Sur la raison grecque, on renverra aux travaux pionniers de J.-P. Vernant, 1962, et de P. Vidal-Naquet, 1981 ; en dernier lieu, voir J.-F. Mattei, 1990. Pour une étude lexicographique de la ratio romaine, cf. A. Yon, 1933 ; en dernier lieu, H. Frank, 1992.
Concept que j’emprunte à T.S.Kuhn, 1980, p. 305.
Comme le rappelle A. Boureau, 1995, p. 37.
Pour une approche théorique du problème, voir E. Panofsky, 1983 ; F. Dagognet, 1975 ; ou encore M. de Certeau, 1982, p. 79 sq. surtout.
1989, p. 8 sq.
La date et le lieu de travail d’Andronikos ne sont toutefois pas bien établis : P. Moraux propose de dater ces travaux vers 46 (1973, p. 48-58) ; H.B.Gottschalk pour sa part propose les années 60 (1987, p. 1079 sq.). Tous deux s’accordent à situer à Athènes les travaux du savant. Personnellement, la date de 46 nous paraît convaincante : on comprendrait pourquoi c’est à cette époque que Cicéron présente une version latine des Topiques, manière de participer à un mouvement intellectuel important et de le faire en latin.
De fin. I, 22 ; cf. Sex. Emp., Hypoth. II, 16-20. La logique stoïcienne est présentée par trois fois dans des ouvrages de 45-44 : les Academica priora (91-98) ; le de fato (11-1) ; les Topiques (26-34 ; 47-49 ; 53-59). Sur l’aristotélisme et Cicéron, cf. W. W. Fortenbaugh et P. Steinmetz éd., 1989.
Et parvenue aux Romains dès cette époque soit par la critique de Carnéade (elle-même transmise par Clitomaque et Philon) soit par l’adaptation qu’en fit Antiochus d’Ascalon, académicien proche des stoïciens. Cf. M. Baldassari, 1985, p. 7, qui s’appuie notamment sur le témoignage de Boèce, in Cic. Top. p. 292,8 Orelli.
Top. 6 ; Orat. 11,5-7. Sur Cicéron et Diodote, cf. Cic., Brut. 309 : « J’avais auprès de moi le stoïcien Diodote qui habitait ma maison et qui est mort récemment. Sous sa direction, je faisais beaucoup d’exercices sur la dialectique, laquelle doit être considérée comme de l’éloquence contractée et comprimée et sans laquelle toi aussi Brutus, tu as jugé ne pouvoir parvenir à cette éloquence normale qu’on appelle de la dialectique dilatée ».
1986, p. 85-89.
Journal de mon voyage en l’an 1769 : « et ce livre précisément, dont triomphent les Français, est pour moi le premier signe de leur déclin. Ils n’ont rien à écrire et font donc des abrégés, dictionnaires, histoires, vocabulaires, esprits, encyclopédies… Les œuvres originales tombent ».
Phil. VIII, 3,8. Toutes les dates citées dans cet ouvrage sont antérieures à l’ère chrétienne ; les exceptions seront signalées.
De nat. rer. I, 41 ; II, 10 : errare atque viam palentis quaerere vitae. Assurément, Lucrèce évoque ici la condition humaine mais le contenu du livre II est fortement marqué par la réalité romaine. Sur la fermeture du temple de Janus : Suét., Aug. 22,1 ; Florus, II, 34 (IV, 12,61) ; cf. P. Gros, 1976a ; sur le temple de la Concorde : Dio., LV, 8,2. Il s’agit du temple construit sur le Forum par L. Opimius en 121 après la mort de Caius Gracchus (App., B.C. I, 26,120 ; Aug., civ. Dei III, 25 ; Plut., C. Grac. 17,8) ; le temple fut promu en 10 de notre ère au rang de sanctuaire de la Concordia Augusta (Dio., LVI, 25,8) ; cf. Ovide, Fasti I, 645 sq. Auguste fit aussi construire un autre temple de la Concorde dans le Portique de Livie (Ovide, Fasti VI, 637), reprenant sans doute le projet, non réalisé, de César d’ériger un nouveau temple à la Concordia nova (Dio., XLIV, 4,4). Sur toute cette question, cf. A. Momigliano, 1942 ; et en dernier lieu, C.J. Simpson, 1991 (avec sa bibliographie n. 1 à 3). L’importance du thème de la concorde dès la fin de la République est aussi confirmée par la présence de Concordia sur les monnaies tardo-républicaines, à partir de 62 : cf. M. H. Crawford, 1974, nos 415 et 417 (deniers de Paullus Lepidus, de 62) ; 429,2a (de P. Fonteius Capito, de 55) ; 436 (de L. Vinicius, de 52) ; 494,41 (de L. Mussidius) ; 529,4a (quinarius de Marc Antoine, de 39).
Dans l’ordre, Cic., Acad. I, 3,9 (sur l’errance) ; Cic., fam. V, 12,4 : commutationes civiles.
Plat., Lois VII, 793c-d ; App., B.C. I, 30 ; 33 ; 60 sq.
Le rôle des généraux est mis en valeur notamment dans les biographies grecques et romaines de Cornelius Nepos, qui posent constamment le problème de leur contrôle par le pouvoir politique. Cf. A.C.Dionisetti, 1988, notamment p. 49 ; sur l’effet des conquêtes sur les mœurs, cf. Sall., Iug. 41 ; sur le rôle des Italiens, cf. G. Luraschi, 1995.
Sur Menenius, Liv., II, 32,11. Sur la constitution romaine, cf. Pol., VI, 11-18 ; de rep. II, 33,57 (et J.-L. Ferrary, 1984, pour la comparaison des exposés de Polybe et de Cicéron). En ce qui concerne l’apparition du thème de la concorde, elle serait liée, selon A. Momigliano (1942, p. 111 sq.), à l’introduction au IVe siècle de la déesse Homonoia en Grèce et en Grande-Grèce. La concordia semble en tout cas rappeler l’idée pythagoricienne d’Harmonie dont Archytas de Tarente avait fait à la même époque le principe de son gouvernement et qui a sans doute influencé une partie de la classe dirigeante romaine, Appius Claudius notamment : cf. L. Ferrero, 1955, p. 167 sq. ; et, plus récemment, M. Humm, 1996. La question reste toutefois complexe, les deux notions d’homonoia et de concordia étant plurielles. Sur l’homonoia, voir les remarques de P. Jal, 1961, p. 222 sq.
A.Momigliano (1942) conteste l’historicité du temple de Camille. Mais la question reste débattue entre les partisans de la thèse de Momigliano, comme L. Richardson, 1978 ; et ses adversaires, tel J.-C. Richard, 1963. Sur l’épisode de Flavius, cf. Liv., IX, 46,4-5 ; Pline, N.H. XXXIII, 17-20 ; Cic., pro Mur. 25 ; Att. VI, 1,8 ; de orat. I, 186 (cf. F. D’Ippolito, 1986, p. 11-12 ; 39 sq. ; 101-103).
De orat. II, 48,199. Cf. aussi de leg. III, 24 : « Si l’ordre suprême ne soulève pas la haine, la plèbe pour son propre compte ne soulève pas de conflits dangereux. » Des Gracques, au contraire, Cicéron écrit que leur politique a renversé l’État, plaçant le peuple au-dessus de l’autorité des magistrats : convellit statum civitatis (de har. resp. 41). Sur l’expression « selon la nature des choses », cf. Cic., de rep. II, 33,57 : ainsi, le tribunat de la plèbe, donné au peuple après une sédition, au Ve siècle, a permis de mieux en contenir les excès (cf. de leg. III, 19 sq. ; de rep. II, 34,59). Si l’idée cicéronienne est globalement claire, cette « nature des choses » reste un objet de débat : cf. L. Perelli, 1972 ; contra, J.-L. Ferrary, 1984. Sur la position de Quintus : de leg. III, 19-22.
Sall., Iug. 41,2 ; 4 ; cf. aussi Catil. 10,1. Sur l’idée de la vertu comme lien social, cf. Denys d’Halicarnasse, pour qui le sens communautaire des Romains les a préservés de la tyrannie et leur a permis de connaître une démocratisation pacifique (cf. P.A.Brunt, 1979, p. 80 ; E. Noé, 1979, p. 24-30). Sur le rôle de la crainte, cf. aussi Sall., Hist. I, fr.9-10 McG. (= Aug., civ. Dei, II, 18), où Salluste fait dépendre la concorde non de l’amor iustitiae, mais de la peur de Carthage. Une idée que les Anciens attribuaient déjà à Scipion Nasica, adversaire en 146 de la destruction de Carthage (Diod., 34/35,4-6 ; Plut., Cato maior 27 ; Flor., I, 31,5 (II, 15,5) ; App., Pun. 69 ; Aug., civ. Dei II, 18), mais qui pourrait bien dater plutôt du Ier siècle. Dans le même sens, Varr., de vita p.R. II, 66 et 67 Rip. ; cf. aussi Velleius Pat. II, 1.
Successivement, Sall., Hist I, 15 : à partir de la mort de Ti. Gracchus, seditiones graves coepisse. Sur l’éclatement de la classe dirigeante à l’époque des Gracques, sa division en deux factions, les auteurs anciens sont unanimes : Cic., har. resp. 19,41. Sur les discordiae civiles, cf. Varr., de vita p.R. IV, 114 Rip. : bicipitem civitatem fecit, discordiarum civilium fontem ; à comparer avec le calendrier brontoscopique de Nigidius Figulus (au 24 oct.) : ἐκ διχονοίας τῶν κρατούντων ὀ δῆμοςπερίεσται (sur ce calendrier, voir plus bas, n. 61) ; cf. aussi App., B.C. I, 2 :ἅνευ τοῦκοίνου ; Florus, II, 5 (III, 17), 3 (sur tous ces textes, C. Nicolet, 1979 ; éd., 1983 ; et P. Botteri et M. Raskolnikoff, 1983). Sur la désunion du peuple : Cic., de rep. I, 31 ; Sall., Iug. 41. Sur le désir de pouvoir des dirigeants, cf. par exemple Varr., de vita p.R. IV, 121 (Non., 499,26) ; 122 (Non., 465,26) : propter amorem imperii magistratus gradatim seditionibus sanguinulentis aut dominatus, quos appeterent.
Sur la concordia ordinum, chez Cicéron, voir H. Strasburger, 1931 ; E. Lepore, 1954, p. 100 sq. ; C. Nicolet, 1966, p. 635 sq. Le περὶ ὁμονοίας de Démétrios de Magnésie circulait entre Atticus et lui (cf. Att. VIII, 11,7).
Expression empruntée à M. Buber, 1986, p. 17.
Sall., Iug. 4,5.
Successivement Cic., de rep. V, 1,1-2 (cf. aussi ORF, 21, 13 = Gell., IV, 20,1 : il s’agit du discours que tint Scipion l’Africain « alors qu’il était censeur et qu’il exhortait le peuple à suivre la tradition ») ; sur Octave, cf. App., B.C. V, 13,128.
La référence aux ancêtres se modifie au fil des siècles : au Ier siècle on rappellera surtout des exemples du IIe siècle ; sous l’Empire, c’est l’époque cicéronienne qui constitue la référence classique : cf. Quint., I.O. IV, 1,9 ; IX, 3,1 : omnes veteres et Cicero praecipue. Par ailleurs, précisons que les Romains distinguaient la consuetudo (terme générique pour désigner la coutume en général et dont l’autorité vient du fait qu’elle repose sur le consensus populaire et sur l’ancienneté) et le mos, qui est un simple usage : ce dernier repose sur le consentement de tous, mais n’est pas sanctionné nécessairement par le temps ; on peut aussi dire qu’il précède en quelque sorte l’usage (cf. Macr., Sat. III, 8,8-10) ; enfin le mos maiorum (les usages des ancêtres) est une catégorie ou espèce de la consuetudo : consensus et ancienneté le caractérisent mais il ne concerne que les « ancêtres romains » et non les hommes en général. Pourtant, parfois ces deux notions (consuetudo et mos) sont utilisées dans un sens équivalent. Sur les définitions juridiques de la coutume : L. Bove, 1961, p. 23 sq. ; J. Gaudemet, 1979, p. 5-63 ; sur les rapports mos/ius, cf. Y. Thomas, 1991a.
D’où, chez Ulpien (D. 1.1.10.2), la définition de la jurisprudence comme notitia rerum, c’est-à-dire comme connaissance des réalités. (M. Villey, 1945, p. 176-177) Dans le même sens, Polybe (VI, 10), insistant sur les ressemblances entre les institutions lacédémoniennes et les institutions romaines, montre que Lycurgue a établi sa constitution par le raisonnement, les Romains, eux, « tirant chaque fois la leçon de leurs mésaventures de façon à choisir le meilleur ». Même idée chez Sénèque (ad Luc. 64,7 sq.).
Pour les définitions du mos, cf. Cic., de inv. II, 22,67 : consuetudinis autem ius esse putatur id quod voluntate omnium sine lege vetustas comprobarit (et sur le caractère informel, cf. aussi Rhet. Her. II, 13,19 [sine lege] et F. Lombardi, 1947, p. 65 sq.). Autre définition dans Varron, ap. Serv., ad Aen. VII, 601 : inveteratus mos ; et dans Festus, qui définit le mos comme « la mémoire des Anciens (memoria veterum) relative aux pratiques religieuses et aux cérémonies antiques » (cf. Festus, p. 146, 3 L. ; et ap. Macr., Sat. III, 8,9). Et après un premier livre sur la religion, le livre II des Faits et paroles mémorables de Valère Maxime est entièrement consacré aux usages (mores, instituta, consuetudinem) des Anciens, c’est-à-dire aux cérémonies privées et publiques, aux usages militaires illustrés par des exemples passés. Sur le consensus : Cic., de inv. II, 22,67 : voluntas omnium ; II, 53,162 : vulgi adprobatione ; le terme de consensus est employé par Gell., XI, 18,4 ; XII, 13,5. Enfin, le statut de la coutume comme partie de l’ordre juridique est explicite dans certains documents officiels : la lex Antonia de Termessibus de 72 ou de 68 (FIRA, I, no 11) reconnaît aux habitants de Termissus Maior l’autonomie qu’ils détenaient avant 91 ; elle reconnaît aussi la validité des normes appliquées dans le passé pour les rapports entre habitants de la ville de Pisidie et citoyens romains, normes qui sont contenues soit dans les lois soit dans la consuetudo (col.2, l.18-22). D’autres textes contiennent la référence simultanée à la loi, au droit et à la coutume : cf. l’inscription de Chios d’époque augustéenne, contenant une allusion à une mesure de Sylla en 80 (Syll.3, II, 785), et l’inscription sur les privilèges de Stratonicée en Carie de 81 (OGIS, II, p. 441, fr. E, l.47-48 = Sherk, RDGE, p. 18) ; sur ces trois textes, voir L. Bove, 1961, p. 53 sq.
Sur la définition générale des devoirs des censeurs, cf. Den. Hal., XIX, 16 (18,19), 5 : τοὺς ἐκβαίοντας ἐκ τῶν πατρίων ἐθῶν ζημιοῦν ; Liv., IV, 8,2 ; 42,3,7 ; Cic., de leg. III, 3,7. Autres références dans T. Mommsen, 1887, V, p. 53 sq. De telles définitions restent de fait très imprécises : d’où l’impression d’arbitraire, que soulignent aussi certaines sources. Par exemple Cicéron qui, dans le pro Cluentio, § 117-135, se livre à une critique du pouvoir des censeurs, définissant leur jugement comme une simple opinio. Il va même jusqu’à dénoncer les usages étroitement politiques de l’action censoriale, la comparant à une proscription (§ 123). Ailleurs, il reprend cette critique, par exemple dans le de orat. II, 287 : le censeur Lépide (en 179) avait rayé de la liste des chevaliers M. Antistius de Pyrgi et ses amis s’indignaient à haute voix de cette rigueur : « Que répondra Antistius à son père, lorsqu’il lui demandera pourquoi on lui a enlevé son cheval, alors qu’il est un excellent colon-cultivateur, rangé, sage et frugal ? – Eh bien, répondit Lepidus, il dira que je n’en crois rien. » La lex Clodia de notione censoris limitait considérablement cet arbitraire : appliquée de 58 à 52, elle « interdisait aux censeurs de chasser quelqu’un d’un ordre… ou de le dégrader… à moins qu’il n’eût d’abord été jugé dans une procédure régulière devant les deux censeurs réunis » (Dio., XXXVIII, 13,2 ; cf. Asc., in Pis. 9 St.). Selon A.E.Astin (1988, n. 25), Clodius avait dû imposer aux censeurs une justification écrite pour toute nota. Sur la loi, en dernier lieu, W.J.Tatum, 1990, selon qui Clodius pensait, en diminuant la censoria potestas, se rallier une bonne partie des sénateurs effrayés par les nombreuses expulsions : une manière, aussi, de ne pas apparaître seulement comme un terrible popularis.
Le carmen de moribus de Caton le censeur (Gell., 11,2,1-2) tentait-il de remédier à cette imprécision, comme le pense A.E.Astin (1978, p. 185-186) ? Un bon exemple de définition se trouve dans Den. Hal., XX, 13,3, qui énumère les mauvaises mœurs privées punies par les censeurs : trop de sévérité à l’égard des esclaves, manque de respect des enfants à l’égard des parents, banquets de trop longue durée… ; cf. Gell., IV, 12 (dont le titre est Notae et animadversiones censoriae veteribus monumentis repertae memoria dignae et selon qui jadis les censeurs punissaient ceux qui ne prenaient pas soin de leur champ ni de leur cheval public). Sur la censure, voir aussi C. Nicolet, 1976b, p. 103 sq. ; sur le caractère symbolique des mores, cf. E. Baltrusch, 1989, p. 2 sq. ; 29 sq.
Cela ne va pas toutefois sans une reconstruction de l’histoire : ainsi donne-t-on au Ier siècle un plus grand rôle à la fondation romuléenne, sans doute parce que, comme le fait remarquer J.-L. Ferrary, avec la disparition du consensus, on cherche dans l’ancienneté une plus grande garantie. La conscience d’une formation progressive des institutions ne disparaît pas pour autant. Seul Denys, un Grec donc, fait vraiment de Romulus l’auteur d’une « constitution » achevée – un législateur à la manière de Lycurgue.
Les leges Aelia et Fufia, peut-être de 153, qui interdisent de proposer une loi entre l’annonce d’élections et la tenue des comices (Schol. Bob., 148 St. ; mais selon G.V.Sumner [1973], contre A.E.Astin [1964], ce contenu ne s’applique qu’à la lex Fufia) ; qui limitent le nombre de jours comitiaux (cf. A.K.Michels, 1967) et règlent l’obnuntiatio, c’est-à-dire le blocage des comices sous prétexte que les auspices sont défavorables. D’autres lois plus tardives participent du même esprit : la lex Caecilia Didia, de 98, qui interdit de proposer plusieurs lois à la fois et oblige à respecter trois marchés (le trinundinum) entre la promulgatio et le vote de la loi. Sur les manœuvres relatives à la tenue des comices, M. Bonnefond-Coudry (1989, p. 246 sq.) offre une bonne synthèse ; cf. aussi E.S.Gruen, 1974, p. 255-256, pour les sources et la bibliographie.
Sur la majesté et sur la lex Appuleia, du tribun L. Appuleius Saturninus, votée en 100, cf. J.-L. Ferrary, 1983. Au Ier siècle, la législation populaire semble mettre plus directement en cause l’autorité du Sénat et des magistrats. Par exemple, les lois cornéliennes de 67 visent, sinon à limiter, du moins à contrôler l’autorité des sénateurs et des magistrats. L’une oblige les préteurs à s’en tenir dans leur iurisdictio à la lettre de leur édit publié à leur entrée de charge (Asc., in Corn. 58 St. ; Dio., XXXVI, 40,1-2 ; cf. A. Metro, 1969) : alors que le respect de l’édit était fondé jadis sur la moralité du préteur, des abus, tels ceux de Verrès, avaient en effet rendu nécessaire la transformation de ces pratiques en lois (Cic., Verr. I, 46,119). Une autre loi du même Cornelius, plus importante de notre point de vue, limitait la possibilité de solutio legis – c’est-à-dire de la dispense des lois accordée à certains, à laquelle recourt le Sénat de plus en plus fréquemment après Sylla –, rappelait la nécessité d’un quorum pour tout sénatus-consulte dispensant des lois et interdisait le droit de veto si un tribun voulait saisir le peuple sur ce point (Asc., in Corn. 57-58 St.). Sur ces lois, voir notamment M. Griffin, 1973. Enfin dans la série des lois visant à limiter l’activité sénatoriale, il faut aussi citer la lex Pupia de 61, qui interdit aux sénateurs de se réunir les jours comitiaux et de faire ainsi obstruction à la tenue des comices : cf. M. Bonnefond-Coudry, 1989, p. 229 sq. L’historiographie a tendance à ne voir dans ces lois « institutionnelles » des populares que des lois de circonstance (cf. par exemple B. Vonglis, 1968, p. 187 sq. ; M. Bonnefond-Coudry, 1989) : il est vrai que la loi cornélienne de 67 sur la solutio legis devait permettre au tribun Cornelius d’empêcher le vote de la lex Calpurnia de ambitu, mais il est aussi remarquable qu’une bonne partie des lois de ce tribun visent à limiter l’arbitraire des sénateurs, comme la loi clodienne sur l’obnuntiatio. Des lois pour protéger la loi en somme. Sans tomber dans l’opposition stricte entre populares et optimates, qui n’est pas toujours pertinente, comme l’a montré Gruen pour l’ensemble de la législation de l’époque (1974, p. 257-258 notamment), il est clair qu’il y a deux courants de pensée, l’un, libéral, qui laisse une large interprétation à l’autorité des magistrats et des sénateurs, l’autre qui vise à réglementer plus strictement par l’activité comitiale : on en trouve l’écho dans les clauses de certains textes législatifs imposant aux magistrats de prêter serment d’obéissance à la loi (cf. lex latine, tab. Bantina, 2, l.9, dans FIRA, I, no 6, p. 82-83) ou encore dans le débat sur la notion de loi autour des années 80, au moment où se mettent en place les lois municipales, issues non des comices mais de l’auctoritas des commissaires (cf. W. Seston, 1976). La loi contre l’arbitraire – c’est aussi l’objet de la lex Clodia sur les censeurs (voir plus haut, n. 19).
Pro Sest. 25,55. Un exemple de lois inappliquées est donné par Plutarque (Cato min. 8,4) : « Une loi ayant été portée qui interdisait aux candidats à une charge de se faire accompagner de nomenclateurs, Caton le Jeune, qui briguait le tribunat militaire, fut le seul qui obéit. » Cf. F. Wieacker, 1961, p. 72 sq.
Successivement, Sall., Catil. 9,1 : ius bonumque apud eos non legibus magis quam natura valebat ; Tac., Ann. III, 25,2 ; 27,2-3. Sur les codifications à partir de Sylla, cf. P. Cerami, 1982, p. 66-67 ; et E. Gabba, 1987 ; F. Casavola, 1990, p. 268 (et ici, p. 123 sq.).
Plut., C. Grac. 3,5-7. Sur le sénatus-consulte ultime, voir en dernier lieu, M. Bonnefond-Coudry, 1989, p. 766 sq. Sur la volonté des Gracques de restaurer la petite propriété, cf. par exemple, E. Gabba, 1976b.
Catil. 52,11 : Sur ce texte de Salluste, cf. L. Canfora, 1993, p. 103-108 ; cf. aussi Sall., Hist. I, 12 McG. (= Aug., civ. Dei III, 17) : Boni et mali cives appellati non ob merita in rem publicam omnibus pariter corruptis, sed uti quisque locupletissimus et iniuria validior, quia praesentia defendebat, pro bono ducebatur. Sur Thuc., III, 82-83, cf. N. Loraux, 1986.
Dans le de oratore, Antoine, qui fut l’avocat de Norbanus, dit que tout le procès tourna autour du sens des mots « la majesté du peuple romain » (de orat. II, 109 ; voir aussi de orat. II, 89 ; 124 ; 164 ; 167 ; 197 ; 201…). Je renvoie sur toute cette question au lumineux article de J.-L. Ferrary (1983) qui, sur la base des Partitiones oratoriae (§ 105) de Cicéron, démêle le quiproquo entre les deux partis.
Cf. aussi Cic., de imp. Cn. Pomp. 17,51 : « nous pouvons sans avoir égard à l’autorité, en ne considérant que la situation elle-même, rechercher la vérité » (omissis auctoritatibus ipsa re ac ratione exquirere possumus veritatem). Pour des exemples antérieurs aux Gracques, cf. L. Ross-Taylor, 1962, p. 27. Le discours de Catulus, cité au paragraphe précédent, est tiré de Cic., de imp. Cn. Pomp. 20,60.
Cf. App., B.C. I, 54,126 (sur ce dernier épisode, voir G. Crifò, 1980, p. 178-179).
Tite-Live oppose ainsi clairement l’esprit traditionnel et ce qu’il appelle nova sapientia, la nouvelle sagesse (XLII, 47,9). Cf. aussi Pol., XIII, 3,2 : « les hommes d’autrefois étaient tout à fait étrangers à ces pratiques [sous-entendu : fondées sur la ruse]. Bien loin de machiner des mauvais coups contre leurs amis pour accroître leur puissance, ils se refusaient même à triompher de leurs ennemis par ruse ». Autres exemples, Velleius Pat., II, 1,5 ; Florus, I, 33 (II, 17), 17 ; I, 39 (III, 4), 7. Cicéron, de son côté, reconnaîtra qu’en cas de crise « il est parfois nécessaire… d’obéir aux circonstances (temporibus parere) plutôt qu’aux coutumes (quam moribus) » (Phil. XI, 27). La critique de l’impérialisme romain repose précisément sur le passage de la moralité à l’utilité (Cf. Pol., XXXVI, 9,11). Sur ce thème, voir par exemple E. Gabba, 1974, p. 639 sq. ; 1977, p. 49 sq. Sur le rôle de la fides dans l’idéologie impériale de Rome, Cicéron a donné des exposés précis : de off. I, 36 ; 38 ; II, 26 ; de rep. III, 26,37, fr.1-3. Cf. aussi W. Waldstein, 1976, p. 68 sq. ; en dernier lieu, G. Freyburger, 1986.
Cf. Cic., Acad. II (Luc.), 5,13.
De nat. deor. II, 3,9. Pour le débat sur la peine de mort, cf. Sall., Cato 51,4 ; 52,30. Quant à l’école de rhéteurs, elle est considérée par les censeurs comme portant des innovations contraires à la coutume : haec nova… praeter consuetudinem et morem fiunt (Gell., XV, 11,2) ; sur Marius, cf. aussi Sall., Iug. 63 ; 85 ; Lucius Plotius Gallus, fondateur de l’école, était un client de Marius (Cic., Arch. 9,20) ; sur cette décision censoriale, voir surtout p. 193-195.
D’abord Cic., de rep. V, 1,1,2. La difficulté de comprendre la langue latine archaïque était relevée dès le IIe siècle : cf. Pol., III, 21 ; et Cic., de leg. II, 23,59 : Cicéron rappelle que les jurisconsultes du début du IIe siècle, Sex. Aelius et L. Acilius, interprètes du vieux code de lois du Ve siècle, la loi des XII Tables, « ont dit qu’ils ne le comprenaient pas bien » (non satis se intellegere). Le mot lesse leur paraît particulièrement obscur (voir aussi ici, p. 102). Sur l’oubli, cf. Nietzsche, Considérations inactuelles I-II (Paris, Gallimard, 1990, p. 97). Sur le concept d’amnésie structurelle, apparu dans les années 1940 avec l’ethnologue Evans Pritchard, The Nuer, pour rendre compte, dans le cas de ce peuple du Soudan, de l’influence des structures sociales sur la mémoire et l’oubli des noms d’ancêtres, cf. M. Douglas, 1989, p. 46 sq. Pour un Romain, en revanche, la mémoire est action, l’oubli paresse. Cf.Varr., L.L. VI, 49 (45) : « meminisse vient de memoria quand ce qui est resté caché dans l’esprit est remis en circulation » ; cf. Cés., B.G. VI, 14.
Successivement, Sall., Iug. 2,4 ; Varron (Ant. rer. div. I, 2a, éd. F. Cardauns = Aug., civ. Dei VI, 2) se plaint de la négligence des pontifes qui oublient les cérémonies (cf. Cic., de leg. II, 29 : « les pontifes ont par négligence laissé périr la législation de Numa »). Cf. aussi Caton (dans Cic., de div. I, 15,28) qui parle de la négligence des augures. Même thème chez Horace, Ode III, 6. Sur le mot religio : Cic., de nat. deor. II, 28,72 ; Gell., IV, 9.
D’abord Liv., XLIII, 13,1 (cf. aussi Suét., Caes. 69 : « aucun scrupule religieux ne fit jamais différer à César une seule de ses entreprises ») ; sur l’ignorance du droit civil : Cic., de div. I, 15,28 ; Brut. 214 (thème qu’on retrouvera chez Tacite : Ann. XI, 15,1 ; Dial. 28 ; 32). Sur l’oubli des auteurs anciens, cf. Brut. 68-69. Au contraire, Plutarque loue Paul Émile d’avoir maintenu les traditions, ne négligeant ni les traditions militaires ni les rites des augures, et surtout n’innovant en rien (ou[te kainotomou~nto”) : Plut., Paul. Em. 3,2-7 ; cf. Liv., XLIV, 33 et 34 ; sur la ruine des monuments, voir les sources dans P. Gros, 1976a, p. 21 sq. (au contraire, sous Auguste, « les sanctuaires ne connaissent plus la vieillesse » : Ov., Fasti II, 61) ; sur Metellus : Cic., Att. VI, 1,17-18 ; Tac., Dial. 28. La référence à Sénèque est tirée du de ben. II, 20,2 ; l’allusion au soldat qui oublie Rome vient de Hor., Odes III, 5,5-12.
Dans l’ordre, Cic., Orat. 120 ; Aug., R.G. 8,5.
Aristote fait de l’accroissement de l’écart entre les riches et les pauvres une des causes des séditions (livre IV), idée que reprennent Polybe puis Salluste. Et Cicéron, en avançant dans le traité Des devoirs qu’une trop grande richesse individuelle ruine les fondements de la cité, n’est pas éloigné d’eux (cf. E. Gabba, 1988). Sur les activités de Caton : Plut., Cato maior 21,5 (cf. J. D’Arms, 1980).
Cf. Festus, p. 106, 25 L. : « luxa membra : membres dérangés et déboîtés ; d’où l’adjectif luxuriosus appliqué à l’homme dérangé dans son patrimoine (in re familiari solutus) ». Sur les lois somptuaires, cf. Gell., II, 24 ; M. Bonamente, 1980 ; G. Clemente, 1981, p. 1-14 ; et en dernier lieu, E. Gabba, 1988.
Cic., de off. I, 14,42 sq. ; l’expression « égoïsme social » est de E. Narducci, 1985, p. 96.
D’abord, Sén., Ep. 77,14 : vita si moriendi virtus abest, servitus est. Sur l’opposition entre liberté et sécurité, cf. aussi Cic., Phil. XIII, 3,6-7. Sur le sens de virtus, lié non aux exploits mais à l’ingenium, cf. D.C.Earl, 1961, p. 28 ; sur la comparaison entre l’homme et la bête, cf. aussi Cic., de off. I, 11 : « Entre l’homme et la bête ceci surtout diffère que la bête… s’adapte à cela seulement qui lui est présent dans l’espace et dans le temps, car elle a fort peu le sens du passé ou de l’avenir. » Sur les notations de temps chez Salluste, cf. Iug. 2 : brevi, immortalia, finis est, occidunt, incorruptus, aeternus, aetatem agunt, mortalium. Le mot mortales pour désigner les hommes est un archaïsme de type catonien, mais il traduit bien chez Salluste le genre humain, par opposition à la divinité.
Sall., Iug. 3,1 : « Les magistratures, les commandements, la participation aux affaires publiques ne paraissent pas vraiment dignes d’être recherchés dans le temps présent. Les honneurs ne servent plus à récompenser le mérite et ceux qui arrivent au pouvoir par l’intrigue n’en retirent ni plus de sécurité ni plus de considération. » L’opposition entre l’imitation qui pousse à l’éloge du passé et à la gloire et l’invidia, la jalousie, sentiment individualiste, se trouve notamment formulée par Cic., Phil. XIV, 6,17 ; cf. aussi Lucr., de nat. rer. III, 75 ; Liv., XLV, 38,6 ; sur la défense du temps présent : Sall., Hist. I, 12 : on appelait « bon citoyen » non pas celui qui avait rendu des services à la patrie, mais celui qui était le plus opulent et le plus puissant à nuire, parce qu’il défendait l’état présent (quia praesentia defendebat).
Cf. M. de Certeau, 1975, p. 11.
Cic., Phil. V, 16,42. L’expression strenua inertia se trouve dans Ep. I, 11,28 (cf. E. Mandruzzato, 1989, p. 88 sq.) ; voir aussi Cic., pro Sest. 47,100 ; 103 : il emploie les mots de tarditas, cunctatio ou desidia. La tarditias est une sorte de laisser-aller hors des honneurs, dans la faiblesse ou les plaisirs – comme la libido, chez Salluste (Iug. 40,3) ou encore l’inertia (Iug. 1,4).
ORF, I, fr.2, p. 101 (discours de Paul Émile ; cf. M. Pavan, 1961, p. 593 sq.) ; Cic., Fam. IV, 5 (lettre de Servius ; cf. aussi Att. XII, 20,1) ; Fam. IX, 1 (lettre de Cicéron à Varron).
L.Varius, éd. Morel : l’ouvrage abordait aussi, semble-t-il, le thème de la mort des tyrans) ; pour le premier ouvrage de Brutus, cf. Diomède, GLK, I, 383, 8 ; le de virtute est dédié en 46 à Cicéron : cf. Cic., Tusc. 5,1,1 ; de fin. I, 8 ; Brut. 249-250 ; Sén., ad Helv. 8,1 ; 9. Selon G.L.Hendrickson (1939, p. 401), le traité se présentait sous forme de lettre. Parmi les traités de Varron, on pensera à certains logistorici, les de virtute ou peut-être de exilio (cf. H. Dalhmann et P.W.Speyer, 1957, p. 171-174) ; de pudicitia (Serv., ad Aen. IV, 45), de insania (Gell., XIII, 4) (sur les logistorici, voir aussi F. Ritschl, 1877 ; F. Della Corte, 1970, p. 238-240 ; B. Zucchelli, 1981). Parmi les traités de Cicéron, on citera les de amicitia, de senectute, de officiis… mais aussi un de virtutibus qui n’a pas survécu (saint Jérôme dans Zach. 1,2, p. 792 (= Patr. Lat. 25, 1429) ; Aug., de trinit. 14,11,14). Sur les prologues de Salluste, on consultera A. La Penna, 1968. Sur Philodème, voir notamment M. Gigante, 1983 ; G. Sbordone, 1969. Pour l’ensemble du débat romain sur les vertus, voir les remarques de S. Weinstock, 1971, p. 228 sq.
Sén., Ep. 8 ; cf. aussi Cic., Tusc. V, 2,5 (et sur la notion de subsidia : Fam. IX, 6,4) ; sur cette conception de la philosophie, cf. P. Hadot, 1977 ; 1995.
Tous les philosophes ne s’accordaient pas toutefois sur cette conception. Le néo-académicien Carnéade « affirmait que, dans pareil langage, il n’y avait rien qui fût de nature à soulager le chagrin… Pour lui, l’argumentation qui se fonde sur l’énumération des maux d’autrui (enumeratio exemplorum) n’était bonne qu’à consoler des gens malveillants ». Au contraire, Chrysippe n’y voyait aucun mal (Cic., Tusc. III, 24,60).
Sur Lucrèce, cf. en dernier lieu D.P.Fowler, 1988, p. 150. Une lettre illustre parfaitement le tourment de Cicéron : Fam. IX, 2,5 (texte cité p. 160). L’expression « manuel de la classe dirigeante » est de S. Mazzarino, 1983, I, p. 38. Le de officiis, écrit fin 44, est entièrement dédié à la réconciliation de la politique et de la morale, qui s’avère impossible dans un régime de tyrannie. Sur les implications politiques de l’ouvrage, cf. E. Gabba, 1979.
Hor., Ep. II, 1, v. 1 : Cum tot sustineas et tanta negotia solusl res Italas armis tuleris, moribus ornes… cf. aussi Juv., Sat. VII, 1 : et spes et ratio studiorum in Caesare tantum. Sur la confiscation de la politique, voir la mise au point dans J. Scheid et F. Jacques, 1990, p. 49-52 (avec la bibliographie). Sur la théorie de Quintilien, voir l’article de I. Lana, 1990, p. 279 sq.
Sén. Brev. vit., IX, 1 ; Liv., XXII, 38,12 ; cf. aussi XXII, 51,2.
Sur Pompée : Cic., de imp. Cn. Pomp. 14,40 ; Florus, I, 40,27. Sur César, Suét., Caes. 37,2 : veni, vidi, vici ; Plut., Cés. 50,3-4 ; Dio., XLIV, 46,1 ; voir aussi, App., B.C. II, 47,192 ; 53,216 ; Pline, VII, 25,91 : celeritatem quodam igne volucrem ; cf.Solin, I, 107. (De même l’inscription triomphale de Cornelius Balbus à Philae [ILS, 8995] met l’accent sur le fait que Balbus a pris cinq cités en quinze jours ! Rappelons qu’au contraire Plaute [Curc., v. 447-448] se moquait de la vitesse.) Cf. aussi Sall., Hist. I, 13 McG. (= Aug., civ. Dei, II, 18) : « à partir de cette époque [après la ruine de Carthage], les mœurs traditionnelles ne déclinèrent plus peu à peu comme auparavant, elles se précipitèrent vers leur ruine à la vitesse d’un torrent » ; et Hist. orat. M. Phil. où le consul Philippus s’en prend aux hésitations des sénateurs « avec votre verbiage et les prophéties de vos devins » (§ 3) alors qu’il faut « se hâter » (§ 8).
Sur la rapidité de César, Cic., Att. VII, 9,4 ; pro Marc. 5 (cf. aussi Att. VII, 20,1 ; IX, 6 ; XVI, 10,1) ; sur Octave : Cic., Phil. V, 16,43 ; la dernière citation est tirée de Phil. XI,11,27.
Sur le respect dû traditionnellement à la vieillesse : cf. Val. Max., II, 1,9-10 ; Gell., N.A. II, 15. Sur la tradition familiale : Cic., de rep. I, 22,35-36 ; sur les jeunes au pouvoir, cf. Cic., de orat. I, 85 ; Sall., Cato 38,2, qui se réfère surtout à une situation post-syllanienne. Sur Scipion l’Africain : Liv., XXV, 2 ; 6-7. Sur Flamininus, Plut., Flam. 3,1-2. Autre dérèglement au IIe siècle, le cas de Scipion Émilien, consul en 147 à 36 ans : App., Lib. 112 ; Rhet. Her. III, 2 (cf. L. Ross-Taylor, 1966, p. 79 ; J. Bleicken, 1968, p. 97) Deux lois réglementèrent le cursus honorum, la lex Villia Annalis de 180 (cf. A.E.Astin, 1958) et la lex Cornelia de magistratibus de 82 (Rotondi, p. 351).
Successivement, Varr., Sat. Men. Sexagessis, éd. Bolisani, p. 264 ; Sall., Catil. 20,10 ; Cic., de dom. 129 ; Att. VII, 7,6 : perdita iuventus (cf. aussi Att. I, 14,5 ; 16,1 ; VII, 3,5).
Successivement, Tac., Ann. II, 88,4 : dum vetera extollimus, recentium incuriosi ; Sall., Catil. 37,3 : « toujours ceux qui ne possèdent rien jalousent les gens de bien, exaltent les méchants ; haïssent l’ancien (vetera odere) et appellent de leurs vœux le nouveau (nova exoptant) ; détestant leur situation, ils s’appliquent à tout changer… » ; Florus, II, 11 (III, 23), 2 ; Cic., Orat. 120. Sur le lien entre ancien et nouveau, voir le discours de Catulus dans Cic., de imp. Cn. Pomp. 20,60 : ne quid novi fiat contra exempla atque instituta maiorum, dit-il.
Sur le culte d’Apollon, cf. en dernier lieu G. Liebeschuetz, 1979, p. 82 sq. Le thème du retour à l’origine sera également cher à Caligula : Cf. Suét., Cal. 16,11 : « on décida que le jour où il avait pris le pouvoir serait appelé “Parilia”, comme s’il se fût agi d’une seconde fondation de Rome ».
Sur la mesure de 92, cf. p. 193-195. Puis, dans l’ordre, Varr., R.R. I, 2,1, repris par Gell., XII, 10,4 (aedituus). Sur l’urbanitas, cf. Cic., Fam. III, 8,1 ; 9,1 ; Brut. 169-172 ; Quint., I.O. VI, 3,17 (cf. J.-M. David, 1983) ; sur la tendance archaïsante, cf. Cic., de orat. III, 11,42 ; cf. aussi Brut. 137 ; de leg. II, 18-19 ; II, 8 (voir aussi les remarques de G. Devoto, 1940, p. 126 ; 149). Sur le style de Caton, Cic., Brut. 67-68. Sur le passé inaccessible : Varr., L.L. V, 5,4 : « ce que l’oubli a aboli déjà pour nos ancêtres, ni Mucius ni Brutus ne sauraient le ramener vers nous ». Sur l’idée de progrès, Cic., Brut. 71 : « rien ne naît parfait » : nihil est enim simul et inventum et perfectum ; ibid., 132 : « Q. Catulus était savant non à la manière des Anciens (antiquo more) mais à la nôtre. » Voir aussi de orat. II, 51 sq. : « les Grecs aussi ont commencé par ressembler à notre vieux Caton, à Fabius Pictor, à Pison ». Même idée dans Horace, Ep. II, 1 ; dans Pomponius Mela, III, 5,44 : « Cornelius Nepos, auteur plus moderne (recentior), donc plus fiable ». Mais aussi Varr., R.R. I, 7,2 : « nos ancêtres tiraient un blé moins abondant et moins bon ». On rapprochera de toutes ces citations un passage des Académiques de Cicéron (Acad. I, 4,13) : commentant le fait qu’il se détourne de l’ancienne Académie (vetus) vers la nouvelle (novam), celle de Philon de Larissa, Cicéron s’exclame : « Il est hors de doute que les choses les plus récentes sont les plus correctes et les plus libres d’erreur. » Plaisanterie mais qui renvoie à une idée de l’époque. Sur cette approche différenciée de la tradition, cf. les remarques de E. Lepore, 1954, p. 219 sq. Plus généralement, sur l’idée de progrès, on renverra à l’étude de A. Novara, 1983.
Successivement Varr., L.L. V, 5,1-2 (cf. aussi Cic., Marc. 4,11 : « il n’est pas d’œuvre que l’âge [vetustas] tôt ou tard ne détruise ou n’anéantisse ») ; et Cic., de rep. V, 1,2.
Successivement, Lachmann, p. 350-351 (sur Vegoia ; cf. en dernier lieu A. Valvo, 1987) ; Plut., Syll. 7,7 (prodiges de 88 ; cf. S. Weinstock, 1971, p. 191 sq.) ; Jul. Obseq., Prod. 57 (118) (cf. Cic., har. resp. 9,18) (ceux de 83) ; Cic., Catil. III, 19 (ceux de 65). Cf. aussi la réponse des haruspices consultés en 56 à la suite d’un grondement suspect (strepitus cum fremitu) dans le territoire latin (Cic., de har. resp. 19,40) ; elle a été rapprochée à juste titre du calendrier brontoscopique de Nigidius Figulus, dont les savants s’accordent à penser qu’il s’agit d’un document d’origine peut-être babylonienne, à laquelle s’ajoute une strate étrusque, et qui fut remanié à la fin de la République romaine, dans les années 50 : cf. A. Piganiol, 1951 ; et pour le texte, D. Liuzzi, 1981. Sur tous les prodiges, voir aussi S. Weinstock, 1971, passim ; et H. Massa-Pairault, 1991, p. 5 sq.
Sur le passage de la comète, signe de la divinisation de César, Suét., Caes. 88,2, qui explique ainsi les représentations figurées de César « avec une étoile au-dessus de la tête » (cf. Virg., Egl. IX, 46, et Serv. auct., ad loc. ; et le témoignage des monnaies : M.H.Crawford, 1974, no 534,1, aurei de l’année 38). Les pythagoriciens et les stoïciens croyaient en la divinité des étoiles et en l’immortalité astrale des grands hommes, et les Romains connaissaient bien ces idées qui, après la mort de César, étaient d’une actualité particulièrement vive (cf. Varr., Antiq. div., fr.25a et 25b Ag. ; Cic., de rep. VI ; cf. aussi S. Weinstock, 1971, p. 342 sq. ; 370 sq.). Et même les épicuriens, dans le cercle de Philodème, commençaient à faire quelques concessions à ces idées : cf. P.G.Woodward, 1989, p. 29-32 surtout. Sur la fin du Nom Étrusque, cf. M. Sordi, 1972a, p. 782 : pour les Étrusques, chaque peuple et chaque individu ont une durée fixe, articulée en périodes et crises, toutes surpassables sauf la dernière, qui est fatale. Mais au Ier siècle, peut-être sous l’influence pythagoricienne, l’idée apparaît que la fin d’un cycle entraîne la naissance d’un autre. La guerre de Pérouse, considérée comme le signe de la fin du Nom Étrusque, troubla profondément les esprits (Prop., I, 21 ; 22 ; II, 1,29). Comme le montre M. Sordi, la victoire d’Octave à Actium en 31 signa la fin de la peur.
Epod. 7,9-10 : « suivant le vœu des Parthes, notre ville va périr de ses propres mains » ; 16,11 : « Le Barbare s’installera en vainqueur sur les cendres de nos maisons. » Il s’agit de la prophétie d’Hystaspe (Lact., Inst. VII, 15,11 : cf. E.J.Bickerman [1946, p. 148] 1985, p. 306 ; A. Momigliano, 1984b, p. 90). Sur l’idée d’expiation, voir aussi Hor., Epod. 7,17-18 : « les destins cruels s’acharnent contre les Romains, ils punissent le crime de Romulus » ; cf. ibid., 16 ; Ode III, 6 (cf. M. Sordi, 1972a, qui trouve à cette idée une origine étrusque).
Successivement : Cic., Att. II, 21,1 : res publica… tota periit (cf. Fam. I, 8,4 ; Q.fr. III, 5,4 ; sur son refus des superstitions : de div. I, 4,7) ; Sall., Hist. orat. M. Phil. 3. Les citations de Lucrèce en fin de paragraphe sont tirées du livre V, v. 310 ; puis 1210-1213.
Sur les âges étrusques : Censor., d.n. 17,6. On appelait en outre Grande Année (magnus annus) l’espace de temps qui séparait deux configurations semblables des signes du Zodiaque, du Soleil et des principales planètes.
La prédiction de Vettius était rapportée par Varron au livre 18 des Antiquités (Censor., d.n. 17,15). Quant à Tarutius, Cicéron le décrit comme un homme « versé dans les calculs des Chaldéens » : in primis Chaldaicis rationibus eruditus (div. II, 47,98). Sur ses calculs, cf. aussi Plut., Rom. 12,3-6 (autres références dans W. Kroll, RE, s.v. Tarutius). L’astrologie est attestée à Rome aux IIe et Ier siècles (Cic., de div. II, 42,87 sq. ; I, 58,132 ; Plut., Syll. 37 ; Mar. 42,7-9). Mais elle ne prend vraiment de l’influence que sous l’Empire. On ne connaît sous la République qu’une expulsion d’astrologues en 139 (Val. Max., I, 3,3) : on en relève dix entre 33 et 93 de notre ère : cf. G. Liebeschuetz, 1979, p. 122 sq. Il est intéressant de relever que, de la même façon, les chrétiens calculeront la date de la Création afin de pouvoir déterminer celle de la fin du monde, annoncée par de multiples prophéties. Sur les « calculs précis » de Varron, ses curiosae computationes, comme dira Arnobe (adv. nat. 5,8), cf. A.T.Grafton et N.M.Swerdlow, 1985.
L’expression « monde à l’envers » est commentée par J.-P. Cèbe (Sat. Mén., Bimarcus 59, t. 2, p. 251). En ce qui concerne les rapports entre religion et politique, on rappellera que la religion, à travers les auspices notamment, était devenue à la fin de la République une arme aux mains des conservateurs (qu’on pense à l’usage qu’en fit Bibulus en 59, par exemple), tandis que son pouvoir dans la vie politique était violemment contesté par certains membres de la classe dirigeante (cf. les mesures de Clodius pour limiter l’obnuntiatio ; et la critique de Sall., Hist. orat. M. Phil. 3 [texte cité plus haut, n. 52]). Quant à l’idée de nouvelle ère, précisons que saeculum ne signifie pas « siècle » à l’origine, mais recouvre la durée d’une génération : cf. Plaut., Trin. 283 ; Tér., Ad. 304 ; Lucrèce (I, 20 ; 467) l’emploie aussi dans ce sens. Mais, dans la pensée étrusque notamment, saeculum, c’est aussi la durée de la vie humaine la plus longue (Censor., d.n., 17,5). Par la suite, le terme devint l’équivalent de cent ans (ibid.). L’idée d’un nouveau siècle, d’une nouvelle ère, concrétisée aussi par l’adoption dans les provinces du jour de naissance du prince comme point de départ de leur année (U. Laffi, 1967), n’était, elle, pas nouvelle, comme le rappelle S. Weinstock (1971, p. 191 sq.) : à l’instar des dynastes d’Orient, et avant Auguste, Sylla en Asie (en 85-84), Pompée dans certaines cités (en 64-63), César en Syrie et en Lydie avaient introduit eux aussi de nouvelles ères. A Rome, ce dernier n’alla pas si loin, mais il réforma le calendrier de la cité en 46 et de nouvelles fêtes furent créées par décret pour commémorer ses victoires ; enfin un mois de l’année prit son nom (Dio., XLIV, 5,2). On peut noter aussi que, dès 43, apparaissent des aurei représentant les planètes, symboles de ce nouvel âge d’or (cf. L. Ross-Taylor, 1934). Cette idée d’une nouvelle ère, qu’on trouvera aussi dans le poème de Virgile, était également dans un poème grec anonyme, le Carmen Cumaeum, écrit sous l’inspiration de la sibylle de Cumes et qui annonçait l’apparition du Xe siècle dédié au Soleil (Egl. IV, 4 et Serv., ad loc.) (sur le thème de l’âge d’or, cf. A. Wallace-Hadrill, 1982 ; S. Blundell, 1987, p. 135-164, surtout p. 156-160).