6. Un mystérieux personnage

Au matin de la fête nationale, il commença à bruiner. Il n’y a rien de tel que la persistance d’un temps pluvieux comme celui-ci pour vous déprimer et vous rendre mélancolique. Après le petit déjeuner, Hong Jun descendit jusqu’à l’entrée de l’hôtel et s’aperçut qu’il n’y avait pas grand monde dans la rue qui semblait bien morne. Il resta sur le perron à regarder les rares voitures qui passaient, mais, comme les idées noires de la veille au soir n’avaient cessé de le hanter et qu’en plus il avait mal dormi, il se sentait la tête lourde. Tout compte fait, il préféra retourner dans sa chambre.

Dès 9 heures, il téléphona aux bureaux administratifs de la Dasheng. À entendre sa voix, le seul employé qui se trouvait être de service ne devait pas être bien vieux. Hong Jun lui dit qu’il désirait parler au directeur général adjoint, Luo Taiping. L’autre lui répondit qu’il n’était pas là. Hong Jun expliqua qu’il était un de ses vieux amis venu de Pékin en mission et qu’il ne comptait rester qu’un seul jour, qu’il aurait bien aimé voir son vieil ami mais qu’il avait oublié son numéro de téléphone chez lui. À l’issue de ces explications, l’employé plein de zèle qui se trouvait à l’autre bout du fil lui communiqua l’adresse ainsi que le numéro de téléphone de Luo Taiping et lui expliqua fort aimablement comment se rendre chez lui.

Hong Jun reposa le combiné et, après mûre réflexion, décida de commencer par appeler Luo Taiping chez lui. Ce fut justement ce dernier qui décrocha. Hong Jun lui dit avoir été chargé par Jin Yiying de prendre contact et lui exprima l’espoir de pouvoir s’entretenir de vive voix avec lui le jour même. Luo Taiping ne lui donna son accord qu’après un moment d’hésitation et il eut toutes les peines du monde à lui fixer un lieu de rendez-vous. À Hong Jun qui lui proposait de se déplacer lui-même jusqu’à son domicile il répondit que ça n’était pas pratique. Hong Jun l’invita alors à venir à l’hôtel Shengguo mais Luo Taiping jugea l’endroit tout aussi peu propice. Finalement, il lui proposa une rencontre au pavillon situé au centre du jardin de la Dasheng dans la demi-heure qui suivait. Hong Jun acquiesça non sans éprouver comme une certaine méfiance en raison de l’impression bizarre que cet homme lui avait faite.

Hong Jun arriva le premier au rendez-vous. Une fois sur les lieux, il réalisa que le choix de Luo Taiping était des plus judicieux : comme c’était un jour férié et qu’il pleuvait, les passants étaient rares dans cette rue de banlieue industrielle et le jardin était plus désert encore. Sous la galerie couverte il n’y avait rien d’autre qu’un balayeur qui s’abritait de la pluie. Le pavillon se trouvait être au cœur du jardin et les alentours étaient dissimulés par les arbres si bien que, quand bien même y aurait-il eu quelqu’un sur la route, il lui aurait été très difficile d’apercevoir ceux qui pouvaient se trouver à l’intérieur. L’endroit offrait donc toutes les garanties de discrétion pour un entretien – ceci, dans la mesure où les protagonistes voulaient éviter d’être espionnés. Mais pourquoi donc Luo Taiping avait-il un tel souci de prudence ? Qui voulait-il donc éviter ? Apparemment, derrière la maladie de Tong Wenge se cachait bien quelque chose. Hong Jun ne put s’empêcher d’éprouver une certaine excitation.

Juste à ce moment-là, sur l’allée située au nord, arrivait un individu qui poussait sa bicyclette. À cause de son imperméable de matière plastique et de son chapeau qui lui dissimulait le visage, il était impossible d’en distinguer les traits. Arrivé près du pavillon, il y appuya sa bicyclette puis il entra ; après que l’homme eut ôté son imperméable, Hong Jun put finalement voir à quoi il ressemblait : la cinquantaine environ, relativement maigre, un visage à la peau desséchée et qui manquait d’éclat. Il avait l’air un peu rude mais il était rasé de près et son regard était plein de vitalité. Hong Jun alla à sa rencontre et lui demanda s’il était bien M. Luo.

— Je suis Luo Taiping. Vous êtes bien maître Hong ? Lui aussi avait l’accent pékinois.

Hong Jun ne se souvenait pas lui avoir parlé de sa qualité d’avocat, aussi lui demanda-t-il, plein de curiosité : « Monsieur Luo, comment se fait-il que vous sachiez que je suis effectivement avocat ? »

L’autre, un instant interdit, répondit : « En fait, à la Dasheng, tous ceux du dernier étage sont déjà au courant de votre venue. Peut-être l’ignorez-vous, mais cette société est une… organisation extrêmement rigoureuse. Elle ne tolère aucune intervention extérieure dans son système interne. Elle a également un excellent réseau d’informations qui la fait ressembler à un gigantesque corps vivant. Que quelqu’un de l’extérieur vienne à perturber un de ses secteurs et, aussitôt, le département correspondant aura la réaction appropriée. Rappelez-vous bien de cela lorsque vous aurez affaire à eux. Sachez bien que c’est en tant qu’ami de Tong Wenge que je vous donne ce conseil. Bon ! Retournons à nos moutons[66]. De quoi vouliez-vous m’entretenir ? »

Hong Jun apprécia la façon qu’avait Luo Taiping d’aller droit au but.

« Vous êtes apparemment au courant de ce qui m’amène ici, lui répondit-il. Cela dit, en plus de la conclusion d’un accord écrit avec votre société concernant le salaire et les frais d’entretien de Tong Wenge, le professeur Jin m’a également chargé d’obtenir pour elle quelques renseignements à propos des événements qui ont précédé la maladie de son mari. Ce n’est pas qu’elle ne fasse pas confiance à la Dasheng mais, en tant qu’épouse, il est tout à fait normal qu’elle fasse ce genre de demande ; vous n’êtes pas de cet avis ? »

Luo Taiping ne répondit pas à cette question. Il enchaîna au contraire sur un discours que l’on aurait dit préparé longtemps à l’avance : « La maladie de Wenge a vraiment pris tout le monde au dépourvu, d’autant qu’il s’était toujours très bien porté. On disait parfois en plaisantant que, si quelqu’un de la société devait tomber malade, ça ne serait sûrement pas lui. Il est certain que, juste avant, il s’était investi énormément. En plus de son travail de technicien et des projets de recherche dont il avait personnellement la responsabilité, il avait aussi participé directement aux négociations de prise de participation des hommes d’affaires de Hong Kong et il s’était rendu sur place avec le patron pour l’enquête. À vrai dire, il aurait pu tout aussi bien ne pas y aller : il est ingénieur en chef, et non pas directeur général. Mais il a quand même choisi d’être du voyage. À partir du moment où il est revenu, je lui ai trouvé l’air fatigué ; c’était comme s’il subissait une très forte pression psychologique.

— Vous a-t-il parlé de ce qui s’était passé là-bas ?

— Non. Mais à son retour, le patron nous a informés de la situation lors d’une réunion et nous a dit que les choses progressaient de façon satisfaisante.

— Parlez-moi des relations entre Tong Wenge et le patron. »

Hong Jun avait demandé cela en toute confiance.

— Le patron a une qualité majeure, c’est de connaître les gens et de savoir tirer le meilleur parti de leurs capacités. Il estimait beaucoup Wenge et ce dernier lui était très reconnaissant de cette faveur, aussi lui était-il dévoué corps et âme. Je vous dirais même qu’il lui arrivait de lui confier des choses qu’à moi il n’aurait pas dites, bien que nous soyons des amis de longue date.

— Que pouvez-vous me dire de ses relations avec les autres employés de la société ?

— Pour quelles raisons vous intéressez-vous à ce genre de problème ?

Luo Taiping lui adressa un regard soupçonneux.

— Je ne vous cacherai pas que je ne cesse de me poser des questions sur les causes de la maladie de Tong Wenge. J’ai dans l’idée qu’à l’origine, il pourrait y avoir un facteur psychologique, peut-être à cause de relations par trop tendues avec ses collègues. Souvent, lors des traitements, nos médecins ne tiennent pas compte de cet élément, pourtant fondamental. Lorsque j’étais aux États-Unis, j’ai remarqué que nombreux étaient ceux qui accordaient de l’importance aux éléments d’ordre psychologique. Il y a pas mal de recherches en ce domaine, et, bien que je sois avocat, je m’y intéresse beaucoup également.

— C’est-à-dire… Wenge s’entendait bien avec tout le monde, c’est un fait. Il n’aimait pas se lier trop intimement mais en revanche, il ne lui arrivait jamais de s’emporter contre quelqu’un. Quoique… Non, dans le fond, rien.

Luo Taiping se retint d’en dire davantage.

— Apparemment, il y a des choses dont vous jugez bon de ne pas informer l’étranger que je suis. Je comprends parfaitement votre embarras, aussi ne vous demanderai-je rien de plus. Je dois cependant vous préciser que tout ce que je fais, c’est sur la demande du professeur Jin, et dans le but de soigner son mari.

Il avait parlé en toute sincérité.

— En fait, je me posais simplement des questions et, par ailleurs, je n’aime pas discuter de la vie privée des gens à leur insu.

Luo Taiping semblait mal à l’aise.

— Maître Hong, poursuivit-il, puisque vous dites que c’est pour le bien de Wenge, je vais parler. Je le fais aussi pour Jin Yiying, bien sûr. Nous nous sommes connus à Pékin. Franchement, elle a toute ma sympathie et j’admire beaucoup sa conduite ; c’est vraiment une femme d’une bonté exceptionnelle et ce qui lui arrive est terriblement injuste. Surtout, maître Hong, n’allez pas le lui répéter. Que cela reste entre nous.

— Ne vous inquiétez pas !

— Dans notre société, il y a une femme peu ordinaire qui s’appelle He Mingfen. Vous devez l’avoir vue hier.

Hong Jun confirma d’un signe de la tête.

— Une carriériste achevée ! Elle occupe actuellement le poste d’assistante du directeur général, mais elle a toujours visé celui même de directeur général. Je le sais pertinemment. Au début de l’année, le patron a annoncé sa décision de renoncer à sa fonction de directeur général, disant qu’il était prêt à se retirer à peine aurait-il trouvé la personne susceptible de lui succéder – pour ne conserver que sa position de président du conseil d’administration. C’est à partir de là que ladite demoiselle a commencé à s’agiter. Quel âge lui donnez-vous ?

— Trente ans au plus ?

— Elle a plus de trente ans ! Elle est célibataire et elle passe son temps à se maquiller de façon à ressembler à une jeune fille. Personnellement, elle me déplaît. Ce qu’elle raconte en privé en dit long sur sa personnalité. Selon elle, à peine les hommes ont-ils de l’argent qu’ils s’encoquinent, alors que les femmes, elles, ne peuvent gagner de l’argent que si elles le sont déjà. Et encore : si une femme demande l’aide d’un homme, elle doit s’attendre à le payer en nature. Pour elle aussi, si les hommes ont certaines parties de leur anatomie qui sont rigides, c’est que forcément ils en ont d’autres qui sont fragiles. Ça vous donne une idée des propos qu’elle tient ! On dit souvent que « les femmes portent malheur[67] ». En ce qui la concerne, je trouve ces mots on ne peut plus appropriés.

Arrivé à ce point du discours, Luo Taiping jeta un coup d’œil pour surveiller les alentours avant de confier à Hong Jun en grand secret : « Je vous dis, moi, qu’elle a déjà causé la mort de deux personnes !

— C’est vrai ? demanda celui-ci, stupéfait.

— Bien sûr que c’est vrai !

— Et qui sont ces personnes ?

— Deux des fondateurs de la Dasheng, qui s’appelaient Huang Weixiong[68] et Su Zhiliang[69].

— Dans ce cas, comment se fait-il qu’elle n’ait jamais été inquiétée ?

— Elle ne les a bien sûr pas assassinés de ses propres mains.

— Comment s’y est-elle donc prise ?

— C’était il y a assez longtemps et, à cette époque, je n’étais pas encore ici, aussi ne suis-je pas au courant des circonstances exactes. Ce n’est que par la suite que j’en ai entendu parler. Une chose est sûre, c’est que ces deux personnes sont mortes à cause d’elle. »

Puis, élevant le ton, il ajouta : « Maître, je ne vous ai dit tout cela qu’au nom de l’amitié qui me lie à Wenge et afin que vous puissiez être sur vos gardes. N’en soufflez mot à personne, il suffit que vous sachiez personnellement à quoi vous en tenir. »

Hong Jun acquiesça du chef avant de lui demander : « Elle ne s’entendait pas avec Tong Wenge ?

— Comment exprimer cela ? Il y a quelque temps, ils entretenaient des relations plutôt… pas très claires. Vous comprenez ce que je veux dire, n’est-ce pas ? Le soir, elle venait souvent le chercher. Plus d’une fois, je les ai trouvés ensemble. Seul et loin de chez lui, Wenge devait tout naturellement souffrir parfois de la solitude, mais le problème est que ladite He est une femme peu respectable. À la vérité, j’ai bien essayé de convaincre Wenge de faire venir femme et enfant. Moi aussi, voyez-vous, j’avais fait venir ma femme et mon fils, ce qui était une bonne chose, vous ne croyez pas ? Mais il ne m’a pas écouté et c’est la raison pour laquelle tout cela est arrivé. Non seulement il y a eu tous ces commérages au sein de la société, mais Jin Yiying et lui ont même failli divorcer !

— Vous voulez dire que le professeur Jin a eu connaissance de la liaison de son mari ?

— Même les murs ont des oreilles[70] !

— Et pourquoi donc n’ont-ils pas divorcé en fin de compte ?

— C’est justement pour ça que je vous ai dit qu’elle était la bonté même ! Elle a toujours été très compréhensive, aussi a-t-elle pardonné à Wenge.

— Comment les choses ont-elles évolué ensuite entre Tong Wenge et He Mingfen ?

— Leur relation a pris fin, en apparence, à la suite de cette affaire, mais j’ai dans l’idée que les liens anciens ne peuvent être totalement rompus[71]. Ces derniers mois cependant, j’ai eu l’impression d’un changement radical ; mais je n’ai jamais su ce qui avait bien pu se passer. De toute façon, ce n’était plus comme avant. Wenge était très souvent mélancolique et, de plus, lorsqu’il leur arrivait de se rencontrer dans les couloirs, ils ne s’adressaient pas la parole.

— S’étaient-ils disputés ? s’enquit Hong Jun, très intéressé.

— Je n’en ai aucune idée. Cela dit, Wenge a un très bon tempérament et il a horreur des disputes.

— Ne se serait-il par hasard jamais querellé avec une quelconque personne de la société ?

— Comment vous expliquer ? Il était plutôt consciencieux et parfois, dans son travail, il lui arrivait d’avoir des mots avec certains, y compris le patron, mais on ne peut pas appeler ça se quereller. D’ailleurs, je vous l’ai déjà dit, il avait horreur de ça. »

Hong Jun réfléchit un instant avant de demander : « Comment s’est-on aperçu qu’il était tombé malade ?

— L’après-midi de la veille, quand je l’ai rencontré, je lui ai trouvé la mine défaite : je lui ai même demandé s’il se sentait bien. Il m’a répondu que ce n’était rien, juste un peu d’insomnie. Je n’y prêtai donc pas davantage attention. Le lendemain après-midi, alors que j’allais partir, j’ai reçu un appel de He Mingfen me disant que M. Tong était malade et qu’il fallait que je vienne le voir de toute urgence. Je me précipitai donc chez Wenge, dans son bureau, où je ne pus que constater qu’il avait perdu connaissance. He Mingfen me raconta qu’elle venait à peine de chercher à le joindre au téléphone, que personne n’avait répondu et que M. Tong restait introuvable. Comme elle trouvait ça bizarre, elle était allée voir ce qui se passait et c’est alors qu’elle l’avait trouvé, gisant à même le sol. Peu de temps après, le patron était arrivé en personne et avait immédiatement demandé qu’il soit hospitalisé. Elle avait donc appelé un taxi pour le faire transporter à l’hôpital principal de la ville. Comme il me restait certaines choses urgentes à régler, je n’ai pu l’accompagner.

— Et ensuite ?

— Ensuite, j’ai appris par le médecin de l’hôpital qu’il avait attrapé la grippe, que c’était sérieux et qu’il était malade depuis deux jours. Le patron a fait prévenir Jin Yiying. Quant aux événements ultérieurs, je pense que celle-ci a déjà dû vous en informer. »

Hong Jun confirma d’un signe de la tête et lui demanda : « Monsieur Luo, combien y a-t-il de directeurs généraux adjoints dans la société ?

— Il y a moi. Le patron estime qu’il en suffit d’un seul. Dans les sociétés privées ce grade n’existe pas[72]. Le responsable d’un service, c’est le chef de service ; celui d’un département, c’est le chef de département et il n’est pas nécessaire que quelqu’un ait le titre de directeur général adjoint. »

Cette fois, on aurait bien dit que Luo Taiping donnait son avis personnel.

Après cette entrevue, Hong Jun se rendit à l’hôpital principal de la ville où il réussit à trouver, non sans quelque difficulté, le médecin qui, à l’époque, avait reçu Tong Wenge lors de son admission à l’hôpital. Le discours creux que lui tint ce dernier ne lui apprit rien de plus : Tong Wenge avait attrapé la grippe, les examens et le traitement avaient été effectués normalement et rien de particulier n’avait été découvert. Qui plus est, il souligna à maintes reprises que les mesures qui avaient été prises en matière de traitement étaient correctes mais que le malade avait été envoyé trop tard à l’hôpital par son unité de travail. Hong Jun eut l’impression qu’il avait peur que la famille ne se plaigne d’un faux diagnostic ou d’un quelconque retard dans la mise en route du traitement. En prenant moult précautions, il demanda à pouvoir jeter un coup d’œil au dossier médical de Tong Wenge. Le médecin n’y vit aucun inconvénient mais ajouta qu’il fallait pour cela trouver la personne qui s’occupait des admissions. Hong Jun eut beau faire deux fois le tour de l’hôpital, il lui fut impossible de mettre la main sur la personne susceptible de lui fournir le dossier ; il eut beau exhiber sa carte d’avocat, personne ne fit grand cas de ce petit bout de papier. Il dut finalement se résoudre à quitter l’hôpital.

Il faisait déjà nuit lorsqu’il arriva à l’hôtel. Il fit sa toilette et s’apprêta à descendre dîner. À peine était-il sorti de sa chambre qu’il tomba sur une femme en robe blanche qui passait devant sa porte et qui se retourna même pour lui adresser un timide sourire. Comme le couloir n’était pas très éclairé, il ne put pas vraiment voir si c’était la même femme que la veille au soir. Il resta un moment interdit, la suivant du regard jusqu’à ce qu’elle eût tourné pour emprunter un autre couloir. Que peuvent bien venir faire ces femmes en robe blanche ? se demandait-il. Sont-elles médecins ? Mais, pour l’heure, il n’avait pas le temps de chercher des réponses à ces interrogations.

Après le dîner, il fit le tour de la grande salle du rez-de-chaussée. Il put constater que l’hôtel possédait tous les services que l’on pouvait désirer : en plus des restaurants aussi bien chinois qu’internationaux, il y avait un centre de fitness et de loisirs qui comprenait dancing, salle de billard, piscine, sauna, et d’autres choses encore. Le lieu idéal pour venir se relaxer quand on est fatigué, pensa-t-il. Soudain il lui vint à l’esprit un autre service qui pouvait lui être de quelque utilité et s’en revint vers la porte principale. Là, il admira tout à loisir la grande plante verte en pot qui trônait dans le hall. Il finit par trouver ce qu’il cherchait et un petit sourire de satisfaction se mit à flotter sur ses lèvres. À ce moment précis, il ressentit inconsciemment un regard scrutateur posé sur lui : il tourna la tête et vit, dans l’encoignure de la porte, un jeune homme vêtu d’un costume bleu. Au moment où leurs regards se croisèrent, ce dernier tourna la tête de l’autre côté d’une façon bien peu naturelle. Hong Jun regarda à droite et à gauche comme si de rien n’était avant de se diriger vers l’ascenseur.