DANS CE CHAPITRE :
» Une technique plurimillénaire !
» Apprenez à vous créer une vraie « main de masseur »
» Découvrez la véritable technique traditionnelle
Que nous les appelions digitoponcture, acupressing, shiatsu, ces techniques remontent à la nuit des temps. Certains hiéroglyphes égyptiens représentaient déjà des scènes de massage ponctuel sur certaines zones du corps à l’aide de l’utilisation des doigts.
Qui ne s’est jamais servi de ses mains ou de ses doigts pour se soulager d’une douleur ? En cas de migraine par exemple, qui n’a jamais porté spontanément ses doigts sur les tempes pour se soulager ? La MTC, dans ses méthodes dao yin, en a systématisé l’utilisation depuis des millénaires.
Bien qu’apparentée au massage, cette technique va beaucoup plus loin. Nous allons voir que c’est une méthode aussi bien préventive que curative.
Nous pouvons dire d’emblée que la digitoponcture est une méthode beaucoup plus
douce que l’acupuncture et peut donc être pratiquée par tout le monde.
Une courte définition : « C’est l’activation de certains points, principalement sur les méridiens, dans le but de tonifier, de faire circuler ou de calmer le flux d’énergie sous-jacent. » Or, nous savons que la surface du corps au travers du trajet des 14 méridiens est directement en relation avec les « 5 logiciels organes ». Par la digitoponcture, nous pouvons agir directement sur les déséquilibres d’un ou de plusieurs organes internes.
Et qui plus est, cette technique peut être appliquée sur soi-même. En effet, certains
thérapeutes n’hésitent pas à montrer certains points à leur patient pour qu’ils
continuent à rééquilibrer énergétiquement leur organisme entre deux séances. La
digitoponcture applique les mêmes principes que l’acupuncture, mais ce sont les
doigts, et en particulier la pulpe du pouce, qui vont remplacer l’aiguille.
LES STRATES ÉNERGÉTIQUES
Lors de notre étude précédente sur les méridiens, nous avions vu qu’il y avait trois couches d’énergie à la surface du corps :
» Les méridiens à proprement parler qui se situent entre l’os et le muscle, très en profondeur, et qui ne sont accessibles qu’au moyen d’une aiguille, la plus fine possible, pour saisir l’énergie. Ce point a longuement été développé précédemment.
» Une couche superficielle, « sur la peau », représentée par des capillaires énergétiques. Rappelez-vous, en surface de peau, nous n’avons pas de méridiens à proprement parler, mais des zones Yin et Yang, représentatives du maillage énergétique des trois méridiens Yin et trois méridiens Yang présents sur chaque membre. Cette « couche énergétique » est directement accessible par les différentes techniques de massage.
» Enfin, une couche médiane, située comme le disent les textes « entre la chair et le muscle ». C’est cette couche que nous atteindrons dans les différentes pratiques de digitoponcture.
Avant d’aborder la technique à proprement parler, nous allons devoir apprendre à nous créer une « vraie main de masseur ». C’est non seulement une main qui peut devenir sèche et chaude très rapidement, mais aussi une main « énergétique ».
Pour rendre notre main énergétique, nous devons nous attacher à agir sur un point bien précis, situé quasiment au centre de la main : il s’agit du point Lao Gong, le huitième point du méridien du Péricarde.
Gong signifie « palais » et Lao « travail », d’où une des traductions de ce point : « le palais du labeur ».
Nous savons que dans le logiciel Cœur se trouve logé le Shen, l’esprit. Il est dit aussi que le Cœur est « le maître des cinq Shen », des cinq émotions. C’est le Cœur Empereur, le Yang dans le Yang, l’été, la couleur rouge…
Le Péricarde, dont le concept va bien au-delà de la matière, est l’enveloppe protectrice du Cœur sur le plan énergétique. Il était dit que le « Péricarde devait veiller laborieusement au confort du palais », d’où son nom : « palais du labeur ».
Dans le langage populaire, il est dit de ce type de personne qu’elle a « un poil dans
la main ». Cela fait référence à ce point et au fait de ne rien faire de ses dix doigts.
Ce point est donc situé au centre de la main, entre le deuxième et le troisième os métacarpien, plus proche du troisième, de l’éminence thénar. En fermant le poing, l’extrémité de l’annulaire indique exactement l’emplacement.
Pour plus de précision en acupuncture, il faut trouver une dépression en regard du dos de la main et tenir entre le pouce et l’index les deux points.
En dehors de ses vertus thérapeutiques spécifiques, comme celle de drainer très fortement le « feu du Cœur », dans toutes les traditions, il possède une très forte charge symbolique.
En Inde par exemple, il est considéré comme un chakra mineur. Dans l’iconographie traditionnelle, on voit souvent la représentation d’un rayon sortant du centre de la main. C’est ce que nous appelons la « sortie de l’énergie de guérison ».
C’est l’ouverture de ce point qui va donner un pouvoir magnétique à la main.
Sans entrer dans les détails, retenez que ce point est en relation directe avec le point Dan Tian, situé à deux travers de doigt sous le nombril. Ceci aura une importance capitale quand nous aborderons plus loin la « véritable technique traditionnelle de digitoponcture ».
Nous allons voir un exercice très simple qui va vous permettre de « travailler ce point ». Vous allez pouvoir le pratiquer en position assise, allongée, en relaxation, ou en position de méditation. Toute l’action qui va suivre se passera très rapidement.
OUVERTURE DU POINT LAO GONG
« Vous ouvrez votre main gauche, ciblez le centre de la paume et, avec l’extrémité de l’index droit, vous faites une chiquenaude assez puissante sur le point Lao Gong. Ensuite, très rapidement, vous passez à l’autre main et répétez la même opération. Une fois ce double tapotement effectué, si vous vous mettez à penser à autre chose, si votre esprit vagabonde, vous allez très vite oublier la sensation du point. En revanche, et c’est un excellent exercice de méditation, si vous visualisez mentalement ce point, yeux fermés ou ouverts, vous allez pleinement le ressentir. En état de relaxation ou de méditation, la sensation de ce point pourra même être amplifiée.
Ce ressenti pourra prendre la forme d’une chaleur ponctuelle qui va irradier progressivement dans toute la paume de la main. Ce point pourra même devenir transfixiant et la sensation ressentie du côté Yang, à savoir le dos de la main. »
Tout ce travail de visualisation pourra durer entre 10-15 minutes, voire plus. Et vous serez étonné de voir que, loin de s’atténuer ou de disparaître, uniquement par concentration du mental, la sensation de ce point va s’amplifier. Vous êtes en train « d’ouvrir le point Lao Gong ». À force de répétition, vous allez effectivement amener l’énergie au centre de la main et pouvoir la dispenser à bon escient.
Mais ce n’est pas tout. Votre main a besoin de force.
Dans le diagnostic par l’observation, on prête une grande attention à la tonicité de l’éminence thénar, lorsqu’on examine la main du patient (voir chapitre 6). C’est une masse musculaire située à la base du pouce. Il est important qu’elle soit bien « bombée » et charnue. Si les muscles de la main sont relâchés, cela indique que l’énergie de la Rate-Estomac est faible. Inversement, si les muscles sont fermes, cela indique que l’Estomac et les Intestins digèrent bien, assimilent bien le bol alimentaire et par là même produisent assez d’énergie dont le corps a besoin pour fonctionner. Rappelons-nous en effet que les « muscles et les chairs » sont à mettre en relation avec ce logiciel organe.
Il convient aussi d’examiner au niveau de l’éminence thénar la présence ou non des petites veinules ou capillaires de couleur bleu ou rouge. Il faut voir si la couleur des vaisseaux a de l’éclat, un aspect terne ou vif, afin de déterminer si la quantité de sang dans les Xue Mai, les vaisseaux, est suffisante. Normalement, quand une personne est en bonne santé, on ne doit voir quasi aucun capillaire.
Il est donc très important de faire régulièrement travailler sa main afin de la tonifier.
Il existe des exercices de qi gong spécifiques pour agir dans ce sens, à savoir agir non
seulement sur l’énergie, mais aussi sur la tonicité des muscles de la main.
Une méthode tout à fait traditionnelle, c’est l’utilisation des Baoding ball’s. Ce sont des boules métalliques, en cloisonné, en pierre, de différentes grosseurs, encore appelées « boules de méditation ».
Ces boules sont d’une utilisation très ancienne. On en retrouve des traces au cours de la dynastie des Ming, le Moyen-Âge des Chinois, aux alentours des années 1400.
L’exercice consiste à maintenir une paire de ces boules dans la paume de la main,
en les faisant tourner, tout en les maintenant en contact constant. Petit à petit, on
pourra augmenter la vitesse de rotation. Et plus tard, elles pourront tourner dans un
sens ou dans l’autre, sans qu’elles se touchent. Toute la surface de la main sera ainsi
massée. L’action de tonification musculaire est alors très puissante.
Je voudrais en profiter ici pour vous donner un qi gong très important à mettre en œuvre, surtout quand nous nous trouvons en face de patients qui développent un tableau symptomatologique que nous appelons en MTC « stagnation de sang et d’énergie au niveau du Foie ».
Pour faire court, quand nous sommes soumis en permanence à des situations qui se concrétisent par une intériorisation de la colère, nous risquons d’entraver la libre circulation de l’énergie et du sang au niveau du logiciel Foie. Or, nous savons que ce logiciel organe, qui est à mettre en relation avec l’élément bois de la nature, doit avoir la circulation de sa sève (énergie et sang) libre de toute entrave.
Quand nous sommes confrontés à des situations de stress, de colères intériorisées
qui perdurent, le sang et l’énergie stagnent au niveau de ce logiciel. Il n’y a pas assez
de sang aux extrémités. Le cerveau est une éponge à sang. Si le sang n’arrive pas à
le nourrir, cela peut être une grande cause de fatigue. Par ailleurs, le sang a besoin
d’énergie pour circuler jusqu’aux extrémités.
Si l’énergie du Foie est bloquée, on aura très facilement les mains et les pieds froids. Au début, ce n’est qu’un simple symptôme signal d’alarme. Mais, si on n’y prend garde, petit à petit, ces micro-stagnations des extrémités peuvent donner naissance à de véritables pathologies et, entre autres, à une maladie auto-immune. On parlera alors dans ce cas extrême de « maladie de Raynaud ».
De toute évidence, en suivant les principes de base de la MTC, nous serons amenés à traiter la cause de cette pathologie, à savoir ici débloquer l’énergie du Foie. Mais ici, il conviendra de faire preuve de pragmatisme. Il faudra en même temps faire un traitement symptomatique, surtout si nos mains sont toujours froides, ce qui non seulement est désagréable pour le patient, mais signe aussi une incapacité à se créer une main énergétique.
QI GONG ANTI-MALADIE DE RAYNAUD
Un qi gong très intéressant consiste donc à « secouer ses mains », comme si nous devions éliminer des gouttelettes d’eau qui seraient sur la peau. Vous mettez vos deux mains devant vous, coudes fléchis à 90 degrés, poignets totalement relâchés. Ensuite vous commencez à les secouer très rapidement devant vous. Petit à petit, il n’y a plus d’effort mental à produire. Le mouvement est auto-entretenu par le relâchement du poignet et la force d’inertie qui s’est mise en place. Votre respiration est calme pendant toute la durée de l’exercice, à savoir 2 minutes. Amusez-vous, sans rien changer dans la pratique du mouvement, à concentrer votre mental sur l’annulaire, l’auriculaire, le pouce. En agissant ainsi, vous commencez à ressentir le pouvoir de l’énergie mentale sur le physique.
Au bout de ces 2 minutes de pratique, vous arrêtez brusquement ce mouvement qui est devenu presque automatique. Ressentez alors l’impression de fourmillement, vos doigts étant comme dans du coton. C’est l’énergie qui circule, et les petits capillaires distaux qui sont en train de retrouver leur perméabilité. Testez cet exercice deux fois par jour pendant neuf jours de suite. Les résultats seront surprenants quant au réchauffement de la main. Vous commencerez à ressentir ce qu’on appelle « une libre circulation de sang et d’énergie ». Nous pourrions appeler cet exercice « technique d’ébranlement des mains ».
En art martial, il existe bien d’autres techniques pour se créer des mains puissantes et énergétiques, comme les faire travailler dans un bac de sable, ou gantées, dans un bac à mercure. Mais cela dépasse ici le cadre de notre propos.
Il convient d’avoir un maximum de concentration avant de commencer une séance. Voici un excellent exercice de préparation qui va très rapidement nous permettre de rendre notre main opérationnelle.
PRÉPARER SA MAIN AU MASSAGE
Commencez par frotter vigoureusement vos deux mains devant la zone du Cœur. Ensuite vous les ramenez devant vous et faites un « lavage des mains » pendant une dizaine de secondes. Une opération que vous devriez répéter très souvent : une fois les doigts imbriqués les uns dans les autres, ramenez la paume des mains vers l’avant, le plus loin possible devant vous de manière à assouplir au maximum doigts et poignets. Ensuite, étirez chacun de vos doigts. Si vous les relâchez bien, vous pourrez entendre de temps en temps un « craquement » bénéfique. Massez ensuite chaque doigt sur toute la longueur. Prenez chaque extrémité des doigts, pincez-les et faites une rotation comme si vous vouliez tailler un crayon. On appelle cela en MTC « les dix déclarations ». Enfin mains jointes devant le cœur, faites une courte concentration pendant une dizaine de secondes.
Une des caractéristiques de notre monde moderne est ce que nous pourrions appeler
« l’explosion du Yang ». Nous avions longuement insisté sur ce point au début de la
partie un. Plus nous avançons dans le temps, plus nous nous trouvons en face d’une
pluralité de théories de plus en plus complexes et même les plus érudits finissent par
en perdre leur latin.
Dans le cas qui nous intéresse ici, la digitoponcture, il faudra par exemple masser dans le sens du courant pour faire une tonification et l’inverse pour une sédation. Et dans d’autres textes, c’est même totalement l’inverse qui est expliqué. Mais ce n’est pas tout. Pour obtenir une tonification, il convient de faire une rotation dans un certain sens avec son pouce ou ses doigts, et l’inverse pour une sédation. Et cela change encore s’il s’agit d’un homme ou d’une femme. De même que selon le sexe, il faudra commencer plutôt à gauche qu’à droite ou l’inverse. Certaines théories font même entrer les cycles horaires dans la pratique, ce qui obligerait le praticien à agir sur certains points à 3 heures du matin.
Nous allons voir que la technique « primordiale » de digitoponcture, si on peut parler de technique, sera beaucoup plus simple. C’est la théorie du rasoir d’Occam qui considère qu’une explication simple d’un fait a plus de chance d’être vraie qu’une explication compliquée.
Oui, mais voilà, cette simplicité n’est qu’apparente, car elle va sous-entendre un changement total de point de vue et de comportement d’un praticien. En effet, le praticien devra totalement s’investir, mais aussi se donner les moyens de cet investissement pour ne pas lui-même être déséquilibré sur son câble de vie. Dans la trilogie ciel-homme-terre, il devra petit à petit devenir un médiateur, et en même temps un transmetteur et régulateur d’énergie pour traiter son patient.
Pour en revenir à notre propos sur la digitoponcture, que dit la Tradition quant à la juste technique de la pratique ? Dans le Nei Jing existe un passage qui traite des « neuf aiguilles ». Chaque type d’aiguille a une forme particulière et chacune d’entre elles, en fonction de sa forme, permet d’obtenir un certain effet. En ce qui concerne la digitoponcture, c’est l’aiguille no 3, l’aiguille appelée Ti, qui servait à faire ce type d’intervention. C’est une aiguille ronde qu’on utilisait pour exercer une pression sur les points des méridiens ou à « frotter » le trajet de celui-ci. Ce n’est que plus tard que s’est imposé le massage par l’intermédiaire des doigts et du pouce. Je vous rappelle que le chiffre 3, c’est l’action de l’homme entre ciel et terre.
En digitoponcture, comme en acuponcture, c’est le choix des points qui nous permettra de savoir dans quelle direction nous voulons aller quant au traitement que nous devons appliquer.
LES TROIS CATÉGORIES DE POINTS
» Les points distaux, et qui sont situés aux quatre extrémités, aux mains et début des avant-bras et aux pieds et début des jambes. Et dans une moindre mesure, au niveau de la tête.
» Les points médians situés le long de la colonne et surtout entre les coudes et les épaules et entre les genoux et les hanches.
» Enfin les points proches situés, eux, sur le tronc, face antérieure et pour certains sur la face postérieure.
Il a été fait un juste diagnostic en utilisant les quatre méthodes que sont l’interrogatoire, l’examen visuel comportant l’étude de la langue et de ses enduits, la prise des pouls et la palpation. À partir de là, vous allez donner une direction à votre traitement. Par exemple, s’il y a une faiblesse, un manque, il va falloir tonifier. Si au contraire il y a un excès, il convient de calmer, de faire une sédation. Si on se trouve en présence de blocages, de stagnations, il conviendra alors d’employer des formules à visée circulatoire.
À partir de ces constatations, vous allez élaborer une formule. Si celle-ci comporte
plus de points d’extrémités que de points proches, c’est que vous voulez en quelque
sorte « vidanger » l’excès d’énergie, faire une sédation pour calmer le jeu de la
symptomatologie de l’excès. Si au contraire vous prenez plus de points proches, c’est
que vous vous tournez vers une tonification. Ce sont des points que nous serons
d’ailleurs très souvent amenés à chauffer grâce à la technique de la moxibustion.
Et très souvent pour harmoniser une formule, on pourra utiliser des points médians comme le 36E ou le 11GI.
Donc, il n’est pas juste question ici de masser dans un sens ou dans l’autre, mais bien
d’un choix des points.
Il est à noter d’ailleurs que si on se trouve en présence de trois praticiens confirmés face à un même patient, ils seront amenés tous les trois à faire un même diagnostic, mais pourront proposer trois formules différentes selon leur propre logique et intuition. Et ils obtiendront tous le même résultat, certes plus ou moins rapidement, à savoir la guérison du patient.
En dehors du choix des points, qu’est-ce qui compte fondamentalement dans l’acte du soignant ? C’est avant tout L’INTENTION.
Une définition classique de l’intention est : « un plan délibéré pour accomplir une
action, laquelle débouchera sur le résultat désiré ». Ce qui est gênant dans cette
définition, c’est la notion de planification. En effet, chaque partie d’un plan génère
autant de peurs et de contre-énergies qui peuvent entraver la réussite du traitement.
Je préfère de loin cette définition qui découle entre autres des dernières recherches
sur la physique quantique : « L’intention est une projection de la conscience, de
manière délibérée et efficace, en vue d’atteindre un objectif ou un résultat donné. »
Or, l’intention est un concept central, lorsqu’il s’agit de traiter un patient, qui découle directement des enseignements taoïstes. Je vous renvoie au chapitre consacré au Hun et au Po, les âmes spirituelles et corporelles.
En effet, dans nos sociétés que nous pourrions qualifier « d’évolution exponentielle » à tous les niveaux, notre Shen (sous-entendu notre esprit, notre mental, nos facultés cognitives, nos affects et émotions) est avant tout nourri par nos cinq sens. L’excès d’informations auquel il est soumis finit par le mettre en surchauffe, d’autant plus que la plupart du temps, ce feu du Cœur n’est pas calmé par l’eau du Rein. Et c’est le burn out, le « tilt » du corps qui est souvent au bout du chemin.
Perdant pied avec la nature, étant de plus en plus éloignés de l’unicité, nous nous sommes construit une véritable carapace qui nous empêche d’accéder à notre subconscient le plus profond, qui nous empêche d’être à l’écoute de notre âme.
LES TROIS NIVEAUX DE PRATICIEN
» Le praticien de niveau 1 est un praticien qui n’a pas « ouvert son cœur », c’est-à-dire qu’il n’a pas appris à émettre son énergie de guérison. Il ne se contente que de recettes, il connaît des listes de points correspondant à certains symptômes et ne sait évidemment pas manipuler l’énergie. Il va avoir une action que nous pourrions qualifier de matérielle, superficielle sur le point. Il aura obligatoirement un résultat, mais le curseur sur une échelle de 1 à 10 restera à 1, et la pathologie ne mettra pas longtemps à réapparaître. Il n’aura fait qu’occulter un symptôme signal d’alarme.
» Le praticien de niveau 2 connaît les véritables techniques traditionnelles. Il sait manier l’énergie. Il sait écouter son âme, ses intuitions. Il sait puiser dans son énergie, dans sa batterie. Au travers de ses mains, de ses pouces, il va agir directement sur l’énergie du patient. Il y a un corollaire à ceci : ce praticien est alors tenu, dans une même journée, de se recharger autant qu’il a donné, sous peine de s’épuiser rapidement et de vieillir précocement. Ce profil de praticien va faire monter le curseur à 5 sur l’échelle de 1 à 10, qui correspond à l’efficacité du traitement.
» Le praticien de niveau 3, lui, se situe alors sur une tout autre vibration. C’est un pratiquant de longue date. Il a appris à « ouvrir son cœur » au travers de ses pratiques. Il devient en quelque sorte un intermédiaire, un intercesseur entre ciel et terre. C’est un médium dans le vrai sens étymologique, à savoir un « moyen terme » entre les deux polarités Yin-Yang, entre ciel et terre. Il capte l’énergie Yang du ciel, l’énergie Yin de la terre et grâce au potentiel de régulation du Zhi, de l’énergie du Rein, il se produit une alchimie au niveau du Cœur, une transmutation très subtile qui lui permet alors d’émettre de la pure « énergie de guérison » à travers ses mains. Certains possèdent ce don, disons à fleur de peau très tôt dans leur vie. Ils arrivent à guérir uniquement par imposition des mains. D’autres le possèdent enfoui sous des couches, des carapaces d’ego, un peu comme une pépite cachée dans sa gangue. À force de pratiques, de qi gong par exemple ou de lâcher prise grâce à la méditation, ce don peut remonter à la surface. C’est à ce moment-là que l’aphorisme « un point suffit pour guérir un patient » prend toute sa valeur. Évidemment, ce profil de praticien fera monter à 10 le curseur de la guérison. Il faudra, pour l’immense majorité d’entre nous « des vies entières » pour en arriver à ce niveau. Mais faire monter le curseur à 7-8 est à la portée de tout le monde, à condition évidemment de s’en donner les moyens.
Ce que nous appelons « retour à l’unicité » dans la Tradition, c’est se départir de cette carapace de l’ego, enlever couche après couche les résidus de l’excès de nos pensées, de nos émotions, de nos affects : se mettre à nu en quelque sorte pour que notre âme spirituelle, notre Hun puisse enfin librement s’exprimer.
Cette vision va nous permettre de tirer la conclusion suivante. Comme nous allons le voir, la digitoponcture est un pur acte intuitif, où le pouvoir de l’émission de la pensée, l’émission de « l’énergie de guérison » qui n’est rien d’autre que l’énergie d’Amour, l’Intention dans l’acte sont non pas sous la direction de notre Shen, de notre ego, de notre mental, de nos facultés cognitives, mais de notre Hun, de notre énergie spirituelle.
Et pour être à l’écoute de notre Hun, il faut savoir, comme il est dit dans certaines sociétés initiatiques, « déposer ses métaux », laisser à l’extérieur l’armure de notre ego. Et cela se travaille.
Notre maître insistait très souvent sur ce qui ne devrait être qu’une évidence : « Tout
praticien, ou toute personne qui veut aider l’autre doit mettre en place une politique
dite “d’égoïsme salvateur” et s’occuper de sa propre maison pour que l’âme ait envie
d’y rester et puisse s’y exprimer. »
Un praticien de médecine chinoise ou toute autre personne ayant l’ardent désir de s’occuper de l’autre et qui ne pratique pas les exercices au quotidien, comme les qi gong, la méditation ou autres techniques, finira par ressembler à ce qu’on appelait au moment de la Révolution culturelle, « un médecin au pied nu », c’est-à-dire un médecin formé la plupart du temps à quelques techniques de base en quelque mois, quelques recettes bien loin évidemment de la médecine énergétique.
C’est une autre notion tout à fait centrale quant à la pratique de la digitoponcture et bien évidemment de l’acupuncture (voir chapitre 13).
Rappelons-nous que lorsque nous agissons sur un point, nous recherchons avant
tout à atteindre le Qi, l’énergie qui circule le long du méridien. Il ne faut pas oublier
que cette énergie est issue d’un mélange très subtil entre la quintessence de l’énergie
de l’air et la quintessence de la digestion du bol alimentaire. Et que cette énergie va
bien au-delà de toute matérialité.
L’énergie dont nous parlons en MTC est d’un tout autre niveau, un niveau que nous pourrions qualifier de métaphysique. Elle ne peut être que ressentie. Et ce ressenti se fera, non pas avec nos facultés cognitives, notre Shen, comme on ressent un point chaud ou froid. Ce ressenti procède de ce qu’on appelle « l’intuition », l’intuition du point. Et c’est ce qui nous différencie totalement de l’acupuncture et de la digitoponcture moderne.
Ce n’est pas le patient qui doit éprouver une sensation, ou si peu. C’est le praticien
qui par l’intermédiaire d’un transmetteur, en l’occurrence la pulpe du pouce ici, qui
doit « ressentir » que le Qi est là, présent. Et quand le Qi arrive sous son doigt, c’est
à ce moment-là qu’on peut dire qu’il a « saisi l’énergie ».
Nous avons vu jusqu’à maintenant les principes de base qui sous-tendent les pratiques de la digitoponcture. Nous avons pris conscience de l’importance de se créer petit à petit une « vraie main de masseur » grâce à l’ouverture du point Lao Gong et à la tonification des muscles palmaires. Voyons à présent les différentes étapes à mettre en place pour redonner à la digitoponcture sa véritable finalité, à savoir une pure technique énergétique traditionnelle.
C’est la plus importante. On pourrait l’appeler « l’étape de la visualisation ». Je me place dans le cadre d’un praticien de niveau 2 dont on a parlé précédemment. Ce praticien va en quelque sorte puiser sur sa propre énergie interne, sur sa batterie du Rein, pour traiter l’autre. S’il y avait un secret bien gardé dans cette pratique, c’est bien cette étape.
Avant tout notre instrument de prédilection, à l’instar de l’aiguille pour l’acupuncteur, c’est le pouce et plus précisément la pulpe du pouce.
Saviez-vous que dans la cartographie du cortex cérébral, le pouce est la zone qui y trouve une des plus grandes projections ? Certes, nous serons amenés de temps en temps à utiliser plusieurs doigts, voire le poing ou la paume de la main. Mais dans la majorité des cas, c’est bien la pulpe du pouce qui servira d’intermédiaire entre l’énergie du praticien et celle du patient.
LA VISUALISATION, LE GRAND SECRET
Il existe un méridien qui relie la zone de l’énergie du Rein avec la zone de la gorge. C’est le méridien Zhong Mai qui ne possède pas de points directs en surface du corps. Il monte en avant des corps vertébraux jusqu’à la gorge. Commencez par imaginer une boule de chaleur, d’énergie, dans la région du Dan Tian, sous le nombril, à l’intérieur de votre bas-ventre. Alors que dans une respiration consciente habituelle, le « ventre sort » lors de l’inspiration, ici vous allez faire le contraire : « J’inspire, mon ventre rentre. Je m’imagine alors, à l’instar d’une paille dans un verre d’eau, que l’énergie monte le long de ce méridien Zhong Mai. J’aspire cette énergie, je la fais monter tout le long de l’inspiration. Elle arrive jusqu’aux épaules. J’expire. Mon ventre se relâche. L’énergie descend alors le long de mes bras, pour arriver jusqu’aux mains, et ici en l’occurrence jusqu’à la pulpe de mes pouces. »
Quand vous appliquez la technique de visualisation, petit à petit, à force de répétition, vous allez ressentir cette énergie comme un flux léger, un véritable écoulement d’énergie possédant une certaine consistance. C’est un peu la sensation que vous pouvez avoir, quand vous ressentez la « consistance de l’air » en déplaçant très rapidement vos mains ouvertes. Vous avez bien compris que tout ce ressenti peut être potentialisé par la pratique du qi gong, du tai-chi, du yoga ou autres pratiques traditionnelles.
Donc en résumé : « J’inspire, un flux d’énergie monte le long de la colonne vertébrale en partant du Dan Tian pour s’épandre au niveau des épaules. J’expire et cette énergie descend jusqu’à la pulpe du pouce. »
LA TECHNIQUE DU PICOTAGE
Au moment de l’expire, toute l’énergie est concentrée dans la zone de la pulpe du pouce et non au bout du pouce. C’est donc cette large zone de la pulpe qui entre en contact avec le point. À ce moment-là, la technique que nous allons employer, à l’instar de celle que nous pouvons utiliser avec un bâton d’armoise dans la moxibustion, s’appelle la « technique de picotage ». Un peu comme un pivert qui picote. Elle consiste à synchroniser la respiration avec la pression : « À l’inspire, je relâche la pression, à l’expire, j’appuie et ainsi de suite. » À chaque cycle respiratoire, c’est l’énergie de guérison qui arrive au niveau de la pulpe du pouce. Je le répète, cette technique est très puissante et elle est donc dirigée par le Shen du praticien, son mental. C’est un pur flux vibratoire, énergétique, tout cela porté par la visualisation et la pleine conscience.
Combien de fois doit-on répéter cette opération ? Les anciens parlent de 9-18 ou 36 cycles de pression-relâchement. Tout dépend du nombre de points utilisés, de la chronicité de la pathologie, de la direction que nous voulons donner au traitement. En effet, surtout sur les points que nous avions appelés « points proches », plus nous répéterons l’opération, plus nous amènerons de l’énergie pour agir sur le point.
À partir de ce moment, que faire de son pouce ? Nous en avons longuement parlé au début de ce cours. Il faut éviter de tomber dans le piège de la « multiplicité », des « 10 000 techniques ». Devons-nous aller dans un sens pour tonifier, dans l’autre pour disperser ? Devons-nous commencer à droite ou à gauche selon le sexe ? Devons-nous masser dans le sens du flux énergétique circulant dans le méridien ou dans le sens contraire ? Etc.
Vous avez bien compris que l’idée première est de nous permettre de revenir à l’unicité, de revenir aux techniques les plus anciennes, en particulier celles préconisées par le Nei Jing.
Voici donc la technique qui a fait ses preuves depuis des millénaires, que nous pourrions qualifier de purement énergétique, qui donne des résultats nettement supérieurs relativement à un simple effet mécanique d’un massage ponctuel « sans conscience ».
LA TECHNIQUE DU « SOURIRE INTÉRIEUR »
Dans cet état, vous allez émettre par l’intermédiaire de votre Cœur « une pensée claire de guérison » au travers de ce que la tradition appelle le « sourire intérieur ». Cette émission de flux énergétique se fait donc dans un état de pur détachement, sans aucun effort. Le praticien n’a juste qu’à imaginer que le patient est en train de guérir, surtout ne pas se poser de questions sur le comment. C’est, je le répète, un flux continu, grâce à la pleine conscience qui se fait entre l’énergie du Cœur et la pulpe du pouce. Oui, mais voilà. La durée de cette émission d’énergie de guérison doit se faire au minimum pendant une minute. Les recherches récentes de la physique quantique parlent de 69 secondes. Pendant ce laps de temps, il ne doit y avoir aucune rupture de pensée de guérison. Aucune pensée parasite ne doit interférer avec ce flux d’énergie pour que la technique soit véritablement efficace.
À condition d’avoir pratiqué depuis fort longtemps la méditation comme je l’ai dit plus haut, ou la pleine conscience, peu de personnes sont capables d’une telle concentration. C’est pour toutes ces raisons que la technique de « picotage », qui est donc d’un abord beaucoup plus aisé, sera à privilégier, surtout quand on est jeune praticien ou autodidacte.
À côté de cette technique de picotage, qui somme toute est très simple à mettre en œuvre, à condition de s’en donner les moyens, il en existe une autre encore plus traditionnelle qu’on pourrait appeler « émission en continu de flux énergétique de guérison ». Elle demande d’importantes connaissances et compétences.
Quelques conseils pour maximiser cette pratique de la digitoponcture.
Avant tout, et nous l’avons bien compris, ne nous situant pas dans le domaine du « grossier », mais dans le domaine de l’énergétique pure, l’appui ne doit pas être une démonstration de force. Ce ne doit pas être une action mécanique provoquant une sensation de douleur chez le patient.
En tant que technique énergétique pure, c’est le praticien qui doit intuitivement ressentir quelle pression il doit appliquer sur le point avec la pulpe de son pouce. Et quand il deviendra praticien confirmé, il n’aura quasiment plus besoin d’appui pour « saisir l’énergie » et agir dessus.
Fondamental : la formule que vous serez amené à élaborer grâce aux méthodes de
diagnostic de la MTC ne comportera jamais un nombre incalculable de points. Selon
la tradition, la formule comportera tout au plus 3-4 voire 5 points, ce qui va correspondre à 6-10 points à masser.
Il existe deux types de traitement : les traitements à visée préventive, c’est-à-dire des traitements que nous devrons pratiquer sur nous-mêmes, ou appliqués par un praticien uniquement dans le but de booster notre organisme, notre batterie du Rein pour augmenter nos défenses immunitaires, nos facultés d’adaptation et nos possibilités d’autoguérison. Ce type de traitement que nous pouvons appeler « traitement à visée Yang Sheng Fa », ou de « préservation de la santé », se fera sur de courtes périodes.
L’autre type de formules correspond alors au traitement thérapeutique à proprement parler. Dans la tradition, difficilement applicable dans les cabinets, sauf si vous pratiquez sur vous-même certaines séries que vous aura prescrites votre praticien, il devrait faire un cycle de neuf jours de traitement avec une semaine de repos, suivi d’un autre cycle. Ainsi, deux voire trois autres cycles pourront être dispensés au regard de la chronicité du problème ou de l’état énergétique du patient.
Un autre point important. Il convient de n’employer qu’une formule à la fois. Certains
auront envie de changer de point d’un jour à l’autre voyant que les résultats se font
attendre. N’oubliez pas que nous sommes dans un contexte d’hyper-multiplication
générant une notion de rapidité. Le patient ou le praticien voudrait tout, tout de
suite. Laissez le temps au temps, surtout lorsqu’il s’agit d’une pathologie chronique.
Si votre formule est « juste », la réponse au traitement sera elle aussi juste. Ce n’est
qu’au cours de la 2e série que vous pourrez adapter votre traitement selon l’évolution
de la symptomatologie.
N’oubliez surtout pas : « C’est l’émission de l’énergie de votre mental, avec comme intermédiaire votre pouce, qui est responsable de la rapidité des résultats. »
Quand vous avez élaboré une formule selon vos propres connaissances, aidées aussi par vos intuitions, ou que vous utilisez une formule « toute faite », avant de passer à un autre point, vous devez ressentir que vous avez bien « saisi l’énergie », le Qi sous votre pouce.
Une fois de plus cette sensation ne peut être quantifiée. Elle fait partie du domaine de l’intuition, de la sensation. Souvent nous trouvons dans les textes la notion de « sensation d’énergie fluide et vivante ». Cette sensation ne vient pas de vos facultés cognitives, de votre Shen, mais de votre âme, de votre Hun, qui est donc située dans le Foie et qui nourrit votre Cœur.
Quand vous serez devenu « compétent inconscient » à force de répétition, fiez-vous à la sensibilité de vos doigts. Effleurez d’abord la zone en pleine conscience et arrêtez-vous sur l’endroit que vous percevez « spontanément », intuitivement comme étant l’emplacement du point.
Très souvent vous sentirez une dépression ou une modification de texture, de consistance des tissus à ce niveau.
Ne tombez pas dans l’écueil du profane qui se contente d’appliquer à la lettre les mesures que nous trouvons dans les traités d’acupuncture. Ces distances ne sont données qu’à titre de localisation générale. Mais il faut savoir que cette localisation surtout en acupuncture peut varier d’un patient à l’autre.
Par ailleurs, notre maître nous disait que si nous nous trompions un peu en amont ou en aval du point, ce n’était pas trop grave. Le tout et de ne pas se tromper de courant de méridien !
Et bien sûr, et je n’aurais de cesse de le répéter, c’est vous, en tant que praticien, qui devez ressentir le point, ce puits d’énergie et non par un détecteur quel qu’il soit.
Les quelques contre-indications font appel à la logique. Par exemple, si la zone où se trouve le point est atteinte par une maladie de peau comme du psoriasis ou de l’eczéma, on ne pourra pas « travailler » dessus. De même, en cas de grossesse, il vaut mieux éviter, si on n’a pas la connaissance, de traiter en digitoponcture, surtout si nous utilisons les points d’extrémités. Trop d’action de « sédation » peut en effet faire descendre le fœtus ou risque de lancer le travail de manière trop précoce.
Un point fondamental à bien comprendre. Si vous-même en tant que praticien
êtes épuisé, ou si vous sortez d’un repas de fête un peu trop arrosé, si vous venez,
surtout pour les hommes d’avoir un rapport sexuel avec éjaculation, vous risquez de
perdre toute l’énergie qu’il vous reste. Et ceci est valable même si vous vous traitez
vous-même.
Un corollaire également valable surtout pour le praticien de niveau 2. Puisque le traitement consiste, comme nous l’avons vu, à puiser dans l’énergie contenue dans votre batterie du Rein afin de traiter le patient, il est fondamental de recharger ce qui a été déchargé, et ce, dans une même journée. Je vous renvoie pour cela à toutes les méthodes de préservation de la vie que nous appelons « méthodes Yang Sheng Fa ».
De telles méthodes sont d’autant plus nécessaires pour ceux qui pratiquent au quotidien. Faites l’expérience suivante. En début d’après-midi, votre langue est rosée, et théoriquement sans enduit, si vous êtes en bonne santé. En fin de journée, elle a tendance à être pâle avec un léger enduit blanc dessus. Cela signe une grande perte d’énergie. Si vous n’y prenez pas garde, si vous ne mettez pas en place cette fameuse politique d’égoïsme salvateur, vous perdrez petit à petit vos énergies de protection et deviendrez perméable aux pathologies externes, aux « attaques externes ». Et cette perte d’énergie favorisera aussi l’apparition des « maladies dites internes ». Et donc vous vieillirez précocement.
Donc, étudiez bien les chapitres sur le sommeil, la respiration, la diététique, les qi gong que vous retrouverez dans ce livre.
Enfin, une séance devrait être un véritable acte qi gong, un acte de pleine conscience.
Il n’est pas question de traiter à la va-vite, « entre deux portes ». Pour que cet état
de transmission directe d’énergie entre le patient et le praticien puisse se faire, il
est très important de se créer un rituel de soin, un espace de soin qui puisse vous
permettre très rapidement de vous mettre à l’écoute de votre âme.
Voyons à présent quelques combinaisons de points que vous pourrez pratiquer sur vous-même en cas de besoin.
Si vous n’aviez à retenir qu’une seule grande formule de tonification générale, que
vous pouvez faire selon la technique de digitoponcture, mais aussi en moxibustion,
ce serait :
Tableau 14-1 Formule 1 de tonification générale.
20DM, Bai Hui | Les cent réunions | Au sommet du crâne, dans une dépression à l’apex des deux oreilles. | Grand point de tonification du corps et anti-fatigue. |
36E, Zu San Li | Trois distances | Face antéro-externe de la jambe, à 3 distances de l’articulation du genou. | Point incontournable de longévité. Booste l’organisme dans son ensemble. |
6RM, Qi Hai | Mer de l’énergie | À 2 travers de doigt sous le nombril. | Tonifie l’énergie de tout le corps et aide à la captation de l’énergie de l’air. |
17RM, Shan Zhong | Centre du thorax | Sur le thorax, sur la ligne médiane joignant le bout des deux seins. | C’est le grand point pour tonifier l’énergie du haut du corps. |
Le but de cette formule est de recharger votre batterie du Rein. Vous devriez l’utiliser à chaque changement de saison, là où votre organisme puise dans ses réserves pour s’adapter. Surtout à l’entrée de l’hiver et à la « montée du printemps ». Mais aussi dans toutes les périodes de stress et de grands changements dans votre vie.
Il est important de suivre l’ordre des points.
Une autre formule très puissante de tonification générale.
Tableau 14-2 Formule 2 de tonification générale.
36E, Zu San Li | Trois distances | Face antéro-externe de la jambe, à 3 distances de l’articulation du genou. | Point incontournable de longévité. Booste l’organisme dans son ensemble. |
6Rt, San Yin Jiao | Croisement des trois Yin | Face interne de la jambe, à 3 distances au-dessus de la malléole interne, dans une encoche contre le tibia. | Agit sur les 3 méridiens du Foie, du Rein et de la Rate. Régule tout le Foyer inférieur. Grand point des troubles gynécologiques et sexuels. |
11GI, Qu Chi | Étang de la courbe | Bras fléchi, à l’extrémité externe du pli de flexion du coude. | Point « anti-inflammatoire » du Foyer supérieur, mais aussi augmente l’effet des autres points. |
4GI, He Gu | Réunion des deux os | Dans l’angle haut, entre le 1er et 2e métacarpien. | Entre autres, grand point qui régule la fonction des Trois Foyers. |
6RM, Qi Hai | Mer de l’énergie | À 2 travers de doigt sous le nombril. | Tonifie l’énergie de tout le corps et aide à la captation de l’énergie de l’air. |
Lorsque vous n’arrivez pas à démarrer le matin, quand vous êtes surmené, cela peut
souvent générer des problèmes de stagnation de sang et d’énergie. Cette formule
peut aussi être utilisée en cas de neurasthénie plus ou moins chronique.
Tableau 14-3 Formule anti-fatigue et pour les neurasthéniques.
1Rn, Yong Quan | Source jaillissante | Dans une dépression sur la plante de pieds quand celui-ci est en flexion. | C’est le grand point pour booster l’énergie du Rein, calmer le feu du Foie (insomnie 3 heures du matin). Les taoïstes disent qu’il augmente l’espérance de vie. |
5C, Tong Li | Libre circulation | Face antérieure du poignet, à 2 doigts au-dessus du muscle cubital antérieur. | Point majeur pour tous les troubles psychiques. Point anti-dépression et anti-excès de pensées. |
20DM, Bai Hui | Les cent réunions | Au sommet du crâne, dans une dépression à l’apex des deux oreilles. | Grand point de tonification du corps et anti-fatigue. |
Vous pouvez aussi vous masser le point 1Rn, le matin au lever, pendant 36 cycles respiratoires. Mais aussi le soir avant de se coucher. Ce point permet alors de rétablir la liaison Rein-Cœur, et de combattre l’insomnie.
Si vous êtes dans des périodes où l’angoisse et l’anxiété vous submergent, une
période que la MTC appelle « l’engluement du mental », quand les énergies surtout
Yin stagnent dans le corps, une très bonne formule à se faire soi-même :
Tableau 14-4 Formule anti-angoisse.
6CC, Nei Guan | Obstruction interne | Face antéro-médiane de l’avant-bras, 2 travers de doigt au-dessus pli du poignet. | Entre autres, il régularise le Qi, l’énergie, en supprimant les stagnations. |
7C, Shen Men | Porte du cœur | Extrémité cubitale du pli de flexion du poignet, entre le pisiforme et le muscle cubital antérieur. | C’est le grand point de l’insomnie, de l’anxiété, de la nervosité et des palpitations. |
17RM, Shan Zhong | Centre du thorax | Sur le thorax, sur la ligne médiane joignant le bout des deux seins. | C’est le grand point pour tonifier l’énergie du haut du corps, mais aussi calmer le cœur. C’est le Xanax et le Lexomil chinois ! |
3F, Tai Chong | Grande abondance | Dans une dépression dans l’angle haut, entre le 1er et 2e métatarsien. | Le grand point de l’insomnie de 3 heures du matin. Il permet de calmer le Foie et surtout l’esprit. |
Tableau 14-5 Grande formule pour booster la sexualité.
3Rn, Tai Xi | Grande rivière | Côté interne du pied, dans un creux entre la malléole interne et le tendon d’achille. | Le grand point de la sexualité (impuissance, trouble érectile, éjaculation précoce, libido à zéro). |
36E, Zu San Li | Trois distances | Face antéro-externe de la jambe, à 3 distances de l’articulation du genou. | Point incontournable de longévité. Booste l’organisme dans son ensemble. Recharge la batterie du Rein. |
23V, Shen Shu | Point Shu du Rein | Mettre les mains sur les deux hanches : se trouve sous L2, à une distance et demie de la colonne vertébrale. | Grand point pour renforcer les lombes, booster la batterie du Rein et agir sur la sexualité. |
4RM, Guan Yuan | Barrière de l’origine | À 4 travers de doigt sous le nombril. | Grand point de la sexualité, mais aussi pour lutter contre la stérilité. |
6Rt, San Yin Jiao | Croisement des trois Yin | Face interne de la jambe, à 3 distances au-dessus de la malléole interne, dans une encoche contre le tibia. | Agit sur les trois méridiens du Foie, du Rein et de la Rate. Régule tout le Foyer inférieur. Grand point des troubles gynécologiques et sexuels. |
On pourrait multiplier les formules à l’infini. Cependant je vous renvoie à tout ce qui a été dit dans le chapitre sur l’acupuncture (chapitre 13), et en particulier à la « méthode de choix des points selon le Pr Leung Kok Yuen » (annexe A). Toutes ces formules pourront être pratiquées en digitoponcture. C’est donc une technique qui va vous faire toucher du doigt, c’est le cas de le dire, ce qu’est l’énergie en MTC. Elle peut être pratiquée par tout un chacun et une fois de plus, elle n’a que très peu de contre-indications. Je pense qu’avant la pratique de l’acupuncture, c’est une très bonne méthode pour aborder « l’énergétique » et les méthodes de prévention et de traitement en MTC.