Vagabonds380

Pitoyable frère ! Que d’atroces veillées je lui dus ! « Je ne me saisissais pas fervemment de cette entreprise. Je m’étais joué de son infirmité381. Par ma faute nous retournerions en exil, en esclavage. » Il me supposait un guignon et une innocence très bizarres, et il ajoutait des raisons inquiétantes.

Je répondais en ricanant à ce satanique docteur382, et finissais par gagner la fenêtre. Je créais, par-delà la campagne traversée par des bandes de musique rare383, les fantômes du futur luxe nocturne.

Après cette distraction vaguement hygiénique je m’étendais sur une paillasse. Et, presque chaque nuit, aussitôt endormi, le pauvre frère se levait, la bouche pourrie, les yeux arrachés, — tel qu’il se rêvait !384 — et me tirait dans la salle en hurlant son songe de chagrin idiot.

J’avais en effet, en toute sincérité d’esprit, pris l’engagement de le rendre à son état primitif de fils du soleil, — et nous errions, nourris du vin des cavernes385 et du biscuit de la route, moi pressé de trouver le lieu et la formule.