Scène 8
ANGÉLIQUE, TOINETTE
TOINETTE. – Les voilà avec un notaire, et j'ai ouï parler1 de testament. Votre belle-mère ne s'endort point2, et c'est sans doute quelque conspiration contre vos intérêts où elle pousse votre père.
ANGÉLIQUE. – Qu'il dispose de son bien à sa fantaisie, pourvu qu'il ne dispose point de mon cœur. Tu vois, Toinette, les desseins violents que l'on fait sur lui. Ne m'abandonne point, je te prie, dans l'extrémité3 où je suis.
TOINETTE. – Moi, vous abandonner ? j'aimerais mieux mourir. Votre belle-mère a beau me faire sa confidente, et me vouloir jeter dans ses intérêts, je n'ai jamais pu avoir d'inclination pour elle, et j'ai toujours été de votre parti. Laissez-moi faire : j'emploierai toute chose pour vous servir ; mais pour vous servir avec plus d'effet, je veux changer de batterie4, couvrir le zèle que j'ai pour vous5, et feindre6 d'entrer dans les sentiments de votre père et de votre belle-mère.
ANGÉLIQUE. – Tâche, je t'en conjure, de faire donner avis à7 Cléante du mariage qu'on a conclu.
TOINETTE. – Je n'ai personne à employer à cet office, que le vieux usurier8 Polichinelle9, mon amant, et il m'en coûtera pour cela quelques paroles de douceur, que je veux bien dépenser pour vous. Pour aujourd'hui il est trop tard ; mais demain, du grand matin, je l'enverrai quérir10, et il sera ravi de…
BÉLINE. – Toinette !
TOINETTE. – Voilà qu'on m'appelle. Bonsoir. Reposez-vous sur moi.
Le théâtre change et représente une ville.