Scène 13

DORANTE, ARAMINTE, LE COMTE, MADAME ARGANTE, DUBOIS, ARLEQUIN

MADAME ARGANTE, voyant Dorante

Quoi ! le voilà encore !

ARAMINTE, froidement

Oui, ma mère. (Au Comte.) Monsieur le Comte, il était question de mariage entre vous et moi, et il n'y faut plus penser : vous méritez qu'on vous aime ; mon cœur n'est point en état de vous rendre justice, et je ne suis pas d'un rang qui vous convienne.

MADAME ARGANTE

Quoi donc ! que signifie ce discours ?

LE COMTE

Je vous entends, Madame, et sans l'avoir dit à Madame (montrant Madame Argante) je songeais à me retirer ; j'ai deviné tout ; Dorante n'est venu chez vous qu'à cause qu'il vous aimait ; il vous a plu ; vous voulez lui faire sa fortune* : voilà tout ce que vous alliez dire.

ARAMINTE

Je n'ai rien à ajouter.

MADAME ARGANTE, outrée

La fortune à cet homme-là !

LE COMTE, tristement

Il n'y a plus que notre discussion, que nous réglerons à l'amiable ; j'ai dit que je ne plaiderais point, et je tiendrai parole.

ARAMINTE

Vous êtes bien généreux ; envoyez-moi quelqu'un qui en décide, et ce sera assez.

MADAME ARGANTE

Ah ! la belle chute96 ! ah ! ce maudit intendant ! Qu'il soit votre mari tant qu'il vous plaira ; mais il ne sera jamais mon gendre.

ARAMINTE

Laissons passer sa colère, et finissons.

Ils sortent.

DUBOIS

Ouf ! ma gloire m'accable ; je mériterais bien d'appeler cette femme-là ma bru.

ARLEQUIN

Pardi, nous nous soucions bien de ton tableau à présent ; l'original nous en fournira bien d'autres copies97.