Scène 4

MONSIEUR REMY, MARTON, DORANTE

MARTON

Je suis fâchée, Monsieur, de vous avoir fait attendre ; mais j'avais affaire chez Madame.

MONSIEUR REMY

Il n'y a pas grand mal, Mademoiselle, j'arrive. Que pensez-vous de ce grand garçon-là ? (Montrant Dorante.)

MARTON, riant

Eh ! par quelle raison, Monsieur Remy, faut-il que je vous le dise ?

MONSIEUR REMY

C'est qu'il est mon neveu.

MARTON

Eh bien ! ce neveu-là est bon à montrer ; il ne dépare point la famille.

MONSIEUR REMY

Tout de bon ? C'est de lui dont j'ai parlé à Madame pour intendant, et je suis charmé qu'il vous revienne : il vous a déjà vue plus d'une fois chez moi quand vous y êtes venue ; vous en souvenez-vous ?

MARTON

Non, je n'en ai point d'idée.

MONSIEUR REMY

On ne prend pas garde à tout. Savez-vous ce qu'il me dit la première fois qu'il vous vit ? Quelle est cette jolie fille-là ? (Marton sourit.) Approchez, mon neveu. Mademoiselle, votre père et le sien s'aimaient beaucoup ; pourquoi les enfants ne s'aimeraient-ils pas ? En voilà un qui ne demande pas mieux ; c'est un cœur qui se présente bien.

DORANTE, embarrassé

Il n'y a rien là de difficile à croire.

MONSIEUR REMY

Voyez comme il vous regarde ; vous ne feriez pas là une si mauvaise emplette.

MARTON

J'en suis persuadée ; Monsieur prévient en sa faveur, et il faudra voir.

MONSIEUR REMY

Bon, bon ! il faudra ! Je ne m'en irai point que cela ne soit vu.

MARTON, riant

Je craindrais d'aller trop vite.

DORANTE

Vous importunez Mademoiselle, Monsieur.

MARTON, riant

Je n'ai pourtant pas l'air si indocile.

MONSIEUR REMY, joyeux

Ah ! je suis content, vous voilà d'accord. Oh ! çà, mes enfants (il leur prend les mains à tous deux), je vous fiance, en attendant mieux. Je ne saurais rester ; je reviendrai tantôt14. Je vous laisse le soin de présenter votre futur à Madame. Adieu, ma nièce. (Il sort).

MARTON, riant

Adieu donc, mon oncle.