Au programme
« Notre survie matérielle n’est pas notre seule forme de dépendance à la nature. Cette dernière doit également nous indiquer le chemin du retour, la sortie de la prison du mental. Nous nous sommes perdus dans l’action, la pensée, le souvenir, l’anticipation – dans un labyrinthe complexe et un monde de problèmes.
Nous avons oublié ce que les pierres, les plantes et les animaux savent encore. Nous avons oublié comment être calmes, nous-mêmes, être là où se trouve la vie : ici et maintenant. »
Eckhart Tolle1
L’équilibre de vie se réalise par une relation harmonieuse entre corps et esprit, désirs et émotions, âme et cœur. Nous nous devons de le maintenir car il est fragile. La plus petite poussière est tout à fait capable de déclencher une rupture entre les actions physiologiques et psychologiques de notre être. Tout interagit, rien n’est séparé ni séparable. Émotions, sentiments, organes, éléments naturels, biologie, psychisme et physiologie : tous œuvrent ensemble. Les symptômes sont le reflet d’un tout cohérent, par lesquels se manifestent une dysharmonie, une carence, un désaccord. Cette dissonance engendre un déséquilibre affectant les organes, mais pas seulement. Âme et conscience se trouvent également touchées.
Un système de mise en relation entre organes, viscères, énergie (élément cosmique concerné) et réaction émotive a été établi dans plusieurs médecines traditionnelles : grecque (avec les tempéraments d’Hippocrate), tibétaine, chinoise, mongole ou encore âyurvédique. Chaque organe est couplé avec un viscère servant de « bouclier » protecteur aux maux éventuels, la plupart d’entre eux provenant des suites émotionnelles, l’émotion étant perçue comme facteur révélateur d’un mal-être enfoui et souvent ancien. En réponse, pour parer au déséquilibre, l’emploi de plantes appropriées permet de restaurer l’harmonie et de renforcer les défenses naturelles avant que le corps ne s’engorge complètement. Prévenir pour mieux guérir est la base sur laquelle se fonde la phytothérapie traditionnelle.
Je vous propose la grille de lecture issue de l’Âyurveda. Sont ainsi en relation étroite :
Les 5 éléments
Les 5 éléments sont les 5 forces de la nature que les plantes absorbent sous forme de bioénergie.
Cette approche humaniste permet de relier la dissonance intérieure et ne s’attache pas seulement à la maladie exprimée. Elle prend en compte l’être dans sa globalité (corps, âme, esprit), son mode réactionnel et son histoire personnelle. Ceci offre la possibilité d’entrer en synergie avec la charge émotionnelle et de choisir la plante la mieux adaptée à l’être afin de répondre à la souffrance exprimée.
« Une émotion, c’est une réponse orpheline de sa question. »
Marc-Alain Ouaknin
Si les plantes interagissent avec les organes en les accompagnant grâce à leur physiologie végétale, elles touchent le clair de la vie et ce qui demeure caché dans les tréfonds de l’être. Elles en dévoilent l’intimité sensible, rendant à la lumière ce qui est resté occulté, oublié, évité et pourtant mémorisé dans la chair. Elles viennent prévenir les maux éventuels nés de nos mots mal dits, en harmonisant notre être, et reliant corps et âme, cœur et esprit. Elles nous emmènent sur des chemins profonds, nous invitant à rejoindre notre nature intime et à retrouver notre unicité originelle.
À la fois organe vital et lieu symbolique de notre conscience, le cœur est un élément essentiel dans la construction spirituelle de l’être. Il régit le cerveau, dirige l’esprit et souffle l’amour inconditionnel. Ouverture, curiosité, clairvoyance par le biais de l’action du feu interne sont ses états. Le principe « volonté » (je m’affirme en tant qu’être autonome et indépendant) émane de sa libre circulation énergétique.
Les symptômes en relation avec la sphère cardiaque sont toujours indicateurs d’un mal au cœur, d’un mal au Soi intérieur de la personne. Selon les thérapies orientales, l’acte de penser n’est nullement un privilège du cerveau, mais émane de notre ouverture « cardiaque » et de nos états amoureux. Si nous sommes fermés, enfermés dans un monde de pensée, une manière rigide de voir la vie – c’est ma vérité –, nous engendrons des arrêts énergétiques au niveau du cœur, s’accompagnant de vertiges, de perte d’équilibre et d’élans ombrageux.
Les plantes qui ouvrent le cœur sont nombreuses, je suis même persuadée qu’elles ont toutes cette sublime capacité, mais qu’elles ne nous le disent pas, et le font en secret. Il vous faudra donc aller à leur rencontre, car ce sont elles qui se dévoileront à vous. Allez les découvrir, et partez à leur recherche, sans crainte aucune. Elles vous réserveront, j’en suis sûre, de belles surprises.
Parmi elles, j’attirerai votre attention plus particulièrement sur :
Le côlon est la dernière partie de la sphère intestinale, celle par laquelle l’être laisse aller ce dont il n’a plus besoin, et le corps ce qui ne lui est plus nécessaire. Cet espace organique exige le lâcher-prise vis-à-vis des expériences douloureuses, le détachement des marées émotives, mais interroge aussi sur le sentiment d’insécurité intérieure, la dysharmonie initiale entre la raison et les sentiments, entre le cérébral et l’affectif. Lorsqu’il y a un « trop-plein » par le doute, le questionnement, l’hésitation, la fatigue, cela génère une hyperactivité nerveuse oxydante, l’être ne prenant pas (ou plus) le temps de digérer, d’assimiler, d’accepter, il entre alors dans une situation de stress persistante et d’angoisse permanente. Le côlon est en émoi car il ressent le premier les tensions et envoie des signaux d’alerte : douleurs abdominales, troubles du transit, insomnie, sommeil non réparateur, rejet des retards et du temps, impatience, énervement, colère agressive se manifestent.
Les plantes dépuratives, drainantes et décongestionnantes sont d’un grand secours pour la sphère intestinale, considérée comme le lieu où habite le « moi », et en interdépendance avec le cerveau. Elles ont une action positivante sur le mental, le psychisme et l’émotivité, encourageant l’expulsion des retenues psychologiques et des nouures biophysiologiques.
Je n’en citerai que quelques-unes, car elles sont nombreuses à posséder des qualités apaisantes tranquillisant le flux émotionnel : la carotte (dulcifiant l’exigence), la coriandre (harmonisant créativité et spiritualité), le fenouil (facilitant la digestion des épreuves), la mauve (adoucissant la rigidité intérieure), la guimauve (favorisant la souplesse mentale), la menthe poivrée (assouplissant la fluidité sanguine), les graines de plantain associées au curcuma (protègeant contre les parasitages psychiques), la myrtille (apportant une claire vision), le romarin (tonifiant l’esprit et réveillant la conscience).
À noter
Le foie est le siège émotionnel, là où se logent les flux et reflux affectifs. Mais c’est la colère qui domine par son énergie enflammée, une colère saine permettant d’agir et de réagir. Toutefois, si celle-ci empiète sur d’autres lieux, elle devient destructrice. La première touchée sera la part d’ombre lovée au cœur de la vésicule biliaire, qui à son tour s’enflammera. L’être devient irritable et excessif, crie et pleure sans raison apparente. L’énergie monte brutalement, entraînant une obstruction laryngée (difficulté à expectorer, à respirer, à s’exprimer). La réactivité émotionnelle trouve sa source dans l’inadéquation entre ce que l’être est intrinsèquement et ce qu’il projette à l’extérieur, produisant ainsi aliénation de l’âme et dénégation du Soi. Ce démenti personnel se manifeste sourdement par la souffrance.
La colère et tout débordement émotionnel engendrent blocage et désordre. Nous aurons ainsi : insomnies, dépression, perte de vitalité, vomissements par blocage de la vésicule biliaire et attaque, au niveau de l’estomac, de la rate avec ballonnements, nausées, douleurs stomacales.
Les plantes préconisées pour agir sur le foie (et ses « adjoints ») sont des plantes puissantes, des toniques amers, qui vont nourrir le cœur : l’anis vert (tonifiant), l’estragon (décontractant), la fraise (détoxifiante), le pissenlit (reins), la chélidoine (draine le feu du foie), la mélisse (relâche les tensions intérieures), la menthe poivrée (aide à digérer les émotions), la nigelle (stimulante).
À noter
Toutes les formes d’énergies inhérentes à l’être humain se rejoignent dans le poumon. Elles vont ensuite se développer dans l’organisme, au rythme de l’inspir et de l’expir. Les difficultés à répétition au niveau du système respiratoire peuvent indiquer une problématique émotionnelle ancienne non résolue ; cela peut aller jusqu’à la perte d’odorat, le nez étant l’ouverture somatique des poumons.
Couplé avec le gros intestin, le poumon agit également au niveau de la peau (celle-ci est appelée le 3e poumon) ; il active l’ouverture et la fermeture des pores. L’être qui se complaît dans les ombres du passé plonge dans le désintérêt du présent, avivant la tristesse, la nostalgie, parfois le remords, souvent les regrets. Le désappointement et le chagrin emplissent le cœur, déposant une dissonance dans l’harmonie énergétique de l’être. Cette perturbation engendrera à la fois des troubles respiratoires et des affections de la peau. En effet, lorsqu’il y a refoulement ancien et profond d’une douleur, d’une pensée, d’un sentiment (ils peuvent être réactivés par toute nouvelle émotion), le corps souffrant de l’état d’esprit sombre se mure et se renferme sur lui, il se sclérose.
Les plantes qui répondent le mieux à cette problématique sont :
À noter
Résidence de la pensée (l’acte de penser), la rate joue un rôle déterminant dans l’élaboration du discernement, de l’opinion et de la décision. Elle est juge intérieur. Un excès de cérébralité abîme la fluidité énergétique et entrave la qualité d’analyse et de jugement, développant l’obsession et le mécontentement de soi-même.
La rate est un réservoir de sang qu’elle purge des impuretés, elle dynamise la vie en contrôlant la circulation hydrique. Dirigeant par ailleurs la digestion, elle est maître d’œuvre dans la transformation et le transport des aliments, et se trouve donc responsable de l’énergie nourricière du corps. Couplée avec le pancréas (petite glande digestive annexée à l’intestin grêle), elle chasse l’humidité. En relation avec l’estomac, elle agit sur l’échange de souffle énergétique se produisant entre eux : en effet, lorsque le souffle de la rate monte, celui de l’estomac descend. Si une dysharmonie existe, il y a répercussion instantanée sur l’estomac. La rate gouverne également les muscles, elle a donc une action importante dans les cas de fatigue musculaire (comme l’atrophie ou la paralysie).
L’estomac est la loge de nos angoisses. C’est en lui que nous avons la capacité de discerner le pur et l’impur ; l’estomac fait le tri ; il expédie les « matières pures » vers la rate, et envoie les « matières impures » vers l’intestin grêle et la vessie. Si la fonction descendante, c’est-à-dire l’évacuation naturelle, est troublée, nous aurons des douleurs épigastriques, de l’aérophagie, des renvois. Le dysfonctionnement de l’estomac nous renvoie à nous-mêmes : à notre petitesse, à notre étroitesse d’esprit, à nos pensées mesquines, à notre orgueil aussi ; nous serons constipés, ou partirons en diarrhée, nous vomirons (de la bile en général), nous aurons des maux de tête : en un mot, nous nous serons congestionnés… Il nous envoie le signal que quelque chose ne va plus, que nous devons laisser tomber de vieilles choses : « vider notre poubelle », accepter de perdre une partie de nous (ce qui ne nous est plus utile) afin de pouvoir évoluer et progresser.
D’une manière générale, toutes les plantes drainantes au niveau hépatique sont excellentes. Mais celles qui agissent plus précisément sur la rate/pancréas et l’estomac sont des plantes décongestionnantes. Nous avons ainsi : l’achillée (qui agit aussi sur le foie), l’ail (régulateur), l’alchémille (fluidifiante), le basilic (chasseur des idées sombres, restaurateur des tissus), la camomille (bien amère…), le cassis (soutenant les défenses naturelles du corps), la coriandre (stimulante), la framboise (reconstituante), la mauve (œuvrant à la fois sur les poumons et l’intestin), la mélisse (facilitant la digestion), la mûre (nutritive), l’origan (harmonisant), le romarin (décontractant), la sarriette (aide à faire face au stress), le serpolet (revigorant), le thym (tonifiant).
À noter
Les reins sont les dépositaires de la force de vie dans son entretien et sa création. Organes de procréation, ils portent en eux l’instinct de survie. Ils contiennent l’énergie héréditaire, présidant à la conception, à la naissance, à la croissance de l’être, à son développement, à sa reproduction. La force intérieure des reins permet d’assurer l’armature de l’être (os). Ils reçoivent l’énergie des poumons (ils leur sont reliés) et la retiennent.
Une défaillance rénale signe un sentiment d’insécurité, de crainte, de peur (pouvant aller jusqu’à la panique), tout comme une faiblesse à cet endroit du corps révèle une non-responsabilité dans les actes (« je renonce », « je baisse les bras », « j’accuse », « je récuse »). Un déséquilibre au niveau des reins engendre la maladie des « pierres » : l’être construit du solide en lui, afin d’éviter la confrontation et de combler le vide (le manque par peur de l’abandon, par exemple) ; il s’enlise dans un mode réactionnel, pouvant aller, chez certaines personnes, à se poser en éternelles victimes et à montrer autrui du doigt.
Les plantes aptes à assouplir l’énergie des reins sont celles à odeur de terre, sentant l’humus, elles sont en général diurétiques ; ainsi le chiendent (qui est un draineur rénal doux), le cumin (défatigant), l’estragon (tonifiant), la fraise (revitalisante), la groseille rouge (reminéralisante), le persil (draineur), le serpolet (apaise les angoisses).
À noter
Une plante spéciale, la sauge, possède une caractéristique bien à elle, son action couvre l’ensemble des organes, calme toutes les douleurs et tonifie toutes les fonctions.
La sauge sclarée adoucit l’être, le rend plus « féminin » (dans sa sensibilité), rompt la rigidité et l’autorité mentale. Calmante, elle apaise l’esprit. Lors de surmenage cérébral, elle redonne envie et volonté de faire. Elle revigore l’être quand il y a dépression réactionnelle, elle rassure et offre une pointe d’euphorie. Elle accentue la nature maternante chez la femme.
Chez une personne dans le contrôle de soi, elle fait accepter la vulnérabilité et la fragilité du caractère, masquée derrière une apparence dominatrice et directive.
1. Op. cit.