1. Tel est le titre donné dans la table chronologique et la table systématique de Porphyre (Vie de Plotin 6, 20 et 24, 44). Les manuscrits des Ennéades en offrent une variante sans conséquence : Sur la question de savoir si les astres agissent (perì toû ei poieî tà ástra). Le titre de ce traité est mentionné en outre par Macrobe, Sur le songe de Scipion I, XIX, 27 (si faciunt astra) et par Jean Lydus, Des mois IV, 37 (hóp ō s poieî tà ástra).
2. Le traité 3 (III, 1) résume bien la position des astrologues : « D’autres encore, se fondant sur la prédiction que l’on peut en tirer, assurent que toutes choses tiennent leur origine de la rotation de l’univers qui enveloppe et produit tout par son mouvement, par les positions respectives des planètes et des étoiles fixes et les figures qu’elles décrivent les unes par rapport aux autres » (trad. A. Petit, dans cette collection). Ptolémée est une exception notable, car, illustre partisan de l’existence et de l’utilité de l’astrologie, il considère que toutes les choses n’arrivent pas aux hommes par une cause céleste (Tétrabiblos I, 3 Feraboli). L’astrologie pure et dure (ce que la littérature anglophone désigne par hard astrology) considère que les astres non seulement donnent des signes des événements, mais les produisent ; ils sont causes de tout ce qu’ils annoncent (3 (III, 1), 5, 40-41). Voir Sextus, Contre les astrologues 5 : les Chaldéens pensent que les astres sont les causes efficientes de chacun des événements de nos vies. Pour un résumé des positions de Sextus et de Plotin sur l’astrologie, voir E. Spinelli, « La semiologia del cielo : Astrologia e anti-astrologia in Sesto Empirico e Plotino ».
3. Voir 3 (III, 1), 2, 26-30 ; 3 (III, 1), 5-6 ; 27 (IV, 3), 7, 20-30 ; 28 (IV, 4), 30-45 ; 33 (II, 9), 13, 20-25 et 48 (III, 3), 6. Il est difficile, voire impossible, d’identifier les auteurs que confronte Plotin. Les principes généraux de l’astrologie sont critiqués, au détriment des applications particulières chez des auteurs précis. R. Amadou croit que Plotin s’en prend avant tout à Marcus Manilius et à Claude Ptolémée (voir « Le message astrologique de Plotin », p. 21-23).
4. Jusqu’à la fin du chapitre, Plotin résume les doctrines des astrologues. Pour un exposé des principes astrologiques auxquels le traité 52 (II, 3) fait référence, voir l’Annexe et les Figures. Sextus présente lui aussi un abrégé des doctrines chaldéennes (Contre les astrologues, 4-22). Le compte rendu rédigé par Cicéron est plus sommaire et manque de subtilité (De la divination,II, 87-89). L’ouvrage classique sur l’astrologie grecque est celui de A. Bouché-Leclercq, L’Astrologie grecque. Voir aussi la présentation générale par A.J. Festugière, La Révélation d’Hermès Trismégiste, vol. 1, p. 89-101.
5. Les planètes deviennent bonnes ou mauvaises selon les lieux du zodiaque où elles se trouvent et les configurations qui les relient ; elles prodiguent des biens lorsqu’elles sont bien disposées et distribuent des maux lorsqu’elles sont mal disposées (3 (III, 1), 6, 15-18).
6. Sur la notion astrologique des quatre « centres », voir l’Annexe, p. 342-343. La « déclinaison » d’un astre est liée à la théorie des « centres » et des douze « lieux » (voir l’Annexe, p. 343-344 et la Figure 6). Les douze lieux sont placés dans l’ordre où, par rapport à l’horizon, ils émergent et se couchent. Le lieu qui précède un centre « décline », alors que celui qui le suit « monte après ». Si l’on consulte la Figure 6, le douzième lieu, qui précède le centre horoscope, décline par rapport à ce centre, tandis que le deuxième lieu « monte après », c’est-à-dire qu’il est en ascension. Autre exemple : par rapport au centre du Couchant, qui est le septième, le sixième lieu décline et le huitième est en ascension. Sextus rapporte que pour les Chaldéens les astres n’ont pas la même puissance s’ils sont sur leurs centres, s’ils montent ou s’ils déclinent (Contre les astrologues,20). Pour une définition de l’« ascension » et de la « déclinaison », voir Sextus, Contre les astrologues,14 et A. Bouché-Leclercq, L’Astrologie grecque, p. 273 et 280.
7. Les bonnes planètes sont la Lune, Jupiter et Vénus ; les mauvaises, Saturne et Mars. Le Soleil et Mercure ont un caractère mixte. Ces qualifications peuvent changer selon la position du Soleil, la position de l’horizon et selon le sexe du signe du zodiaque que les planètes occupent. Voir l’Annexe p. 339-340 et Ptolémée, Tétrabiblos,I, 5.
8. Lorsque les signes zodiacaux ou les planètes sont reliés par des configurations (aspect diamétral, trigone, quadrant ou sextil), les astrologues disent qu’ils se « voient » ou se « rendent témoignage ». S’ils ne sont reliés par aucune configuration, ils ne se « voient pas ». Dans le cas du zodiaque, les signes ne se voient pas lorsqu’ils sont contigus ou séparés par cinq ou sept signes. Ils sont alors dits « inconjoints » (voir A. Bouché-Leclercq, L’Astrologie grecque, p. 166). Dans le cas où seules deux planètes sont concernées, les quatre aspects correspondent à des angles de 180, 120, 90 ou 60 degrés, qui relient ces deux planètes.
9. Terme technique se rapportant aux figures géométriques par lesquelles les astrologues relient les signes du zodiaque entre eux et les planètes entre elles (voir l’Annexe, p. 340-341 et les Figures 1 à 4). Le mot skh ḗ ma (configuration), aussi traduit par « aspect », a pour synonyme marturía (témoignage) et c’est ce dernier que Plotin emploie dans le traité 3 (III, 1), 5, 3-4. Sur cette synonymie, voir A. Bouché-Leclercq, L’Astrologie grecque, p. 165, n. 1. Plotin a déjà condamné la théorie astrologique selon laquelle les planètes deviennent bonnes ou mauvaises selon les configurations qui les relient (3 (III, 1), 6, 15-17).
10. Sur le mélange des influences astrales, voir infra chap. 2, 5-8 ; 5, 6 ; 12, 1-3 et aussi 28 (IV, 4), 38, 12-13. Diogène Laërce affirme que, pour les Égyptiens, les puissances issues des astres se mélangent et produisent les événements d’ici-bas (Vies et doctrines des philosophes illustres,I, 11). L’astrologie avait, pour les gens de l’époque, une double origine, égyptienne et chaldéenne.
11. Le ciel se compose uniquement de feu et rien en lui ne peut être froid (28 (IV, 4), 31, 36-37). Sur la composition ignée du ciel, voir 40 (II, 1), 6-7. Dans un argument contre les astrologues en 3 (III, 1), 6, 6, Plotin concède que les astres peuvent communiquer du froid aux choses sublunaires. La seule planète véritablement froide est Saturne (voir chap. 5, 1 et la note). Ptolémée considère pour sa part que les planètes opèrent selon les quatre qualités primaires : le chaud, le froid, le sec et l’humide (Tétrabiblos I, 5).
12. Le mélange des influences astrales est l’une des raisons qui expliquent les effets défavorables que provoquent les planètes (28 (IV, 4), 38, 7-13 et 39, 27-29). Les astres envoient des effluves vers la terre (Ptolémée, Tétrabiblos,I, 2).
13. Sur l’effet que provoque l’éloignement de la planète froide (Saturne), voir chap. 5, 1-3.
14. Plotin pose la même question mais donne des exemples différents en 3 (III, 1), 6, 7-10 : « Mais comment arrivent-ils [i.e. les astres] à donner les caractères et les occupations, surtout celles qui ne semblent pas asservies à la complexion corporelle, par exemple celle de grammairien, celle de géomètre, celle de joueur de dés, ou celle d’inventeur de telle ou telle chose ? » (trad. A. Petit, dans cette collection). Le début du chap. 6 du traité 3 (III, 1) ressemble d’ailleurs au début de ce chapitre : même si l’on concède aux astrologues que les astres agissent par leur corps sur les corps sublunaires, usant du chaud et du froid, on ne peut expliquer de la même manière les caractères humains qui ne relèvent pas des corps. Le traité 28 (IV, 4), 31, 42-45 demande aussi comment il peut se faire que les astres, s’ils agissent par l’intermédiaire des qualités primaires, peuvent engendrer en nous l’envie, la jalousie et la ruse ; comment ils arrivent à rendre un homme chanceux, bon, meilleur, riche ou pauvre ; comment ils expliquent la noblesse d’une naissance, la noblesse d’un ancêtre et la découverte d’un trésor. Des milliers de faits ne peuvent avoir pour cause l’action de qualités corporelles (28 (IV, 4), 31, 45-48).
15. L’action du chaud, du froid, du sec et de l’humide, même si elle vient des astres, ne permet pas d’expliquer tout ce qui se produit sur terre, surtout les différences de caractères (28 (IV, 4), 31, 38-43).
16. Les astres n’agissent pas selon un choix préalable, car des dieux ne sauraient faire le choix absurde d’accomplir le mal (28 (IV, 4), 35, 4-7). Ils ne manigancent pas contre les hommes, ils ne font ni choix ni calcul rationnel en vue de rendre des hommes trafiquants d’esclaves ou pilleurs de temples (ibid. 31, 48-54). Aucun dieu, aucun homme respectable n’accomplirait des actes de ce genre ni ne participerait à de telles manigances (ibid. 31, 54-57). Les maux que produisent les dieux célestes ne résultent pas de choix préalables (ibid. 39, 23-25). Plotin énumère une série de raisons pour lesquelles les dieux sidéraux font du mal ici-bas (ibid. 39, 23-32). Sur la possibilité de produire sans choix préalable, voir le traité 28 (IV, 4), 37, 17-26.
17. Reprise quasi littérale de 33 (II, 9), 8, 34-35 : « Il est bien certain que ce qui rend les gens mauvais ici ne se trouve pas là-bas [i.e. dans les astres] ». Voir aussi 51 (I, 8), 5, 30-32 : le vice présent chez les hommes n’existe pas chez les dieux sensibles (i.e. célestes). Les âmes des astres ne sont pas affectées par les corps qu’elles dirigent, n’étant pas remplies de passions, de désirs ni de craintes qui entraveraient leur intellection (6 (IV, 8), 2, 38-53). Les astres sont impassibles et leurs corps ne subissent aucun dommage (28 (IV, 4), 42, 23-26). Ils possèdent un corps spécial et inaltérable, comme aussi une âme d’un rang supérieur (40 (II, 1), 4 ; 7-8). Ce sont des divinités bienheureuses, dépourvues de troubles et de passions (50 (III, 5), 6, 10).
18. Plotin discutera successivement des lieux (chap. 3, 2-28) et des configurations (chap. 4). Les lieux semblent ici n’être que la position d’une planète dans les signes du zodiaque. Il n’y aurait pas référence à la théorie astrologique des douze lieux (voir l’Annexe, p. 343-344).
19. Si ce sont les lieux du zodiaque et les configurations qui amenaient les planètes à avoir tel ou tel effet, chaque planète produirait le même effet lorsqu’elle se trouverait dans tel lieu et dans telle configuration. Plotin ne semble pas honnête dans cette critique, car il a déjà expliqué au traité 28 (IV, 4), 34, 14-23 et 35, 44-49 qu’une configuration n’exerce pas la même action quand elle relie des planètes différentes et qu’un corps céleste n’a pas les mêmes puissances quand il se trouve dans des lieux différents. Sur le rôle et les puissances des configurations, voir 28 (IV, 4), 34-35.
20. L’astrologie s’est établie à une époque ancienne où l’on croyait que les planètes et les constellations circulaient sur un même plan. Il faisait alors sens de dire que les planètes entrent dans les signes du zodiaque, qu’elles se poursuivent les unes les autres, se dépassent, se nuisent ou se fuient. L’interaction entre les corps célestes était plus concrète. Les Grecs, depuis Eudoxe et Platon, ont cependant dilaté l’univers en assignant des orbites différentes aux sept planètes et aux étoiles fixes. Le passage des planètes d’un signe à l’autre se réduit alors à une illusion d’optique qui ne vaut que pour un observateur situé sur la terre. Cette nouvelle distribution des planètes n’a pourtant pas freiné l’essor de l’astrologie même savante, qui ne s’en est pas formalisée. Plotin souligne ici cette incohérence, car l’astronomie platonicienne suppose que les planètes résident sous le zodiaque et n’ont pas de contact direct avec lui. Cela dit, il semble que les épicuriens allaient encore plus loin que Plotin, car ils niaient l’existence même des signes du zodiaque (voir Achille Tatius, Introduction,13, 7-8).
21. Voir supra chap. 1, 15-16 et la note.
22. Les notions de « centre », de « déclinaison », d’« ascension » et de « paresse » appartiennent à la doctrine astrologique des douze lieux. Les centres, l’ascension et la déclinaison ont été expliqués à la n. 6. Plotin ajoute ici la « paresse », car les lieux 2, 6, 8 et 12 sont qualifiés de « paresseux » par les astrologues. Il s’agit de quatre lieux n’ayant aucun rapport de configuration avec le lieu horoscope, c’est-à-dire qu’ils sont inconjoints avec l’horoscope (voir supra n. 8). Les lieux 6 et 12 sont à la fois des lieux de déclinaison et des lieux paresseux.
23. Le terme « épicentre » signifie qu’un astre est sur un centre (voir Sextus, Contre les astrologues,40). Ce sont les deux seules occurrences du mot epíkentros chez Plotin.
24. Du point de vue d’observateurs situés en des lieux différents.
25. Encore une fois, du point de vue de différents observateurs. Le même astre semble, pour les uns, se lever ; pour les autres, se coucher. L’astre qui se réjouit au lever et se chagrine au coucher sera à la fois joyeux et chagrin.
26. Le bonheur est l’état qui convient aux astres (6 (IV, 8), 2, 41-42 ; 28 (IV, 4), 8, 52-53 ; 46 (I, 4), 4, 3 ; 47 (III, 2), 4, 48 et 51 (I, 8), 2, 25). Ils sont perpétuellement bienheureux et ne varient pas d’état selon l’occasion. Lorsqu’elle admet que les astres sont bons ou mauvais et qu’ils changent d’état d’esprit, l’astrologie contrevient à un principe fondamental de la philosophie plotinienne : les astres sont des dieux bienheureux et immuables. Plotin évacue de l’astrologie sa composante mythologique, laquelle assigne aux dieux un caractère, des émotions, des choix et des actions malintentionnées.
27. Le mouvement des astres a pour fonction principale de préserver l’ensemble de l’univers, et pour fonction secondaire d’envoyer des signes aux hommes (3 (III, 1), 6, 18-24). Le traité 14 (II, 2), 1, 12-14 explique que c’est par son mouvement que le ciel préserve les choses qui se trouvent en lui, car la vie du corps réside dans le mouvement. Les astres n’ont pas pour tâche principale de se mouvoir dans le ciel ; traverser les lieux est pour eux un accident rattaché à la vie de l’univers (28 (IV, 4), 8, 34-45).
28. Les oiseaux donnent des signes des événements à venir, mais n’en sont pas la cause (3 (III, 1), 5, 35-36). L’astrologue doit avoir recours à l’analogie en lisant les configurations des astres comme le devin déchiffre le vol des oiseaux (3 (III, 1), 6, 18-24). Le gnostique valentinien Théodote assimile lui aussi le rôle des astres à celui des oiseaux : le vol des oiseaux a une signification, mais il ne produit rien ; il ne fait qu’indiquer ce qui arrivera (Clément d’Alexandrie, Extraits de Théodote, 70). Théodote s’éloigne cependant de Plotin, car il suppose que les astres servent de véhicule à des puissances invisibles qui régissent le destin des générations d’ici-bas. Ces puissances agissent par l’entremise des astres qui les abritent et qui, en eux-mêmes, n’ont aucun effet.
29. Autrement dit, les planètes sont influencées par celle ou celles avec lesquelles elles sont en configuration.
30. Sur les aspects ou configurations, voir l’Annexe, p. 340-341 et les Figures 1 et 3. L’aspect trigone est aussi mentionné par Plotin en 28 (IV, 4), 35, 2-3.
31. Allusion aux lieux aveugles, dans lesquels les signes ou les planètes ne sont reliés par aucune configuration (voir supra n. 8). Aucune configuration, par exemple, ne lie des signes voisins : comme ils sont au plus près l’un de l’autre, deux signes contigus ne se « voient » pas.
32. Sur la notion astrologique de « domicile », voir l’Annexe, p. 342. Plotin présente une version particulière des domiciles planétaires, car la doctrine généralement reçue veut qu’une planète se réjouisse lorsqu’elle se trouve dans son propre domicile et non dans celui d’une autre planète (voir A. Bouché-Leclercq, L’Astrologie grecque, p. 182).
33. Saturne. Voir Ptolémée, Tétrabiblos I, 4 ; Paul d’Alexandrie, Éléments d’apotélesmatique,19, 12 Boer ; et A. Bouché-Leclercq, L’Astrologie grecque, p. 93-97.
34. Pour des hommes qui résident dans l’hémisphère Nord, une planète s’éloigne lorsqu’elle descend vers le tropique du Capricorne, qui se trouve dans l’hémisphère Sud. Le Soleil, par exemple, produit l’hiver lorsqu’il se trouve au loin dans le tropique du Capricorne et il produit l’été lorsqu’il remonte au plus près dans le tropique du Cancer, qui se situe dans l’hémisphère Nord. Sur les signes « tropiques », voir le résumé de Sextus, Contre les astrologues, 11.
35. C’est-à-dire les signes du Capricorne, du Verseau et du Sagittaire, qui sont au tropique d’hiver et qui occupent un lieu opposé par rapport à un homme qui habite l’hémisphère Nord.
36. L’argument mérite d’être développé. Saturne est pour les astrologues une planète froide et malfaisante. Elle a pour domiciles les signes du Capricorne et du Verseau, situés au tropique d’hiver (tropique du Capricorne). Or, Saturne est d’autant plus malfaisante qu’elle réside dans l’un de ses domiciles, provoquant des pluies, des flux intestinaux et des pituites. Plotin objecte que Saturne, qui devrait se montrer moins malfaisante lorsqu’elle s’éloigne de nous, c’est-à-dire lorsqu’elle arrive dans ses domiciles, reste aussi malfaisante ou le devient même plus. Les astrologues pèchent par incohérence, car ils maintiennent simultanément que Saturne est meilleure si elle s’éloigne de nous et qu’elle est plus malfaisante si elle est plus loin de nous, à savoir dans les signes du zodiaque situés dans la région du tropique d’hiver.
37. Concept d’astronomie qui décrit la position de deux planètes situées de part et d’autre de la terre selon un angle de 180 degrés.
38. Il s’agit d’une opposition ou d’un aspect diamétral entre Saturne (froide) et Mars (chaude). Les astrologues ne s’entendent pas sur l’effet qu’il faut assigner à l’aspect diamétral. Les uns disent que les planètes qui se voient selon cet aspect s’opposent, d’autres qu’elles se renforcent. Plotin trouve logique, comme il le précise à la phrase suivante, que des planètes de qualités opposées s’annulent, car le chaud contrecarre le froid et vice versa.
39. Selon les astrologues, les planètes se divisent en deux clans : diurne et nocturne. Celles qui appartiennent au clan du Soleil se réjouissent le jour et lorsqu’elles se lèvent avec le Soleil ; celles du clan nocturne se réjouissent la nuit et lorsqu’elles se lèvent avec la Lune. Voir l’Annexe, p. 339-340. La planète ignée est Mars, voir infra chap. 12, 21-22 et Paul d’Alexandrie, Éléments d’apotélesmatique,19, 13.
40. Plotin soulève l’objection suivante : la nuit n’existe que pour les hommes, lorsque le soleil passe sous l’horizon, et elle n’existe pas pour les astres. Puisque la terre est de dimensions modestes et que les astres se déplacent sur d’immenses cercles et selon l’angle de l’écliptique, les planètes (sauf la lune) ne tombent jamais dans l’ombre de la terre. En outre, puisque le ciel se compose de feu, il y a toujours de la lumière dans le ciel et il fait sans cesse jour. Le traité 40 (II, 1) explique que l’espace interstellaire paraît noir en raison de la subtilité du feu qui se trouve entre les astres et en raison de son éloignement (40 (II, 1), 7, 46-49). Les planètes ont des couleurs et des grandeurs différentes à cause de la proportion variée de feu céleste qu’elles contiennent (ibid. 7, 44-45). Sur l’incohérence de cette dernière doctrine, voir R. Dufour, Plotin, Sur le ciel [Ennéade II, 1 (40)], p. 155-156.
41. Terme technique décrivant la rencontre de deux planètes sur le même méridien ou, pour le dire autrement, lorsque deux astres se trouvent sur une même ligne droite pour un observateur situé sur la terre. Plotin utilise ici le verbe sunérkhomai, mais il préfère le nom parabol ḗ en 3 (III, 1), 5, 4.
42. Ici et à la ligne 15 apparaissent les deux seules occurrences chez Plotin de l’adjectif pl ē síph ō s (qui brille à son plein).
43. Plotin évoque ce fait sans entrer dans les détails. L’explication astronomique ancienne devait être très complexe (compulser A history of ancient mathematical astronomy par O. Neugebauer suffit à s’en convaincre). Quelques repères cosmologiques suffiront, espérons-le, à éclairer un peu le passage. La cosmologie ancienne, depuis Platon, considère en effet que la terre est au centre de l’univers et que les planètes se distribuent en cercles concentriques autour d’elle, à raison d’une planète par cercle (voir l’Annexe, p. 337-338). Le cercle le plus grand et le plus éloigné de la terre est ainsi considéré comme le plus haut. Le cercle le plus petit et le plus près de la terre est considéré comme le plus bas. Une planète qui circule sur un cercle plus grand que celui de la lune et qui est en conjonction avec elle se trouve « au-dessus » de la lune. L’objection de Plotin porte encore une fois sur le fait que les astrologues ne considèrent que le point de vue d’un observateur humain, alors que le cas examiné implique l’interaction de deux planètes en conjonction. Or, un homme ne voit pas le même côté de la lune que voit une planète qui est au-dessus de la lune et en conjonction avec elle. Lorsque la lune est pleine pour nous, elle est nouvelle pour l’astre en conjonction avec elle, et lorsque la lune est nouvelle pour nous, elle est pleine pour cet astre.
44. Contrairement à ce que prétendent les astrologues.
45. Première conséquence : ils disent que la lune est mauvaise lorsqu’elle est nouvelle, mais n’est-elle pas également bonne, puisqu’elle est pleine pour l’astre qui est en conjonction avec elle ? Si c’est l’interaction entre les deux planètes qui prime, il faut accorder préséance à l’hémisphère lunaire qui se trouve du côté de l’astre considéré. Dans ce cas, les astrologues ont tort de prétendre que la lune est mauvaise lorsqu’elle est nouvelle, car elle est pleine de l’autre côté et c’est cela qui compte.
46. Seconde conséquence : les phases de la lune n’ont aucune importance pour la lune elle-même, car elle est toujours simultanément pleine et nouvelle ; elle n’est soumise à aucune modification. La lune a toujours un hémisphère dans l’ombre et un hémisphère illuminé.
47. Pour qu’une planète en conjonction avec la lune soit réchauffée par le soleil, l’astre solaire doit être au plus près d’elle, c’est-à-dire en conjonction avec la lune et le soleil. Cette disposition des astres correspond à la nouvelle lune.
48. Une planète devient bonne lorsqu’elle se réchauffe (supra ligne 7). Or, une planète en conjonction avec la lune se réchauffe lorsque le soleil s’en approche et que la lune est à la fois nouvelle pour nous et pleine pour cette planète. Les astrologues se fourvoient donc, car il est faux de dire que la lune est bonne pour cette planète lorsqu’elle est pleine pour nous (supra lignes 11-12). M. Ficin transpose ici le chap. 12, 12-32, et la plupart des éditeurs font de même.
49. Cette phrase n’est visiblement pas à sa place. Armstrong la replace au début du chap. 7, alors que Igal la situe au chap. 12, 32 (voir n. 107). Nous préférons l’hypothèse d’Armstrong, cette phrase étant la première réplique du dialogue qui ouvre le chap. 7. Sur l’utilité, dans l’astrologie, de l’analogie entre les choses terrestres et célestes, voir 3 (III, 1), 6, 22-23 et surtout 48 (III, 3), 6. À propos des sources de cette doctrine, voir la n. 61 au traité 3 (III, 1) dans cette collection. Sur le fait que les astres envoient des signes, voir 3 (III, 1), 5, 38-41 ; 28 (IV, 4), 33, 25-27 ; 34, 24-26 ; 33 (II, 9), 13, 20-22.
50. Mars et Vénus.
51. L’astrologie puisait dans la mythologie afin d’expliquer la nature et l’influence des planètes et des signes du zodiaque. La mythologie classique rapporte qu’Aphrodite, épouse d’Héphaïstos, commit l’un des ses nombreux adultères avec Arès. Il allait de soi, du moins pour un astrologue, qu’une configuration qui relie Arès et Aphrodite risque de présager des adultères. L’exemple d’Arès et d’Aphrodite qui, lorsqu’ils se rendent témoignage, provoquent des adultères se trouve déjà chez Vettius Valens, Anthologie, 118, 10-11 Kroll.
52. En lisant péra (au-delà) avec les Addenda de H.-S., qui reprennent une suggestion de Igal, au lieu du péras (limite) des manuscrits. Voir J. Igal, « Obervaciones a las Enéadas I-II de Plotino : texto y fentes », p. 248.
53. Il est difficile de savoir à quelle théorie Plotin fait ici allusion. On ignore, entre autres, s’il adoptait le calcul naïf des ascensions (chaque signe occupe trente degrés et se lève en deux heures) ou le calcul scientifique (les signes n’ont pas tous les mêmes degrés d’ascensions et se lèvent plus ou moins rapidement ; voir l’Annexe, p. 344-345). Mais cela n’a peut-être pas tant d’importance. L’essentiel tient dans le principe, bien attesté en généthlialogie, selon lequel chaque degré du cercle zodiacal équivaut à une année. Prenons par exemple la méthode la plus simple pour déterminer la durée de la vie : une personne qui naît sous un signe à ascension rapide (peu de degrés d’ascension) aura une vie plus courte que celle qui naît dans un signe à ascension lente (plus de degrés d’ascension), car chaque degré d’ascension compte pour une année de vie. Dans le cas que présente Plotin, une planète n’agirait qu’après le nombre d’années qui correspond aux degrés d’ascension du signe qui coïncide avec le moment de la naissance, c’est-à-dire avec le centre « horoscope ». Sur le principe « une année par degré », voir Ptolémée, Tétrabiblos, III, 11 et A. Bouché-Leclercq, L’Astrologie grecque, p. 404-405 et 412. Avec les Addenda de H.-S., nous retenons la correction de Igal, anamon ē̂ s (attente), au lieu du anaphorâs (ascension) des manuscrits.
54. Voir supra, chap. 1, 1-2.
55. L’univers ne sera pas dissous (infra chap. 8, 4).
56. Il semble que la dernière phrase du chap. 5 serait plus à sa place au début du chap. 7 qu’au chap. 5, 21.
57. Plotin reconnaît plusieurs types de divination qui se fondent sur l’analogie (48 (III, 3), 6, 25-26). Il mentionne celle par le vol des oiseaux (voir supra, n. 28) et par les autres animaux(chap. 7, 14-16). C’est un principe établi en 33 (II, 9), 9, 40-42 que « le monde tout entier et chacun des dieux annoncent aux hommes les décrets du dieu et font savoir par des oracles les choses qui leur plaisent » (trad. R. Dufour, dans cette collection).
58. Les astres ont pour fonction principale de préserver l’ensemble des choses, mais ils ont pour fonction secondaire d’indiquer l’avenir à ceux qui savent les déchiffrer comme s’ils étaient des lettres (3 (III, 1), 6, 18-24 ; voir aussi 28 (IV, 4), 39, 17-19). Le traité 48 (III, 3), 6, 18-20 affirme lui aussi que les astres sont comme les lettres de la nature. Plotin y précise que le devin ne peut rien de plus que lire les signes, c’est-à-dire annoncer des faits en ignorant la raison pour laquelle ils se produisent.
59. On peut penser au chap. 11 de la Vie de Plotin. Plotin n’avait pas son pareil pour lire les caractères des hommes et prédire ce qui leur arriverait. Il diagnostiqua la mélancolie suicidaire de Porphyre et lui conseilla de partir en voyage. Voir aussi 27 (IV, 3), 18, 19-20 : on peut apprendre beaucoup de choses sur les gens en les regardant dans les yeux, même s’ils ne disent mot.
60. Formule stoïcienne, voir par exemple Sénèque, Questions naturelles, II, 32.
61. Retour à la question posée au début du chap., ligne 3.
62. Formule d’inspiration stoïcienne qui se trouve dans le traité pseudo-hippocratique De la nourriture 23 Littré. Elle apparaît aussi chez Galien, Des facultés naturelles,II, 39, 189, 196 Kühn et Des causes du pouls,88 Kühn. Voir J. Igal, « Observaciones a las Enéadas I-II de Plotino : texto y fuentes », p. 248-249. Cette conspiration coïncide avec ce que Plotin appelle ailleurs la « sympathie » universelle (E. Spinelli, « La semiologia del cielo : astrologia e anti-astrologia in Sesto Empirico e Plotino », p. 296).
63. Nous adoptons, aux lignes 17-18, le texte et la ponctuation de Igal : – tò eû eirēménon « súmpnoia mía » – allà. L’editio minor de H.-S. donne : – toû eû eirēménou – súmpnoia mía, allà. Dans leurs Addenda, aux lignes 16-18, ils suggèrent : tà pánta – kaì m ḕ mónon en henì t ō̂ n kath’ hékasta toû eû eirēménou « súmpnoia mía », allà polù mâllon kaì próteron en t ō̂ i pantí – kaì.
64. C’est le principe au cœur de la cosmologie plotinienne et celui qui fonde l’astrologie : l’univers est un vivant unique et multiple, dont toutes les parties sont interreliées et en sympathie les unes avec les autres (28 (IV, 4), 32). Sur la sympathie, voir la Notice aux traités 27-29 dans cette collection, p. 32-34.
65. Pour un passage parallèle, voir 28 (IV, 4), 32, 32-52.
66. Sur l’âme en tant que principe, voir Phèdre,245c-d. Voir aussi infra, chap. 15, 20-21.
67. Selon Plotin, l’univers sensible subsiste sans changement (voir entre autres 40 (II, 1), 4, 25-33). Voir chap. 13, 18-19, où le cocher qui guide l’animal rationnel peut le faire avancer en ligne droite ou au hasard.
68. Il ne faut sans doute pas prendre Plotin au pied de la lettre, puisqu’il refuse d’admettre que l’âme du monde améliore et rectifie son œuvre (chap. 16, 29-37 ; voir aussi 33 (II, 9), 2, 13-15). L’âme agit sans effort, sans réflexion et de manière naturelle. Elle ne se soucie pas de son ouvrage et ne passe pas son temps à le surveiller ni à le corriger.
69. L’adjectif ariprep ḗ s (remarquable) est unique dans les traités plotiniens. Il s’agit peut-être d’une réminiscence d’Homère, Iliade,VIII, 556, où les astres qui brillent autour de la lune sont dits être ariprepéa les jours où l’éther est sans vent.
70. Puisque toutes les choses s’écoulent les unes des autres, elles peuvent toutes être prédites (chap. 14, 18-19). Tous les événements sont annoncés par des présages (28 (IV, 4), 39, 1-2).
71. Plotin reconnaît que les astres exercent certains effets sur les choses terrestres (28 (IV, 4), 31, 24-29). Pour des exemples de l’influence que les astres, selon les astrologues, ont sur les êtres d’ici-bas, voir 3 (III, 1), 5, 7-14.
72. Le mal est en lui-même un châtiment et il déterminera, chez l’homme, sa réincarnation en bête féroce (15 (III, 4), 3, 13-17). Le châtiment est proportionnel à la faute (6 (IV, 8), 5, 22-24). Les hommes injustes encourent un châtiment, car leur âme est pervertie par leur action vicieuse et elle viendra occuper un lieu inférieur (47 (III, 2), 4, 23-24).
73. Banquet,192e9 ; République,X, 611d2 ; Timée,90d5. Voir 2 (IV, 7), 9, 28 ; 9 (VI, 9), 8, 14-15 et la n. 133 à ce traité ; 23 (VI, 5), 1, 16 et la n. 7 à ce traité. Sur l’expression arkhaía phúsis, voir R. Schicker, « Sur l’interprétation de Plotin Enn.VI, 9, 8, 14-16 ».
74. Voir 51 (I, 8), 12, 5-7 et 51 (I, 8), 14.
75. Rappel, jusqu’à la ligne 6, du mythe de République,X, 616c-617d et 620d-621a. La rotation céleste se divise en effet en étoiles fixes, celles qui gardent la même position les unes par rapport aux autres et qui dessinent les constellations, et en astres errants, c’est-à-dire les sept planètes qui tournent autour de la terre à des vitesses inégales et qui décrivent toutes sortes de danses dans le ciel.
76. Plotin évoque les trois Moires au chap. 15, 9-12.
77. Le pronom aut ē̂ s (elle)peut désigner soit la rotation (Igal), soit la Nécessité (Armstrong).
78. Timée,69c-d (voir aussi 41a-42a). Pour une exégèse de ces passages du Timée, voir 40 (II, 1), 5.
79. Ces dieux en mouvement sont les astres.
80. Notre âme inférieure. Plotin affirme que « Nous, parce que nous avons été façonnés par l’âme que nous ont donnée les dieux célestes et le ciel lui-même, c’est aussi par cette âme que nous sommes associés à nos corps. L’autre âme, en effet, celle par laquelle nous sommes ce que nous sommes, est la cause de notre bien-être, non pas de notre être. C’est du moins lorsque notre corps est déjà engendré que cette âme arrive en apportant une parcelle de raison à notre existence » (40 (II, 1), 5, 18-23, trad. R. Dufour dans cette collection).
81. Sur la faculté passive, voir notamment 26 (III, 6), 4, 43-52.
82. Cette phrase résume 3 (III, 1), 5, 20-24 ; 31-33. Sur l’autre âme, qui s’oppose aux influences à l’œuvre dans le sensible, voir 27 (IV, 3), 7, 27-28. L’âme s’oppose aux affections du corps (3 (III, 1), 3, 23-24, voir Phédon 94c1).
83. République,X, 617e3. Passage cité aussi en 28 (IV, 4), 39, 2 et 39 (VI, 8), 5, 31. Sur le sujet, voir F. Romano, « Azione morale e libero arbitrio in Plotino : ‘La virtù non ha padrone’ [arete adespoton] (Plat. Rép. X, 617e3) ».
84. Théétète, 176a-b. Sur la fuite du monde, thème fréquent dans les traités plotiniens, voir la note 3 au traité 19 (I, 2) dans cette collection.
85. Sur l’impératif platonicien qui commande de se séparer du corps (Phédon 67c5-6), voir 10 (V, 1), 10, 24-30 et 26 (III, 6), 5, 14-29.
86. Il s’agit d’un corps qui ne reçoit qu’une trace de l’âme supérieure, celle qui peut dominer le corps et les passions.
87. C’est-à-dire les choses qui se trouvent « en haut », le beau et les choses divines.
88. Certaines âmes ne vivent que soumises au destin, alors que d’autres acquièrent la maîtrise d’elles-mêmes en adoptant une autre loi que celle de la nature d’ici-bas (27 (IV, 3), 15, 10-23).
89. D. Rolando a eu une expression heureuse à ce sujet : « le degré de détermination astrale est inversement proportionnel au degré de perfection » (il grado di determinazione astrale è inversamente proporzionale al grado di perfeczione), voir « L’anima e le moire : hard astrology e soft astrology nel pensiero di Plotino », p. 252. Plus l’homme est attaché aux choses d’ici-bas et s’abandonne à son âme inférieure, plus il subit l’influence des astres.
90. Plotin distingue ici, sans le dire explicitement, les deux parties de l’âme du monde : la partie supérieure reste dans l’intelligible, alors que la partie inférieure se lie au corps. Ces parties sont clairement distinguées au chap. 18. Les traces que reçoit la partie inférieure sont les raisons (lógoi). Le traité 6 (IV, 8), 8, 13-14 explique que la partie inférieure de l’âme du monde descend vers le corps. Mais des textes postérieurs affirment que même cette partie reste là-haut, dans l’intelligible (15 (III, 4), 4, 4-6 ; 27 (IV, 3), 4, 21-23 ; 9, 33-34). Il est difficile d’expliquer pourquoi Plotin revient à la doctrine du traité 6. Il sacrifie peut-être ici au parallélisme qu’il veut instituer entre l’homme, l’univers et les astres : ils sont doubles, ayant une partie ici-bas et une autre là-haut. Ce parallélisme n’a pas de raison évidente. Plotin tente, semble-t-il, d’immuniser les hommes, les astres et l’univers de l’influence purement corporelle que les parties de l’univers exercent les unes sur les autres. Aucune n’est la parfaite esclave du destin, car elles ont toutes une partie rattachée à l’intelligible et libre des contraintes matérielles.
91. Sur les effets qui émanent du soleil et des autres astres, voir 28 (IV, 4), 35, 37-44.
92. Le soleil et les astres agissent sur les choses sublunaires, mais en gardant sans cesse leur regard tourné vers l’intelligible (28 (IV, 4), 35, 37-39). Le texte des lignes 36-37 a fait l’objet de controverses, mais nous conservons la leçon de l’editio minor, contre les Addenda de H.-S., qui lisent estì au lieu de eisì à la ligne 36 et s ō̂ ma kaì au lieu de kaì s ō̂ ma à la ligne 37. Même si l’on s’attend, après le díd ō sin, à retrouver le verbe estì et non eisì, il semble que le sujet de ces verbes, qui combine un nominatif masculin et un nominatif neutre (h ḗ lios kaì tâlla ; le soleil et les autres astres), permet un balancement entre une conjugaison au singulier et une au pluriel.
93. Igal note avec raison (p. 391, n. 57 de sa traduction) que Plotin emploie ici le pronom masculin autón, qui fait référence au soleil (voir ligne 34). Voir 28 (IV, 4), 35, 37-44 : mentionner l’entourage du soleil, c’est évoquer les conjonctions et les rapports mutuels des astres, autant de considérations qui déterminent l’influence des astres selon les astrologues. Les configurations qui relient le soleil et les autres planètes font que tous les corps célestes deviennent une seule et même chose (28 (IV, 4), 35, 44-45).
94. Comme il l’a fait en 28 (IV, 4), 35, 37-42, Plotin distingue une double causalité du soleil : le soleil réchauffe les choses qui se trouvent sur terre et il transmet progressivement une influence provenant de son âme végétative (i.e. le reste de son âme). L’univers entier, dit Plotin, possède la dernière puissance de l’âme, c’est-à-dire la puissance végétative (14 (II, 2), 3, 1-3). C’est la manière plotinienne d’expliquer que l’âme du monde, selon Platon, coïncide avec le milieu de l’univers et s’étend jusqu’à sa périphérie (Timée 36e). Le soleil agit donc par son âme végétative sur l’âme végétative des vivants d’ici-bas, car tous possèdent une âme apparentée qui leur vient de la partie inférieure de l’âme du monde.
95. Citation approximative de Timée 47e5-48a1 : « Étant donc mélangée, la génération de notre univers (...) ». Platon écrit : Memeigmén ē gàr oûn h ē toûde toû kósmou génesis ; Plotin : memigmén ē gàr oûn d ḕ h ē toûde toû pantòs phúsis. Ce passage est également cité en 48 (III, 3), 6, 12 et 51 (I, 8), 7, 4-5.
96. Il s’agit, dans l’âme du monde, de la partie supérieure qui est toujours tournée vers l’intelligible et qui envoie ses raisons dans l’âme inférieure, liée au corps du monde (supra,lignes 32-34).
97. C’est l’expression que Platon applique à Éros dans le Banquet 202d13 ; ici il s’agit du corps du monde.
98. Contrairement à ce que prétendent les astrologues (supra, chap. 1, 2).
99. Les astres collaborent avec l’univers dans son ensemble (supra, chap. 6, 6-8). Ils sont des parties de l’univers (supra, chap. 7, 10-11). Ils sont aussi des parties du ciel, la rotation céleste produisant des effets sur elle-même, sur ses parties et sur ce qui se trouve sur la terre (28 (IV, 4), 31, 8-12). Ce court chapitre montre que l’action des astres n’est qu’une des nombreuses causes qui affectent l’âme humaine. Pour une énumération de ce type, voir 33 (II, 9), 13, 20-25 : « Et les choses qui, dit-on, se produisent à cause des astres, il faut les prendre pour les signes des événements futurs et tenir que les êtres qui sont engendrés deviennent différents en raison des hasards du sort (car il n’est pas possible que les mêmes choses arrivent à tous les individus), des moments de la naissance, de l’éloignement des lieux et des dispositions des âmes » (trad. R. Dufour, dans cette collection). Voir aussi 27 (IV, 3), 7, 20-30.
100. Comparer ce chap. avec 28 (IV, 4), 38, 7-24 : les astres n’envoient que des influences positives, mais celles-ci provoquent parfois des maux ici-bas, car elles se mélangent, les substrats corrompent ce qu’ils reçoivent, la matière n’est pas toujours bien dominée par la forme et les vivants d’ici s’ajoutent à eux-mêmes beaucoup de choses.
101. Le feu qui réside dans le ciel est différent du feu d’ici-bas, qui est moins pur et moins brillant (40 (II, 1), 7, 19-43).
102. Voir République III, 411b-c, où Platon présente le naturel ardent et le naturel philosophe, en associant les notions d’irascibilité, de manque d’ardeur et de courage. Nous avons ici la seule occurrence de akrokholía (irascibilité) chez Plotin, qui le tire du passage cité de la République.
103. Sur le mélange des influences, voir aussi supra chap. 1, 24-26 ; 2, 5-8 ; 5, 6 et aussi 28 (IV, 4), 38, 12-13 et 39, 28-29.
104. Il s’agit du mélange des influences astrales, mentionné à la fin du chapitre précédent.
105. Les mêmes exemples sont employés contre les astrologues en 3 (III, 1), 6, 1-3. Plotin s’inspire d’Aristote, Physique,II, 2, 194b13 : « car un homme engendre un homme, et aussi le soleil » (voir en outre Métaphysique, Λ 3, 1070a27-28). Sur le fait que le mouvement du soleil le long de l’écliptique est cause des cycles de génération et de corruption, voir De la génération et de la corruption,II, 10, 336a15-b34.
106. Un vivant est déficient lorsque la forme n’a pas dominé la matière et n’a pu s’y installer parfaitement (28 (IV, 4), 38, 19-21).
107. L’ensemble des éditeurs estiment avec raison, depuis Ficin, que les lignes 12-32 ne sont pas à leur place et qu’elles iraient plutôt à la fin du chap. 5. Seul Igal suggère que les lignes 12-18 vont au chap. 5, 21, alors que les lignes 18-32 vont entre les chap. 6-7 et se concluent avec la dernière phrase du chap. 5, celle à propos de l’analogie.
108. Cette phrase doit être lue en continuité avec la fin du chap. 5 : la planète en conjonction avec la lune se réchauffe et devient bonne, lorsque le soleil s’en approche et que la lune, qui est nouvelle pour nous, est pleine pour cette planète. Cela contredit les principes astrologiques selon lesquels la lune est bonne lorsqu’elle est pleine pour nous et mauvaise lorsqu’elle est nouvelle pour nous. Afin de sauver leur doctrine, les astrologues pourraient proposer que le côté obscur de la lune fasse du tort à l’astre en conjonction avec elle, ce qui justifierait que la lune est mauvaise quand elle est nouvelle pour nous. Plotin rétorque que la face obscure de la lune ne fait aucun tort à l’astre au-dessus d’elle.
109. Mars, planète sanguinaire et redoutable. La position décrite est celle d’une conjonction entre la Lune et Mars à la pleine lune. La Lune est alors pleine pour nous et nouvelle pour Mars.
110. Les astrologues auraient raison cette fois, car la lune serait bonne lorsqu’elle est pleine pour nous. D’ailleurs, les lignes 14-18 servent à justifier la position des astrologues (voir chap. 5, 11-13).
111. C’est le même principe que celui à l’œuvre au chap. 5, 4-6, entre la planète froide et la planète chaude dont les effets s’annulent. Il était cependant question d’une opposition au chap. 5, 4-6, alors qu’il s’agit ici d’une conjonction. À la ligne 17, nous lisons t ō̂ i au lieu de tò avec Theiler et Igal.
112. Plotin revient sur la concession qu’il avait provisoirement faite aux astrologues au chap. 2, 2-3 et au traité 3 (III, 1), 6, 6.
113. Le ciel ne contient que du feu, voir la n. 11.
114. Jupiter.
115. Vénus. Jupiter et Vénus, selon Ptolémée, sont de nature tempérée (Tétrabiblos, I, 4).
116. Mars. Cette planète a pour vertu principale de dessécher, car elle brûle et a une couleur de feu (Ptolémée, Tétrabiblos, I, 4).
117. Saturne. C’est une planète froide, car elle est éloignée de la chaleur du Soleil (Ptolémée, Tétrabiblos I, 4).
118. Jupiter et Vénus sont en accord parce qu’elles se constituent d’un mélange équilibré de feu. Elles sont étrangères à Mars, qui possède une surabondance de feu dans sa constitution, et à Saturne, qui est loin du Soleil et donc froide.
119. Mercure.
120. Ptolémée décrit Mercure comme une planète presque neutre ou égale (Tétrabiblos I, 4). La doctrine astrologique veut que Mercure soit une planète ambivalente ou indifférente, pouvant être mâle ou femelle, bonne ou mauvaise, diurne ou nocturne (voir l’Annexe, p. 339-340).
121. Sur l’origine de la colère et sur le lien qu’elle a avec la bile, voir 28 (IV, 4), 28. La partie voisine doit être le cœur.
122. Le traité 28 (IV, 4), 32, 29-30 présente la même analogie entre la bile dans l’homme et son équivalent dans l’univers (i.e. le vivant parfait). Pour le principe de l’analogie entre l’homme et l’univers, voir aussi ibid. 36, 1-8 et 45, 39-43. L’un des principes de l’astrologie grecque est la correspondance entre le macrocosme (l’univers) et le microcosme (l’homme). Les astrologues voient en l’homme un monde en miniature, reflet du monde entier. Ils établissent des parallèles de toute sorte entre les parties du corps humain et celles du ciel : c’est la mélothésie astrologique. La mélothésie zodiacale rattache les parties du corps humain aux signes zodiacaux, posant la tête sur le Bélier et les pieds sur les Poissons, le reste du corps s’étalant sur les signes intermédiaires. La mélothésie planétaire assigne des parties du corps selon les planètes. Jupiter, par exemple, gouverne le sens du toucher, les poumons, les artères et le sperme. Ptolémée assigne la bile à Mercure (Tétrabiblos,III, 13). Pour Démophile, elle revient à Vénus (d’après A. Bouché-Leclercq, L’astrologie grecque, p. 322). L’auteur de l’Hermippus l’attribue à Mars (d’après A. Bouché-Leclercq, L’Astrologie grecque, p. 323). Pour plus de détails sur la mélothésie astrologique, voir A. Bouché-Leclercq, L’Astrologie grecque, p. 318-326. Sextus présente succinctement la mélothésie zodiacale dans son Contre les astrologues 21-22.
123. Sur la sympathie qui règne dans l’univers et qui explique l’action des astres, voir 28 (IV, 4), 32, 4-32. Nous suivons le texte des Addenda, qui lisent analóg ō i avec Orth et Igal, au lieu de alóg ō i (irrationnel).
124. Il est évident pour Plotin que les révolutions des astres exercent une action sur ce qui se trouve sur la terre, et sur les dispositions du corps et de l’âme (28 (IV, 4), 31, 24-29).
125. Nous construisons cette phrase en prenant comme sujet un arkh ḗ (principe) sous-entendu et en donnant à tà pánta un sens adverbial (en totalité).
126. Plotin évoque la volonté de la nature en 27 (IV, 3), 10, 20-22 : lorsque l’âme fait venir les corps à l’être, ils ne peuvent au début s’opposer à sa volonté.
127. Voir Platon, Critias,109c1 et Héraclite, B11 DK = fr. 147 Pradeau.
128. L’image de l’âme qui se compose d’un attelage guidé par un cocher évoque bien sûr Phèdre,246a-b et 253c-255e.
129. Les astres (voir 28 (IV, 4), 33, 25-29 et 38, 5-7).
130. Les choses inanimées, les végétaux et les bêtes.
131. Les hommes.
132. L’univers est un vivant dont le corps est parfait, complet et inaccessible aux affections (27 (IV, 3), 17, 28-29). Plotin considère aussi que l’Intellect est un vivant parfait, qui sert de modèle à l’univers sensible (34 (VI, 6), 7, 15-19 ; 15, 1-6 ; voir aussi 38 (VI, 7), 8, 31 ; 43 (VI, 2), 21, 56-58 ; 22, 2). Dans ce dernier cas, Plotin s’inspire de Timée 31b.
133. Les meilleurs êtres, dans l’univers, sont les astres (supra, lignes 20-23).
134. Phèdre 246e6. Plotin s’inspire de ce passage, qui décrit Zeus comme le premier dieu ordonnant toutes choses, et qui est suivi par l’armée des dieux et des démons, qui inclut les dieux célestes.
135. Les hommes sont des parties secondes et intermédiaires dans l’univers (supra, lignes 24-27).
136. Les choses inférieures sont les végétaux, les bêtes et les corps inanimés (supra, lignes 13-17). Notons que même les choses qui nous paraissent inanimées ont, selon Plotin, une trace d’âme (28 (IV, 4), 38). C’est pourquoi, semble-t-il, Plotin peut affirmer à la phrase suivante que « tous les vivants » se conforment à la raison universelle.
137. Autrement dit, pas même les astres et le ciel.
138. Voir supra, chap. 12, 1-11.
139. La bonne naissance dérive du fait d’avoir des parents illustres et non de l’activité des astres (3 (III, 1), 5, 41-45 et 50-51).
140. Nous lisons gegén ē tai au lieu de genén ē tai, avec les Addenda de H.-S., qui corrigent l’erreur typographique de l’editio minor.
141. Le traité Sur le destin énumère les trois mêmes causes de la richesse : la découverte d’un trésor, un don reçu de quelqu’un et le fruit du labeur (3 (III, 1), 1, 30-32). Sur la découverte d’un trésor, voir aussi 28 (IV, 4), 31, 43-45. C’est sans doute une allusion à l’exemple classique d’Aristote, sur la personne qui creuse un trou pour planter une plante et découvre un trésor (Métaphysique Δ, 30,1025a14-19).
142. Sur le fuseau, voir supra le début du chap. 9. La description du fuseau vient en fait avant le récit des choix de vie dans la République. Le fuseau, en dehors des deux mentions qu’en fait le traité 52, n’est évoqué qu’en 15 (III, 4), 6, 49.
143. République X, 617d-620d. Sur le choix de vie que font les âmes dans le mythe d’Er, voir traité 15 (III, 4), 5.
144. République X, 620d-621a. Les aides sont les Moires et le démon assigné à chaque âme. Plotin a déjà évoqué les Moires, supra, chap. 9, 1-6. Plus concrètement, les êtres qui se trouvent dans le fuseau sont sans doute les astres.
145. Voir supra, chap. 12, 5-7 et chap. 13, 8-10.
146. Il s’agit de Clotho. Sur les trois Moires, voir République X, 620d-e. Voir aussi Lois XII, 960c.
147. La magie n’a d’influence que sur la partie inférieure et irrationnelle de l’âme (28 (IV, 4), 40, 23-25). L’homme qui est sous l’emprise d’un charme n’est pas vraiment lui-même, car il n’accorde pas préséance à son âme supérieure et rationnelle, qui est son véritable soi.
148. Allusion à Phèdre 248a.
149. Sur la nature originelle de l’âme, voir supra, chap. 8, 13-15.
150. Sur l’âme en tant que principe, voir supra,chap. 8, 2.
151. Renvoi au traité suivant dans l’ordre chronologique : Qu’est-ce que le vivant ?
152. Voir supra chap. 13, 3-4 et Phèdre 246c1-2, où Platon ne fait toutefois pas intervenir de « raisons ». À partir d’ici et jusqu’à la ligne 36, Plotin présente trois interprétations qu’il faut rejeter. La réponse adéquate sera exposée ensuite.
153. C’est la manière dont les gnostiques, dit Plotin, conçoivent la production de l’univers : chaque chose vient après l’autre et le feu apparaît en premier (33 (II, 9), 11, 27-29). Or, Plotin refuse que la production du monde se déroule dans le temps (33 (II, 9), 3, 7-14 ; 7, 1-2 ; 8, 1-3). Les parties de l’univers n’apparaissent pas l’une après l’autre, comme si un artisan les fabriquait, mais d’un seul coup (31 (V, 8), 7, 8-14).
154. Ce semble être une allusion aux cycles cosmiques : au début de chaque cycle, l’âme du monde produirait de manière linéaire chacune des choses que contient l’univers, puis assisterait passivement à leur interaction.
155. Plotin a déjà rejeté cette façon de voir dans le traité 33 (II, 9), 2, 13-15 : l’âme ne s’affaire pas, ne corrige rien et gouverne par la seule contemplation de ce qui la précède, sans user de réflexion. Le verbe diorthoûn (remédier) a une connotation gnostique (voir la n. 41 au traité 33).
156. Cette possibilité est repoussée en 27 (IV, 3), 16, 6-8, mais la suite du chap. 16 du traité 27 laisse entendre que ce que nous considérons comme des maux n’en sont pas vraiment et dépendent des raisons. C’est la doctrine qu’expose le traité 47 : la raison « produit même les prétendus maux selon un plan rationnel, car elle ne souhaite pas que toute chose soit bonne » (47 (III, 2), 11, 3-5 ; trad. R. Dufour). Voir aussi 47 (III, 2), 18, 18-26. Une telle doctrine pourrait être difficile à concilier avec d’autres passages où c’est la matière et non la raison qui cause les maux (voir en particulier 51 (I, 8), 3-5).
157. République I, 342b3 : il n’y a dans l’art ni déficience ni erreur.
158. Chrysippe répète souvent qu’il n’y a rien de blâmable ni de répréhensible dans l’univers, car tout s’y produit selon la meilleure nature (SVF II, 1178). Plotin lui-même professe cette doctrine (6 (IV, 8), 2, 14-16 ; 28 (IV, 4), 42-22-24 et 47 (III, 2), 17, 80-85).
159. Thèse héraclitéenne (voir J.-F. Pradeau, Héraclite, Fragments, p. 52-53). L’univers se compose de contraires (51 (I, 8), 7, 2-3).
160. Référence à Timée 52d, où le réceptacle est mis en mouvement par les traces des éléments avant que le démiurge n’intervienne.
161. L’univers sensible est un mélange de raison et de matière (47 (III, 2), 2, 39-40).
162. Voir, dans un autre contexte, la question que se pose Plotin à propos du démiurge gnostique : est-il une pensée (33 (II, 9), 11, 17-27) ? L’une des objections soulevées à cet endroit comme ici, c’est de savoir comment une pensée peut produire et comment l’on peut concevoir son action.
163. La nature (à savoir la partie inférieure de l’âme du monde, qui est végétative et génératrice) n’a pas la connaissance et se contente de produire (28 (IV, 4), 13, 7-8). Plotin prend le contre-pied du chap. 16, 19, où était avancée et rejetée l’hypothèse selon laquelle les raisons existent non pas en tant qu’elles produisent, mais en tant qu’elles ont la connaissance.
164. En d’autres mots, c’est la puissance supérieure de l’âme qui donne la capacité de produire à la puissance inférieure et végétative.
165. C’est le thème, si fréquent chez Plotin, de l’absence de réflexion et de calcul rationnel dans les réalités intelligibles et notamment dans l’âme du monde qui produit l’univers. Plotin réagit à la doctrine du Timée, qui décrit le démiurge comme un être qui raisonne et calcule. Voir la n. 40 au traité 33 (II, 9).
166. Plotin établit la succession suivante : l’Intellect donne les formes intelligibles à la partie supérieure de l’âme du monde, laquelle les reçoit à titre de « raisons » (lógoi) pour les donner à la partie inférieure de l’âme du monde, qui produit le monde sensible. Cette doctrine est expliquée plus clairement au chapitre suivant. Voir à ce sujet L. Brisson, « Lógos et Lógoi chez Plotin : leur nature et leur rôle » et R. Dufour, « Le rang de l’âme du monde au sein des réalités intelligibles et son rôle cosmologique chez Plotin ».
167. Unique occurrence, à la ligne 24, du terme hupostáthm ē (sédiment) chez Plotin.
168. Sur la nécessité que des maux existent dans l’univers, voir 19 (I, 2), 1, 1-2 ; 47 (III, 2), 5, 29 et 51 (I, 8), 6 et 7, qui renvoient à Théétète 176a-b. Il est impossible que les maux n’existent pas (46 (I, 4), 11, 15-16).
169. Plus encore, l’univers n’existerait pas sans les contraires (supra, chap. 16, 45-46). Les maux ne sont pas dépourvus d’utilité pour la complétude de l’univers (47 (III, 2), 5, 7-9).
170. Argument stoïcien : l’utilité de beaucoup de végétaux et d’animaux reste cachée, mais on la découvrira au fil des siècles (SVF II, 1172). Les lions, les panthères et autres fauves servent, par exemple, à exercer le courage des hommes (SVF II, 1152, 1163 et 1173). Le venin du serpent et la bile de la hyène, par exemple, entrent dans la composition de médicaments (SVF II, 1181.2). Sur l’utilité des maux et des vices, voir 47 (III, 2), 5, 7-25.
171. Selon Chrysippe, le vice se produit conformément à l’ordre de la nature et il est utile à l’univers (SVF II, 1181.1 et 1181.3).
172. Cette remarque sur la beauté artistique surprend. En note à sa traduction, Igal a sans doute raison d’expliquer ce passage au moyen de République X, 604d-e : une représentation théâtrale est plus facile à représenter si le poète met en scène l’élément irrationnel, source de la souffrance, des gémissements, de l’indolence et de la lâcheté. L’art éprouve de la difficulté à imiter le caractère réfléchi et serein de la rationalité.
173. Même exemple en 47 (III, 2), 5, 16-21 : le vice a son utilité, car il tient l’homme aux aguets et garde l’intellect éveillé.
174. Comparer les lignes 8-16 et, supra, chap. 17, 14-17. L’Intellect est pour Plotin le véritable démiurge (5 (V, 9), 3, 25-26 et 10 (V, 1), 8, 5). L’âme qui vient après l’Intellect est la partie supérieure de l’âme du monde. La réalité de troisième rang n’est pas facile à identifier. D’un côté, ce pourrait être le monde sensible (voir par exemple 2 (IV, 7), 13, 15-16). De l’autre, ce pourrait être la partie inférieure de l’âme du monde, celle qui reçoit des traces de la partie supérieure. Le chap. 9, 32-34 affirme en effet que la partie supérieure de l’âme du monde envoie des traces d’elle-même dans sa partie qui est tournée vers le sensible. Les chap. 17 et 18 décrivent en outre le transfert des raisons (lógoi) de la partie supérieure à la partie inférieure de l’âme du monde. Enfin, la suite du chap. 18 évoque trois principes dont le troisième se meut par accident, parce qu’il est dans la matière. Il ne peut s’agir, semble-t-il, que de la puissance inférieure et végétative de l’âme du monde, qui est immanente à la matière (supra, chap. 17, 7-9).
175. Platon soutient que le monde sensible est une image d’un modèle qui reste toujours identique (Timée 28c-29d et92c7). Sur le monde sensible comme image de l’intelligible, voir 22 (VI, 4), 10 ; 31 (V, 8), 12, 11-22 ; 33 (II, 9), 4, 25-26 ; 8, 16-18 ; 28-29.
176. Le contexte suggère que les principes de premier, deuxième et troisième rang sont respectivement l’Intellect, la partie supérieure de l’âme du monde et la partie inférieure de l’âme du monde. Cela ne va pas de soi, puisque Plotin affirme ailleurs que ces principes sont l’Un, l’Intellect et l’Âme (10 (V, 1), 8, 1-14). Toujours est-il que la notion de mouvement par accident, pour l’âme, vient d’Aristote, De l’âme I, 4, 408a31-34 : l’âme n’a pas de mouvement par soi, mais elle est mue par accident à cause du mouvement qu’elle induit dans le corps auquel elle appartient. Sur le fait que Plotin, aux chap. 17 et 18, escamote l’Âme hypostase dans sa description des réalités qui suivent l’Intellect, voir R. Dufour, « Le rang de l’âme du monde au sein des réalités intelligibles et son rôle cosmologique », p. 94-95 et H.J. Blumenthal, « Soul, World-Soul and Individual Soul in Plotinus », p. 58.
177. C’est-à-dire l’âme inférieure et végétative qui est dans la matière.