Chapitre 27 Pathologies de Type Plénitude et Pathologies de Type Vide
Les pathologies de type Plénitude et de type Vide dépendent de la force relative des facteurs pathogènes et de celle du Qi Correct.
En médecine chinoise, la force relative des facteurs pathogènes et celle du Qi Correct est probablement le facteur le plus important pour élaborer le traitement. Il est en effet indispensable de déterminer correctement si une pathologie est de type Plénitude, de type Vide ou de type Vide-Plénitude. Il ne faut pas sous-estimer l’importance qu’il y a à diagnostiquer correctement le caractère Plénitude ou Vide (ou Vide-Plénitude) d’une pathologie car c’est ce diagnostic qui va influencer le principe de traitement et les résultats thérapeutiques (voir aussi ch. 69).
Il serait totalement erroné de tonifier le Qi Correct (Zheng Qi) dans une pathologie de type Plénitude ou d’expulser les facteurs pathogènes dans une pathologie de type Vide. Dans les pathologies de type Vide-Plénitude, il est absolument indispensable de diagnostiquer l’importance et l’équilibre relatifs des facteurs pathogènes et du Qi Correct. Dans ce genre de pathologies, il ne s’agit pas simplement de simultanément expulser les facteurs pathogènes et tonifier le Qi Correct, mais le principe de traitement doit reposer sur une évaluation minutieuse de la force relative des facteurs pathogènes et du Qi Correct et des caractéristiques de chaque cas. Même si le traitement doit à la fois expulser les facteurs pathogènes et tonifier le Qi Correct de façon équilibrée, il faudra toujours mettre l’accent sur l’une ou l’autre de ces procédures.
Diagnostiquer le caractère Plénitude ou Vide (ou Vide-Plénitude) est de la plus grande importance, car cela va déterminer le principe de traitement.
L’expression « facteur pathogène » (xie qi en chinois) a un sens très vaste en médecine chinoise. Il peut s’agir d’un facteur pathogène externe, comme le Vent ou l’Humidité externe, ou d’un facteur pathogène interne, comme les Glaires ou les stases de Sang.
Les facteurs climatiques externes viennent de l’environnement et lorsqu’ils envahissent l’Extérieur du corps, ils deviennent des « facteurs pathogènes externes ». Les facteurs pathogènes externes peuvent devenir internes (généralement, en fonction de leur évolution).Par exemple, le Vent externe peut se transformer en Chaleur et devenir interne (Fig. 27.1). L’étude des facteurs pathogènes externes comme causes de la maladie est présentée dans le chapitre 20 et complétée dans le chapitre 43.
Le cadre 27.1 recense les facteurs pathogènes externes.
Les facteurs pathogènes internes proviennent soit de l’intérieur (par exemple, des Glaires qui découlent d’un vide du Rein et de la Rate) soit de la transformation d’un facteur pathogène externe. Il n’y a que trois cas dans lesquels un facteur pathogène externe pénètre à l’Intérieur dès le début de la pathologie, sans passer par un stade externe, et devient interne dès l’instant où il envahit le corps. Il s’agit du Froid qui envahit l’Estomac (douleur épigastrique aiguë et vomissements), du Froid qui envahit les Intestins (douleur épigastrique aiguë et diarrhées) et du Froid qui envahit l’Utérus (dysménorrhée aiguë).
Il n’y a que trois cas dans lesquels le facteur pathogène envahit directement l’Intérieur du corps, dès le début, sans provoquer de symptômes externes :
Les facteurs pathogènes internes proviennent de l’Intérieur, c’est-à-dire qu’ils se forment en raison d’un déséquilibre interne (Fig. 27.2). Par exemple, un vide du Poumon, de la Rate et du Rein peut engendrer des Glaires ; un vide de Yang peut entraîner un Froid (de type Vide), etc.
On peut citer, comme exemples de facteurs pathogènes internes :
La stagnation de Qi est un facteur pathogène extrêmement courant. Elle peut provenir d’une tension émotionnelle, d’une alimentation irrégulière, d’un travail physique excessif ou d’un manque d’exercice physique. La tension émotionnelle est la cause de stagnation de Qi la plus fréquente chez les patients occidentaux. Certaines émotions peuvent provoquer directement une stagnation de Qi, par exemple, la colère, la frustration, le ressentiment, l’inquiétude et l’excès de réflexion. Mais toutes les émotions, y compris celles qui épuisent le Qi, peuvent engendrer une stagnation de Qi. La tristesse et le chagrin, par exemple, épuisent le Qi, surtout le Qi du Poumon ; il s’ensuit une altération de la circulation du Qi dans la poitrine et donc une stagnation de Qi dans cette zone.
Le principal symptôme de la stagnation est la « distension » (zhang). Les patients occidentaux utilisent rarement ce terme et décrivent plutôt une sensation de « ballonnement ». On peut ressentir une distension au niveau de l’abdomen, des hypochondres, de la poitrine, des seins chez la femme, de la gorge et de la tête. C’est une sensation qui est à la fois subjective et objective. Subjectivement, la personne se sent ballonnée ; objectivement, l’abdomen est distendu (c’est-à-dire visiblement gonflé), plutôt dur mais aussi élastique, comme un ballon.
La stagnation de Qi peut aussi entraîner une douleur, auquel cas elle s’accompagne d’une sensation prononcée de distension. Les autres symptômes de la stagnation du Qi comprennent l’irritabilité, des symptômes qui vont et viennent en fonction de l’état émotionnel, une humeur sombre, des sautes d’humeur fréquentes, des soupirs fréquents, un pouls en Corde et un corps de langue de couleur normale ou légèrement Rouge sur les bords.
Les autres signes et symptômes dépendent de l’organe impliqué. Le Foie est le principal organe affecté par la stagnation du Qi et, effectivement, la stagnation du Qi du Foie se rencontre très fréquemment en pratique clinique. Toutefois, il faut aussi souligner que d’autres organes peuvent souffrir d’une stagnation du Qi, par exemple le Cœur, le Poumon, l’Estomac et les Intestins.
Les manifestations cliniques de stagnation du Qi sont décrites dans le chapitre 34. Il est important de noter que la stagnation du Qi est un facteur pathogène « immatériel » et qu’il diffère en cela de l’Humidité ou des Glaires, par exemple. C’est pour cette raison que la distension abdominale qui affecte le Foie et les Intestins n’est pas soulagée par des selles. Inversement, la plénitude abdominale et la douleur engendrées par l’Humidité ou par la rétention de nourriture disparaissent une fois que la personne a été à la selle.
Une autre caractéristique importante de la stagnation du Qi comparée aux stases de Sang est qu’elle n’engendre pas de pathologies graves dans le sens où la médecine occidentale l’entend. Par exemple, la stagnation de Qi ne peut pas provoquer des cancers, des maladies cardiaques ou des attaques d’apoplexie ; par contre, les stases de Sang sont impliquées dans toutes ces maladies.
Le cadre 27.2 résume les manifestations de la stagnation du Qi
Alors que la stagnation du Qi engendre une distension, les stases de Sang provoquent une douleur (bien que les stases de Sang puissent aussi survenir en l’absence de douleur). La douleur due aux stases de Sang est une douleur en coups de poignard, fixe et perçante. Les stases de Sang sont associées à une couleur pourpre ou sombre, par exemple, un teint sombre, des lèvres pourpres, des ongles pourpres, des saignements de sang foncé avec des caillots foncés, un sang menstruel foncé avec des caillots foncés ou une langue Pourpre. Les variétés de pouls associées aux stases de Sang sont le pouls en Corde, le pouls Rugueux ou le pouls Ferme. Les stases de Sang sont étudiées dans le chapitre 31.
Le Foie est l’organe qui est le plus fréquemment touché par les stases de Sang. Les autres organes que celles-ci sont susceptibles d’affecter sont le Cœur, le Poumon, l’Estomac, les Intestins et l’Utérus. Les symptômes de stases de Sang dans chacun de ces organes sont décrits dans le chapitre 31.
Contrairement à la stagnation du Qi, les stases de Sang sont potentiellement la cause de maladies graves comme le cancer, les masses abdominales, les myomes, l’endométriose, les maladies cardiaques et les attaques d’apoplexie. Bien évidemment, il ne faut pas en conclure que ces maladies se déclarent chaque fois qu’il y a des stases de Sang.
Alors que la stagnation de Qi peut surgir directement, en réponse à une tension émotionnelle, les stases de Sang ne proviennent pas directement d’un facteur étiologique. Par exemple, aucun état émotionnel ne conduit directement à des stases de Sang, même si certains états émotionnels vont avoir cet effet, après avoir tout d’abord provoqué une stagnation du Qi. Les stases de Sang découlent généralement de pathologies autres dont les principales sont :
Les stases de Sang sont également un facteur pathogène important car elles peuvent elles aussi devenir la cause d’un autre déséquilibre. En fait, les stases de Sang peuvent entraîner les pathologies suivantes :
Le cadre 27.3 résume les manifestations des stases de Sang.
Le Vent interne se caractérise par des mouvements involontaires. Les principales manifestations cliniques du Vent interne sont les tremblements, les tics, les sensations vertigineuses intenses, les vertiges et l’engourdissement. Dans les cas graves, ce sont des convulsions, de l’inconscience, un opisthotonos, une hémiplégie et une déviation de la bouche.
Le Vent interne est toujours en relation avec un déséquilibre du Foie. Il peut surgir à la suite de différentes pathologies :
La Chaleur extrême peut engendrer un Vent du Foie. Cette situation survient aux stades tardifs des maladies fébriles, lorsque la Chaleur pénètre dans la couche du Sang et engendre le Vent. Ce processus est semblable au vent engendré par un immense feu de forêt. Les manifestations cliniques en sont une forte fièvre, du délire, un coma, et un opisthotonos.
La montée du Yang du Foie peut engendrer le Vent du Foie dans les pathologies de longue durée. Les manifestations cliniques en sont des sensations vertigineuses intenses, des vertiges, des céphalées, des tremblements, des tics et de l’irritabilité. Le Feu du Foie peut engendrer un Vent du Foie. Le vide de Sang du Foie ou le vide de Yin du Foie peut engendrer un Vent du Foie. Ce tableau est dû à un vide de Sang qui crée un espace vide dans les vaisseaux sanguins, espace que le Vent interne remplit. Les manifestations cliniques de ce tableau sont l’engourdissement, les sensations vertigineuses, la vision trouble, les tics et les tremblements légers.
En dehors du Vent interne qui survient aux stades avancés des maladies fébriles chez les enfants (sous la forme de convulsions), le Vent interne est plus fréquent chez les personnes âgées. C’est lui qui est la cause, par exemple, de l’attaque de Vent ou de la maladie de Parkinson.
Le Vent interne est présenté plus en détail au chapitre 43.
Le cadre 27.4 résume les manifestations du Vent interne.
L’Humidité interne est un facteur pathogène extrêmement courant. Il provient soit d’un déséquilibre interne (vide de Qi de la Rate) soit de la transformation de l’Humidité externe. L’Humidité est responsable d’une grande variété de pathologies affectant de nombreux systèmes différents. Par exemple, elle peut être la cause de nombreuses maladies de la peau, de troubles digestifs, de troubles urinaires, de problèmes de sinus, de troubles menstruels, du syndrome de fatigue post-virale, etc.
Les principales manifestations cliniques de l’Humidité interne sont une sensation de plénitude dans l’abdomen, de la léthargie, des urines troubles, des écoulements vaginaux excessifs, des douleurs musculaires, des problèmes de sinus, un goût collant dans la bouche, un enduit lingual collant et un pouls Glissant ou Mou.
Ce ne sont-là que les manifestations générales de l’Humidité ; les autres signes et symptômes dépendent de l’organe impliqué. De nombreux organes peuvent souffrir d’Humidité interne comme, par exemple, l’Estomac, la Rate, la Vessie, les Intestins, la Vésicule Biliaire, le Foie, le Rein et l’Utérus. En dehors des Organes Internes, l’Humidité se loge souvent dans diverses structures comme les articulations, les méridiens, les muscles, l’espace compris entre la peau et les muscles, la peau ou la tête.
Les différentes manifestations cliniques et les principales caractéristiques de l’Humidité peuvent se résumer comme suit :
Lourdeur : elle engendre une sensation de fatigue, de lourdeur des membres ou de la tête, une sensation de brouillard dans la tête.
Impureté : l’Humidité est sale, ce qui se traduit dans les écoulement sales comme des urines troubles, des écoulements vaginaux ou des maladies de la peau qui se caractérisent par des suintements de liquides épais et sales comme dans certaines formes d’eczéma.
Épaisseur : l’Humidité est collante, ce que traduisent l’enduit lingual collant, le goût collant dans la bouche et le pouls Glissant.
L’humidité est présentée plus en détail au chapitre 43.
Le cadre 27.5 résume les manifestations de l’Humidité.
Le Froid interne provient soit d’un vide de Yang (auquel cas il s’agit d’un Froid-Vide) soit d’une transformation du Froid externe (auquel cas il s’agit d’un Froid-Plénitude). Le Froid interne engendre une douleur en forme de crampes qui est soulagée par l’absorption de boissons chaudes ou par l’application de chaleur, une sensation de froid, une absence de soif, des écoulements fins et clairs, des membres froids, un teint blanc vif, un enduit lingual blanc et un pouls Lent.
Les manifestations cliniques du Froid-Plénitude et du Froid-Vide sont similaires car leur nature est identique. La principale différence est que le Froid-Plénitude se caractérise par une apparition soudaine, une douleur intense et une langue et un pouls de type Plénitude. Par exemple, la langue va présenter un enduit blanc et épais, et le pouls va être Plein et Serré. Le Froid-Vide se caractérise par une douleur plus sourde, une langue Pâle avec un enduit blanc et mince et un pouls Lent, Profond et Faible.
Le Froid est étudié plus en détail au chapitre 43.
Le cadre 27.6 résume les manifestations du Froid interne.
Les Glaires sont un facteur pathogène interne très important. Comme les stases de Sang, elles sont potentiellement la cause de maladies graves comme le cancer, les maladies cardiaques et les attaques d’apoplexie. Les Glaires sont à la fois un état pathologique et un facteur étiologique. En fait, des Glaires installées depuis un certain temps peuvent elles-mêmes devenir une cause de maladie.
La principale cause de formation des Glaires est le vide de la Rate. Si la Rate n’arrive plus à transformer et à transporter les Liquides Organiques, ces derniers s’accumulent et se transforment en Glaires. Le Poumon et le Rein sont aussi impliqués dans la formation des Glaires. Si le Poumon n’arrive plus à diffuser les liquides et à les faire descendre, et si le Rein n’arrive plus à transformer et à excréter les liquides, ceux-ci vont s’accumuler et se transformer en Glaires.
Les principaux signes de Glaires sont un corps de langue Gonflé, un enduit lingual collant et un pouls Glissant ou en Corde. Les autres symptômes possibles sont une sensation d’oppression dans la poitrine, des nausées, une sensation de lourdeur, une sensation de brouillard dans la tête et des sensations vertigineuses.
Les autres signes, concernant les Glaires chroniques, sont :
manque d’éclat (shen) des yeux
orbites oculaires de couleur sombre
petites gerçures qui suintent au coin de l’œil
corps gonflé, visage bouffi, obésité
transpiration des organes génitaux externes, des
aisselles ou des paumes des mains et des plantes
Les Glaires sont une accumulation pathologique de liquides qui survient lorsqu’il y a une perturbation de :
la descente et la diffusion du Qi du Poumon
la montée et le transport du Qi du Cœur
la transformation et le transport du Yang de la
Le réchauffement, la circulation, le transport, la transformation et l’excrétion des liquides dépendent du Yang Qi. Ainsi, si le Yang Qi est insuffisant, c’est le Yin qui domine et les liquides s’accumulent et se transforment en Glaires. Inversement, comme les Glaires sont une accumulation de Yin, elles lèsent le Yang.
Parce qu’elles sont collantes et parce qu’elles bloquent le mécanisme du Qi, les Glaires sont difficiles à éliminer, elle deviennent chroniques et elles engendrent des changements pathologiques lents. Parce qu’elles bloquent le mécanisme du Qi, on ajoute souvent des plantes qui font circuler le Qi dans les prescriptions destinées à éliminer les Glaires.
Comme les Glaires sont une accumulation de liquides et qu’elles sont de nature Yin, elles peuvent engendrer des masses, des gonflements, des nodules, des boules sous la peau, ou des boules dans la cavité abdominale ou dans les organes. Les masses qui proviennent des Glaires sont généralement molles à la palpation et habituellement indolores. Inversement, les masses dérivées de stases de Sang sont généralement dures à la palpation et douloureuses.
De nombreuses maladies qui se caractérisent par des masses sont dues aux Glaires :
Les Glaires bougent et circulent, suivant le Qi dans ses mouvements de montée-descente et d’entrée-sortie, et parcourent le corps entier, de l’Extérieur aux Organes Internes. Elles sont stockées par le Poumon, elles sont rassemblées dans l’Estomac, elles obstruent les orifices du Cœur, elles agressent le Foie et la Vésicule Biliaire, et elles s’installent dans les méridiens.
Une fois formées, les Glaires suivent le Qi et le Sang ; on les trouve à l’Intérieur dans les Organes Internes, et à l’Extérieur dans les méridiens. Parce qu’elles obstruent, elle peuvent engendrer ou aggraver les stases de Sang, effet renforcé par l’interaction qui existe entre les liquides et le Sang. En fait, d’un côté, il existe une relation d’échange mutuel entre les Liquides Organiques et le Sang (voir ch. 3), et donc les stases de Sang ont une influence sur les liquides, et de l’autre, les Glaires sont une accumulation de liquides pathologiques, ce qui aggrave les stases de Sang. Toutefois, tout comme les Glaires peuvent aggraver les stases de Sang, ces dernières peuvent aussi contribuer à la formation des premières en raison de l’interaction qui existe entre les liquides et le Sang. Ainsi, les Glaires et les stases de Sang se renforcent mutuellement et engendrent un véritable cercle vicieux (Fig. 27.3).
Zhu Dan Xi dit : « Lorsque le Qi du Poumon est relâché, que le patient tousse et qu’il ne peut pas rester allongé, cela vient des Glaires qui nourrissent les stases de Sang ». Zhang Lu dit : « Les Glaires nourrissent le Sang mort, elles suivent le Qi, circulent et engendrent de la douleur ». Li Yong Cui dit : « Le Sang de l’Estomac peut stagner et s’accompagner de Glaires qui s’accumulent nuit et jour ; il en résulte des maladies de Yi Ge et de Fan Wei ».
De nombreuses pathologies occidentales sont considérées comme découlant des Glaires et des stases de Sang, comme les lymphomes, les cancers, les hémorragies cérébrales, les maladies coronariennes et certaines maladies mentales.
L’interaction entre les Glaires et les stases de Sang peut entraîner les manifestations suivantes :
Les Glaires sont à l’origine de nombreuses maladies ; leur champ clinique est vaste et elles engendrent généralement des maladies complexes. Le « syndrome de Glaires » traduit une pathologie dans laquelle les Glaires sont la cause de la plupart des modifications pathologiques ; mais ce n’est pas parce qu’il y a présence de Glaires qu’on a forcément un « syndrome de Glaires ».
Les Glaires peuvent prendre différentes formes, ce qui explique qu’elles peuvent engendrer des tableaux pathologiques très différents comme par exemple, des Glaires-Vent, des Glaires-Chaleur, etc. Ceux-ci sont décrits au chapitre 31.
Les Glaires bloquent le Réchauffeur Moyen et engendrent très facilement un vide de l’Estomac et de la Rate. En particulier, l’Estomac est fréquemment touché par les Glaires et les préparations qui dissolvent les Glaires comportent généralement des plantes qui « harmonisent l’Estomac ». Sur la langue, des Glaires chroniques se traduisent souvent par une fissure de type Estomac avec un enduit collant et sec à l’intérieur.
Les Glaires se combinent souvent avec le Vent, le Froid, la Chaleur et l’Humidité. Ces associations sont décrites au chapitre 31.
Les médecins chinois fournissent diverses lignes directrices à suivre dans les situations cliniques complexes qui ont tendance à entretenir les Glaires. En voici quelques unes :
« Dans les cas étranges, traiter les Glaires. » Cette phrase évoque les tableaux pathologiques complexes qui comportent des signes et symptômes qui ne rentrent dans aucune catégorie. Par exemple, un homme de forte constitution se réveille fréquemment au cours de la nuit, il rêve beaucoup, il a un appétit insatiable et une langue Gonflée ; cette pathologie est probablement due à des Glaires. Autre exemple : une femme d’un certain âge souffre de palpitations, de constipation, de soif, d’insomnie et elle a un goût amer dans la bouche ; ces manifestations pourraient provenir de Glaires-Chaleur.
« Dans les syndromes complexes, traiter les Glaires. »
« Dans les maladies aiguës graves, traiter les Glaires. » On peut citer en exemple les attaques de Vent, les infarctus et le cancer.
Le cadre 27.7 résume les manifestations des Glaires.
Le terme de « Chaleur » prend généralement au moins deux sens différents. Tout d’abord, le mot « Chaleur » est un terme générique qui comprend toute manifestation qui se caractérise par de la Chaleur, que celle-ci soit une Chaleur interne, un Vent-Chaleur interne ou un Feu. Dans ce sens, le « Feu » rentre dans la catégorie générale de la « Chaleur ».
Dans un sens plus restreint, la « Chaleur » renvoie à un facteur pathogène qui se différencie du Feu. Bien que la Chaleur et le Feu partagent de nombreuses caractéristiques et qu’ils soient de même nature, ces deux facteurs pathogènes se distinguent par leur intensité (le Feu est plus intense que la Chaleur) et leurs manifestations cliniques, tout comme leur traitement, sont quelque peu différents. De ce point de vue, la Chaleur est donc différente et distincte du Feu.
Il existe une autre différence terminologique importante entre la Chaleur et le Feu. Alors que la Chaleur dénote toujours une Chaleur pathologique, le terme de « Feu » peut renvoyer au Feu physiologique du corps (le Feu Ministre ou le Feu de la Porte de la Vie) ou au Feu pathologique (comme dans le « Feu du Foie »). Dans le « Classique de médecine interne de l’Empereur Jaune », le Feu physiologique du corps est parfois appelé « Petit Feu » (Shao Huo) et le Feu pathologique « Feu Exubérant » (Zhuang Huo) (voir Fig. 43.10).
La Chaleur dénote donc un état d’excès de Yang ; elle peut affecter pratiquement n’importe quel organe et elle est soit d’origine interne, soit le résultat de la transformation de la Chaleur externe. Les principales causes internes de Chaleur sont la tension émotionnelle et le régime alimentaire. Comme nous l’avons dit précédemment, toutes les émotions peuvent engendrer une stagnation du Qi qui, à son tour, peut entraîner une Chaleur, car le Qi stagnant « implose » et engendre de la Chaleur.
Les manifestations cliniques traditionnelles de la Chaleur sont une sensation de chaleur, une face rouge, de la soif, de l’agitation mentale, une langue Rouge et un pouls Vaste et Rapide. Les autres manifestations cliniques dépendent de l’organe impliqué et du caractère Plénitude ou Vide de la Chaleur.
La Chaleur est un facteur pathogène extrêmement courant qui peut aussi coexister avec le Froid. Par exemple, il n’est pas rare de rencontrer un vide de Yang du Rein (et donc un Froid-Vide) et une ChaleurHumidité de la Vessie.
La Chaleur se combine fréquemment avec l’Humidité pour donner la Chaleur-Humidité, source de nombreuses manifestations cliniques dans de nombreux et différents organes et endroits du corps. La Chaleur-Humidité est présentée au chapitre 43.
Le cadre 27.8 résume les différentes manifestations de la Chaleur.
Le Feu est essentiellement un facteur pathogène interne. On pourrait considérer que la seule forme de « Feu externe » est celui qu’on trouve dans les Maladies de type Chaleur. Le Feu peut provenir de la transformation d’autres facteurs pathogènes externes (par exemple, le Vent, le Froid, la Chaleur de l’Été ou l’Humidité), mais une fois qu’il atteint les Organes Internes, il devient un facteur pathogène interne.
Les causes du Feu interne sont la consommation excessive d’aliments de type chaleur et d’alcool, la tension émotionnelle (la stagnation de Qi se transforme en Feu) et le tabac (Fig. 43.11).
Les manifestations cliniques traditionnelles du Feu sont une face rouge, des yeux rouges, des yeux gonflés et douloureux, des aphtes, des urines foncées et peu abondantes, des selles sèches, des saignements, de l’insomnie, de l’agitation mentale, une irritabilité prononcée, une propension aux accès de colère (dans le Feu du Foie), de la nervosité, une langue Rouge avec un enduit jaune foncé et sec, et un pouls Profond, Plein et Rapide.
Comme nous l’avons dit précédemment, le mot « Chaleur », dans son acception étroite, dénote une forme modérée de Feu. La Chaleur et le Feu sont de toute évidence de même nature et présentent des caractéristiques communes ; tous deux engendrent la soif, une sensation de chaleur, une certaine agitation mentale, une langue Rouge et un pouls Rapide. Toutefois, leurs manifestations cliniques, leurs possibles complications et leur traitement comportent des différences importantes.
Le Feu est plus « solide » que la Chaleur, il tend à bouger plus et à assécher plus que la Chaleur, et c’est cette nature du Feu qui engendre des urines foncées et peu abondantes et des selles sèches. Le Feu monte (provoquant des aphtes, par exemple) ou endommage les vaisseaux sanguins (provoquant des saignements). De plus, le Feu a plus tendance à affecter l’Esprit que la Chaleur et à engendrer de l’anxiété, de l’agitation mentale, de l’insomnie ou des troubles mentaux.
De par sa nature, le Feu va donc :
Le cadre 27.9 résume les manifestations du Feu.
Face rouge, yeux rouges, yeux gonflés et douloureux, aphtes, urines foncées et peu abondantes, selles sèches, saignements, insomnie, agitation mentale, irritabilité prononcée, propension aux accès de colère (dans le Feu du Foie), nervosité, langue Rouge avec un enduit jaune foncé et sec, pouls Profond, Plein et Rapide
Le cadre 27.10 montre les caractéristiques du Feu comparées à celles de la Chaleur.
C’est la présence d’un facteur pathogène qui fait qu’une pathologie est de type « Plénitude » et présente un « Excès ». Le terme « Excès » renvoie ici au facteur pathogène et non au Qi Correct ; autrement dit, dans une pathologie de type Plénitude, il n’y a pas un excès de Qi Correct mais la présence d’un facteur pathogène. Une telle pathologie se nomme shi en chinois, ce qui signifie « solide » ; ce terme décrit bien la situation car cette pathologie se caractérise par la présence d’un facteur pathogène dont elle est « solidaire ». Il faut noter que les conditions indispensables pour définir un tableau comme étant un pur tableau de « Plénitude » nécessitent non seulement la présence d’un facteur pathogène mais aussi un Qi Correct relativement intact, capable de combattre ce facteur pathogène. En fait, si le Qi Correct est insuffisant par rapport au facteur pathogène, la pathologie sera plutôt qualifiée de pathologie « Vide-Plénitude » (Fig. 27.4).
Une pathologie de type Plénitude se traduit, par définition, par des symptômes qui sont relativement graves et intenses. Par exemple, si un patient souffre d’une douleur forte, intense, qui l’empêche d’avoir des activités normales, cette douleur provient de façon certaine d’une pathologie de type Plénitude. Il faut bien noter qu’une pathologie de type Plénitude peut être chronique ou aiguë, et que le terme « aigu » n’est pas synonyme de pathologie externe (Fig. 27.5). Une invasion de Vent externe est un exemple de pathologie de type Plénitude externe et aiguë ; une montée aiguë du Yang du Foie qui provoque une crise de migraine grave est un exemple de pathologie de type Plénitude interne et aiguë.
Le cadre 27.11 résume les caractéristiques des pathologies de type Plénitude.
Une pathologie de type Vide se caractérise par un « vide », c’est-à-dire une insuffisance du Qi Correct. Il faut se souvenir que le Qi Correct est un terme général qui englobe à la fois toutes les formes du Qi et du Sang, et qu’il dénote essentiellement la résistance du corps aux facteurs pathogènes. Le terme de « Qi Correct » (Zheng Qi) s’utilise, en fait, en association ou en opposition avec l’expression « facteur pathogène » (Xie Qi).
Les manifestations cliniques d’une pathologie de type Vide sont bien plus légères que celles d’une pathologie de type Plénitude. La douleur est un symptôme excellent pour comparer les pathologies de type Plénitude et les pathologies de type Vide. Dans une pathologie de type Plénitude, la douleur est forte et intense, tandis que dans une pathologie de type Vide, elle est plus légère et ressemble plus à une gêne qu’à une douleur.
Comme la pathologie de type Plénitude, la pathologie de type Vide peut être chronique ou aiguë, mais le plus souvent, elle est chronique. Par exemple, un vide de la Rate va apparaître progressivement et lentement, au fil des ans (en raison, généralement, d’une alimentation irrégulière), et il en va de même pour le vide du Rein (qui est généralement dû au surmenage). Le vide de Yin provoqué par une maladie fébrile aiguë, le vide de Sang consécutif à une forte perte de sang et le vide de Qi qui découle de transpirations profuses sont des exemples de pathologies de type Vide aiguës. La très grande majorité des patients qui viennent consulter pour une pathologie de type Vide souffre d’un vide interne chronique qui s’est constitué progressivement.
Le cadre 27.12 résume les caractéristiques d’une pathologie de type Vide.
Une pathologie est dite de type « Vide-Plénitude » lorsqu’il y a présence d’un facteur pathogène et que le Qi Correct est insuffisant ; ce dernier ne peut donc pas combattre correctement le facteur pathogène ou, dans les cas graves, il ne peut pas le combattre du tout. Dans les pathologies internes extrêmement chroniques, c’est en fait le vide du Qi Correct qui entraîne la formation du facteur pathogène (par exemple, un vide de la Rate et du Rein engendre des Glaires).
Les facteurs pathogènes et le Qi Correct sont en constante interaction. De façon générale, lorsque l’un prend le pas sur l’autre, ce dernier décline (Fig. 27.6). Par exemple, si les Glaires (le facteur pathogène) se développent, cela va inévitablement affaiblir la Rate et peut-être aussi le Rein ; inversement, si la Rate et le Rein se renforcent, les Glaires diminuent. Le chapitre 28 des « Questions simples » dit : « Lorsque les facteurs pathogènes sont forts, la pathologie est de type Plénitude ; le Qi Correct est épuisé et devient insuffisant ».1
Le cadre 27.13 résume les caractéristiques des pathologies de type Vide-Plénitude.
Cadre 27.13 Pathologies de Type Vide-Plénitude
Une pathologie de « Vide-Plénitude » se caractérise par la présence d’un facteur pathogène alors que le Qi Correct est insuffisant.
On peut imaginer six situations différentes quant à la force relative du facteur pathogène et du Qi Correct, à savoir :
Voyons ces six possibilités en détail.
Bien évidemment, il s’agit-là d’un état (rare) de parfaite santé.
C’est une pathologie de type purement Vide que l’on rencontre généralement dans les pathologies internes chroniques, comme par exemple, un vide de Qi de la Rate chronique qui s’installe progressivement et lentement en raison d’une alimentation irrégulière, un vide de Yang du Rein qui s’installe progressivement et lentement en raison d’un surmenage, etc.
Bien qu’en apparence il s’agisse d’une situation très courante, cette pathologie n’est pas aussi répandue que cela car, dans la majorité des cas, on va trouver un autre facteur pathogène en plus (ou en raison) du Vide.
Le cadre 27.14 résume les caractéristiques de l’absence de facteur pathogène et d’un Qi Correct insuffisant.
C’est une pathologie classique de type purement Plénitude : la personne souffre d’un facteur pathogène (qui peut être interne ou externe, aigu ou chronique) et le Qi Correct est fort et combat vigoureusement le facteur pathogène. C’est une situation qui engendre des manifestations cliniques fortes et intenses, surtout dans les pathologies externes aiguës. Par exemple, si une personne qui présente un Qi Correct fort est envahie par un Vent externe fort, les manifestations cliniques vont être très fortes et intenses (par exemple, une forte fièvre, des courbatures prononcées, etc.).
Alors qu’il est facile d’imaginer la présence d’une pathologie externe aiguë lorsqu’à la fois le facteur pathogène et le Qi Correct sont forts, cette situation se rencontre aussi dans les pathologies internes chroniques. Par exemple, une personne dont le Qi Correct est fort peut présenter une forte stagnation du Qi (pathologie de type Plénitude) due à des troubles émotionnels ; il va s’ensuivre une pathologie de type purement Plénitude qui sera interne et chronique. En fait, c’est une situation que l’on rencontre souvent chez des patients qui, bien que présentant un facteur pathogène fort, jouissent d’une bonne constitution, ce qui renforce le Qi Correct ; c’est pourquoi ces personnes atteignent souvent un âge respectable malgré la présence de ces facteurs pathogènes forts.
Le cadre 27.15 résume les caractéristiques d’un facteur pathogène fort associé à un Qi Correct fort.
Bien que les trois situations suivantes : facteur pathogène fort et Qi Correct insuffisant, facteur pathogène faible et Qi Correct fort et facteur pathogène faible et Qi Correct insuffisant, conduisent toutes à une pathologie de type Vide-Plénitude, elles sont en fait différentes et je vais illustrer ces différences par des exemples.
Lorsque le facteur pathogène est fort et que le Qi Correct est insuffisant, la pathologie est une pathologie de type Vide-Plénitude extrêmement courante qui peut être externe ou interne. Par exemple, cette pathologie est celle que l’on trouve chez une personne qui présente un Qi Correct insuffisant (ce qui est extrêmement fréquent) et qui est envahie par un Vent externe fort. Comme le Qi Correct est insuffisant, les manifestations cliniques sont moins intenses que dans le cas cité précédemment (c’est-à-dire lorsque le facteur pathogène et le Qi Correct sont tous les deux forts). Contrairement au cas précédent, si le patient a de la fièvre, celle-ci sera relativement faible. On peut citer comme exemple de pathologie interne dans laquelle le facteur pathogène est fort et le Qi Correct insuffisant le cas d’une personne qui souffre d’un syndrome de fatigue post-virale qui se caractérise par une Humidité prononcée et intense et un Qi Correct insuffisant ; cette pathologie est relativement courante. Dans ce cas-là, le Qi Correct essaye encore de combattre le facteur pathogène mais il ne le fait pas de façon efficace. C’est exactement ce qui se passe dans le syndrome de fatigue post-virale, lorsque le Qi Correct ne réussit pas à combattre le facteur pathogène ; il en résulte une pathologie chronique extrêmement durable, qui s’étend sur une longue période, sans jamais aller mieux ou aller plus mal.
On peut aussi citer comme exemple de pathologie interne accompagnée d’un facteur pathogène fort et un Qi Correct faible, le cas d’un patient qui souffre d’une grave pathologie de Glaires et d’un vide simultané de la Rate et du Rein. Cette situation est relativement fréquente et peut, chez les personnes âgées, engendrer des maladies graves.
Le cadre 27.16 résume les caractéristiques d’un facteur pathogène fort et d’un Qi Correct insuffisant.
Cette situation peut aussi entraîner une pathologie de type Vide-Plénitude qui peut être interne ou externe. Bien qu’il s’agisse d’une pathologie de type Vide-Plénitude tout comme celle évoquée précédemment (avec un facteur pathogène fort et un Qi Correct insuffisant), les manifestations de cette pathologie sont bien différentes et généralement plus modérées (parce que le facteur pathogène est faible).
On peut aussi citer comme exemple de pathologie externe avec un facteur pathogène faible et un Qi Correct fort, le cas d’un patient qui est envahi par un Vent externe modéré ; dans ce cas, les manifestations cliniques sont très légères, il n’y a pas de fièvre et le patient est habituellement capable de surmonter cette pathologie.
On peut aussi citer comme exemple de pathologie interne avec un facteur pathogène faible et un Qi Correct fort, le cas d’un patient qui souffre d’une pathologie modérée d’Humidité avec un Qi Correct fort. Dans ce cas également, les manifestations cliniques sont légères.
Le cadre 27.17 résume les caractéristiques d’un facteur pathogène faible et d’un Qi Correct fort.
Il peut sembler étrange qu’une pathologie de ce genre (dans laquelle à la fois le facteur pathogène et le Qi Correct sont « faibles ») soit aussi considérée comme un tableau de type Vide-Plénitude. On décrit celui-ci comme tel parce qu’il y a présence d’un facteur pathogène, même s’il est faible. Cette pathologie peut être externe ou interne et les manifestations cliniques sont, parmi les trois dernières situations évoquées, les plus légères.
On peut citer comme exemple de pathologie externe avec un facteur pathogène faible et un Qi Correct faible, le cas d’un patient qui est envahi par un Vent externe modéré ; les manifestations cliniques sont modérées et il n’y a pas de fièvre.
On peut citer comme exemple de pathologie interne avec un facteur pathogène faible et un Qi Correct fort, le cas d’un patient qui présente un vide chronique de Qi Correct et la présence simultanée mais légère d’une Humidité ou de Glaires. Le cas d’un facteur pathogène faible et d’un Qi Correct insuffisant est une pathologie qui engendre des symptômes qui durent pendant des années, sans s’améliorer ni s’aggraver.
Le cadre 27.18 résume les caractéristiques d’un facteur pathogène faible et d’un Qi Correct faible.
Les facteurs pathogènes et le Qi Correct ne sont pas des entités figées mais ils sont en interaction constante. Ceci s’explique par le fait que chaque facteur pathogène évolue et change fréquemment de nature, tout comme chaque facteur pathogène a aussi tendance à léser le Qi Correct d’une façon ou d’une autre. Par exemple, le Vent externe se transforme souvent en Chaleur et devient interne (c’est ce qui arrive lorsqu’une infection respiration supérieure aiguë se transforme en une infection pulmonaire). La stagnation de Qi entraîne souvent des stases de Sang, l’Humidité entraîne des Glaires.
Outre leur nature changeante, les facteurs pathogènes ont aussi tendance à léser le Qi Correct de diverses façons. Par exemple, la Chaleur assèche les Liquides Organiques et peut léser le Yin ; l’Humidité ou les Glaires entrave le Qi et engendre un vide de Qi ; des stases de Sang graves peuvent engendrer une sécheresse des Liquides Organiques ; la stagnation de Qi interfère avec la bonne montée ou la bonne descente du Qi ; le Froid fige le Sang et entraîne des stases de Sang ; le Froid a aussi tendance à affaiblir le Yang Qi.
D’un autre côté, le Qi Correct est en interaction avec les facteurs pathogènes parce que, s’ils sont externes, il va essayer de les combattre et de les éliminer, et s’ils sont internes, il va exercer son influence sur eux et il va essayer de les éliminer. Par exemple, dans les invasions de Vent externe, le Qi Correct combat le facteur pathogène, et c’est la fièvre qui est le résultat de ce combat.
Dans les pathologies internes aussi, le Qi Correct combat le facteur pathogène. Par exemple, si un patient est touché par l’Humidité, alors, de par sa nature même, le Qi va essayer de la transformer, de la dissoudre et de l’expulser. Que cette tentative réussisse ou non dépend de la force relative de l’Humidité et du Qi Correct. Généralement, plus la pathologie est enracinée depuis longtemps dans le corps, plus le Qi aura du mal à l’éliminer. Lorsque tout va bien, le Qi Correct peut réussir à expulser les facteurs pathogènes. Par exemple, si un patient est touché par l’Humidité, un simple changement de ses habitudes alimentaires peut être tout ce dont il a besoin pour donner au Qi Correct une chance d’éliminer l’humidité sans même l’aide d’un traitement par l’acupuncture ou par les plantes (Fig. 27.7).
Le cadre 27.19 résume l’interaction entre le Qi Correct et les facteurs pathogènes.
L’interaction entre les facteurs pathogènes et le Qi Correct peut devenir très complexe car l’un affecte l’autre, de sorte que, par exemple, un facteur pathogène peut léser le Qi qui, à son tour, peut soit renforcer le facteur pathogène originel lui-même, soit entraîner un autre facteur pathogène (Fig. 27.8 et 27.9).
Par exemple, une invasion de Vent externe peut bloquer le Qi qui, à son tour, peut entraîner de l’Humidité (cas fréquent chez les enfants). Le vide de Qi peut conduire à la formation d’une Humidité qui, à son tour, va encore plus affaiblir le Qi. Les figures 27.10 à 27.13 montrent des exemples de ces interactions complexes entre les facteurs pathogènes et le Qi Correct.
Dans ce chapitre, vous avez vu :
1. 1979 Classique de médecine interne de l’Empereur Jaune - Questions simples (Huang Di Nei Su Wen) People’s Health Publishing House, première publication environ 100 AEC, p. 173-174.