Scène 3

MARTON, DUBOIS, ARLEQUIN

ARLEQUIN, voyant Dubois

Ah ! te voilà donc, mal bâti.

DUBOIS

Tenez : n'est-ce pas là une belle figure pour se moquer de la mienne ?

MARTON

Que veux-tu, Arlequin ?

ARLEQUIN

Ne sauriez-vous pas où demeure la rue du Figuier, Mademoiselle ?

MARTON

Oui.

ARLEQUIN

C'est que mon camarade, que je sers, m'a dit de porter cette lettre à quelqu'un qui est dans cette rue, et comme je ne la sais pas, il m'a dit que je m'en informasse à vous ou à cet animal-là ; mais cet animal-là ne mérite pas que je lui en parle, sinon pour l'injurier. J'aimerais mieux que le diable eût emporté toutes les rues, que d'en savoir une par le moyen d'un malotru82 comme lui.

DUBOIS, à Marton, à part

Prenez la lettre. (Haut.) Non, non, Mademoiselle, ne lui enseignez rien : qu'il galope.

ARLEQUIN

Veux-tu te taire ?

MARTON, négligemment

Ne l'interrompez donc point, Dubois. Eh bien ! veux-tu me donner ta lettre ? Je vais envoyer dans ce quartier-là, et on la rendra à son adresse.

ARLEQUIN

Ah ! voilà qui est bien agréable ! Vous êtes une fille de bonne amitié, Mademoiselle.

DUBOIS, s'en allant

Vous êtes bien bonne d'épargner de la peine à ce fainéant-là.

ARLEQUIN

Ce malhonnête* ! Va, va trouver le tableau pour voir comme il se moque de toi.

MARTON, seule avec Arlequin

Ne lui réponds rien : donne ta lettre.

ARLEQUIN

Tenez, Mademoiselle ; vous me rendez un service qui me fait grand bien. Quand il y aura à trotter pour votre serviable personne, n'ayez point d'autre postillon que moi.

MARTON

Elle sera rendue exactement.

ARLEQUIN

Oui, je vous recommande l'exactitude à cause de Monsieur Dorante, qui mérite toutes sortes de fidélités*.

MARTON, à part

L'indigne !

ARLEQUIN, s'en allant

Je suis votre serviteur éternel.

MARTON

Adieu.

ARLEQUIN, revenant

Si vous le rencontrez, ne lui dites point qu'un autre galope à ma place.