (C. W. Stiles, 1905), tiré du grec toxicon et de kara « tête ». Le mot désigne la maladie transmise par un nématode (ver) parasite, le toxocara, présent dans les excréments d'animaux domestiques, chiens et chats, et atteignant surtout les enfants.
On a eu recours à toxo- (pour toxique) et à l'élément -oïde pour créer TOXOÏDE adj. (1904), dit d'un corps dérivé d'une toxine mais dénué de toxicité.
❏ voir INTOXIQUER, TOXOPLASME.
TOXOPLASME n. m. est la francisation du latin moderne toxoplasma, formé par les biologistes Nicolle et Manceaux (1908-1909), à partir du grec toxon « arc » (dont le dérivé est à l'origine de toxique*) et de plasma (→ plasme). Le mot dénomme un micro-organisme (sporozoaire) en forme d'arc, de croissant, qui parasite les cellules du système lymphatique et d'autres organes.
❏  TOXOPLASMOSE n. f. (v. 1930 ; de -ose) désigne une parasitose des vertébrés causée par des toxoplasmes, et qui se manifeste chez les humains par des céphalées et de la fièvre ; elle peut être congénitale ou acquise.
TRABE n. f. est un emprunt du moyen français (déb. XVIe s.) au latin trabs ou trabes, trabis « poutre » (→ travée) dans ce sens, passé en terme de blason (1611) pour l'image d'une hampe de bannière, et (avant 1690) en technique pour « hampe (de drapeau) ». Il est sorti d'usage au XVIIIe siècle. Le mot latin, rapproché formellement d'autres mots italiques (osque, ombrien) de sens différents, demeure d'origine obscure.
TRABÉE n. f., mot d'antiquité romaine, pris (1611) au latin trabea, qui est peut-être dérivé de trabe, désigne une toge de pourpre ornée de bandes horizontales. Les spécialistes emploient aussi la forme latine TRABEA n. f.
? TRABENDO n. m. s'emploie en français d'Algérie et du Maroc pour « contrebande » et, par extension, « trafic illicite, marché noir ».
❏  TRABENDISME n. m. désigne la pratique du trabendo, et TRABENDISTE n. le traficant.
TRABOULER v. intr., mot franco-provençal de Lyon, semble issu du lat. populaire °trabulare, du lat. transambulare, de trans- « à travers » (→ trans-) et ambulare « aller, se promener » (→ ambul).
❏  Le verbe, enregistré en 1894 dans le Littré de la Grand' Côte, signifie « ménager un passage entre les maisons (en parlant du chemin, de l'allée) ». Le mot doit être ancien oralement.
❏  Le déverbal TRABOULE n. f., plus courant aujourd'hui que le verbe, désigne l'allée, le passage qui traboule. Il n'est pas attesté dans les dictionnaires et glossaires lyonnais de la fin du XIXe et du début du XXe siècle et a dû se diffuser un peu plus tard. Le mot a pour équivalent trage ou traige, en Bourgogne.
1 TRAC n. m. (1441) est un mot d'origine discutée. Pour Wartburg, il serait issu d'un radical onomatopéique °trakk- d'où viendrait traquer*. Selon P. Guiraud, il viendrait de traquer ; selon d'autres, il remonterait à un latin °tracticus, dérivé de °tracticare (qui a lui-même donné traquer*).
❏  Le mot a désigné les bagages qui suivent une armée et la piste, la trace d'un animal (v. 1470), le bruit fait par des gens qui marchent (1534), puis (1694) l'allure d'un cheval. Dans un premier temps, il a donné la locution tout d'un trac « tout d'une traite » (1483), disparue, puis la locution encore vivante tout à trac (1549, reprise 1888) qui transpose l'idée initiale de brusquerie, de rapidité sur le plan du langage.
? 2 TRAC n. m., d'abord écrit traque (1830), est d'origine douteuse : c'est soit une formation expressive, soit un développement métaphorique de trac « fait d'être secoué » ; un rapport avec tracas, tracasser* est possible.
❏  Le mot est familier au sens général de « peur » ; il se dit couramment (1833) à propos du genre de peur que l'on ressent avant d'affronter le public, de subir une épreuve.
❏  Le mot a produit le verbe traquer « craindre », sorti d'usage, mais dont dérive 1 TRAQUEUR, EUSE n. (1837) et adj. (1878).
■  Le diminutif TRAQUETTE n. f. s'employait très familièrement (1890) pour « peur », surtout au pluriel (avoir les traquettes).
TRACASSER v. tr. est dérivé (av. 1450) de traquer* par changement de suffixe.
❏  D'abord synonyme de traquer, il s'en est détaché très vite, l'accent étant déplacé de l'idée de but à celle de mouvement. Tracasser a signifié « parcourir, passer par (une forêt, un endroit) » (v. 1475) et comme intransitif « aller, courir çà et là » (v. 1485). De là, il a développé la valeur de « s'agiter, se remuer sans résultat pour de petites choses » (1536), vivante en langue classique et sortie d'usage au XIXe s. ; il s'est dit d'un bateau agité par la mer (1845), acception liée aussi à l'idée de mouvement. ◆  Le sens de « donner du souci (à qqn) » existe depuis Montaigne (1580), également à la forme pronominale se tracasser (1670, réciproque ; 1759, réfléchi). C'est aujourd'hui le seul emploi usuel. ◆  Tracasser sa vie (1690), « se donner du mal pour subvenir à ses besoins », est propre à l'époque classique.
❏  Le dérivé le plus courant de tracasser est son déverbal TRACAS n. m. (1588, Montaigne), d'abord écrit traquas (v. 1500) et signifiant « souci, embarras » surtout d'ordre matériel. Le mot a désigné jusqu'au XIXe s. l'agitation qu'on se donne pour des choses sans importance (1611), le métier que fait qqn (1668, « populaire » selon l'Académie en 1694) et, à l'époque classique, la manière d'agir d'un intrigant (1680). ◆  Le singulier a autrefois eu un sens technique lié à celui d'agitation : « ouverture dans un plancher pour le passage vertical des matériaux » (1765).
■  Tracasser a produit d'autres dérivés aux XVIe et XVIIe s., TRACASSERIE n. f. (1580, Montaigne), toujours vivant pour « action de tracasser ; fait de tracasser qqn », TRACASSEUR, EUSE adj. et n. (1611), sorti d'usage et remplacé par TRACASSIER, IÈRE adj. et n. (1680), puis l'adjectif TRACASSANT, ANTE (1872) tiré du participe présent. ◆  Le mot familier TRACASSIN n. m. (v. 1903) « léger tracas, inquiétude » a connu une certaine vogue à la suite d'un discours du général de Gaulle, mais sa vitalité semble éteinte.
L TRACER v., d'abord tracier (v. 1120), est issu d'un latin populaire °tractiare, dérivé du classique tractus (→ trait), du supin de trahere « tirer », « traîner » (→ traire) et qui a dû signifier « suivre à la trace » ou « faire une trace », si l'on se fonde sur les premiers sens attestés en français.
❏  En ancien et en moyen français, tracer a donc eu le sens de « traquer, suivre à la trace », sens continué au XVIe s. (1538, « chercher ») et qui survit en particulier dans le langage de la chasse. ◆  Il a été employé comme transitif et comme intransitif (XIIIe s.) pour « courir », « parcourir (une région) » « marcher, voyager », valeur encore vivante ou reprise des dialectes avec l'emploi familier de tracer pour « aller vite » (1893) [Cf. filer].
■  Par transposition de l'idée de trace dans le domaine graphique, il a signifié « faire un trait, des traits pour raturer, effacer » (1439). Ce sens, disparu en français de France, survit en Suisse.
■  Le passage à l'usage moderne, où l'accent est mis sur l'idée de trait, de ligne d'écriture, a eu lieu au XVIe s. où tracer (un papier) signifie « écrire sur » (av. 1563), d'où tracer qqch. (1669) « écrire », et en particulier par analogie « représenter par l'écriture ou la parole » (1552). ◆  Parallèlement, tracer (un chemin) s'emploie pour « indiquer ou ouvrir (un chemin) » en faisant une trace (1552), d'où au figuré « donner l'exemple » (v. 1580), « prescrire » (1563) et les emplois abstraits tracer qqch. dans l'esprit (fin XVIe s.), tracer à qqn sa conduite (1669). ◆  Au début du XVIIe s., tracer signifie par extension « marquer, représenter au moyen de lignes » (1625), spécialement « marquer (le contour de qqch.) », d'abord en broderie, sens qui se développe dans le vocabulaire technique à partir du XIXe s. dans divers domaines (1876, « indiquer sur place la forme d'un objet à travailler »). ◆  Tracer se dit aussi par figure pour « ébaucher, esquisser » (1606, tracer un discours), aujourd'hui par exemple dans tracer les grandes lignes de qqch.
■  L'idée de ligne a donné lieu à des emplois intransitifs spécialisés : tracer s'utilise à propos de racines qui s'étendent horizontalement (1694) ou d'animaux qui creusent des galeries peu profondes (1810).
❏  TRACE n. f. a des emplois variés liés au verbe. Il désigne d'abord (v. 1120) une suite d'empreintes laissées par le passage d'un homme ou d'un animal, ensuite d'une chose (1690, trace d'une voiture), et chacune de ces marques prise isolément (v. 1198). Par extension il se dit de la marque laissée par ce qui agit sur qqch. (v. 1250, « égratignure »). ◆  Trace prend très tôt des valeurs figurées ou analogiques ; il s'est employé pour « manière d'agir » (v. 1190) puis « exemple à suivre » (v. 1530), d'où aujourd'hui suivre les traces de qqn (1636) et marcher sur ses traces (1658). Il désigne aussi l'impression qui reste de qqch. (XIIIe s.), ce qui subsiste du passé (1538), en particulier dans la mémoire (1679) ; de là l'emploi pour « petite quantité » (1847). ◆  Par un autre développement, trace s'est dit pour une broderie sur un vêtement (1509), une file de personnes (1515), sens disparus. Le mot s'emploie avec sa valeur moderne en géométrie (1799), en botanique (1876), en ski (1939, faire la trace).
■  TRACÉ, ÉE adj., du participe passé (XVIe s.), se dit d'un sentier, puis aussi d'un trait, etc. Depuis le XXe s., il qualifie techniquement les parties repérées et découpées dans un glissement minier. ◆  Il est substantivé, TRACÉ n. m. (1792) succédant au féminin tracée (1762 dans ce sens) pour désigner l'ensemble des lignes constituant le plan d'un ouvrage, d'abord dans le domaine des fortifications puis (1845) dans les travaux publics. Il désigne également la ligne suivie par un objet dans la nature (1798) et les linéaments d'un dessin au trait. ◆  Le féminin TRACÉE n. f. (v. 1330, « chose tracée »), d'usage plus limité à cause de la concurrence de trace, se rencontre, mais rarement, avec le sens de « traînée » (fin XIXe s.).
Tracer a produit deux noms d'action.
■  Le plus ancien, TRACEMENT n. m. (1476, trachement, peut-être « action de biffer », puis 1636) est relativement rare par rapport à TRAÇAGE n. m. qui n'est attesté que depuis le milieu du XIXe s. (1855).
■  TRACEUR, EUSE n. correspond à « personne ou chose qui trace » ; il a d'abord eu le sens de « chasseur » (1558) en relation avec le sens initial de tracer, puis s'est dit de la personne chargée d'exécuter le tracé d'un dessin (1582) et s'est spécialisé dans des acceptions techniques et scientifiques. Le mot est adjectivé (XXe s.) avec le sens de « qui laisse une trace », qualifiant un type de projectile (balle) dont la trajectoire est visible (par une trace).
■  TRAÇANT, ANTE adj., du participe présent, d'abord « qui sait suivre une piste » (v. 1330), est un terme de botanique qualifiant une sorte de racine (1694) et a le même emploi que traceur dans balle traçante (1937). Table traçante s'emploie en informatique pour un traceur de courbes.
■  Deux noms d'objets techniques, TRAÇOIR n. m. (1676) et TRACERET n. m. (1676) ou TRACELET (1803), désignent un outil (en particulier de charpentier) servant à faire des tracés.
TRAÇABILITÉ n. f. est un emprunt (attesté en 1996) à l'anglais traceability, dérivé de to trace, emprunt du moyen anglais au bas latin qui correspond au français tracer, par un adjectif traceable. Le mot désigne la possibilité d'identifier l'origine d'une substance, d'un produit, d'une marchandise depuis sa production jusqu'à sa diffusion. Le mot est plus courant que l'adj. TRAÇABLE, emprunt (v. 1990) à l'anglais traceable (1748 chez Richardson pour « repérable »). Traceability avait été créé (1891) comme terme de finance.
Le dérivé préfixé RETRACER v. tr. a signifié « aller en quête de qqch. » (XVe s.) et « biffer » (déb. XVIe s.) ; il s'emploie au sens de « tracer de nouveau » concrètement (1680) et au figuré aujourd'hui (1672) au sens de « raconter pour faire revivre » mais à l'époque classique aussi pour « rappeler (à la mémoire) » (1656) et, à la forme pronominale, « se rappeler ».
TRACHÉE n. f. est emprunté (v. 1370 ; v. 1240, trachie) au bas latin trachia, terme d'anatomie repris au grec trakheia (artêria), proprement « (conduit respiratoire) raboteux », en raison de ses anneaux. L'expression est formée de trakhus « rugueux, raboteux, rocailleux » et de artêria (→ artère), le grec employant aussi simplement artêria en ce sens.
❏  Terme d'anatomie devenu courant, trachée s'emploie par analogie à propos des organes respiratoires des insectes (1734), par emprunt au latin scientifique trachia (v. 1680, Malpighi), et en botanique (1748) pour les vaisseaux servant aux plantes à respirer.
❏  TRACHÉE-ARTÈRE n. f., emprunté directement au grec (1503) et précédé par trachie arterie (v. 1240), ne s'est pas imposé en anatomie où l'on dit la trachée ; on relève au XVIIe s. diverses tentatives de réduction du mot comme trachiartère (1611) et trache artère (1694).
■  Tous les dérivés et composés de trachée sont didactiques ; les premiers apparaissent au XVIIIe s. : TRACHÉAL, ALE, AUX adj. (1765) et TRACHÉOTOMIE n. f. (1772) fait avec l'élément -tomie* et employé en chirurgie, qui a lui-même produit TRACHÉOTOMISER v. tr. (1835) à propos de l'opération qui consiste à ouvrir la trachée pour rétablir le passage de l'air ou pour une intubation (si on suture les lèvres de la plaie à la peau, on parle de TRACHÉOSTOMIE n. f. [1921]).
■  TRACHÉITE n. f. (1823) et TRACHÉO-BRONCHITE n. f. (1855) désignent des inflammations de la trachée (et des bronches).
■  TRACHÉIDE n. f. (1905), emprunt à l'allemand (1863), est un terme de botanique et TRACHÉEN, ENNE adj. (1805) de zoologie à propos de la respiration des insectes.
TRACHÉLIEN, IENNE adj., terme d'anatomie, est dérivé savamment (1810) du grec trakhêlos « cou, nuque » et aussi « col de la vessie, d'un vase ». C'est une création du grec, probablement expressive et familière, à rapprocher de trekhein « courir » (d'abord « courir en rond ») avec le sens de « partie du corps qui tourne » : le nom du cou est d'ailleurs rattaché à la notion de « tourner » dans plusieurs langues (vieux slave vratu à côté de vratiti « tourner »).
❏  Trachélien qualifie ce qui appartient à la partie postérieure du cou.
❏ voir TRACHÉE.
TRACHOME n. m., terme de médecine (1752) sans rapport avec la trachée ou le cou, est cependant un emprunt à un dérivé grec de trakhus (→ trachée), trakhôma « aspérité ». C'est le nom d'une maladie contagieuse, endémique dans certaines zones tropicales, qui attaque la conjonctive et peut affecter la cornée, provoquant la cécité. On l'appelle aussi conjonctivite granuleuse à cause des granulations de la conjonctive qu'elle provoque.
❏  TRACHYTE n. f. est le nom (1801) d'une roche volcanique composée surtout de feldspath et contenant plus de 60 % de silice. Sans rapport avec trachome, ce mot est aussi formé par Haüy à partir du grec trakhus. Il a pour dérivé TRACHYTIQUE adj.
TRACT n. m. est emprunté (1832) à l'anglais tract n. (XVe s.), employé depuis 1806 pour « opuscule, brochure sur une question politique, religieuse ». Ce mot est la forme abrégée du latin tractatus (→ traité, à traiter) qui avait aussi donné à l'anglais tractate « traité » (1474), remplacé par treatise.
❏  Le mot, passé en français à propos d'un opuscule en général polémique, sens disparu, désigne (1840) une petite feuille de propagande politique, distribuée ou affichée puis tout feuillet donné au public (publicité, propagande).
TRACTATION n. f. est emprunté (1455) au latin tractatio « action de manier, maniement » et, au figuré, « emploi, mise en œuvre, procédé », de tractare (→ traiter).
❏  Le premier texte dans lequel apparaît ce mot l'emploie pour « manière d'agir » puis il signifie (v. 1475) « négociation » et « ouvrage où l'on traite d'une matière » ; ces emplois repris du latin sont sortis d'usage, tout comme l'emploi en rhétorique, propre à l'époque classique, pour « manière de traiter un sujet (dans un écrit) » (1584) où tractation correspond à traitement.
■  Dans l'usage moderne (probablement 2e moitié XIXe s.), le mot est presque toujours au pluriel et péjoratif ; il désigne une négociation de caractère officieux ou occulte avec manœuvres et marchandages ; Littré en 1874 n'enregistre encore que la valeur neutre « action de traiter une affaire ».
TRACTEUR, TRICE n. m. et adj. est un dérivé savant (1836) du latin tractum, supin de trahere (→ traire), au moyen du suffixe -eur.
❏  Le mot est apparu pour désigner un instrument de chirurgie servant à tirer le fœtus dans les accouchements laborieux ; ce sens est sorti d'usage au bénéfice de forceps.
■  Le mot s'applique ensuite à un véhicule automobile qui tire un ou plusieurs véhicules (1872, d'une locomotive à vapeur), en particulier et couramment des instruments agricoles. ◆  Dans l'usage didactique, tracteur se dit de tout mécanisme qui produit une traction (1877). ◆  Le mot désigne aussi (1971) le dispositif d'une imprimante qui règle la position du papier. ◆  Tracteur, trice adj. s'applique (v. 1950) à ce qui est capable de tracter.
❏  Le mot a produit TRACTÉ, ÉE adj. (1943), terme militaire qualifiant ce qui est traîné par un tracteur, un engin à moteur (canon tracté). ◆  De ce dernier on a tiré le verbe correspondant TRACTER v. tr. (1956), d'emploi plus général, qui a lui-même donné l'adjectif TRACTABLE (v. 1965).
■  Autre dérivé de tracteur, TRACTORISTE n. (1964) signifie « conducteur de tracteur ».
■  Enfin, le mot est préfixé dans des composés techniques comme MOTOTRACTEUR n. m. (XXe s.).
De tractum ont été dérivés deux termes didactiques.
■  TRACTRICE n. f. (1711) est un terme de géométrie ; on dit aussi TRACTOIRE n. f. (1765), adaptation du dérivé latin tractorius « qui sert à tirer » et d'abord employé avec ce sens (1547, adj.).
■  TRACTIF, IVE adj. qualifie ce qui exerce une traction (1842 ; 1834, autre sens).
TRACTO-, élément tiré de tracteur ou du latin tractum, entre dans des noms techniques d'instruments, tels TRACTOGRUE n. f., TRACTOPELLE n. f. (1973-1974), tracteurs comportant une grue, une pelle mécanique (ce dernier engin pouvant servir au chargement ou au pelletage).
❏ voir TRACTION.
⇒ encadré : Le tzigane ou tsigane