Scène 6
ARAMINTE, MARTON
ARAMINTE
Marton, quel est donc cet homme qui vient de me saluer si gracieusement, et qui passe sur la terrasse ? Est-ce à vous à qui il en veut ?
MARTON
Non, Madame, c'est à vous-même.
ARAMINTE, d'un air assez vif
Eh bien, qu'on le fasse venir ; pourquoi s'en va-t-il ?
MARTON
C'est qu'il a souhaité que je vous parlasse auparavant. C'est le neveu de Monsieur Remy, celui qu'il vous a proposé pour homme d'affaires.
ARAMINTE
Ah ! c'est là lui ! Il a vraiment très bonne façon*.
MARTON
Il est généralement estimé, je le sais.
ARAMINTE
Je n'ai pas de peine à le croire : il a tout l'air de le mériter. Mais, Marton, il a si bonne mine pour un intendant, que je me fais quelque scrupule de le prendre ; n'en dira-t-on rien ?
MARTON
Et que voulez-vous qu'on dise ? Est-on obligé de n'avoir que des intendants mal faits ?
ARAMINTE
Tu as raison. Dis-lui qu'il revienne. Il n'était pas nécessaire de me préparer à le recevoir : dès que c'est Monsieur Remy qui me le donne, c'en est assez ; je le prends.
MARTON, comme s'en allant
Vous ne sauriez mieux choisir. (Et puis revenant.) Êtes-vous convenue du parti* que vous lui faites ? Monsieur Remy m'a chargée de vous en parler.
ARAMINTE
Cela est inutile. Il n'y aura point de dispute17 là-dessus. Dès que c'est un honnête homme, il aura lieu d'être content. Appelez-le.
MARTON, hésitant à partir
On lui laissera ce petit appartement qui donne sur le jardin18, n'est-ce pas ?
ARAMINTE
Oui, comme il voudra ; qu'il vienne. (Marton va dans la coulisse.)