Aurige ou danseur, dit l’« Aurige de Motya »,
vers 470 av. J.-C. Marbre, h : 181 cm.
Museo Joseph Whitaker, Motya.
La tête de Marsyas est un objet d’étude intéressant, révélant ici la forte opposition de Myron à ses prédécesseurs, qui tentait de représenter les caractéristiques nationales de son peuple. Marsyas était à moitié sauvage et arborait une longue barbe et une moustache loin d’être hellénistiques, ainsi que de petits yeux malicieux Mongoles.
Les têtes des différents Discoboles sont sans doute les moins intéressantes[20], car l’attention se concentre surtout sur les torsions du corps, c’est-à-dire sur l’action. Le traitement de la chevelure est ignoré, sans ressemblance aucune avec une chevelure naturelle, et l’impassibilité du visage ne correspond pas à l’énergie physique déployée. Cette remarque s’applique également aux autres parties du corps, sauf peut-être aux pieds, qui semblent dégager une force considérable pour rester cloués au sol.
C’est pour cette raison que nul n’est surpris d’entendre Pline juger Myron en ces termes : « Il semble avoir été le premier sculpteur important à porter la représentation réaliste en art. Cependant, il s’est concentré sur l’aspect physique du corps, mais n’a représenté ni les sensations de l’esprit qui l’accompagnaient, ni les améliorations découvertes depuis les rudes pratiques de l’art antique dans le traitement de la chevelure. »
Plus que sa maîtrise technique ou la netteté de son œuvre, c’est la vigueur et la liberté comparative de sa conception qui confèrent à Myron le droit de figurer parmi les plus grands artistes de cette période de transition. L’évolution, dans ces domaines, fut annoncée par deux autres hommes, Pythagore et Calamis. On en sait décidément peu sur eux bien que, selon le Dr Waldstein[21], la statue connue sous le nom d’ « Apollon à l’Omphalos » est probablement l’œuvre de Pythagore. D’autres sont prêts à attribuer à Calamis, la magnifique statue de l’Aurige de Delphes, mais ces deux attributions sont toujours soumises au doute.
L’argument du Dr Waldstein, surtout une fois réorganisé et renforcé, offre une perspective si intéressante pour la suite des débats qu’il ne peut être ignoré. En substance, il repose sur le fait que les copies des statues du type « Apollon à l’Omphalos » étaient des statues de boxeurs.
Les victoires ne représentaient pas toujours la discipline sportive des athlètes victorieux, cela obligeait donc les sculpteurs à les différencier par les traits saillants de leur physique. Les muscles les mieux entraînés d’un coureur sont ses jambes, tandis que le boxeur développe davantage les muscles de la partie supérieure du corps. Les épaules et les bras de cet « Apollon » type sont si développés, et le sang semble couler si librement dans ces larges veines qu’ils attirent immédiatement l’attention. L’idée est que si cet homme utilisait davantage les muscles supérieurs de son corps, il devait donc être boxeur. En outre, la copie romaine de ce type, au British Museum, est ornée d’un objet oblongue sur le torse, qui ne peut être, comme cela fut souvent affirmé à tort, un arc brisé, mais plutôt une lanière de cuir, comme celle des boxeurs de l’époque, qui fut remplacée de nos jours par les gants. Si cette interprétation est la bonne, cela prouve que le copiste romain avait au moins compris que l’original représentait un athlète. Le style de la statue la situe avec certitude dans la période de transition. La plus célèbre statue de boxeur de cette époque fut cependant réalisée par Pythagore. Que ces répliques intitulées « Apollon à l’Omphalos » soient les copies d’une œuvre célèbre ne fait aucun doute, car nous en avons retrouvé de nombreux fragments, qui pourraient en fin de compte nous mener à Pythagore. Cette attribution provisoire d’autorité de la statue originale à Pythagore est en fait devenue plausible à nos yeux, lorsque nous avons découvert que, selon les Anciens, cet usage caractéristique des veines était la grande force de cet artiste. Ils faisaient également l’éloge de la précision de son traitement de la chevelure ; or, de toutes les statues de cette époque, aucune autre n’arbore de tresses aussi délicates et de chevelure aussi réaliste, devenue un véritable ornement en soi.
Voici brièvement les arguments du Dr Waldstein en faveur de l’attribution de cet « Apollon » type à Pythagore. Nous devons lui concéder que son argument est convaincant et qu’il fut repris pour étayer de nombreuses tentatives similaires. Même l’attribution du Discobole à Myron ne peut reposer sur de meilleurs fondements.