Chanson de la plus haute Tour1
Oisive jeunesse
À tout asservie,
Par délicatesse
J'ai perdu ma vie2.
5 Ah ! Que le temps vienne
Où les cœurs s'éprennent.
Je me suis dit : laisse,
Et qu'on ne te voie :
Et sans la promesse
10 De plus hautes joies.
Que rien ne t'arrête
Auguste retraite3.
J'ai tant fait patience
Qu'à jamais j'oublie ;
15 Craintes et souffrances
Aux deux sont parties.
Et la soif malsaine
Obscurcit mes veines.
Ainsi la Prairie4
20 À l'oubli livrée,
Grandie, et fleurie
D'encens et d'ivraies
Au bourdon farouche
De cent sales mouches.
25 Ah ! Mille veuvages5
De la si pauvre âme
Qui n'a que l'image
De la Notre-Dame !
Est-ce que l'on prie
30 La Vierge Marie ?
Oisive jeunesse
À tout asservie
Par délicatesse
J'ai perdu ma vie.
35 Ah ! Que le temps vienne
Où les cœurs s'éprennent !
Mai 1872.