Statue (Bwile, Tumbwe).

République démocratique

du Congo. Bois, clous de laiton,

verre, hauteur : 36,2 cm.

Collection Felix.

 

 

Figure d’ancêtre féminine.

 

 

L’Empire mandingue

 

Sur la rive gauche du haut Niger, à peu près à mi-chemin entre Siguiri et Bamako, se trouve le village de Kangaba, appelé aussi Dioliba ou Diéliba, du nom du grand fleuve sur les bords duquel il est situé[7]. Ce village sert de résidence habituelle au chef d’une famille mandingue ou malinké, du groupe des Keïta, qui y exerce le pouvoir depuis plus de treize siècles, avec une seule interruption de quinze ans de 1285 à 1300, et qui est vraisemblablement la plus ancienne dynastie du monde encore en exercice. Seulement, après avoir été successivement un simple chef de canton, puis le maître d’un royaume et enfin celui d’un véritable empire, le mansa de Kangaba a redescendu ensuite la courbe, redevenant un modeste roi ou chef de province, pour n’être plus aujourd’hui que l’humble chef de canton qu’était, vers le début du VIIe siècle, le plus lointain de ses ancêtres.

 

Cependant ce petit village du haut Niger fut, pendant plusieurs centaines d’années, la principale capitale du plus vaste empire qu’ait connu l’Afrique noire et de l’un des plus considérables qui aient existé dans l’univers, l’empire du Manding ou Mandé ou, pour employer le nom que nous ont légué les historiens et géographes arabes et qui n’est autre que la forme peule du mot « Mandé », l’empire du Mali ou Melli.

 

Le Manding est proprement la province dont Kangaba est le chef-lieu et dans laquelle se trouvent les mines d’or réputées du Bouré ou Bouté, le Bitou des auteurs arabes. Ses habitants portent, selon le dialecte, l’un des noms de Mandenga, Mandinga ou Mandingo, dont nous avons fait Manding comme nom de pays et Mandingue comme nom de peuple, et sont appelés par les Peuls Malinké, forme que nous avons adoptée communément pour désigner les Mandingues proprement dits et leur dialecte, réservant l’appellation de Mandingues ou Mandé à l’ensemble de la population dite Ouangara par les Arabes.

 

Depuis plusieurs siècles, les mansa ou rois du Manding menaient à Kangaba une existence obscure, lorsque aux environs de 1050, celui qui régnait alors fut converti à l’islamisme par un Almoravide, fit le pèlerinage de La Mecque et commença à nouer avec les États voisins des relations qui furent favorables à l’accroissement de sa puissance et au développement de son pays, en même temps qu’il cessait de se considérer comme un vassal de l’empereur de Ghâna. Jusque-là, c’était surtout le Bambouk qui fournissait la poudre d’or dont le commerce enrichissait Ghâna et entretenait des échanges actifs et continuels entre le Soudan et l’Afrique du Nord. Les Almoravides ayant appris à connaître le chemin du Manding et l’ayant enseigné aux caravanes marocaines, ce fut le Bouré qui, désormais devint la principale source de production du métal précieux, ce qui ne contribua pas peu à remplir le trésor du roi du Manding et à ouvrir à son peuple des horizons nouveaux.

 

Plusieurs auteurs arabes nous apprennent, qu’en 1213, un mansa du Manding, nommé selon les uns Moussa et selon d’autres Allakoï, se rendit en pèlerinage à La Mecque. Il y retourna trois fois durant son règne, ce qui indique qu’il disposait d’une certaine fortune et ce qui ne manqua pas de grandir son prestige.

 

Mais les richesses du roi de Kangaba et la réputation des mines d’or du Bouré devaient exciter des convoitises. Profitant de la mollesse des successeurs immédiats de Moussa dit Allakoï, le roi de Sosso Soumaoro entreprit et réalisa, vers 1224, la conquête du Manding, qu’il annexa brutalement à son État. Cependant Soundiata Keïta, appelé aussi Mari-Diata, petit-fils de Moussa, résolut de rendre l’indépendance à son pays et y réussit. Après s’être procuré l’alliance des chefs mandingues qui résidaient à l’Ouest, au Sud et à l’Est de Kangaba et les avoir amenés, de gré ou de force, à lui obéir, il recruta chez eux les éléments d’une puissante armée, à la tête de laquelle il marcha contre son éphémère suzerain. Les deux princes se rencontrèrent en 1235 à Kirina, non loin de Koulikoro, près du Niger, où Soumaoro fut défait et tué. Sans perdre de temps, Soundiata continua sa marche victorieuse, entra en maître à Sosso, poussa jusqu’à Ghâna qu’il prit et détruisit (1240), surtout dans le but de faire reporter sur lui-même la renommée qui s’attachait à cette antique capitale d’un glorieux empire, et jeta ainsi les bases d’un puissant État. Il ne se contenta pas d’être un grand guerrier : les traditions disent qu’il donna tous ses soins au développement de l’agriculture, qu’il introduisit dans son pays la culture et le tissage du coton et qu’il fit régner la sécurité la plus absolue d’un bout à l’autre de son royaume. Ce prince si remarquable périt en 1255, dans sa capitale, victime d’un accident survenu au cours d’une fête publique.

 

Son successeur, le mansa Oulé, renouvela la tradition inaugurée par Baramendana et se rendit à La Mecque, tout en reportant plus loin vers l’Ouest les limites de l’empire naissant et en y incorporant le Bambouk, le Boundou et la majeure partie de la vallée de la Gambie.