Notices de l’Album de vers anciens
Valéry reprend à peu près la version des Poètes d’aujourd’hui de Van Bever et Léautaud, où il modifie surtout le v. 19 qui était : « Tu es morte naïve au bord du crépuscule ». Voir p. 85 la première version, et la Notice qui mentionne la proximité avec « Les chercheuses de poux ».
Hélène
Valéry reprend à peu près la version des Poètes d’aujourd’hui de Van Bever et Léautaud, mais au v. 9 « conques sonores » devient maintenant « conques profondes ». Voir p. 83 la première version, et la Notice pour les réminiscences d’époque.
La première version de 1891 (voir p. 784) est retravaillée dans deux manuscrits et fait ensuite l’objet de huit dactylographies de 1913 à 1920 ; ainsi qu’on l’a vu dans la Notice (voir p. 427), le sens du mythe change après la rencontre avec Catherine Pozzi. C’est pourquoi le poème n’apparaît que dans la seconde édition de l’Album, en 1926, mais il est remarquable que le premier manuscrit de cette nouvelle version, sans doute ébauché en 1913 en vue de la publication dans Les Fêtes le 15 septembre, donne des corrections plus sombres encore que le texte de 1926. Au v. 3, par exemple, Valéry corrige « le bois sacré » de 1891 qui devient « le bois hideux », et le v. 5 devient : « Le dieu chante l’effroi du site tout-puissant1 ».
Lors de sa parution en 1891, le poème s’appelait « Celle qui sort de l’onde » et six dactylographies montrent qu’il est considérablement remanié de 1913 à 1917. Voir p. 61 la première version, et la Notice pour les réminiscences d’époque. Une version assez différente de cette nouvelle « Naissance de Vénus » a été publiée par Willy-Paul Romain dans Paul Valéry. Le poème. La pensée (Éd. du Globe, 1951).
Intitulé « Blanc » au moment de sa première publication en 1890 (voir p. 63), le poème est très remanié dans trois dactylographies de 1913, en vue de la réédition de 1914 sous le titre de « Fée » (voir p. 259), puis en 1915 et 1916 : la version de l’Album ne modifie que les tercets de 1914. Il est repris en 1930 dans les Morceaux choisis.
De manière tout à fait exceptionnelle, les deux tercets sont ébauchés dans un Cahier du début de 19252 et seule une première version manuscrite très lacunaire est conservée. Le poème est écrit en 1926 et publié la même année dans Quelques vers anciens et, avec des variantes, dans la deuxième édition de l’Album où il s’intitule « Féerie (variante) ». Le titre définitif apparaît en 1929. Valéry dira dans « Fragments des mémoires d’un poème » : « Il m’est arrivé de publier des textes différents de mêmes poèmes : il en fut même de contradictoires3, et l’on n’a pas manqué de me critiquer à ce sujet. Mais personne ne m’a dit pourquoi j’aurais dû m’abstenir de ces variations4. »
La version parue dans Poètes d’aujourd’hui de Van Bever et Léautaud est très peu remaniée. Voir p. 105 la première version.
En 1891, le poème s’intitulait « La belle au bois dormant » et offrait une version très différente (voir p. 80). Deux feuillets manuscrits et quatre dactylographies attestent qu’il est beaucoup retravaillé en 1913, 1915 et 1916.
Le sonnet voit le jour à la fin de 1918, est sans doute achevé en 1919 et figure d’abord dans la liste de poèmes dressée par Valéry pour la publication de l’Album en 19205. Retravaillé en 1921, il ne figurera pourtant que dans la réédition de 1926 ainsi que, la même année, dans Quelques vers anciens.
Le poème est peu remanié. Voir p. 93 la première version, et la Notice. Il est repris en 1930 dans les Morceaux choisis.
Le poème de 1892 (voir p. 81 sq.) est peu remanié, sans doute en 1920. Il est publié en mars 1929 dans le numéro 5 de la Revue des Belles-Lettres de Lausanne et en 1930 dans les Morceaux choisis, puis figure dans l’Album intégré aux éditions des Poésies à partir de 1931. La version de 1942 est très différente, et les deux dactylographies de ce dernier état sont sans doute de 1941. La version antérieure était la suivante :
Celles qui sont des fleurs légères sont venues,
Figurines d’or et beautés toutes menues
Où s’irise une faible lune… Les voici
Mélodieuses fuir dans le bois éclairci.
De mauves et d’iris et de nocturnes roses
Sont les grâces de nuit sous leurs danses écloses.
Que de parfums voilés dispensent leurs doigts d’or !
Mais l’azur doux s’effeuille en ce bocage mort
Et de l’eau mince luit à peine, reposée
Comme un pâle trésor d’une antique rosée
D’où le silence en fleur monte… Encor les voici
Mélodieuses fuir dans le bois éclairci.
Aux calices aimés leurs mains sont gracieuses ;
Un peu de lune dort sur leurs lèvres pieuses
Et leurs bras merveilleux aux gestes endormis
Aiment à dénouer sous les myrtes amis
Leurs liens fauves et leurs caresses… Mais certaines,
Moins captives du rythme et des harpes lointaines,
De manière tout à fait exceptionnelle, une ébauche du poème se trouve dans un Cahier de 18986 et ce premier état est plus visiblement lié à Agathe et au thème du sommeil dans deux vers que je souligne :
Le feu Amour m’habite et je vois froidement
L’illumination de la nuit entière
Je n’en puis plus aimer seulement qu’en dormant
Les actes gracieux mélangés de lumière.
Ils reviennent tout seuls me tendre des regards
Après le premier temps du sommeil malheureux
Quand le malheur rêvant est dans le noir épars
Ils reviennent briller et me donner des yeux
Je m’endors davantage et descends plus encore
Dans le meilleur du fond de la nuit qui ignore7
Et je baise ma fin et nous nous ressemblons
La chair et les plaisirs qui dans mes doigts se touchent
Meurent de la même ombre où [inachevé]
Valéry y travaille jusqu’en 1900, puis surtout en 1913, 1915 et 1916. Il est publié dans l’Album dès 1920.
Voir p. 67 le premier état du poème, et la Notice, ainsi que les sonnets qui ont porté le même titre (voir p. 306-309). Valéry le retravaille à plusieurs reprises à partir de 1913, puis le reprend à la fin du mois d’août et au début du mois de septembre 1917. C’est à ce moment-là que s’ébauchent les futurs « Fragments du Narcisse ». La version des Poètes d’aujourd’hui est assez largement remaniée dans l’Album et augmentée de cinq vers. La version de La Conque et celle de 1920 sont republiées en 1926 chez Stols dans une plaquette qui s’intitule Narcisse et comprend aussi les « Fragments du Narcisse » de Charmes, et l’année suivante, avec quelques variantes, aux Éditions des Cahiers libres sous le titre Études pour Narcisse.
La dernière version, qui est celle des Poètes d’aujourd’hui de Van Bever et Léautaud, est très peu modifiée, en 1912 ou 1913. Voir p. 92 la première version, et la Notice qui indique les réminiscences mallarméennes.
La version du Centaure (voir p. 158) est reprise, avec d’infimes variantes de ponctuation et la suppression de la parenthèse au v. 10, modifications qui datent de 1920.
Le poème était originellement disposé sous forme de sonnet élisabéthain et quasiment non ponctué (voir p. 220). La version de 1920 reprend, à peine modifiée, celle des Poètes d’aujourd’hui de Van Bever et Léautaud, où le poème était disposé en sonnet régulier et ponctué.
La version de 1920 est quasi identique à celle des Poètes d’aujourd’hui de Van Bever et Léautaud, puis elle est considérablement allongée en 1942 puisque Valéry y ajoute, entre les trois premières et les deux dernières strophes, six quatrains probablement écrits en 1941. Il semble avoir hésité sur leur place puisqu’il note : « Composer à la suite du poème Été8. » Voir p. 157 la première version.
De premières esquisses apparaissent à la fin du siècle précédent dans un poème bien différent dont le premier mot est « Regard ! » et où l’on trouve en particulier ce vers : « Regard ! je bois le jour et l’ombre et je caresse »9, très proche du futur v. 3. Mais le poème est plus tardif que les précédents puisqu’il a connu sept états en 1915, et a été repris en 1916 où trois autres états sont dactylographiés ; trois nouvelles versions voient le jour en 1917 (avril, juin et septembre), alors que Valéry travaille aux poèmes de Charmes : le texte est alors considérablement amplifié, et c’est donc une des pièces les plus travaillées du recueil. Après l’avoir intitulée « Regard du soir », « Ciel », « Fantaisie du soir », « Infusion du soir », « Facilité du soir », Valéry, en 1917, hésite entre le premier titre et « Regard », puis il choisit « Profusion du soir » avant de revenir à « Infusion du soir » et « Facilité du soir », puis finalement à « Profusion du soir ». Par insatisfaction ou lassitude, il ne retravaille plus le poème qui ne paraît que dans la réédition de 1926, et c’est sans doute pourquoi il lui donne alors pour sous-titre « Poème abandonné… ». Il le fait alors suivre de cette date : « 189… ».
Le poème a été ébauché à la fin du siècle précédent10 et a d’abord paru dans La Plume le 1er décembre 1900 (voir p. 246), puis avec des variantes au printemps de 1912 dans le Recueil pour Ariane ou le Pavillon dans un parc (troisième recueil) où il n’a plus que cinq strophes, dont une inédite (les actuelles strophes 1, 2, 3, 6 et 13). Le manuscrit montre que, comme « Un feu distinct… », le poème est au commencement plus ouvertement lié à Agathe : « Ah ! cède davantage et descends plus encore / Versée étrangement à l’absence de pleur / Dans le meilleur du fond où le même s’ignore / Chef-d’œuvre inachevé de l’extrême douleur11. » En 1913, Valéry lui ajoute les strophes 10 et 11, puis y revient en 1915 pour trois nouveaux états, et le retravaille encore en 1916 et à l’été de 1917. Augmenté de trois nouveaux quatrains, ce qui porte l’ensemble à neuf strophes, le poème paraît dans l’Album dès 1920 et, quasi identique, dans Les Écrits nouveaux en décembre 1920. En 1920, la table des matières du recueil donne comme surtitre à « Anne » et à l’« Air de Sémiramis » qui suit : « Poèmes inachevés », et de fait cette première édition de l’Album ne comporte pas les actuelles strophes 7 et 8, pourtant déjà écrites, non plus que la neuvième et la douzième qui seront ajoutées pour la réédition de 1926. André Breton dira de ce poème : « Il y allait d’une pente très glissante de la rêverie, volontiers érotique d’ailleurs12. »
Le poème s’écrit sous le signe de Degas, mort le 26 septembre 1917. Dès le premier jour, le 6 mai 1918, Valéry se rend à la vente des tableaux qui se trouvaient dans son atelier et, une semaine plus tard, il lit dans L’Action française du 14, sous la plume de Louis Dimier – un agrégé de philosophie proche de Maurras –, un article qui conteste violemment l’achat, par le musée du Luxembourg, d’une œuvre dont le critique considère qu’elle atteste toute l’impuissance du peintre à composer. Ce tableau, Sémiramis construisant Babylone, qu’il mentionne dans Degas Danse Dessin13 et qui est aujourd’hui au musée d’Orsay, Valéry l’a si souvent contemplé dans l’atelier de la rue Victor-Massé qu’il y repense longuement et bientôt note sur la première page de son poème : « Songé à écrire à cause article de Dimier sur Degas et contre ce tableau14. » Ce que réveille en lui la légendaire reine de Babylone, c’est la puissance d’une conscience qui transforme le monde, mais aussi le mythe d’Amphion qu’il confond volontiers avec celui d’Orphée : l’ancien rêve des pierres qui, sur un ordre, s’élèvent et deviennent temple.
Ainsi s’ébauche l’« Air de Sémiramis » dont le titre même renvoie à la musique. Valéry le retravaille durant l’été de 1918, le reprend en janvier 1919 et, en dépit de sa date récente, comme si le poème était lié à l’ancienne contemplation du tableau, il ajoute au titre : « Fragment d’un ancien poème », puis inverse les termes : « Fragment d’un très ancien poème – Sémiramis ». Le texte est retravaillé à la fin de 1919 et au début de 1920, et interrompu, plutôt qu’achevé, au printemps, car Valéry l’a beaucoup remanié sans parvenir visiblement à un ensemble qui le satisfît. Il l’intitule « Sémiramis (Fragment d’un très ancien poème) » lorsqu’il le fait paraître dans Les Écrits nouveaux de juillet 1920, puis « Sémiramis » en 1920 où la table des matières le donne pour « inachevé » (voir ci-dessus la Notice de « Anne ») ; de fait, la deuxième édition de l’Album, parue en 1926 chez Stols, donne, sous le même titre de « Sémiramis », trois nouvelles strophes (22 à 24), après quoi le poème disparaît bizarrement de la réédition de l’Album en 1927, pour faire retour en 1929 dans le volume des Poésies où apparaît son titre définitif. Intitulée « Air de Sémiramis. Fragment d’un ancien poème », la même pièce figure dans Charmes en 1922 et dans les rééditions de février et décembre 1926 avant d’en être définitivement retirée : dans celle de décembre, « Sémiramis » comprend les trois nouvelles strophes (22 à 24) qui figurent déjà dans l’édition Stols de l’Album achevée d’imprimer en mai. Plusieurs modifications sont apportées en 1942.
Très peu de variantes par rapport à la version de 1906 (voir p. 251).
Plusieurs tables ont été établies. Voici celle que Valéry adresse à Gallimard le 20 août 1917 à un moment où il envisage un volume de pièces diverses qui aurait repris La Jeune Parque15 : « Orphée », « Hélène », « Naissance de Vénus », « Féerie », « Le bois amical », « Au bois dormant », « Narcisse », « Épisode », « Vue », « Un feu… », « Baignée », « Fileuse », « Anne », « Valvins », « Été », « Intérieur », « Heure », « Facilité du soir », c’est-à-dire « Profusion du soir », « (Aurore) Au jardin spirituel » qui passera dans Charmes, « Les doléances », c’est-à-dire « Ébauche d’un serpent » qui sera aussi inclus dans Charmes, « Le vieillard16 ? », « La Jeune Parque », « L’amateur de poèmes », « Nuit », c’est-à-dire « Pour la nuit17 ».
La table que Valéry dresse à l’été de 1920 comprend les pièces suivantes18 : « Heure », « Orphée », « Caresse19 », « Nuit », c’est-à-dire « Ma nuit », « Vaines danseuses », « Sinistre », « Facilité du soir », c’est-à-dire « Profusion du soir », « Flûtes20 », « Ma nuit21 », « Grottes22 », « César » et « Neige ». En marge à gauche, il ajoute « Le Jardin rose23 » et « Ballet24 » ; en marge à droite, « Arion », « Le vieillard25 ».
1. BNF, Naf 19003, f° 20.
2. C.X.589.
3. C’est le cas de la première et de la dernière version d’« Orphée ». La même idée est formulée dans « Au sujet du Cimetière marin » (voir p. 282, au t. 2 de cette édition).
4. Voir p. 782, au t. 3 de cette édition.
6. C.I.202.
8. BNF, Naf 19003, fos 72-73.
9. BNF, Naf 19002, fos 151-160.
10. BNF, Naf 19002, fos 161-163.
11. BNF, Naf 19003, f° 133.
12. Entretiens, Gallimard, 1969, p. 15.
13. Voir p. 544, au t. 2 de cette édition.
14. BNF, Naf 19003, f° 165 ter.
15. BNF, Naf 19003, f° 11.
17. Poème abandonné et resté inédit.
18. BNF, Naf 19003, f° 12 bis.
19. C’est-à-dire « La caresse » (voir p. 1227, au t. 3 de cette édition).
20. C’est-à-dire « Colloque (pour deux flûtes) » (voir p. 1219, au t. 3 de cette édition).
21. Voir p. 1433, au t. 3 de cette édition.
22. C’est-à-dire « À des divinités cachées » (voir p. 1428, au t. 3 de cette édition).
23. Poème de 1890 que Valéry avait songé à retenir pour son futur recueil dès 1913.
25. Ou « Le vieil homme » (voir p. 923 sqq.).