Charles-François Daubigny, Les Bords de l’Oise, vers 1860-1865.
Huile sur toile, 32,5 x 60 cm. Collection privée.
Si dans les voies nouvelles ouvertes au paysage, les différences entre l’orientation de maîtres tels que Corot et Rousseau s’accusaient très nettement, leur sincérité du moins était pareille. En dehors des formules conventionnelles, la nature était leur seule inspiratrice et la variété infinie de ses aspects suffit à expliquer la diversité des interprétations qu’ils nous en ont données.
Un des premiers, Prosper Marilhat (1811-1847) a tenu une place importante dans les débuts de l’École française. Il devait allier dans ses œuvres la recherche du style à un amour très vif de la nature. Né en 1811 à Vertaizon, au cœur de l’Auvergne, il devait garder de ce pays le goût d’un pittoresque un peu sauvage. Ses parents ne cédaient que très difficilement à son désir de s’adonner à la peinture. Ses études finies, Marilhat avait cependant obtenu la permission d’aller à Paris où il fréquentait l’atelier de Camille Roqueplan. C’est là que l’avait connu un riche Allemand, le baron de Hugel, qui lui offrait de l’emmener avec lui en Orient. Le jeune homme, au sortir de son pays natal, ne s’accommodait guère des tranquilles horizons de la banlieue parisienne. Il accepta donc avec empressement cette proposition et partit de Marseille en 1831. Surtout l’Égypte l’avait conquis par la simplicité et la pureté de ses lignes, par la merveilleuse harmonie de ses colorations et la beauté de sa lumière, aussi bien que par l’accord toujours heureux que la figure humaine y présente avec la nature. Quand l’argent que lui envoyaient les siens tardait trop à lui parvenir, il peignait, pour vivre, des portraits ou brossait des décors pour le théâtre d’Alexandrie. Rappelé par sa famille, il ne se décidait à quitter l’Égypte qu’avec un profond regret.
Dans les tableaux que, rentré en France, il composait à l’aide de ses études, Marilhat s’est appliqué à exprimer des impressions de la lumière et de l’étendue surtout, qui le frappaient particulièrement dans les contrées qu’il venait de parcourir. Le premier, il a su rendre avec autant de force que de délicatesse, comme dans ses Bords du Nil, le contraste entre la riche végétation qui se presse sur les rives des cours d’eau de ces contrées avec la désolation de leurs solitudes rocheuses. Ces pénétrantes images donnent bien l’idée de la poésie de la nature en Orient. Mais de bonne heure, la santé de l’artiste fut compromise par les imprudences de sa vie aventureuse. Passionné pour le plaisir comme pour le travail, il avait ressenti avec terreur les premières atteintes du mal dans lequel devait sombrer sa raison. À son retour à Paris, il avait fallu l’interner dans une maison de santé où il mourait, en 1847, à l’âge de trente-six ans.
Mêlé de près, et des premiers, nous l’avons vu, au mouvement de notre École moderne de paysage, Jules Dupré était né à Nantes en 1811, et il avait commencé par travailler dans la manufacture de porcelaine que son père exploitait à Parmain, en face de L’Isle-Adam. Mais c’est à la nature même qu’il dut ses meilleurs enseignements. Dès l’âge de vingt ans, il exposait au Salon de 1831 des tableaux dont les motifs étaient pris aux environs de L’Isle-Adam.