Le personnel védique de la fonction guerrière, la manière dont il s’organise autour du dieu canonique de ce niveau, Indra, fournit une intéressante matière au comparatiste qui, après l’Inde, porte son regard sur d’autres parties du monde indo-européen, et d’abord sur Rome.
On sait combien la mythologie proprement romaine est pauvre. La théologie, les formules classificatoires, les relations entre les divinités des diverses fonctions et des divers niveaux sont claires, plus claires même que dans d’autres religions apparentées – la grecque, l’irlandaise, par exemple – où la charpente des définitions qui soutient la structure est comme écrasée sous la masse des récits : jusqu’à l’intervention de Zeus, tout ce que les Romains racontent de Jupiter tient en quelques rapports entre lui et les premiers rois de la ville. Et de même pour les autres provinces de la théologie.
J’espère avoir montré, par de nombreux exemples, que la mythologie n’a pas disparu pour autant : elle s’est constituée en histoire. Ce ne sont pas des dieux, mais des héros des premiers temps qui, par leur caractère, leurs aventures, leurs rapports, font la démonstration des valeurs que reconnaît la société et la conception qu’elle a d’elle-même et de sa place dans le monde. Tout cela a été en grande partie formé par un transfert sur l’espace romain et dans le temps romain (les seuls qui intéressent Rome) de ce qui, chez les Indiens ou chez les Scandinaves, se passe dans l’Univers et dans le Grand Temps. Avec les règnes de Tullus Hostilius, de Tarquin le Superbe, le présent livre a offert au lecteur plusieurs de ces transpositions.
Mais l’histoire n’est pas le seul réceptacle de cette mythologie en quelque sorte fermentée que les annalistes ont fait couler dans nos mémoires comme un miel savoureux d’événements significatifs et exemplaires. L’organisation sacerdotale la plus ancienne, notamment, se conforme aux mêmes structures et aux mêmes images : l’ordo sacerdotum, le groupement libre mais strictement hiérarchisé des trois flamines maiores, autant et plus que les définitions différentielles de leurs dieux Jupiter, Mars et Quirinus (notamment de Quirinus), a été le point de départ de tout le travail comparatif accompli depuis cinquante ans. Il en est de même pour la fonction guerrière.
Avant de devenir le fils de Jupiter et le père de Romulus, Mars, lui non plus, n’a pas de mythologie. D’autre part, il ne semble pas que Rome ait distingué, dans ses patronages divins, ce qui était, chez les Indo-Iraniens, l’aspect Vāyu (Bhīma) et l’aspect Indra (Arjuna)1. Mars est seul à son niveau, avec une Bellōna qui, à en juger par la structure de son nom et par ses offices, a pour mission de faire que les Romains sortent en bon état d’une guerre, voire de substituer à la guerre la diplomatie2. Il est aussi articulé à Quirinus, mais Quirinus, en dehors des dérives qu’a causées ou facilitées son assimilation à Romulus, ne s’occupe que des militaires entre deux campagnes, des Quirites, des civils toujours prêts à se mobiliser et vivant dans une paix vigilante, et l’essentiel de ses rapports avec Mars est dans leur commune participation, dans des postes complémentaires et inégaux, à la structure non pas bi-, mais trifonctionnelle Jupiter, Mars, Quirinus. Mais on chercherait vainement, près de Mars, l’équivalent de Viṣṇu et des Marut.
Au contraire, le personnel sacerdotal attaché à la guerre, en dehors du flamen Martialis, consiste en deux sodalités dont les offices correspondent à ceux de Viṣṇu et des Marut. Simplement, comme nous sommes à Rome, fondamentalement juriste et procédurière, et peu confiante dans les purs miracles, la première de ces deux sodalités a transporté au droit international, à la zone d’action de Jupiter, ce qui, dans la mythologie de Viṣṇu, n’est que magique. Il s’agit des fetiales d’une part, des Salii d’autre part.
Dans Idées romaines (1969), p. 63-78 (et p. 304), une étude à laquelle je n’aurais rien d’important à changer a longuement traité du ius fetiale : j’y renvoie le lecteur. En gros, les fēti-ales sont les prêtres chargés de donner à une guerre éventuelle le fondement (cf. sanscrit dhtu) moral qui en fait un bellum pium. Matériellement, ils font plus : ils légitiment la marche que fera l’armée romaine en territoire ennemi, si ennemi il y a, c’est-à-dire si le peuple contre lequel Rome a des griefs n’a pas donné la réparation demandée. Et cela, le fétial désigné pour cet office, le pater patratus, et son auxiliaire l’accomplissent en trois étapes, par un équivalent rituel des trois pas par lesquels Viṣṇu fournit à Indra l’espace de son exploit3. Voici le passage de mon étude de 1969 qui, complétant sur un point l’article de 1953 d’où est tirée la précédente section, concerne directement notre problème (p. 73-75).
Viṣṇu, par ses trois pas, ouvre à l’action guerrière d’Indra la zone de l’espace où elle doit se dérouler et quand, en trois pas, il arpente « pour Indra » les trois mondes, c’est l’univers entier qu’il lui rend accessible. Il fait matériellement, par ses pas, ce que le fétial romain fait, mystiquement, par son rituel : il procure au guerrier une marche et un champ de bataille assurés. On a vu plus haut des raisons de penser que le trait est ancien, indo-iranien : dans l’Avesta postgāthique, le dieu guerrier, Miθra, substitué en cette fonction à l’*Indra indo-iranien, a près de lui un auxiliaire, Rašnu, dont le nom consonne avec celui de Viṣṇu, et qui présente avec Viṣṇu d’autres analogies ; or, comme Viṣṇu à Indra, ce Rašnu continue à donner à Miθra l’espace nécessaire à ses exploits (Yašt X, 41). Si Rašnu est une « réforme » zoroastrienne d’un *Višnu indo-iranien, comme je l’ai proposé, son nom indique suffisamment le sens de la réforme : il est « le droit », aussi bien et plus au moral qu’au propre, et sa présence auprès de Miθra, comme, d’ailleurs, la substitution même de Miθra au dieu guerrier indo-iranien, suppose que le mazdéen ne fait que des guerres « droites », c’est-à-dire justes, et surtout dans l’intérêt de la vraie religion. Mais peut-être cet aspect du service était-il déjà, avec d’autres nuances, contenu dans les représentations indo-iraniennes : l’hymne védique, cité plus haut (Vāl., 4, 3), qui dit que « c’est pour Indra que Viṣṇu a fait ses trois pas », ajoute aussitôt úpa mitrásya dhármabhiḥ, « conformément aux lois de Mitra4 », du Mitra qui n’est toujours, dans la religion védique, sans rien de guerrier, qu’un dieu souverain, garant bienveillant de l’ordre sous toutes ses formes, cosmique, social, liturgique et moral5.
Le rituel des fétiaux paraît contenir un élément de même forme, à valeur à la fois morale et matérielle. On connaît la procédure par laquelle ces prêtres, exactement celui qui a été choisi comme pater patratus et son compagnon, vont demander réparation et, s’il doit y avoir bellum, assurer aux Romains un bellum pium6 : en trois marches, ils se rendent depuis la frontière du peuple coupable jusqu’au forum de sa ville. En territoire romain d’abord, à proximité de la frontière, puis encore sur la frontière, le pater patratus invoque les dieux, affirme sous imprécation la justice de la cause romaine et expose ce dont Rome se plaint, puis, avec son compagnon, il commence sa marche sur le territoire virtuellement ennemi en refaisant trois fois ce discours : 1. Au premier passant qu’il y rencontre, 2. En arrivant à la porte de la ville, 3. Sur le forum, devant les magistrats. Si le peuple ainsi sommé demande un délai, il accorde trente jours.
Un tel scénario semble indiquer que la procédure combinait primitivement la préparation juridique du bellum pium et une préparation plus matérielle : non pas encore une prise de possession7, mais l’ouverture ou, pour garder l’image de *fēti-, la « fondation » mystique du champ où l’armée romaine s’avancera ensuite, protégée par les dieux. De la frontière au premier passant, de celui-ci à la porte, de la porte au forum, aux trois points, l’un mobile, les autres fixes, qui jalonnent entièrement ce monde étranger, le fétial « pose » le droit de Rome et, par là même, les qualifie, eux et le pays qu’ils résument, comme « base » pour l’action guerrière qui suivra. Du moins est-ce l’explication littérale que suggère cette marche en trois étapes, cette sorte d’incantation progressive de tout le terrain8.
À la différence des fetiales, dont l’intervention est commandée par les circonstances, les Salii opèrent à dates fixes, dans des fêtes que prescrit le plus ancien calendrier : ils ouvrent en mars, ferment en octobre la saison des guerres9. Leur service est de parcourir les rues de Rome en dansant une danse contorsionnée qu’ils scandent en frappant de leurs javelines des boucliers archaïques, c’est-à-dire le bouclier-talisman envoyé du ciel par Jupiter à Numa et les copies qui en avaient été faites. Ils opèrent sous la direction d’un chef de danse (praesul) dont ils reproduisent les figures et, en même temps, dirigés par leur uates, ils chantent un carmen devenu peu intelligible à l’époque classique. Ils sont divisés en deux équipes de douze, les Salii Palatini et les Salii Agonenses ou Collini, ayant chacune son magister. La première appartient à Mars, la seconde à ce « Mars tranquille », à ce « Mars qui préside à la paix » qu’est Quirinus. Denys d’Halicarnasse les présente ensemble comme « danseurs et chanteurs des dieux en armes » (II, 70, 2). Ce n’est pas ici le lieu de traiter de Quirinus et de ce qui explique son glissement vers un statut de dieu guerrier, étranger à l’idéologie qui soutient les actions connues de son flamine10. Il suffit ici de souligner que Rome confie le succès de ses légions à des prêtres danseurs qui font bruyamment parade de leurs armes. Ils sont, dit le commentateur de Virgile (Serviuṣ, ad Aen., VIII, 663) in tutela Jouis Martis Quirini, ce qui est conforme à l’origine céleste, diale, des boucliers et aux affections des moitiés de la sodalité11. Enfin, des prêtresses nommées Saliae uirgines, dont il faut bien penser qu’elles doublaient les Salii et « dansaient » comme eux, ne sont signalées qu’à l’occasion d’un sacrifice annuel, offert sans doute à la chapelle de Mars dans le Regia12.
On sent combien, par leur nature et leur rituel, ces Salii sont proches des Marut (et donc, peut-être, les Saliae des Fravaši) : les uns et les autres font étalage d’un riche armement et les uns et les autres dansent, puisque seuls Indra et les Marut (et une fois les Aśvin, autres jeunes gens) reçoivent dans les hymnes la qualification de nr̥tú « danseurs13 ».
Il faut ici rappeler un autre rituel guerrier de Rome, celui de la purification, le 1er octobre, au tigillum sororium, que l’on rattachait au « péché » commis par le troisième Horace après son combat contre les trois Curiaces : dans la première partie du présent livre, il a été montré que la légende justificative de ce rituel établi sous le roi guerrier Tullus Hostilius rappelait le mythe védique où Indra a pour auxiliaire Trita, « le Troisième ». Ainsi le recours à la mythologie védique du niveau guerrier permet d’entrevoir comment des corps sacerdotaux et des actes rituels qui, à Rome, sont dispersés, prolongent un ensemble cohérent de représentations remontant aux temps indo-européens14.
Tout n’est pas encore éclairci, dans les religions germaniques, sur la théologie et la mythologie du niveau guerrier. Un fait du moins, souligné dès 1939, domine le dossier : si ce qui est dans l’Inde le « type Vāyu-Bhīma » subsiste clairement en la personne du dieu Þórr, le « type Indra-Arjuna », et généralement tout le reste du personnel divin de la fonction guerrière a si bien pénétré la fonction souveraine qu’elle a paru aux observateurs, dès l’Antiquité et jusqu’à l’extinction du paganisme, en former l’essentiel. C’est par « Mars », entre Mercure et Hercule, que les informateurs de Tacite ont traduit *Tiwaz, et c’est comme dieu de la guerre, au XIIe siècle, que Snorri présente Týr15. Parallèlement, dans la triade d’Upsal que des voyageurs hanséatiques ont décrite à Adam de Brême – Óđinn, Þórr, Freyr » (Wodan, Thor, Fricco) – les fonctions des dieux sont réduites à l’essentiel, du moins à ce qui les a le plus frappés16 :
Thor est le maître de l’atmosphère et gouverne le tonnerre et la foudre, les vents et les pluies, le beau temps et la moisson ;
Wodan, c’est-à-dire la Fureur, dirige les guerres et fournit à l’homme la vaillance contre l’ennemi ;
le troisième, Fricco, procure aux mortels la paix et le plaisir.
Ainsi, ce que nous savons par ailleurs d’Óđinn et qui est en réalité dominant, à savoir son caractère de souverain du monde, de « père universel » et de magicien tout-puissant par son savoir, n’est pas retenu, alors que sa participation aux guerres n’est qu’une application privilégiée de cette valeur générale : il gouverne le sort des batailles, choisit les morts héroïques qu’il se réserve, bien plutôt qu’il ne se bat.
Quant à Týr, qui ne paraît pas dans la triade d’Upsal, Snorri (Gylfaginning, 13) le définit « très intrépide et très courageux » et dit qu’il a « grand pouvoir pour la victoire dans les batailles », enfin qu’il est bon que les hommes vaillants l’invoquent, – ce qui est très proche de la part d’Óđinn dans la seconde partie du témoignage d’Adam de Brême :
… Si la peste ou la famine menace, c’est à l’idole Thor qu’ils sacrifient ; pour la guerre, à Wodan ; et si des noces doivent être célébrées, à Fricco.
Ce n’est pas ici le lieu de montrer que la part de Týr et celle d’Óđinn dans la guerre et dans la victoire ne sont pas les mêmes, ni de compléter, de rectifier la définition que Snorri donne de Týr qui, au civil comme au militaire, au Þing de justice comme au Þing des armes qu’est la bataille, préside aux rapports le plus souvent difficiles et violents des hommes : le travail est fait depuis longtemps et le lecteur peut se reporter à mes Dieux souverains des Indo-Européens, p. 183-203 et, en dernier lieu, à la discussion que j’ai récemment soutenue contre M. R.I. Page, dans l’Esquisse 73 (L’Oubli de l’homme…, p. 278-301). Je rappellerai seulement le glissement qui peut être très schématiquement résumé17, pour les deux fonctions supérieures, dans un tableau comme celui-ci :
Pour l’essentiel, c’est donc Óđinn qui assume les fonctions d’Indra. Osmose naturelle, sans doute, entre le niveau souverain et le niveau guerrier puisque, pour des raisons différentes, l’Indra postvédique est devenu le souverain des dieux (Varuṇa et Mitra s’étant presque effacés) tout en restant le guerrier par excellence, et que l’Iran zoroastrien, dans le temps qu’il rejetait l’Indra traditionnel parmi les archidémons, a transféré sa mission, retouchée dans la nouvelle morale, à Miθra qui, sous Ahura Mazdā, garde beaucoup de ses traits de dieu souverain.
La plus notable différence est que, dans l’aspect naturaliste de la fonction guerrière, Óđinn ne s’est pas approprié la foudre (comme l’ont fait ailleurs les souverains Zeus et Jupiter sans pourtant descendre à la deuxième fonction) : de même que, dans l’Inde, c’est Indra, au deuxième niveau, qui manie le vájra, l’arme céleste qui symbolise la foudre, c’est Þórr, au deuxième niveau aussi mais dans la « partie Vāyu » de ce niveau, qui a pour arme le marteau qui ébranle l’atmosphère. Il est d’ailleurs remarquable que, chez les Germains, ce soit ainsi le coup de tonnerre plutôt que la foudre, le bruit plutôt que la lumière, qui ait été mis en vedette dans l’arme (le marteau) comme dans le nom même du dieu (* Þun(a)raz).
Pour à peu près tout le reste, c’est bien Óđinn qui a amassé sur lui l’équivalent de la dotation d’Indra. Notamment son entourage : les équivalents, mutatis mutandis, de Viṣṇu et des Marut sont au service d’Óđinn.
Pour le premier, Víđarr, la démonstration a été donnée en 1965 et reprise dans Mythe et Épopée, I, 1968, p. 230-237, à l’occasion de la transposition de Viṣṇu en Kr̥ṣṇa dans le Mahābhārata. Je n’ai rien à y modifier.
Quant aux Marut, dès 1953, les équivalents scandinaves ont été désignés. Dans l’hypothèse que j’ai reproduite tout à l’heure – sublimation zoroastrienne des Marut dans les Fravaši – un trait important de celles-ci manque à ceux-là : l’élément « âmes des morts » ou « anges gardiens associés aux âmes » reste inexpliqué, puisque les Marut ne sont pas conçus comme tels et ne semblent pas avoir de rapports avec la mort ni l’après-mort (encore qu’il faille ici rappeler que de tels rapprochements sont certains chez le complexe Rudra dont les liens avec les Marut sont multiples). Mais il se peut que sur ce point les hymnes du R̥gVeda, peu intéressés par le destin de l’homme après sa vie terrestre, aient appauvri une représentation indo-iranienne, indo-européenne, qui reparaîtrait dans les deux religions qui, au contraire, se sont fait une image riche et efficace de la survie dans l’au-delà, l’iranienne, la scandinave.
Il y a, d’une part, les Einherjar d’Óđinn et ses Valkyrjur, étroitement solidaires. Les premiers, élus d’Óđinn que les secondes vont chercher sur le champ de bataille, sont les guerriers morts héroïquement et le folklore moderne des pays scandinaves et de l’Allemagne du Nord reconnaît les morts dans la Chasse Fantastique qui suit Oden-Wotan dans ses chevauchées bruyantes sur la terre ou dans l’air. Les Einherjar sont très vraisemblablement conçus à l’image des bandes, des Männerbünde des vieilles sociétés germaniques. C’est ce que suggère leur nom (*aina-harijar)18, dont le second élément n’est autre que le nom d’un vieux peuple de la Germanie continentale, les Harii, chez lequel Tacite (Germanie, 43, 6) a décrit une telle société, très convenablement, semble-t-il, bien qu’il n’en comprît pas tout le mécanisme19 : « Les Harii, dit-il, surpassent en force les peuples que je viens d’énumérer ; farouches, ils augmentent leur sauvagerie naturelle en se servant d’artifices, et en utilisant le temps qu’il fait : boucliers noirs ; corps barbouillés ; pour les combats, ils choisissent des nuits épaisses et, par l’horreur qu’inspire ainsi dans l’ombre cette armée funèbre (feralis exercitus), ils portent l’épouvante ; nul parmi les ennemis ne soutient ce spectacle étrange et comme infernal (nouum ac uelut infernum aspectum), car, dans tout combat, les yeux sont les premiers vaincus. »
Quant aux Valkyries, les Fravǎsi, comprises comme il vient d’être proposé, n’ont pas d’analogue plus proche. Elles participent à l’action d’Óđinn dans la bataille, dans l’autre monde ; elles sont à la fois les gardiennes et les psychopompes des guerriers et leurs partenaires féminins dans la Valhöll ; les sabots de leurs chevaux projettent grêle et rosée, etc.20.
Par Víđarr d’une part, les Einherjar et les Valkyrjur d’autre part, Óđinn dispose donc, sur les lignes propres à une idéologie et à une imagerie bien différentes, des mêmes auxiliaires que sont, pour Indra, Viṣṇu et les Marut, pour Miθra, Rašnu et les Fravaši. Ils ne nous réduisent pas au ras de terre comme font à Rome, platement, leurs homologues sacerdotaux, fetiales d’une part, Salii et Saliae uirgines d’autre part.