Avertissement1

Ces écritures-ci sont d'un jeune, tout jeune homme2, dont la vie s'est développée n'importe où ; sans mère, sans pays, insoucieux de tout ce qu'on connaît, fuyant toute force morale, comme furent déjà plusieurs pitoyables jeunes hommes3. Mais, lui, si ennuyé et si troublé, qu'il ne fit que s'amener à la mort comme à une pudeur terrible et fatale. N'ayant pas aimé de femmes, – quoique plein de sang ! – il eut son âme et son cœur, toute sa force, élevés4 en des erreurs étranges et tristes. Des rêves suivants, – ses amours ! – qui lui vinrent dans ses lits ou dans les rues, et de leur suite et de leur fin, de douces considérations religieuses se dégagent peut-être. Peut-être se rappellera-t-on le sommeil continu des Mahométans légendaires5, – braves pourtant et circoncis ! Mais, cette bizarre souffrance possédant une autorité inquiétante, il faut sincèrement désirer que cette Âme, égarée parmi nous tous, et qui veut la mort, ce semble, rencontre en cet instant-là des consolations sérieuses et soit digne !

A. Rimbaud