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CHAPITRE 4

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L’ART-THÉRAPEUTE ET LE PATIENT

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« Traitez les gens comme s’ils étaient ce qu’ils devraient être et vous les aiderez à devenir ce qu’ils sont capables d’être. »

Goethe

Art-thérapeute, qui êtes-vous ?

Cette phrase de Goethe fait écho au sens donné à l’art-thérapie dans l’introduction de notre ouvrage : amener l’autre à devenir qui il est. Lorsqu’un être humain sourit à un autre être humain, ce dernier répond la plupart du temps par un sourire. Lorsqu’on laisse un petit enfant monter seul les escaliers, on lui permet d’accroître sa confiance en lui. Lorsqu’on écoute une personne âgée nous transmettre un peu de son expérience de vie, qu’on la considère au-delà de son corps démuni, on lui rend sa dignité. Traiter les gens comme s’ils étaient ce qu’ils devraient être, c’est accepter l’autre dans sa différence, dans sa vérité nue.

Quelle que soit notre action, notre parole, nous avons besoin d’être reconnus dans nos émotions et donc dans ce que nous sommes. Nous devenons ainsi plus disponibles aux autres et à la vie.

L’expression de soi lorsqu’on crée, danse, ou peint nous renforce dans nos capacités et nous aide à dépasser nos peurs1. Dès lors qu’on n’a plus peur, on n’éprouve plus de haine, ni de l’autre ni de soi…

L’art-thérapeute « n’est pas, il le devient »

Mais qu’est-ce qui fait qu’un artiste bascule vers cette envie de faire de son art un outil de communication, un lien à l’autre, un terreau de relations fertiles, un moyen de soigner ?

Pour l’art-thérapeute il ne s’agit pas là d’aider son patient à devenir artiste, bien que des talents puissent se révéler, mais à devenir plus globalement « l’artisan de sa vie ».

Tout comme la célèbre phrase de Simone de Beauvoir, « on ne naît pas femme, on le devient », l’art-thérapeute n’est pas, il le devient. Ce devenir ne s’arrête pas à une formation, une expérience clinique et un savoir-faire artistique, il implique un travail personnel permanent et une mise à jour des connaissances ainsi qu’une pratique continuelle.

Être art-thérapeute, c’est être relié à cet artiste en soi qui (se) cherche. Au-delà d’un métier, c’est une façon d’être, une sensibilité qui rejoint probablement aussi cette faille en soi, ce trop ou trop peu, issue de l’enfance et des accidents de la vie. Tentative de réparation d’un vécu, d’un décalage ressenti entre le discours de l’entourage et une perception personnelle, besoin de s’ouvrir vers une conscience élargie, désir de s’évader dans l’art, envie de comprendre son âme et celle des autres.

Autant de raisons et de motivations singulières pour un métier singulier.

Itinéraires…

Parfois, offrir de l’aide est plus facile que d’en demander : dans le premier cas nous sommes confrontés à nos capacités, mais dans le deuxième nous sommes mis en face de nos limites et de nos manques. On ne s’engage pas dans les métiers de la relation d’aide par hasard et il serait totalement illusoire de penser que le thérapeute n’a pas de « face cachée », qu’il serait « invulnérable » et au clair avec tous ses problèmes existentiels. Notre vérité étant souvent en deçà de notre idéal, si le thérapeute veut être à sa juste place dans la relation d’aide, il est nécessaire qu’il dépasse l’image qu’il a de lui-même et qu’il soit capable d’introspection et d’autocritique, loin de tout jugement moral, mais qu’il ait aussi confiance en lui et en son intuition. Dans le souci de cette juste place à trouver lorsqu’on est engagé dans la relation d’aide, il semble indispensable de s’en remettre à un tiers par un travail de supervision. Certains art-thérapeutes, dans cette profession émergente, créent des groupes de travail et de covision pour mettre leurs expériences et leur réflexion au profit des uns et des autres.

Ni psy, ni professeur, ni seulement artiste… Sans diplôme reconnu, l’art-thérapeute se définit-il comme « n’étant pas » ? Est-ce dans ce « vide » ou cet espace de liberté que, justement, chaque art-thérapeute se définit dans sa singularité d’artiste, et surtout d’être humain ? La question de l’identité de l’art-thérapeute, sa liberté et sa crédibilité dans l’exercice de cette activité, sa place au sein de l’institution, sont directement liées aux représentations sociales et aux conceptions actuelles de la culture, de l’art et de la santé mentale.

«Le voyage intérieur

Voyager à l’étranger, m’adapter à un nouveau pays, à des populations variées, aux coutumes différentes des miennes : telle était ma motivation depuis mon enfance pour me sentir vibrer, m’enrichir et surtout m’évader. Après quelques années passées en agence de voyages, j’ai observé le mieux-être de mes clients au retour de chacun de leurs séjours ; éloignés de leur quotidien ils revenaient apaisés par le divertissement que leur avait procuré la découverte d’un nouveau lieu. Je me suis alors demandé : pourquoi devons-nous prendre l’avion pour nous sentir mieux ? C’est ainsi que j’ai commencé mon voyage intérieur, une terre que je n’avais pas encore visitée : riche, variée, colorée, lumineuse et sombre, pleine de formes, sur un fond sonore mélodieux ou désaccordé, des odeurs de cannelle enivrantes et la douceur des roses entourées de leurs épines… J’ai vécu ce voyage initiatique accompagnée d’un guide. Comme au cours d’un trek, j’ai surpassé mes limites et découvert des paysages nouveaux, déstabilisants, déroutants et surprenants. Quant aux rencontres, elles m’ont traversée et élevée. Expérimenter ces nouveaux lieux inconnus jusqu’alors a été possible grâce au support d’un carnet de voyage en peinture et en couleur.

À partir de cette découverte de ma propre terre et de ce moyen d’évasion et de liberté qu’est l’acte créatif, j’ai ressenti des changements possibles, une ouverture vers l’autre, vers le monde extérieur. Peindre m’est venu alors naturellement, comme une respiration nécessaire pour prendre de la distance par rapport à mon cadre intérieur trop étriqué.

Transgresser les lois établies, les revisiter et les remodeler à mon goût m’emplit du sentiment d’être moi en toute liberté, d’être vraie et d’exister comme individu responsable. Aujourd’hui, je suis art-thérapeute et j’accompagne ces voyageurs au cœur de soi. Le plus beau des voyages est en chacun de nous…

ANAÏS AUTHELIN, ART-THÉRAPEUTE, PEINTURE ET ARTS DE LA SCÈNE.»

L’aboutissement d’un cheminement personnel

Si vous demandez à une dizaine d’art-thérapeutes comment ils le sont devenus, vous obtiendrez certainement dix réponses différentes. Certains vous diront que le chemin s’est fait via une pratique artistique et/ou un travail en psychothérapie, d’autres étaient déjà impliqués dans une profession médico-sociale ou de relation d’aide à la personne. Parfois, c’est en allant ailleurs, comme dans le témoignage ci-dessus, que le chemin s’est forgé. C’est exactement ce que l’art-thérapie propose : aller ailleurs que là où l’on est déjà allé, avec cette idée de voyage, de dépaysement.

Que ce soit dans notre vie intime ou sociale, personne ni aucune méthode ne peut répondre à la complexité de tous nos besoins qui sont à la fois d’ordre psychologique, relationnel, physiologique et environnemental. Comme dans toute activité humaine, les professionnels de l’accompagnement à la personne sont plus ou moins compétents, plus ou moins efficaces, la relation à l’autre étant un organisme vivant soumis à ce qui nous anime, à notre philosophie et à notre regard sur le monde. Le thérapeute guide et encourage là où se situent les besoins et les possibilités de son patient, mais il peut difficilement le mener plus loin que le point qu’il a lui-même atteint.

«Un espace de respiration

J’ai toujours peint, j’ai gardé cela de mon enfance, comme un besoin, sans pouvoir pourtant mettre du sens à cette pratique. C’était comme une évidence. Le support blanc, comme une histoire à inventer, y laisser une empreinte qui était la mienne. Peindre pour se sentir être, ici et maintenant.

Je me suis accrochée à cet espace de respiration, et c’est certainement la raison pour laquelle j’ai cheminé d’école d’art en école d’art, avec toujours le même fil conducteur : la création.

Lorsque j’ai entendu parler d’art-thérapie, c’était comme si mon parcours artistique prenait du sens.

La peinture qui m’avait si souvent apaisée et aidée à soulager colères et souffrances, allait me permettre d’accompagner et d’aider d’autres personnes à se reconnecter avec cet espace de liberté, souvent oublié depuis l’enfance, afin d’y déposer leurs ressentis douloureux, un peu comme on dépose les armes.

Ma formation en art-thérapie a été l’aboutissement d’un parcours personnel, d’une expérience particulière de l’art et de la création comme moyen d’expression et support de symptômes.

ANIK BOTTICHIO, ART-THÉRAPEUTE.»

L’art-thérapeute, travaille non pas avec mais dans le médium artistique. Par cette position il ne se place pas du côté du discours scientifique mais du côté du sujet.

Il se démarque de toute intervention corrective, son rôle n’est pas l’adaptation du sujet à son milieu, et encore moins la programmation d’une production pour répondre aux attentes de l’institution soignante. La médecine s’intéresse au symptôme afin d’éliminer la maladie le plus vite possible pour assurer la survie du patient. L’art-thérapie, en revanche, ne va pas chercher à éradiquer le symptôme au plus vite mais plutôt « faire avec ».

L’art-thérapeute ne fait pas pratiquer des exercices, mais propose des expériences. L’artiste s’efface devant le thérapeute, tourné vers l’autre au lieu d’être tourné vers lui-même. Les notions de rivalité, de pouvoir et de savoir disparaissent car il y a absence d’enjeu : ce sur quoi on travaille, « on n’en sait rien » puisqu’on voyage au pays de l’insu où le goût de l’aventure et du risque appartiennent avant tout au patient.

Si l’artiste travaille pour son compte et n’a pas de limite ni de comptes à rendre, quitte à y « laisser sa peau », l’art-thérapeute, à l’inverse, doit savoir ce qu’il fait et comment il le fait. De toute évidence, il est indispensable que le thérapeute en lui ait pu travailler ses propres résistances, et que l’artiste en lui se mette entre parenthèses et ne cherche pas la reconnaissance artistique auprès de ses patients.

Ajoutons au sujet de l’art-thérapeute qu’idéalement l’artiste en lui est resté en lien avec son être profond, avec l’enfant créateur en lui, contrairement à la plupart des adultes qui paraissent l’avoir oublié. Dans la rencontre, il fait sortir les patients de cet oubli par le biais de la création. Le thérapeute en lui est lié à lui-même et aux autres par des connaissances et par la prise en compte de l’inconscient auquel beaucoup d’adultes n’accordent aucune crédibilité, voire aucune existence. Permettre au patient de rentrer en contact avec son inconscient et l’aider à le comprendre fait partie de sa mission.

«« L’expérience en tant qu’intuition sensible des phénomènes »

C’est au fil d’expériences curieuses que ce métier m’est advenu. Dont celle-ci.

Je suis au chevet d’une jeune amie. Hôpital. Émotion. Stupeur. Elle a à peine 20 ans. Une colère, un malaise, le coma. Au réveil, hémiplégie, aphasie. Elle est là, couchée, dans la douleur, la tension, la peur, enfermée dans ses muscles et des connections qui ne fonctionnent plus.

Je parle. Je lui raconte des choses d’elle, ses colères rentrées, je suis mal à l’aise, je me sens bavarde, inutile. Je laisse venir le silence. Je lui propose de lui masser les pieds. Tout doucement. Elle semble d’accord. Je sens ses jambes se relâcher un peu. Je lui propose de lui chanter des comptines. Je lui dis que si « parler » ne fonctionne pas, « chanter » peut marcher. Et nous voilà parties : moi debout au bout du lit lui massant les pieds, faisant défiler tout mon répertoire de comptines enfantines, elle, couchée, les yeux rivés sur mes lèvres, sa bouche commençant à chercher, et puis… la voix. Nous chantons… toutes les deux. La souris verte, Une poule sur un mur, Au clair de la lune, Frère Jacques… La porte s’ouvrira brièvement deux fois. Je n’y prête pas attention. Nous finissons par modifier les paroles, je lui dis que finalement, c’est joli de demander « don-ne-moi-à-boi-re » en chantant ! Je la quitte.

Dehors, ils sont deux à m’attendre : sa mère et le kiné qui, depuis plusieurs jours, essayait de la masser, mais elle n’acceptait pas qu’on la touche. Sa mère est stupéfaite de l’avoir entendue chanter.

Je repars bouleversée. Que s’est-il passé ? Je trouverai plus tard les réponses : les connections de la parole et du chant ne se font pas dans le même hémisphère cérébral. Tomatis décrit aussi les mécanismes engendrés par le son, les liens qui se renouent… Husserl écrit : « La phénoménologie prend pour point de départ l’expérience en tant qu’intuition sensible des phénomènes afin d’essayer d’en extraire les dispositions essentielles des expériences ainsi que l’essence de ce dont on fait l’expérience. »

GENEVIÈVE CHARLES, ART-THÉRAPEUTE, MUSIQUE ET ARTS DE LA SCÈNE.»

Le « suffisamment bon » thérapeute

Il serait réducteur de décrire en quelques mots ce qui fait un « bon art-thérapeute » car connaissances, savoir-faire et savoir-être personnels et professionnels concernent des domaines qui se chevauchent sans pouvoir être hiérarchisés. Disons plutôt qu’ils coexistent !

S’il est heureusement impossible de dresser un « portrait type » de l’art-thérapeute, on peut tout de même mettre en avant certains acquis et certaines qualités qui font, clin d’œil à Winnicott, un « suffisamment bon » art-thérapeute.

Voilà ce qu’on peut attendre de lui :

Être thérapeute est une profession qui comporte une grande responsabilité : il s’agit d’approcher les autres dans le but de les rendre aptes à prendre un chemin de transformation, à « réviser » des schémas connus, souvent chargés de frustrations et de blessures.

L’art-thérapeute approche l’autre dans ce qu’il a de plus vrai et vulnérable : ses émotions. Le thérapeute, bien évidemment, n’en est pas exempt lui-même. Il est confronté à ses propres affects dans chaque nouvelle rencontre et il doit « travailler avec » tout en les mettant à distance.

«L’énergie déployée

Je suis issue d’un parcours de danse contemporaine qui recroise les expériences de la scène, de l’enseignement et de la création. J’ai fait de la danse mon métier, ma vie. Quand je danse, c’est autre chose, un autre rapport au temps, à l’espace. J’ai la sensation d’une présence différente à l’autre et à moi-même. Je suis sensible au corps et à son langage, à sa façon d’exprimer certaines choses formulées généralement par la parole.

Lorsque je donnais mes cours de danse, j’ai rencontré des élèves qui exprimaient un plaisir à danser qui allait au-delà du simple loisir. Certains vivaient ce moment comme un espace de liberté qu’ils ne pouvaient s’accorder ailleurs. Je réalisais alors que toute cette énergie déployée en quelques heures ne s’arrêtait pas à la frontière de l’atelier : elle avait aussi un sens en dehors pour chaque participant, chaque histoire. De là est née mon envie de me former à l’art-thérapie pour proposer une meilleure approche de la danse en tant que processus thérapeutique. J’ai dès lors confronté ma pratique et mon statut d’artiste au monde du soin, dans l’espoir de les réunir et d’y trouver aussi un équilibre personnel.

FLORA BRIEAU, DANSE-THÉRAPEUTE.»

Nos acquis ne sont jamais des statu quo. Ce que nous sommes dépasse souvent ce que nous montrons de nous-mêmes, ou l’idée que nous nous faisons de nous-mêmes, avec nos multiples facettes, obscures ou lumineuses…

Pour l’art-thérapeute il s’agit d’offrir à ses patients, à travers la création, ce petit supplément d’âme qui leur permettra d’entrer en contact avec ces différentes facettes, de laisser déborder leurs larmes, de faire éclater leur colère comme leur joie et de découvrir parfois avec surprise que la difficulté à être révèle aussi leur part de poésie.

Jean-Pierre Royol2 rappelle que « cette capacité fictionnelle concerne, en premier lieu, le fonctionnement psychique de l’art-thérapeute, qui doit se tenir en marge d’une assistance marquée par l’insistance. Il apprend à laisser ses capacités poétiques libres d’intervenir au lieu de stériliser la rencontre en la tordant dans des soucis de maîtrise. C’est ainsi qu’il est le plus artiste, en cette liberté d’esprit qui le conduit à jouer les objets du monde. »

La relation patient/art-thérapeute

« L’art-thérapie est une thérapie en volume non centrée sur l’échange intersubjectif de paroles mais sur la circulation autour d’un objet qui est la production de l’un soutenu par l’autre. »

Jean-Pierre Klein

La juste place

Dans la vie, les choses se passent souvent bien lorsque tout et chacun est à sa juste place, mais c’est justement ce qui est si complexe !

Un parent accaparant, un mari manipulateur, un enfant non reconnu, une soudaine maladie, un adolescent toxicomane, une jeune femme anorexique… Quelque part, à un moment donné de la vie du patient en demande d’aide, le lien à l’autre s’est substitué à un « dés-à-corps ».

La souffrance est toujours un lieu de confusion à l’autre, un lien d’aliénation, dans lequel la place du « je » est devenue bancale. Il est parfois spectaculaire de voir jusqu’où on peut se faire souffrir soi-même, inconsciemment le plus souvent, pour maintenir cette aliénation à l’autre.

La thérapie, la psychanalyse dévoilent petit à petit la place où les autres nous attendaient, ou nous attendent encore, car nous sommes constitués de la parole de l’autre, nous ne cessons de répéter le discours que nous avons entendu jusqu’à ce que le travail thérapeutique le fasse tomber. Selon Françoise Dolto, les paroles qui sont dites au-dessus du berceau d’un nouveau-né s’écrivent comme un destin. Cela commence par le prénom qu’on nous donne, (comme on le verra pour Irène au chapitre 6) toujours porteur de sens dans l’histoire familiale de chaque individu.

Une personne qui vient en thérapie est une personne pour qui « ça ne va pas », c’est-à-dire qui se sent partagée ou clivée, et chaque fois qu’on est divisé, on est mal. Dans le remaniement de la place qui est à l’œuvre dans toute thérapie, où le symptôme surgit comme une tentative de réparation et soulève la question :

« Qui m’attend dans cette position pour que je me mette au travail, qu’est-ce qui me rend “déficitaire” et qui en est bénéficiaire ? »

Les âmes en détresse cherchent quelqu’un pour penser/panser à leur place. La recherche de l’harmonie (comme dans le cas d’Isabelle avec ses psys3) peut prendre la forme de « collage » à l’autre, être le désir de ne faire qu’un avec lui. La forme extrême de cette tendance, c’est le fanatisme, ce désir de faire corps avec une idéologie, comme dans les sectes ou l’intégrisme politico-religieux, avec tout ce que cela comporte de mortifère.

Comment trouver et garder la bonne distance, cette neutralité bienveillante dont parle la psychanalyse ? C’est la création qui fait tiers : elle est l’entre-deux de la communication.

Une thérapie, ça bouscule !

La thérapie peut parfois être l’inverse d’une communication harmonieuse : si l’on est censé entendre ce que dit le patient, on n’est pas obligatoirement là pour « s’entendre », au sens de « se faire du bien ». La thérapie nous fait reconnaître nos aliénations et comprendre que nous sommes les « marionnettes de notre inconscient ». Une thérapie, ça bouscule ! Le patient peut s’en offusquer et projeter sur la personne du thérapeute colère, tristesse ou ressentiment et ce, pour son plus grand bien !

L’art-thérapeute doit reconnaître ces mécanismes, le transfert du patient et son propre contre-transfert. La création se trouve au milieu de tout cela. « Ma peinture est moche » peut signifier plusieurs choses suivant la personne qui le dit et même peut-être le revendique ! Prêcher le « moche », pour avoir l’attention, le compliment, provoquer l’autre. Image de soi qui demande l’état de grâce, demande d’amour déguisée… En art-thérapie, on l’a vu, la création n’est pas toujours « belle », ni réussie, ni valorisante. L’art-thérapeute s’en sert comme outil de transfert, de mise à distance du symptôme, ce qui ne veut pas dire le supprimer4 !

Rendre à l’autre ce qu’il croyait ne pas avoir

À terme, le but est de redéfinir le lien à l’autre, dans un type de communication où l’on est capable de se priver du corps à corps, c’est-à-dire de la présence de l’autre. Ce décollement, qui est le but de toute thérapie, demande beaucoup de tact, d’inventivité ou d’audace face à la personne en thérapie. Parfois beaucoup de temps également.

Pour qu’il comprenne quelle est cette personne en face de lui, le thérapeute doit se connaître et garder une certaine humilité par rapport à ce qu’il peut faire pour l’autre, c’est-à-dire sans acharnement thérapeutique. Le patient a besoin d’une forme d’illusion ou de croyance que le thérapeute possède ce qu’il n’a pas – qu’il voit, entend et comprend des choses lui donnant le pouvoir de le changer. Si le thérapeute a en effet des connaissances et compétences, il n’a pas, en revanche, le pouvoir de rendre l’autre clairvoyant ni de le changer malgré lui.

Le travail thérapeutique consiste à rendre à l’autre ce qu’il croyait ne pas avoir, à l’aider à trouver ses propres armes de guérison pour qu’il sorte de l’aliénation du Grand Autre qui est supposé savoir. En art-thérapie, ce qui est produit, dans tous les sens du terme, révèle que le patient a quelque chose à dire, qui prend forme au sein d’une relation, d’un échange dont il sort enrichi. C’est le patient qui fait, qui produit, qui observe et verbalise : il participe activement au processus créatif et thérapeutique.

« Je ne vaux rien ! »

Dans les troubles dépressifs associés à des troubles du comportement où il est question de dépendance, de déni, de comportements limites, de souffrance physique qui insécurisent la personne, le manque de confiance et de discernement se révèle dans l’activité créatrice. Le patient a des difficultés à faire des choix, à s’y tenir et se dévalorise face aux autres patients. Soutenu par l’art-thérapeute dans le choix des couleurs, la recherche de sa composition ou le mélange de techniques, le patient découvre qu’il est capable de développer son identité à lui et de créer quelque chose qui possède une structure et une cohérence dans lesquelles il peut reconnaître ses forces et ses faiblesses.

Beaucoup de personnes qui viennent à l’atelier d’art-thérapie pensent et disent tout haut, « qu’elles ne valent rien », que de toute leur vie elles n’ont rien fait de valable, ou encore « qu’il est trop tard de toute façon ». Pourtant, tant qu’on est vivant, qu’on a le désir de vivre, il n’est jamais trop tard !

Un jeu de miroir

Lorsque, en peignant, un patient me demande, non sans inquiétude, si ce qu’il fait « c’est bien », si « cela me plaît », je lui retourne la question pour qu’il apprenne à s’écouter et à se situer lui-même plutôt que de tenter de répondre aux hypothétiques attentes d’autrui. Petit à petit, il se met à peindre pour lui et non pas pour l’approbation du regard de l’autre.

L’art-thérapie crée une alternative à cette zone de manque d’autonomie en faisant place au « je ». Je peins, je danse, je chante, je crie, j’écris… L’acte de création participe au dépassement d’une crise, d’une difficulté à être, par la mise en présence de deux opposés symboliques : Liberté (de création) et Contrainte (limite du cadre et de la technique) ; l’Autre (le thérapeute) et Moi (le patient).

C’est dans cette mise en tension entre ces deux pôles symboliques/imaginaires que va se jouer le pathos : amour, haine, rivalité, désir, perte, rêves, souvenirs… La femme qui a fait le modelage en terre5 de la figure 11, a exprimé la fin de son histoire d’amour. Lorsque je lui demande ce qui lui manque le plus suite à sa rupture, elle me répond : « La tendresse. » Dans la figure 126, c’est le désir d’enfant qui se dit, un enfant qui ne vient pas, un enfant qu’on porte « sur la main » mais aussi un fœtus hors du corps, sans cordon, admiré, attendu, regardé comme un corps étranger, inaccessible ? Il n’y a que l’auteur qui puisse donner du sens à l’image créée lorsqu’il est prêt à le faire. L’art-thérapeute est là pour voir et entendre. Dans ce jeu de miroir, de comparaison et d’observation, on va rencontrer la réalité et donc la différence.

Faire la part de la réalité et de l’illusion. Pour ce qui est de la peinture, l’image créée est évidemment un outil formidable. Elle traduit le vide ou le plein, la (pro) fusion ou l’absence, et les excès de langage de l’autre qui a créé le lien pathologique.

«Cécile, ou autant de fleurs que de tombes à fleurir

Cécile, la quarantaine, n’aime pas trop parler, elle ne semble pas à l’aise avec les mots. Des périodes d’hospitalisation alternent avec des périodes de vie de famille, avec son compagnon et ses enfants. Cécile ne travaille plus. Dès qu’elle est hospitalisée, elle vient peindre à l’atelier. Peindre pour s’évader, pour ne pas trop penser et ne plus être tentée de s’assommer dans l’alcool.

Ce jour-là, je la trouve en pleurs devant son chevalet. Appel au secours silencieux. Je lui demande alors si elle veut bien me raconter ce que contiennent ses larmes. Elle vient d’enterrer sa sœur il y a un mois, morte d’un cancer. Sur les six enfants de la fratrie, il ne reste qu’elle. Absence de père et de repères. Par bribes, elle me dit les drames de sa vie, les morts, les absences. Absence de la mère qui, à bout de force et d’alcool, tient dans ses bras ses jumeaux, qu’elle vient d’étouffer.

Cécile se souvient « qu’ils étaient tout bleu pâle ». Elle a alors six ans. Elle est placée en famille d’accueil. Des années plus tard, sa mère sort de prison. Cécile ne la verra plus vraiment. À l’âge adulte, elle perdra elle-même son premier bébé, âgé de quelques mois, à la suite d’une maladie. Entre mère « meurtrière » et mère meurtrie, le silence et l’alcool remplissent le vide.

Elle aura deux autres enfants dont elle parle avec beaucoup de fierté, mais Cécile semble absente à elle-même.

À l’atelier, discrète et appliquée, elle peint sur d’anciennes peintures délaissées qu’elle prend dans le bac à recyclage. Elle les recouvre de fleurs, de guirlandes et de petits points. Dans le parc de la clinique, que Van Gogh a peint maintes fois, elle ramasse des feuilles et des boutons de roses et les colle sur un fond crayonné au pastel gras. Elle ne s’arrête pas pour boire le café ni pour causer entre femmes… Sauf sur notre insistance.

Elle peint des fleurs dans le silence de ses pensées, elle se saoule de peinture, telle une Séraphine des temps modernes. Toujours des fleurs, et autant de fleurs que de tombes à fleurir. Au retour d’un weekend en famille, elle me rapporte des pommes et des poires comme pour pallier, par ce geste, l’absence de mots. Préfère-t-elle mon sourire et le petit merci au grand discours ? Cécile n’aime pas parler.

Les non-dits ne sont jamais des non-sens. Je ne sais pas si quelque chose fait thérapie pour elle ni comment, mais elle revient peindre chaque fois que cela est possible.

La communication avec Cécile n’est pas évidente, les pains au chocolat et les fruits qu’elle m’offre sont sans doute, en plus de sa présence à l’atelier de peinture, une façon de me dire qu’elle est contente de pouvoir se raconter à travers autre chose que sa pathologie. Il y a dans ces répétitions, dans la frénésie avec laquelle elle colle et peint des fleurs, autant de symptômes que de poésie. Que j’accueille comme tels…»

Ne pas vouloir pour l’autre

Pendant le processus de création, l’art-thérapeute est attentif à la façon dont le patient travaille et dont il se comporte car cela révèle en partie sa problématique. Les interventions que propose l’art-thérapeute se situent à la fois dans le médium artistique et dans la sphère relationnelle. Comment le patient se place-t-il dans l’espace ? Est-il autonome ou très en demande d’être aidé, guidé ? A-t-il besoin de s’isoler, de parler ? Tient-il compte de la présence des autres participants ? Respecte-t-il le matériel mis à disposition et les règles de fonctionnement ? Se compare-t-il aux autres ou a-t-il besoin de critiquer ? A-t-il besoin de s’étaler dans la pièce ou au contraire peur de prendre sa place ? A-t-il peur de se salir ? Quel mode de relation cherche-t-il à instaurer avec l’art-thérapeute ?

Pendant la création et pour que le patient existe le plus possible par lui-même, l’art-thérapeute intervient le moins possible afin d’éviter de cocréer ce qui n’appartient qu’au patient.

Dans un lieu d’art-thérapie, et contrairement à ce qui se passe dans la démarche pédagogique où l’on fixe généralement des résultats à obtenir, l’art-thérapeute doit, d’une certaine manière, « inespérer » le sujet, autrement dit être sans préméditation. C’est une façon de ne pas vouloir pour l’autre, à sa place, et de laisser libre cours à ses propres cheminements et désirs, car trop vouloir soigner l’autre peut être persécuteur, tout comme l’est l’acharnement thérapeutique médical. Cette « inespérance » rejoint peut-être le silence du psychanalyste, aussi déroutant et inconfortable qu’il puisse être pour l’analysant, elle permet de ne pas se substituer à la parole de l’autre, de laisser vacante la place possible… Au prix du silence.

Il est toujours préférable de se méfier de la passion clinique, d’épouser une forme d’humilité dans laquelle on accepte les mystères inhérents à la création et à ce qui nous échappe dans ce qui « fait thérapie » ou pas. La thérapie s’est voulue science, science humaine, mais en termes humains. Le mot science, du latin scientia, « connaissance », est « l’ensemble de connaissances, d’études d’une valeur universelle, caractérisées par un objet (domaine) et une méthode déterminés, et fondées sur des relations objectives vérifiables ». N’est-il pas difficile de parler de science, alors que chaque cas est tellement particulier ?

Que nous est-il permis de vérifier objectivement ? Et qu’est-ce qui nous échappe ?

Art-thérapie et psychose : l’absence de demande

Un jour, une stagiaire infirmière en psychiatrie demandait en quoi un atelier de peinture/modelage pouvait avoir des vertus thérapeutiques pour un patient psychotique. Qu’entend-elle par psychotique ? C’est un terme assez général, créé par le psychiatre E. Freuchterleben, qui l’utilisera pour la première fois dans son cours de pathologie mentale, inauguré à Vienne en 1844. Le point essentiel dans la psychose reste le conflit entre le Moi et la réalité. Mais de quelle manière s’exprime-t-il ? De façon aiguë ou chronique, d’origine affective ou organique, de nature schizophrénique ou dépressive ? Toute maladie se manifeste autant par des signes cliniques qu’à travers la personnalité et l’âge du patient. On sait comment la schizophrénie ou la paranoïa peuvent provoquer de façon plus ou moins spectaculaire chez telle personne un ralentissement ou une inhibition de l’activité mentale (perte d’intérêt) favorisant un repli sur soi, chez telle autre l’apparition de délires ou d’hallucinations diverses… Ou les deux ! Quel que soit « ce patient psychotique », il se trouve dans une grande difficulté à rester en contact avec la réalité, à mener une vie normale : c’est avant tout une personne qui souffre.

On peut répondre à la question de la jeune stagiaire que l’art-thérapie permet au patient psychotique, comme à n’importe quelle autre personne, de s’exprimer, de s’extraire des mouvements répétitifs du quotidien, du « geste utile » et d’accéder à une part de poésie en lui-même et/ou en l’autre.

Suivant les troubles dont elle souffre, la personne psychotique ne fera pas le même travail de mise à distance de ses problèmes – ambition de toute thérapie –, ni même n’en prendra conscience. Sa parole, une certaine logique n’interviendront pas forcément de manière adaptée ou resteront parfois totalement absentes, là où à d’autres moments, ou pour d’autres formes de psychose, une grande capacité et une grande intelligence caractériseront sa création. Parfois, sa création aura des aspects répétitifs sans que le patient cherche à en sortir. Il n’y aura pas vraiment une demande de faire un travail, ni sur soi, ni sur le plan de l’expression ou sur des aspects techniques de sa création, et c’est là, dans cette absence de demande, que le travail avec un patient psychotique est différent.

C’est dans la relation, la présence, que l’art-thérapeute va chercher des ouvertures possibles, faire un travail de valorisation narcissique et donner une place à l’œuvre produite. Cette création, comme toute création authentique, est on ne peut plus autobiographique. Là où une autre personne va pouvoir flirter longtemps avec l’idée de faire de « belles images », se cacher derrière les copies dans une tentative de séduction ou de réassurance, la personne psychotique, elle, ne le peut pas. Elle ne fait pas semblant d’y être, elle y est !

Je me rappelle d’Emma, cette femme à l’approche de la cinquantaine, qui participait dans le cadre d’un CAT (Centre d’aide par le travail) à l’atelier d’art-thérapie. Elle ne parlait pas mais communiquait avec des sons, des gestes et son regard. Elle faisait des peintures abstraites magnifiques, proches de la calligraphie. Parfois elle se mettait soudainement à pleurer pendant qu’elle peignait, sans que qui que ce soit puisse en connaître les raisons et encore moins savoir si ses larmes étaient liées à sa production créatrice. Pendant deux ans elle a assisté à l’atelier, auquel elle n’était pas obligée de venir, en peignant en toute autonomie toujours un peu les mêmes figures. Petit à petit nous avons fait connaissance, malgré les blancs des « non sus », mais là encore la création a fait co-naître quelque chose, ancré à la fois dans sa production et le lien instauré entre elle et moi.

La personne qui souffre de troubles psychotiques se dévoile « malgré elle » dans sa création artistique. Mais c’est une donnée que l’on retrouve chez la plupart des personnes lorsqu’elles sont impliquées dans un processus créatif. La difficulté, avec la psychose, c’est cette absence du faire-semblant – et donc de mise à distance par le jeu –, qui met en échec le travail de symbolisation.

Parfois le patient psychotique met à jour un comportement de création compulsive dénué de tout attachement à l’objet de sa création, mais pour lui pouvoir s’exprimer, faire partie d’un groupe est de toute façon intéressant. Sa création permet tout de même la rencontre avec un objet externe, un élément de réalité et, par son intermédiaire, la rencontre avec le thérapeute. Si l’on ne permet pas à une personne psychotique de s’exprimer, d’exister avec, par exemple, un médium créatif, elle va de toute façon trouver autre chose pour exprimer ses pulsions et ses affects : elle va les déplacer vers son comportement, ses passages à l’acte, sombrer dans quelque chose qui ressemble à la folie…

C’est la psychiatrie qui définit la folie, la psychose, et cela pose une autre question : qu’est-ce que la folie ? Ne trouve-t-on pas des formes de démence dans la foi religieuse ? Et parfois, dans l’art, des comportements et croyances plus qu’étonnants chez des personnes dites « normales » ? En revanche, l’art-thérapie ne définit pas, car là n’est pas sa vocation ; elle s’incline devant la personne. Comme toute thérapie, y compris la psychiatrie, l’art-thérapie ne va pas forcément guérir, ni même enlever les symptômes. La création peut simplement donner au patient un sentiment d’unité psychocorporelle, la possibilité d’entrer en contact avec autrui, ici et maintenant. En art-thérapie, on approche la personne, en dépit de la maladie ou de ses difficultés existentielles, dans ce qui lui reste de désir et d’élan vital.

Entre théorie et intuition

Comme on l’a vu plus haut, l’art-thérapie s’appuie sur des théories et des courants de pensées divers, sur des recherches et des connaissances qui s’inscrivent dans l’histoire de notre culture et nous permettent des pistes de réflexion, d’évaluation. Mais devant une personne en déclin, en détresse, ce ne sont pas les théories qui sont à l’œuvre. Elles donnent un cadre à notre humanité et donc à nos forces et failles, elles nous permettent de nous justifier ou nous mettent au défi lorsque nous sommes démunis. Mais la théorie est peu de chose devant l’enfant autiste qui se balance en réponse à une proposition d’activité, devant le psychotique muré dans le silence, devant une personne en larmes.

C’est pourquoi il est à la fois important pour l’art-thérapeute d’avoir de solides connaissances théoriques et d’être en même temps capable de les oublier dès qu’il est en face d’une personne, c’est-à-dire engagé dans une relation vivante.

Il est important que l’art-thérapeute – et c’est là que les connaissances prennent tout leur sens – ne confonde pas une crise d’adolescence avec un début de schizophrénie, par exemple. Mais la prise en charge d’une personne en difficulté, et surtout la façon dont on va pouvoir l’encourager à se prendre en charge ellemême, se joue dans la rencontre, au-delà de tout diagnostic de départ. Qu’on fasse danser, chanter ou peindre le patient, c’est d’abord cette femme-là qu’on rencontre, et non pas « une alcoolique » ou une dépressive ; un jeune handicapé, et non pas un trisomique ; un homme, et non pas un malade en chaise roulante infecté par le VIH… On rencontre une personne et toute rencontre est un processus créatif et unique. Chercher à trop prendre appui sur des concepts théoriques ou des diagnostics, des fiches d’observation et d’évaluation, risque de nuire à l’intuition qui fait probablement les meilleurs thérapeutes, à condition que cette intuition ne confonde pas croyances et connaissances.

 

1 Figure 9.

2 Jean-Pierre Royol, Art-thérapie, Éditions Dorval, 2009.

3 Voir chapitre 3.

4 Figure 10, « Montrer ses dents et son mordant. Exorciser ses démons ».

5 Figure 11.

6 Figure 12.