Le Groupe μ : J. Dubois, F. Edeline, J. M. Klinkenberg, P. Minguet, F. Pire, H. Trinon (Centre d’études poétiques, université de Liège), Rhétorique générale, Paris, Larousse, 1970. Il faut ajouter l’important travail de Michel Le Guern, Sémantique de la métaphore et de la métonymie, Larousse, 1973, qui représente aussi le dernier état de la recherche en langue française. Toutefois, il ne sera fait que des références fragmentaires à cet ouvrage dans la présente étude, en raison de ses liens étroits avec les thèses de Roman Jakobson qui ne seront discutées que dans la sixième étude, et en raison du rôle attribué à « l’image associée », rôle qui ne pourra non plus être apprécié que dans le cadre de la prochaine étude.
Prieto et Ch. Muller, Statistique et Analyse linguistique, faculté des lettres et sciences humaines de Strasbourg, 1966.
A.-J. Greimas, Sémantique structurale, Recherche de méthode, Paris, Larousse, 1966. Du sens. Essais sémiologiques, Paris, éd. du Seuil, 1970.
G. Genette, « La Rhétorique restreinte », Communications, 16, Paris, éd. du Seuil, 1970.
G. Genette, La Rhétorique des figures, Introduction à Pierre Fontanier : Les Figures du discours, Paris, Flammarion, 1968. Cf. ci-dessus IIe Étude, p. 72.
Jean Cohen, Structure du langage poétique, Flammarion, 1966.
Tzvetan Todorov, Littérature et Signification, Appendice : « Tropes et figures », Paris, Larousse, 1967.
Cf. ci-dessus IIIe Étude, p. 110.
Ibid., p. 116-128.
Il suffit de comparer les deux définitions : la rhétorique est « la connaissance des différents sens dans lesquels un même mot est employé dans une même langue », Des tropes, p. v, cité Todorov, op. cit., p. 94 ; et, d’autre part : « Il est du ressort de la grammaire de faire entendre la véritable signification des mots, et en quel sens ils sont employés dans le discours », Des tropes, p. 22.
Genette, « Figures » in Figures, I, Paris, éd. du Seuil, 1966, p. 205-221.
Voici une remarque de Gérard Genette qui rassemble tous les traits évoqués ici : hiatus et conscience de hiatus, virtualité du langage non marqué, traductibilité de principe des figures : « L’esprit de la rhétorique est tout entier dans cette conscience d’un hiatus entre le langage réel (celui du poète) et un langage virtuel (celui qu’aurait employé l’expression simple et commune) qu’il suffit de rétablir par la pensée pour délimiter un espace de figures », op. cit., p. 207. Et encore : « Le fait rhétorique commence là où je puis comparer la forme de ce mot ou de cette phrase à celle d’un autre mot ou d’une autre phrase qui auraient pu être employés à leur place et dont on peut considérer qu’ils tiennent lieu. » Et encore : « Toute figure est traduisible et porte sa traduction visible en transparence, comme un filigrane, ou un palimpseste, sous son texte apparent. La rhétorique est liée à cette duplicité du langage » (211). C’est en ce sens que Gérard Genette reprend à son compte l’aphorisme de Pascal, placé en exergue à Figures, I : « Figure porte absence et présence. » D’où, aussi, la justification de l’opposition, par Fontanier, entre la catachrèse, dont l’usage est forcé, et la figure, dont la combinaison est libre.
Cf. ci-dessus IIIe Étude, p. 123.
Jean Cohen, op. cit., p. 22.
Le degré zéro relatif est atteint par une série d’approximations successives : 1) prose, 2) prose écrite, 3) prose écrite scientifique. 1) « Nous voulons comparer la poésie à la prose et par prose nous entendons provisoirement l’usage, c’est-à-dire l’ensemble des formes statistiquement les plus fréquentes dans le langage d’une même communauté linguistique » (21) ; 2) « Le principe d’homogénéité exige que la poésie qui est écrite soit comparée à de la prose écrite » (22) ; 3) « Parmi tous les types de prose écrite, laquelle choisir pour norme ? De toute évidence, il faut se tourner vers l’écrivain le moins soucieux de fins esthétiques, c’est-à-dire vers le savant » (22).
Remarquant que la statistique est la science des écarts en général, et la stylistique celle des écarts linguistiques, Jean Cohen se propose « d’appliquer à la première les résultats de la seconde : le fait poétique devient alors un fait mesurable, et s’exprime comme fréquence moyenne d’écarts par rapport à la prose présentée par le langage poétique » (15). C’est donc dans un projet d’esthétique-science que s’inscrit l’entreprise. La poétique doit se constituer en science quantitative. « Le style poétique sera l’écart moyen de l’ensemble des poèmes à partir duquel il serait théoriquement possible de mesurer le “taux de poésie” d’un poème donné » (15).
Gérard Genette, Figures, I, op. cit., p. 211.
Ibid.
Rhétorique générale, p. 30-44.
A.-J. Greimas, Sémantique structurale, p. 69 et s.
Cf. ci-dessus, Ire Étude, p. 23 à 30.
Ibid., p. 49.
Ibid., p. 46 et 53.
P. Fontanier, Les Figures du discours, p. 63.
Ibid., p. 64.
Roman Jakobson, « Closing Statements : Linguistics and Poetics » dans T. A. Sebeok, éditeur, Style in Language, New York, 1960 ; trad. fr. dans Essais de linguistique générale, chap. Il, p. 209 et s.
Jakobson rattache en outre ces deux arrangements au principe de similarité (choix parmi des termes semblables) et au principe de contiguïté (construction linéaire de la séquence). Nous discuterons dans la sixième étude, consacrée au jeu de la ressemblance, cet aspect particulier de la définition du procès métaphorique chez Roman Jakobson.
Cf. VIIe Étude, § 2.
Tzvetan Todorov, Littérature et Signification, p. 102.
On a déjà cité dans le paragraphe précédent ce texte de Gérard Genette : « L’esprit de la rhétorique est tout entier dans cette conscience d’un hiatus possible entre le langage réel (celui du poète) et un langage virtuel (celui qu’aurait employé l’expression simple et commune) qu’il suffit de rétablir par la pensée pour délimiter un espace de figures », Figures I, p. 207.
Cité par G. Genette, op. cit., p. 220.
Gérard Genette, « Espace et Langage », in Figures, I, p. 103.
Northrop Frye, Anatomy of Criticism, p. 80.
Tzvetan Todorov, op. cit., p. 99.
La verification ne vise qu’à « affaiblir la structuration du message » (96), qu’à « brouiller le message » (99). « L’histoire de la versification, considérée en deux siècles nous montre l’augmentation progressive de la dé-différenciation » (101).
Platon, Le Sophiste, 251 d, 253 c.
Noam Chomsky, Aspects of the Theory of Syntax, Cambridge, MIT Press, 1965 ; trad. fr. : Aspects de la théorie syntaxique, Paris, éd. du Seuil, 1971. Sur la sémantique générative qui s’est peu à peu démarquée de la grammaire générative et transformation ne le exposée dans cet ouvrage de Chomsky, cf. « La sémantique générative, par Françoise Dubois-Charlier et Michel Galmiche, Langages, XXVII, septembre 1972, Paris, Didier-Larousse.
Je laisse de côté le cas de carence de détermination (pronoms personnels, noms propres, démonstratifs, adverbes de temps et de lieu, temps du verbe, sans détermination dans le contexte : 155-163), qui pose un autre problème, celui de l’absence de référent contextuel, et introduit un autre type d’interprétation au niveau proprement référentiel. Pour cette raison, cette analyse n’est pas exactement à sa place dans le chapitre sur la « détermination » ; on ne détermine pas le sens d’un embrayeur par détermination de l’extension ; « je » n’a pas d’extension ; en outre ces embrayeurs ne sont pas en position d’épithète.
Jean Cohen note : « Si on étend la flèche sur le plan diachronique, on a la « métaphore d’usage » ; si on la ramasse dans la synchronie, on a la « métaphore d’invention ». C’est la seule que nous étudierons ici, la métaphore d’usage par définition, nous l’avons vu, n’étant pas un écart », op. cit., p. 114, n. 1.
Jean Cohen étend peut-être un peu loin le « genre », en appelant métaphore toutes les figures, y compris la rime, ou l’inversion ; mais, pour parler de rime-métaphore, il faudrait avoir montré le phénomène de réduction d’écart au plan de la versification, ce qui n’a pas été fait, et ce qui, peut-être, ne saurait être fait. Il semble bien, en effet, que toute réduction d’écart soit finalement sémantique.
Cf. ci-dessus IVe Étude, p. 169-170.
La Sémantique de la métaphore et de la métonymie de Le Guern a en commun avec la Rhétorique générale l’hypothèse de l’analyse componentielle du signifié, reçue de Greimas, en vertu de laquelle la métaphore est à traiter comme une altération de l’organisation sémique d’un lexème. Mais cette thèse de sémantique structurale est replacée dans le cadre d’une opposition empruntée à Jakobson, celle du procès métaphorique et du procès métonymique. C’est pourquoi nous en reportons l’examen après la discussion de la thèse de Jakobson. En outre, celle-ci est réinterprétée dans le sens d’une opposition entre relation intralinguistique et relation extra-linguistique ou référentielle : « En replaçant cette distinction de l’analyse de Jakobson on doit s’attendre à ce que le processus métaphorique concerne l’organisation sémique alors que le processus métonymique ne modifierait que la relation référentielle » (14). Il en résulte une grave divergence avec les analyses de la Rhétorique générale (signalée p. 15, n. 17). Dès lors, en effet, que la notion d’organisation sémique est opposée à celle d’un glissement de référence, elle prend par contraste une signification assez différente. On soulignera, le moment venu, d’autres importantes différences entre Le Guern et le Groupe de Liège. On trouvera une analyse d’ensemble de l’ouvrage de Le Guern dans la VIe Étude, § 5.
Cf. IIIe Étude, § 1 ; IVe Étude, § 1 et 5.
Rhétorique Générale, p. 38-45.
Sur le point précis de la définition de la métaphore par une altération de la composition sémique, la parenté est entière entre la sémantique de Le Guern et celle du Groupe de Liège. De part et d’autre, le même primat est conféré au lexème, c’est-à-dire finalement au mot et non à la phrase. De part et d’autre, on suppose une constitution sémique préalable du lexème, sur la base de laquelle la métaphore s’explique « par la suppression ou plus exactement par la mise entre parenthèses d’une partie des sèmes constitutifs du lexème employé », Le Guern, op. cit., p. 15.
A.-J. Greimas, Sémantique structurale, p. 42 et s.
Cf. ci-dessous VIe Étude, § 1.
Peut-on résoudre la question du découpage sémantique sans recourir à la structure du référent ? C’est ce que doit présupposer Le Guern, pour réserver au fonctionnement de la métonymie les modifications de la relation référentielle. L’opposition entre réorganisation sémique et glissement de référence suppose que l’on dissocie entièrement analyse sémique et analyse conceptuelle ou objective. Dans son chapitre : « Pour une analyse sémique », op. cit., p. 114 et s., Le Guern reproche à la plupart des tentatives d’analyses du lexème en sèmes de glisser « vers une structuration de l’univers » (114) ; ce qui condamne l’analyse sémique à un parti encyclopédique, impossible par le fait même à réaliser (ibid.). Ce reproche se rattache à un souci plus général de l’auteur de dissocier le sémantique du logique. On en verra d’importantes conséquences dans la prochaine étude (rôle de l’image associée, différence entre métaphore, symbole, similitude, comparaison, etc.). Selon lui, les emplois métaphoriques d’un mot marquent précisément la différence entre analyse sémique et savoir référentiel de l’objet. La difficulté de ce critère est qu’il ne met enjeu que des métaphores lexicalisées qui, de l’aveu même de l’auteur, ne sont qu’en très petit nombre (82). Notre thème constant qu’il n’y a pas de métaphores vives dans le dictionnaire va dans le même sens. En outre, l’argument risque d’être circulaire, si l’emploi métaphorique révèle le sémantique comme tel, abstraction faite de la métaphore, et si l’analyse sémique doit expliquer l’emploi métaphorique.
Les auteurs appellent mode Σ le mode de décomposition d’une classe en espèces, parce que la classe est la somme (Σ) de ses espèces ; ils appellent mode Π le mode de décomposition en arbres disjonctifs, parce que l’objet est le produit logique (Π) qui résulte de la décomposition distributive.
La sémantique de Le Guern résiste à cette réduction de la métaphore à une double synecdoque, non seulement en vertu de la polarité empruntée à Jakobson du procès métaphorique et du procès métonymique, mais pour une raison tirée de l’analyse directe de la synecdoque (op. cit., 29-39). Celle-ci ne constitue pas une catégorie homogène. Une de ses espèces — la synecdoque de la partie et du tout — rejoint la métonymie ; comme celle-ci, elle se définit par un glissement de référence entre deux objets reliés par un rapport extra-linguistique et s’explique par restitution de la référence entière qui subit seulement une ellipse dans l’énoncé figuré. La synecdoque de la partie et du tout n’est qu’une métonymie un peu particulière, dans laquelle le glissement de référence l’emporte sur le procédé de l’ellipse. En revanche, la synecdoque de l’espèce et du genre ne met pas en jeu d’autres procédés que la démarche d’abstraction qui est à la base de toute dénomination. Ici aussi, je remarquerai que la figure ne consiste pas dans le passage de l’espèce au genre, mais dans la méprise par laquelle on désigne l’une dans les termes de l’autre. Mais je suis bien d’accord que métonymie et synecdoque sont du même côté, en ce qu’elles se laissent définir et expliquer comme des accidents de la dénomination.
Léon Cellier, « D’une rhétorique profonde : Baudelaire et l’oxymoron » dans les Cahiers internationaux de symbolisme, n° 8, 1965, p. 3-14. Pour les auteurs de la Rhétorique générale, la différence proposée par Léon Cellier entre l’antithèse et l’oxymore (« contradiction tragiquement proclamée pour l’antithèse, paradisiaquement assumée pour l’oxymore ») ne concerne que l’ethos des figures, non leur analyse sur le plan formel (120).
Jean Cohen, op. cit., p. 126.
Jean Cohen écrit : « On a donc le droit d’analyser “renard” en “animal plus rusé”, le second trait étant seul retenu dans l’usage métaphorique », op. cit., p. 127.
Pour cette discussion, cf. IIIe Étude, § 3.
M. Le Guern, op. cit., p. 39-65, offre une analyse sensiblement différente de la famille des faits de langage relevant de la relation de similarité. Nous en réservons la discussion pour la prochaine étude, § 5.
La négation de la fonction référentielle du discours métaphorique, dans la nouvelle rhétorique, sera examinée dans la septième étude ; bornons-nous ici à souligner la solidarité de cette thèse avec les postulats de la théorie ; seule la théorie de la métaphore-énoncé, en replaçant la figure dans le cadre de la théorie du discours, peut rouvrir la problématique du sens et de la référence que la réduction au mot a fermée. La sémantique de Le Guern pose un problème analogue, mais pour des raisons distinctes. Le lien étroit institué entre métonymie et référence a pour contrepartie l’exclusion de tout problème de référence dans l’analyse sémique de la métaphore. Dès lors le défaut de dénotation (au sens d’information cognitive) ne peut être compensé que par un excès de connotation (au sens de valeur affective associée) ; une investigation des motivations (enseigner, plaire, persuader) tient alors la place d’une recherche sur la portée référentielle de l’énoncé métaphorique.