Pendant les premiers siècles de notre ère, face à un empire qui se désagrégeait, à des invasions de Barbares qui occupaient la moitié nord de la Chine, à une succession de dynasties dans le Sud renversées les unes après les autres par des intrigues et des coups d’État, à des despotes qui faisaient régner une atmosphère de violence et envoyaient au terrain d’exécution sur un simple soupçon, les penseurs arrivèrent à la conclusion que le confucianisme ne pouvait plus apporter une solution à de telles situations. Ils se tournèrent vers l’autre courant de pensée, le taoïsme, qui préconisait le retrait de la société, et ils élaborèrent, à partir de cette philosophie, un art de vivre, qui était aussi un art de survivre. L’érotisme ne pouvait pas rester à l’écart de cette nouvelle tendance. C’est de cette époque que datent les traités sur l’art de la chambre à coucher, comme le Classique de la Fille Sombre. Le plus important est que cette pensée néotaoïste, comme on l’appelle, se caractérise par un raffinement qui va en faire la séduction, au point que certains en Occident estimeront que c’est l’apport le plus attirant de la civilisation chinoise. Ce raffinement imprégnera aussi l’érotisme, au moins pendant plusieurs siècles. Deux mots alors à la mode nous éclairent sur cette pensée.
Le premier, yun, signifiait à l’époque raffinement et rythme, c’est-à-dire aussi poésie et musique ; tout devait avoir du yun, être esthétique ; tout devait être imprégné d’élégance, pour permettre d’échapper au monde de la violence et de la grossièreté. Xi Kang alla au terrain d’exécution en jouant de la musique, avec le seul regret que cette mélodie meure avec lui. Il n’y a jamais eu en Chine une tradition de l’amour platonique comme celle des troubadours du Moyen Âge ; les Chinois l’auraient trouvée étrange, sinon aberrante. Par contre, s’élabora une relation entre hommes et femmes délivrée de tout désir grossier. L’anecdote la plus significative à cet égard raconte qu’un poète allait souvent boire dans une taverne parce que la tenancière était une jolie femme. Une fois ivre, il passait derrière le comptoir et se couchait à ses pieds. Au début, le mari fut jaloux, mais il s’aperçut vite que le poète n’avait pas d’autre désir que s’allonger près d’elle. Le même recueil de faits divers rapporte qu’une femme demanda à son mari de retenir ses amis pendant la nuit pour jauger leur valeur ; elle fit un trou dans la fenêtre de la chambre pour les observer, et le lendemain le mari lui demanda ce qu’elle pensait d’eux comparé à lui.
L’autre terme est fengliu. Il définit des personnages qui se sont affranchis des conventions sociales. Le plus célèbre groupe fut celui des Sept Sages de la Forêt de Bambous, qui se réunissaient pour boire et bavarder à l’ombre des bambous. Cette façon de vivre librement touchait parfois à l’excentricité. Liu Ling, qui buvait beaucoup, se promenait nu chez lui, et, à ses visiteurs qui l’en critiquaient, il répondait : « Je fais de l’univers ma maison et de ma maison mon pantalon. Qu’avez-vous à vouloir entrer dans mon pantalon ? » Ces hommes ignoraient les entraves imposées par la bienséance et les règles sociales, conscients de leur artificialité et de leur hypocrisie. Un personnage fengliu est celui qui se retire en dehors des normes, ne respecte pas la hiérarchie. À quelqu’un qui lui reprochait de se laisser aller à la satisfaction du moment sans se préoccuper de sa réputation, le poète Ruan Ji répondit que sa réputation de demain ne valait pas une coupe d’alcool aujourd’hui. Cette liberté, à l’opposé de la grossièreté débridée, doit être associée à la subtilité et à la délicatesse pour être fengliu, au moins tant que ce terme gardera son premier sens, avant de prendre simplement celui d’érotique ou même carrément de pornographique ; au XVIe siècle, un roman fengliu veut simplement dire un roman érotique et un personnage fengliu un personnage à l’image de ces romans. Selon la même évolution, le mot s’est réduit comme le terme « libertin » en français : pour Pascal, il qualifiait un esprit libre, et un séducteur de femmes pour Crébillon et Laclos. En Chine, la culture raffinée élaborée par le néotaoïsme allait influencer l’érotisme, en particulier dans le cadre d’une institution qui joua un rôle important sous les dynasties Tang et Song, du VIIe au XIIIe siècle : les maisons de courtisanes. La dynastie Tang, établie en 619, créa une période de paix et de prospérité relatives ; la conquête d’une grande partie de l’Asie centrale ouvrit l’empire aux influences étrangères ; outre le bouddhisme, toutes sortes de religions étaient représentées dans la capitale Chang’an (actuelle Xi’an) – l’islam, le nestorianisme, le manichéisme ; les musiques venues de Perse et de l’Inde étaient à la mode ; des troupes de danseurs et bateleurs arrivaient par terre et par mer des royaumes d’Asie centrale et de l’Asie du Sud-Est. Ce fut aussi l’âge d’or de la poésie avec les grands poètes Wang Wei, Li Bo, Du Fu, Bo Juyi.
L’érotisme se teinte de poésie, érotisme très voilé chez les lettrés, beaucoup plus ouvert dans les chansons populaires comme celles-ci :
Au printemps les fleurs dans la forêt séduisent,
Par leurs chants les oiseaux sur les branches ravissent.
La brise printanière est si amoureuse
Qu’elle entrouvre mon corsage de soie.
Amant à la fière allure
Tu me tires hors de la fenêtre
Et tu mords ma joue poudrée,
De tes mains tu veux défaire ma ceinture.
Attends un peu, mon frère,
Dans un moment nous serons seuls
Et mon pantalon, je te laisserai le dénouer.
À la capitale, les courtisanes vivaient dans des maisons souvent luxueuses, agrémentées d’un jardin à l’arrière et regroupées dans un quartier spécialisé, où un temple avait été construit, et, lors des cérémonies religieuses, beaucoup d’hommes s’y rendaient autant pour apercevoir ces belles femmes que pour prier le Bouddha. Ces maisons étaient tenues par une femme plus âgée, parfois elle-même ancienne courtisane. Celle-ci choisissait des filles souvent encore très jeunes, dont elle devenait la mère adoptive et qui prenaient son nom de famille, afin de les éduquer dans un métier nécessitant tout un apprentissage. Elles devaient apprendre à « servir à boire », c’est-à-dire toutes les règles de la politesse pour servir les clients et les distraire. Elles devaient aussi exceller en musique, en danse et en poésie. Au cours des réceptions, il fallait qu’elles soient capables de participer aux joutes poétiques, dont les lettrés étaient friands. Quelqu’un proposait une rime à partir de laquelle chacun devait composer un poème ; ou un convive donnait un premier vers et chacun à son tour devait ajouter le sien jusqu’à former un poème parfait ; assise à côté de chaque lettré, une courtisane était chargée de l’aider autant que de le faire boire. C’est par l’échange de poèmes que l’on faisait savoir de façon voilée ses sentiments et ses intentions, car l’obligation de la courtisane se limitait à distraire, à flirter avec élégance, à utiliser ses talents de musicienne, de chanteuse, de danseuse ; les devoirs s’arrêtaient là. Celui qui voulait aller plus loin devait faire montre d’empressement, savoir gagner le cœur de la belle, et même des cadeaux somptueux ne garantissaient pas d’obtenir ses faveurs. Les bijoux et l’argent offerts pour passer la nuit avec elle restaient sa propriété et elle pouvait s’en servir pour acquérir de beaux habits, des colifichets ou pour racheter sa liberté, car elle devait rembourser les frais de la tenancière qui avait investi dans son éducation. Cette organisation passera au Japon, où les geishas, héritières de ces courtisanes de l’époque Tang, existent encore de nos jours.
Un grand nombre de récits ont pour thème les aventures de lettrés avec des courtisanes. Le plus célèbre est la Vie de Li Wa. Un jeune lettré, venu à la capitale pour se présenter aux examens impériaux, a une liaison avec une courtisane, Li Wa. Pour pouvoir la fréquenter dans la maison où elle travaille, il finit par se ruiner, car les visites en de tels lieux, fort luxueux, coûtaient cher. Une fois sans le sou, il n’est plus le bienvenu. Réduit à l’état de chanteur dans les funérailles, puis à celui de mendiant, il est renié par son père. Alors qu’il erre dans les rues, il est aperçu par Li Wa, dont la patronne a entre-temps déménagé. Émue par son dénuement, Li Wa renonce à son métier et, grâce aux bijoux donnés par ses admirateurs, elle installe le jeune lettré avec elle dans une maison, lui achète des livres pour qu’il reprenne ses études et se présente aux examens. Dès qu’il a réussi et obtenu un poste officiel, elle décide de le quitter et lui conseille de retourner voir son père pour se réconcilier avec lui et d’épouser une jeune fille de bonne famille. Le jeune homme refusant de la perdre, elle accepte seulement de l’accompagner jusqu’à sa ville natale quand il part revoir sa famille. Le père, ému par le dévouement de Li Wa qui a sauvé son fils, décide de les marier et passe outre les préjugés de son origine sociale. Li Wa est restée le modèle de la courtisane au grand cœur. Un autre récit met en scène une courtisane éprise d’un jeune poète, qui l’abandonne après lui avoir juré fidélité et se marie, sous la pression de sa famille, dans le même milieu que le sien. Désespérée, elle refuse de recevoir d’autres clients et tombe dans la misère. Un ami du poète et jadis client de cette femme entraîne de force son ancien amant chez elle, et elle meurt le soir même sous le coup de l’émotion. Ce poète restera hanté par son souvenir et deviendra d’une jalousie si maladive que son épouse divorcera. Ces récits ont un intérêt : ils montrent que les maisons de courtisanes étaient de hauts lieux de l’érotisme, mais, si certaines de ces femmes étaient sans doute vénales, il ne s’agissait pas de bordels et le sentiment jouait un grand rôle dans les relations entre les courtisanes et leurs visiteurs. Une courtisane griffa même si violemment le visage d’un client ivre et grossier que celui-ci, qui devait se rendre le lendemain chez un dignitaire, dut avouer la rebuffade qu’il avait subie.
Mais il ne faut pas idéaliser la condition de ces femmes. Un petit recueil d’anecdotes1 nous apprend que beaucoup rêvaient de se marier, même si elles ne pouvaient espérer qu’un statut de concubine à cause de leur origine sociale. C’était parfois pour leur malheur : ainsi cette femme mariée à un mari jaloux qui la fouetta devant tout le monde dans la rue parce qu’elle faisait signe à un ancien client rencontré par hasard. Le même livre mentionne le cas d’une femme mariée que son mari, une fois arrivé à la capitale, abandonna dans une maison de courtisanes. Là, elle fut prise de force par un policier du quartier, puis donnée comme concubine au fils d’un ministre qui avait dépensé des fortunes pour elle. Ses frères voulurent la reprendre pour la sauver de son malheur, mais elle se rendit compte qu’ils n’étaient pas assez puissants pour l’arracher à sa nouvelle condition et obtint seulement que leur soit donnée une centaine d’onces d’or par son nouveau maître. Par la suite, étant sans doute retournée à son statut de courtisane, « chaque fois que, recevant des hôtes, elle arrivait à ce point de son récit, elle sanglotait longuement ». La plus émouvante histoire est celle de Yan Lingbin : « Yan Lingbin habitait à l’intérieur de la cité sud ; sa manière d’être était très gracieuse (fengliu) ; ses désirs et ses habitudes étaient très raffinés. Aussi était-elle très estimée par les gens distingués de l’époque. Elle était très habile en écriture et savait rédiger des compositions poétiques. Lorsqu’elle voyait des candidats aux examens de doctorat, elle observait à leur égard toutes les règles rituelles d’une manière très respectueuse. Elle demandait à la plupart [de ses hôtes de composer] des chants ou des poésies comme cadeaux ; aussi des fiches de papier de cinq couleurs [où étaient écrites ces poésies] remplissaient-elles toujours une corbeille. Par la suite elle contracta une maladie très grave. Lorsqu’on arriva à la fin du printemps, un jour où le temps était beau et la température était douce, elle ordonna à sa servante de lui installer un siège devant le perron. Elle regarda les fleurs qui tombaient, et poussa plusieurs longs soupirs ; alors, ayant demandé son pinceau, elle écrivit la poésie suivante :
De souffle ne me restent que quelques respirations,
Des fleurs ne subsistent que deux ou trois.
Pour prendre congé, une coupe de vin,
Je vous invite pour une ultime rencontre.
« Ensuite, s’adressant à un jeune garçon, elle lui dit : “Prends ceci pour moi, sors par le quartier de Xuanyang et va jusqu’au quartier de Qinren ; si tu rencontres des jeunes gens qui viennent de réussir leurs examens et qui sont venus se présenter à celui du doctorat, remets-leur ce papier et dis-leur que Mlle Yan, même malade, accueillera ces messieurs.” À la suite de cela, elle ordonna aux gens de sa maison de préparer du vin et des fruits, pour recevoir [les visiteurs].
« Aussitôt ceux qui vinrent lui rendre visite furent nombreux. Alors on joua de la musique et l’on but jusqu’au soir. Puis, laissant couler ses larmes, elle dit : “Je n’en ai plus pour longtemps ; j’espère que chacun de vous rédigera un éloge funèbre, pour m’accompagner [jusqu’à ma tombe].”
« Précédemment les gens de sa maison se disaient qu’elle demanderait [aux visiteurs] une souscription pour les funérailles, afin qu’on la conduise [au tombeau], et ils étaient donc très satisfaits de cette réunion. Mais lorsqu’ils entendirent ses paroles [ne demandant que des poésies], ils en furent très mécontents. Lorsque Yan Lingbin fut morte, le jour de son enterrement on reçut plusieurs lettres. Sa mère les ouvrit pour les regarder. Elles contenaient toutes des éloges funèbres. La mère en colère les jeta dans la rue en disant : “S’il en est ainsi qu’est-ce qui me sauvera dans l’existence ?”2 »
L’érotisme était alors inséparable de ces maisons de courtisanes, de cette atmosphère de fêtes luxueuses qui y régnait, d’une société où la grossièreté n’était pas de mise, inséparable aussi de la poésie. Dans le recueil des Poésies complètes de la dynastie Tang (Quan Tang shi), un chapitre est réservé aux poèmes des courtisanes. L’une d’elles, Xue Tao, qui vivait à Chengdu dans la province du Sichuan, est restée célèbre pour ses poèmes et pour le papier décoré d’incrustations qu’elle fabriquait avec l’eau d’un puits situé dans un parc de bambous.
Elle confiait ses sentiments à la poésie :
Couleur froide d’une ceinture de brume qui commence à se dissiper,
Sons errants que laissent s’écouler les cordes de soie d’un luth.
L’amour me retient de qui venait longuement sur l’oreiller
Et empêche de dormir celle qui est triste au milieu de la nuit.
Au poète Bo Juyi (772-846), les conteurs ont prêté une rencontre avec la courtisane Guan Panpan, qui était alors la maîtresse du duc Zhang Jianfeng :
Sa voix était claire,
Sa danse légère.
Elle jouait sur les cordes d’anciens et de nouveaux airs,
Elle tirait de la flûte d’élégantes harmonies,
Sur le luth elle jouait de vieilles mélodies,
Sur l’échiquier elle dessinait de nouveaux stratagèmes.
Elle polissait des vers pour en composer des poèmes
Et elle reflétait son charme dans ses écrits.
Elle peignait avec son pinceau
Des fleurs qui surpassaient la nature.
En son honneur, le poète composa ce quatrain :
Son onglet en forme de phénix est orné d’or et de nacre,
Des franges parfumées pendent de sa cithare.
Ivre, la belle n’a plus de force,
Elle est semblable à une pivoine agitée par le vent.
Plus tard, après la mort de son amant à qui elle resta fidèle, elle envoya ses poèmes à Bo Juyi pour avoir son avis critique, et il lui répondit :
Passées sont les couleurs de tes vêtements de soie,
Chaque fois que tu les regardes coulent tes pleurs.
Depuis tant d’années tu ne danses plus
Et tes habits restent inutiles dans leur malle.
Bo Juyi écrivit deux longs poèmes, Le Chant des regrets éternels, sur les amours de l’empereur Minghuang et de sa concubine Yang Guifei, et La Ballade du luth, sur une ancienne courtisane mariée à un marchand, qu’elle accompagne lors de ses voyages, mais que cette nuit-là il a laissée seule sur le bateau. Le poète, touché par sa musique, va la rejoindre sur l’embarcation et elle lui chante sa vie :
J’étais une fille de la capitale,
Ma famille habitait à gauche du Tumulus de la Grenouille.
À treize ans, je savais jouer du luth
Et j’étais parmi les courtisanes célèbres de la capitale.
Quand j’avais fini de jouer une mélodie, les lettrés connus m’admiraient,
Quand j’étais fardée et vêtue, les autres filles m’enviaient.
De toute la région, les jeunes gens riches rivalisaient pour m’offrir des cadeaux,
Après chaque morceau, ils me donnaient de nombreux rouleaux de soie écarlate.
Mes épingles à cheveux, quand je chantais et scandais le rythme, tombaient et se brisaient,
Ma jupe de soie rouge était tachée de vin.
Année après année s’écoulait une vie de plaisirs,
Avec les saisons les temps heureux se succédaient sans que j’y pense.
Mon frère est parti à l’armée, ma mère est décédée,
Soir après matin, mon visage a vieilli,
Devant ma porte, les chars se sont raréfiés.
J’étais déjà vieille, autant épouser un marchand.
Mais le marchand ne regarde que les bénéfices et me quitte à la légère,
Le mois dernier, il est allé à Fuchang faire le commerce du thé.
Il va et vient et me laisse seule garder le bateau amarré à la rive.
Tout autour, je ne vois qu’une étendue d’eau
Où se reflète une lune triste.
Au milieu de la nuit, soudain, je rêve du temps de ma jeunesse,
Dans mon rêve, je ne peux me retenir de pleurer
Et mes larmes coulent et se mêlent à mon fard…
Certes, on l’a vu plus tôt, le mariage était une institution sociale dominée par la volonté des parents, car jugé trop grave pour être à la merci de la passion que le temps finit toujours par éroder ; cela restera vrai au long des siècles. Par ailleurs, les maisons de courtisanes étaient faites pour le seul plaisir des hommes. Mais il ne faut pas appliquer à cette époque les mentalités ultérieures et, si l’on considère ce que dit la littérature de l’époque, on voit que des jeunes filles avaient des aventures avant le mariage, dont les parents avaient connaissance sans que cela provoque un drame, comme ce sera le cas plus tard ; certains pères qui voulaient marier leur fille tenaient compte de ses sentiments et pouvaient céder quand elle refusait leur choix. Des fresques nous montrent des femmes aux vêtements largement décolletés. Dans l’empire des Tang régnait un art de vivre où la cuisine, les soins d’hygiène et de santé, l’érotisme formaient un tout. Même si le pays était menacé par des invasions étrangères, troublé par les luttes entre des gouverneurs militaires en cas d’affaiblissement du pouvoir impérial, agité par des rébellions de paysans qui manquaient de terres quand se reformaient des latifundia ou victimes de corvées et d’impôts trop lourds, il n’existait en tout cas pas de terreur idéologique. L’État laissait les villages s’organiser et les fonctionnaires locaux ne rêvaient que de ne pas avoir à intervenir et de pouvoir limiter leurs rapports à cette seule phrase : la paix règne sur l’empire. La Chine ne retrouvera jamais cet âge d’or où l’érotisme avait une place dans une société relativement libre et hautement sophistiquée.